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Dorat, Ronfard, Baïf, Belleau ont fait des vers toute leur vie, Et Ronfard, felon le témoignage de Binet & du Préfident de Thou, en fit un moment avant fa mort. Voyez ci-deffous au chapitre dernier. Les deux Scaligers ont fait des vers toute leur vie & Jules Scaliger en fit le jour même de fa mort. Beze avoit 82. ans qu'il fefoit encore des vers. Delportes a fait des vers toute la vie. Et ce qu'a écrit Mr. Baillet fur le témoignage de la Croix du Maine, qu'il renonça à la Poëfie avant que de pouvoir paffer pour vieillard, eft très-faux. Il fit fes Pfeaumes dans un âge avancé. Le Cardinal du Perron, fon intime, le dit en termes exprès dans le Perroniana. Voici l'endroit : "La moindre ,, chofe de tout ce que Mr. de Tiron a fait, ce font fes Pleau,, mes. Cela vient de ce qu'il étoit en fa vieilleffe. "Le Préfident de Thou a fait des vers toute fa vie: & il en fit fur fa maladie un peu avant fa mort. Pafferat a fait des vers toute fa vie: & il fit fon Epitaphe un peu avant fa mort. Malherbe a fait des vers toute fa vie, comme il l'a témoigné lui-même par cette Stance fi célébre,

Les puiffantes faveurs dont Parnaffe m'honore ;
Non loin de mon berceau commancérent leur cours,
Je les poffédai jeune, & les poffede encore

A la fin de mes jours.

Mr. Maynard a fait des vers toute fa vie: comme il paroît par ce quatrain,

En cheveux blancs me faut donc aller
Comme un enfant tous les jours à l'Ecole.
Que je fuis fou d'apprendre à bien parler,
Lorfque la Mort vient m'ôter la parole!

Abraham Ravaut, dit Remi, du Village de Remi, lieu de fa naissance, dans le voifinage de Gournai, au Diocéfe de Beauvais; ce que Mr. Baillet a appris de ceux à qui je l'avois appris ; fit fon Epitaphe en vers le jour de fa mort. Cet Epitaphe eft imprimé dans fes Poëfies. Gombaud a vécu près de cent ans : & il a fait des vers jufqu'à fa mort. Mr. de Racan, Mr. Godeau, Mr. Chapelain, Mr. de Balzac, Antoine Hallé, l'Abbé de Boifrobert, le Pere Bourbon, Madelenet, ont fait des vers toute leur vie. Le Pere Vavaffeur a fait des vers toue fa vie. Le Pere Labbe fit des vers peu de tems ayant fa mort; au fujet def-

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quels le Pere Commire a fait ces beaux Hendécafyllabes:

Dum venis furit aftuofa febris,
Et lentis coquit ignibus medullas,
Labbeus canit, & fuos tenellis
Mulcet hendecafyllabis labores

Mortifque immemor imminentis, ore

Nil mortale fonat..

Le Pere Pétau a prefque fini fa vie par ces vers; qui font de fon dernier Poëme à Sainte Geneviève;

Dicebam, fuprema mihi jam vertitur atas, &c.
Petavius ager,.

Cantabat veteris quærens folatia morbi.

J'allégue ces vers du Pere Petau avec ceux du Pere Commire; pour répondre aux railleries que Mr. Baillet fait de moi, au fujet des vers que j'ai faitsdans un âge avancé : difant que je tiens bon contre la vieilleffe, & que je veux mourir en chantant. Germain Vaillant, Abbé de Pimpon, a fait des vers toute fa vie. Et com-. me l'a écrit Sainte Marthe, dans fon Eloge, ni fa dignité de Confeiller du Parlement de Paris, ni celle d'Evêque d'Orléans, ne l'empêchérent point de cultiver les Mufes. Scévole de Sainte Marthe à l'âge de 87. ans fit une Epigramme fur le Livre de Théophrafte Renaudot du foin des pauvres. Cette Epigramme eft imprimée dans les Oeuvres de Scevole de Sainte Marthe; avec cette Note, propria manu: dum annum ageret octogefimum feptimum, IV. Januarii, M. DC. XXIII.

Mr. Patris a vécu 80. ans, & il a fait des vers toute la vie. Et deux jours avant fa mort il fit ces vers fi célébres:

Je fongeois cette nuit que de mal confumé
Côte à côte d'un pauvre on m'avoit inhumé,
Et ne pouvant foufrir ce facheux voisinage,
En mort de qualité je lui tins ce langage:
Retire-toi, Coquin, va pourrir loin d'ici,
Il ne t'appartient pas de m'approcher ainsi :
Coquin! ce me dit-il d'une arrogance extrême;
Va chercher tes Coquins ailleurs, Coquin toi-même,
Ici tous font égaux, je ne te dois plus rien,
Je fuis fur men fumier, comme toi fur le tien.

Mais ma principale défense à l'égard de l'accufation qu'a formée ici contre moi Mr. Baillet, c'eft que la Poëfie a toujours été la moindre de mes occupations, comme il paroît par le grand nombre d'Ouvrages que j'ai fait en profe, & que je n'ai fait des vers que par divertiffement:

CXXVI.

Juftification de ce que j'ai dit dans mes Hendecafillabes fur le Livre de Mr. Baillet, que Mr. Baillet avoit maltraité le Pere Sirmond.

'Ai dit dans mes Hendécafyllabes fur le Livre de Mr. Baillet qu'il avoit maltraité dans fon Livre les plus célébres Ecrivains de France.

Queis affurgere debet, eruditos
Carpit, vellicat, & laceffit omnes.
Pindi nomina magna Gallicani
Ridet Salmafios, Valefiofque.
Ridet Petaviofque, Labbeofque.
Te ludos quoque fecit, Harduine :

Nec, Sirmonde, tibi,ô fcelus! pepercit.

Mr. Baillet prétant que je lui ai impofé à l'égard du Pere Sirmond: car pour le Pere Pétau, le Pere Labbe, le Pere Hardouin, Mr. de Saumaife, & Mr. de Valois, il ne dit point que je lui aye impofé. Voici les chofes defobligeantes qu'il a dites du Pere Sirmond:

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Page 435. Tome II. "Comme le Pere Sirmond étoit homme 5, auffi bien que Petrus Aurelius, il laiffa échaper à sa modestie quelques termes rudes & choquans, que la chaleur & le reffentiment lui dérobérent, & qui penférent donner quelque atteinte à fa réputation, & lui faire perdre quelque chofe de la bonne opinion que le Public avoit euë jufqu'alors de fa modé,, ration & de fon honnêteté.

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Et page 436. Le Pere Pétau étoit, fans contredit, le plus fa, vant homme de toute la Societé des Jefuites. Il paffoit non» feulement le Pere Sirmond, mais encore Mr. de Saumaise de » plufieurs.coudées," Remarquez qu'il fait ici Mr. de Saumaife

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plus favant que le Pere Sirmond, & qu'il a traité ailleurs Mr. de Saumaife d'ignorant en toutes fortes de Sciences. Voyez cideffus le chapitre 2. de ces Remarques.

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A la page 437." Mr. le Premier Préfident de Lamoignon faifant quelquefois réflexion fur les défauts du Pere Pétau, difoit ,, qu'il auroit volontiers préféré la médiocrité du Pere Sirmond ,, avec fon humeur facile & commode, à la profondeur & la vaste étenduë de l'érudition du Pere Petau, accompagnée de cette humeur auftere & farouche, qui le rendoit prefque inacceffible, & par conféquent moins utile au Public que le Pere Sir,, mond. "Mr. le Premier Président de Lamoignon fe connoiffoit trop bien en érudition, pour dire que celle du Pere Sirmond étoit médiocre. Et je mets en fait que Mr. le Premier Président de Lamoignon n'a jamais rien dit de femblable du. Pere Sirmond: ce qui feroit un blafphême. Ca été chez le Pere Sirmond que j'ai vu la premiere fois, Mr. le Premier Président de Lamoignon. Il étoit en ce tems-là Confeiller au Parlement. Et comme nous avions fait connoiffance chez le Pere Sirmond, & fi je l'ofe dire, amitié, nous nous entretenions fouvent du Pere Sirmond. Et en me parlant du Pere Sirmond & du Pere Pétau, Mr. le Premier Président de Lamoignon m'a dit plus d'une fois, que le Pere Pétau avoit plus d'étendue de favoir que le Pere Sirmond, mais que le Pere Sirmond avoit plus de jugement, & qu'il favoit mieux ce qu'il favoit : & qu'il aimeroit mieux être le P. Sirmond que le Pere Pétau. Il a dit la même chose au Pere Rapin: dont le Pere Rapin a rendu témoignage chez moi en présence de plufieurs perfonnes.

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A la même page 437: "Le Pere Sirmond & le Pere Pétau étoient fouvent en différant ensemble. Et comme un jour un ,, de leurs Confteres (le Pere Talon) qui aimoit à rite; les eut furpris au foyer public, difputant feuls, fans témoins, & fe que,, rellant tout de bon, il ne put s'empêcher de s'écrier qu'il avoit ,, trouvé le Calepin & le Polyanthçe brouillez l'un avec l'autre. Ce conte eft ridicule: car il eft ridicule de traiter de Grammairiens les deux premiers Théologiens de l'Europe. Je remarquerai ici en paflant, qu'il faut dire Polyanthéa, & non pas Polianthée.

Je prens la liberté de demander ici à mes Lecteurs, fi toutes ces chofes défobligeantes que Mr. Baillet a dites du Pere Sirmond, n'ont pas pû m'engager à dire que Mr. Baillet n'avoit

pas

pas même pardonné au Pere Sirmond. Nec Sirmonde, tibi ò fcelus! pepercit. Cependant Mr. Baillet me traite, au fujet de ces vers, de Vieillard qui radote. Voici fes termes Tome III. page 224.

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Il n'y a point d'auteurs dans tout mon Recueil dont j'aye tâ,, ché de relever le mérite avec plus d'inclination & de plaifir, que le Pere Sirmond; quelque Tome que l'on en veuille ouvrir, on y découvrira aifément le foin particulier que j'ai eu de », marquer en toutes rencontres les grands fentimens d'eftime & ,, de vénération dont j'ai toujours été pénétré à fon égard, depuis ,, que j'ai commencé à lire fes Ouvrages. Mes Adverfaires qui ,, prétendent que j'ai fait cela gratuitement & fans leur ordre, ne m'en veulent pas tenir compte : & ils ont raison, puisque je ,, n'ai rien fait pour eux en ce point. Néanmoins je ne pense pas qu'on puiffe les excufer d'être tombez dans un des vices les plus ,, ordinaires aux mauvais Critiques, lorfqu'ils ont voulu me chicaner fur un mot dont ils ont crû pouvoir employer l'ambiguité ,, pour me faire un procès. Mais quoique je n'aye pas fongé à », prendre des précautions contr'eux ni contre les autres chica,,neurs quand j'ai dit que quelqu'un avoit jugé la médiocrité du Pere Sirmond préférable à la profondeur & à la vaste étenduë de l'érudition du Pere Petau, le mot de médiocrité ne laiffe pas de se trouver à », l'épreuve de leur Critique. Car fi ces Meffieurs n'ont point encore oublié ce point de leur Grammaire, il ne tiendra qu'à eux de nous dire que la médiocrité n'est autre chose qu'un jufte ,, milieu entre le trop & le trop peu. C'est une vertu fi rare parmi ,, les Savans, qu'il eft plus aifé de les trouver à quelqu'une des ,, extrémitez de la Science, que de les voir toucher ce milieu qui ,, ne consiste que dans un point. C'eft une vertu qui eft le centre ,, de toutes les autres, & qui femble même en être la mefure. Elle ,, a toujours été en très-grande confideration parmi les Anciens ,, comme parmi nous : fon prix n'a point été moins connu des ,, Païens que des Chrétiens. Ces Meffieurs qui font Gens de ,, Lettres, pourroient nous apprendre que c'eft cette médiocrité ,, dont Horace a fait de fi grands éloges; que c'est elle qu'Aulu,, gelle a louée dans Térence, quand il l'a oppofée à l'abondance ,, de Pacuvius & à la féchereffe de Lucilius, & quand il a relevé ,, l'avantage qu'il avoit d'être au milieu de ces extrémitez que ., c'eft celle qui a tant fervi à diftinguer Virgile d'avec Homére, ., & qui a porté le Pere Rapin, & Jules Scaliger avant lui, à donTome VIII. Sf

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