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qu'il devoit imprimer (1); par laquelle il lui dit, Tuam verò, mi Gryphi, veram pietatem, excellentem eruditionem, infignem humanitatem,his noftris lucubratiunculis & præeffe vólui,& moderari : fi id tibi ita collibuiffet: ut Pofleri intelligerent, ejus frugis proventum,fi qua ad eorum commoda per nos exculta effet, à nobis tantùm commendari, quantum ex diligentia tua, atque auctoritate gratiæ confequi potuiffet. Eft-ce là une Dédicace? Jules Scaliger a écrit de même une Lettre à l'Imprimeur Vafcofan, pour lui recommender l'édition de fon Livre de la Subtilité. Outre que Jules Scaliger étoit trop glorieux pour dédier un de fes Livres à un Imprimeur, il n'avoit garde de dédier à Gryphe fes Livres des caufes de la Langue Latine, puifqu'il les avoit adreffez à fon fils aîné Silvius Cæfar Scaliger: auquel il a auffi adreffé fa Poëtique. Jules Scaliger a écrit à Sebastien Gryphe de la même façon que Quintilien a écrit à Tryphon le Libraire pour lui recommender fes Inftitutions Oratoires qu'il avoit dédiées à Marcellus ; & de la même façon que Scévole de Sainte Marthe a adreffé des Hendécafyllabes à Mamert Patiffon, pour lui recommender l'édition de fes Ouvrages.

Mais il eft vrai que Sébastien Gryphe étoit un homme favant. Majoragius l'appele vir infignis ac litteratus. C'est dans son Apologie touchant le changement du nom d'Antonius Maria Comes en celui de Marcus Antonius Majoragius. Et Jean Voûté de Reims, dit en Latin Vulteius, a écrit dans une de fes Epigrammes, qui eft du Livre premier, que Robert Etienne corrigeoit fort bien les Livres, que Colinet les imprimoit fort bien, mais que Gryphe favoit fort bien & les imprimer & les corriger.

Inter tot norunt Libros qui cudere, tres funt
Infignes. Languet cætera turba fame.
Caftigat Stephanus, fculpit Colineus, utrumque
Gryphius edocta mente manuque facit.

1 Jaques Sadolet écrivit auffi une Lettre à Sébastien Gryphe pour lui recommander l'impreffion du Poëme d'Aonius Palearius de animorum immortalitate. Cette recommandation ne fut pas inutile, Gryphe imprima le Poëme avec tout le foin poffible, ce qui lui attira de la part de Palearius un remerciment qui eft auffi imprimé au devant de fes Oeuvres en profe chez le même Gryphe. Dans l'une & dans l'autre de ces Lettres, cet Impri

meur eft extraordinairement loué, de
même que dans une Lettre de Dolet à
Jean de Boiffonné, & dans les Phaleuques
qui commencent:

Gryphi nobilium Typographorum
Nobiliffime eaque in arte princeps ;

imprimez au revers du premier feuillet
de la belliffime édition des Odes Salmonii
Macrini in 8. 1537.

Sébastien

Sébastien Gryphe a fait une Préface à fon Virgile, qui eft tout-à-fait bien écrite (1). Celle qu'il a mife devant fon Politien, eft auffi fort belle.

Il y avoit à Venise en 1557. un Imprimeur du nom dè Jean

Gryphe.

Ce

رو

que

XVI.

dit Mr. Baillet que Grégoire de Nazianze a été appelé le Jeune Théologien, n'eft pas véritable.

Onfieur BAILLET Tome I. pag. 95. "Le fecond à

M.qui

on a donné par honneur le titre particulier de Théo„logien dans l'Eglife, eft S. Grégoire de Nazianze : qui l'a mérité » par l'excellence de fes écrits en général ; & en particulier, par ,, les quatre Difcours admirables qu'il a fait fur la Théologie: où ,, il prouve à fonds la Doctrine Catholique fur la Trinité, & ruine » tous les faux raifonnemens des Hérétiques. Et quand il eft ap„pelé par les uns le Second Théologien, & le Jeune par les autres, ,, il faut entendre felon la penfée de ceux qui l'appelent ainsi, que c'est toujours par rapport à S. Jean l'Evangelifte, qu'ils ap» peloient le premier l'ancien Théologien.

در

MENAGE. Mr. Baillet s'eft tout-à-fait mépris en cet endroit. Ileft vrai qu'on ût pû appeler Gregoire de Nazianze véos edλoyos: de la même façon qu'on a appelé novus Bacchus, ou novus Liber, Ou novus Dionyfius, Marc Antoine le Triumvir, & l'Empereur Caracalla ; & l'Imperatrice Julie, & Sabine, via Aung: & la fille de Germanicus, véa 'I8λía: & Cléopatre, véa "Ios: Mr. du

1. Toutes ces louanges outrées que les Auteurs ont données à Sebaftien Gryphe ne font pas de furs garans de fon érudition. L'on fait affez de quoi un Auteur eft capable, quand il a befoin du fecours d'un Imprimeur, ou qu'il veut luitémoigner fa reconnoiffance. Je veux croi re que Gryphe n'étoit pas ignorant, mais qu'il ait été auffi favant qu'on voudroit nous le faire croire, c'eft de quoi je de fort. N'eft-ce pas une flaterie manifefte que celle de ce Poëte croté qui ofe le préferer à Robert Etienne le plus habile ImPrimeur & l'un des plus favans hommes de fon tems. Les éditions de Gryphe font à la vérité nettes; il y en a même quel

Tom. VIII.

ques-unes d'une beauté fans égale, mais elles ne font ni fi belles généralement ni fi correctes, que celles de Robert Etienne, Qu'on y regarde même de près, j'ofe dire qu'on les trouvera la plupart toutes pleines de fautes. Je n'ai point vû la Préface de cet Imprimeur fur Virgile, j'ai seulement vû celle qu'il a mife fous fon nom audevant de fon Politien de la 1, édit. Elle eft des plus courtes & n'a rien, ce me femble, que d'affez commun. J'y ai même remarqué un certain Scabrofus, mot conftamment barbare, & qui feul devoit empécher M. Ménage de trouver cette Préface fi belle

E

Cange a raporté tous ces exemples dans fon Gloffaire Grec : où il a enfuite remarqué, que plufieurs Empereurs de Conftantinople ont pris le titre de Nouveau Conftantin, & cu'Arrien de Nicomédie fut appelé νέος Ξενοφών: & qu'on a ajouté le mot de νέος aux noms propres de plufieurs Saints, pour les diftinguer des autres Saints de leurs mêmes noms, lefquels les ont précédez: comme à S. Etienne, qui vivoit fous Copronyme : à S. Paul Patriarche de Conftantinople: à un S. Bafile: à un S. Barthelemi: à un S. Luc Stylite à un S. Acharion, &c. Mais jamais S. Gregoire de Nazianze n'a été appelé ni le Jeune ni le Second Theologien. Et quand quelqu'un eft cité fous le nom de véos cóλoyos c'est-à-dire, de Nouveau Théologien ; s'il eft vrai que quelqu'un foit cité de la forte fimplement; cela doit s'entendre, non pas de S. Grégoire de Nazianze, mais ou de Siméon le Métaphrafte, felon l'opinion de Jofep. Evêque de Modom, dans fon Apologie pour le Concile de Florance contre Marc d'Ephefe: dont voici les termes ; Καὶ Σιμεών δε ὁ νέος Θεόλογος ὁ καὶ Μεταφρασης καλέμενος, qui eft auffi celle du Pere Théophile Renaud dans fon Traité de Theophilis ou bien de Siméon Prévoft de S. Mamez de Xérocerque, felon l'opinion de Leo Allatius dans fa Diatribe de Simeonum Scriptis, page 143. Male Juniorem Theologum cum Metaphrafte confundit Methonen is, aliquorum Codicum Manufcriptorum auEtoru te deceptus, qui Tractatulos Symeonis Præpofiti Sancti Mamantis fub hoc titulo notant, το Μεταφράτο καὶ νέε Θεολόγο ἕτερα κεφαλαία. Ce font les termes de Leo Allatius. Le Cardinal Bona dans fa Notice des Ecrivains citez dans fes Livres de la Pfalmodie, eft de l'opinion d'Allatius. S. Grégoire de Nazianze a été appelé fimplement Le Theologen. C'eft ainfi qu'il eft qualifié à la tête de fes Ouvrages. Anaftafe le Sinaite dans fes Questions & Réponses fur l'Ecriture Sainte, page 62. & 152. l'appele du même nom, Tŷ ázis I pay opis тy Deoλóys, & l'Auteur de fa vie a écrit, qu'il eft le feul qui après S. Jean l'Evangeliste, a été appelé tóλoyos. Voici la fource de l'erreur de Mr. Baillet. Le Cardinal Bona a dit au lieu allégué: Simeonis Præpofiti Monafterii sancti Mamuntis: quem Graci Novum Theologum poft Naziar zenum vocant. Ce qui doit fignifier que S. Grégoire de Nazianze aiant été appelé le 7heologien, on a appelé enfuite ce Siméon, le Jeune Theologien. Cela paroît par ces paroles du même Bona, à l'article de Grégoire de Nazianze: Gregorius Nazianzenus, ar&tus Theologus. J'oubliois à remarquer que S. Jean Climaque dans fon Degré XXI. aïant

cité Grégoire le Théologien ; l'Auteur des Eclairciffemens fur le Livre de S. Jean Climaque ; qui eft Mr. le Maiftre; a crû que ce Grégoire étoit le Pape S. Gregoire. Voyez les raisons.

XVII.

Ce que dit Mr. Baillet, que quelques-uns ont crû que Caffiodore avoit fait perdre l'Hiftoire Tripartite d'Epiphane le Scholaftique, eft dit contre toute forte d'apparance.

رو

رو

رو

M

Onfieur BAILLET Tome I. pag 245. "Plufieurs ont

crû que Caffiodore nous avoit fait perdre l'histoire Tri› partite d'Epiphane le Scholaftique, en l'abregeant. Mais on n'a point grand sujet de croire que la Compilation de Caffiodore », nous ait fait faire une perte fort confidérable, puifque l'Ou,,vrage d'Epiphane le Scholaftique n'étoit qu'une verfion pi,,toyable de Socrate, Sozoméne & Théodoret, de laquelle on » peut dire que la privation nous eft plus utile que la poffeffion », ne nous en feroit avantageuse.

رو

MENAGE. Mr. Baillet ne fait pas l'Hiftoire de cette Histoire Tripartite de Caffiodore. La voici : Socrate, Sozoméne, & Théodoret, avoient compofé chacun une Hiftoire Eccléfiaftique. Ces Hiftoires n'étant point traduites en Latin du tems de Caffiodore, Caffiodore pria fon ami Epiphane le Scholaftique de les traduire. Epiphane le Scholaftique les traduifit. Et Caffiodore aïant enfuite rangé par l'ordre des tems ce qui étoit dans ces Hiftoires; il en compofa une Collection, qu'il appela l'Hiftoire Tripartite, parce qu'elle étoit compofée des Hiftoires de ces trois Auteurs, Socrate, Sozoméne, & Théodoret. Comment donc Caffiodore auroit-il pû faire perdre l'Hiftoire Tripartite d'Epiphane le Scholaftique, puifqu'Epiphane le Scholaftique n'a point fait d'Hiftoire Tripartite ; & que c'eft au-contraire Caffiodore qui l'a faite ; & que c'est lui qui l'a nommée de la forte.

XVIII.

Méprife de M.. Baillet touchant un Ecrit du Cardinal Bona.

Onfieur BAILLET Tome II. pag. 59.

"Le Cardinal

a

رو

رو

le jugement des Auteurs Llturgiques qu'il a mis à la tête de fes Livres de la Pfalmodie.

MENAGE. Mr. Baillet n'a pas lu ce Jugement du Cardinal Bona. S'il l'avoit lu, il y auroit vu que ce Jugement comprend généralement tous les Auteurs citez par le Cardinal Bona dans fes Livres de la Pfalmodie, tant les profanes que les Eccléfiaftiques: & que le Cardinal Bona y donne fon Jugement fur Anacréon, fur Pétrone, fur Ovide, fur Perfe, &c. Voici le titre de ce Jugement: Notitia Auctorum & librorum qui in hoc Opere citantur, notantur, illuftrantur; & dans ce Livre de la Pfalmodie, du Cardinal Bona, il n'eft point queftion d'Auteurs Liturgiques. Mais comme long-tems après avoir fait le Livre de la Pfalmodie, le Cardinal Bona en fit un intitulé de Re Litur ica; qu'on appele en François les Liturgiques du Cardinal Bona; cela a brouillé notre homme, & lui a fait parler d'Auteurs Liturgiques,

Ce

XIX.

que dit Mr. Baillet que Bodin a volé fa Traduction des Cynégétiques à Turnébe, n'est pas véritable.

B

Odin a fait des Notes fur les Cynégétiques d'Oppian (1): & il les a traduits en vers Latins. Mr Baillet dit que Bodin a volé cette Traduction & ces Notes à Turnébe. C'est dommage, dit-il Tome II. page 338. que Bodin avoit volé cet Ouvrage à Turnebe Quelle conftruction? Mais il n'eft pas ici question de fautes de langue. Pour juftifier que cette Traduction eft de Turnébe, Mr. Baillet nous renvoye à la France Orientale de Mr. Colomiés page 75. mais où il n'eft rien dit de femblable. On y rapporte feulement une Lettre de Bongars à Ritterhufius, où Bongars dit qu'on ne doutoit point que les corrections de Bodin fur Oppian ne fuffent de Turnébe. L'édition de ce Livre de Bodin a précédé la mort de Turnébe de plufieurs années. Et Turnébe (2) qui s'eft plaint (3) qu'on lui avoit volé quelques-unes de

1 C'est ainsi qu'il faut dire, & non pas Oppien.

2. Dans la Préface fur Oppian. On cite en marge Turnébe dans fa Préface fur Oppien (car j'aine mieux Oppien qu'Oppian qui fent trop le vieux) comme fi c'étoit dans une Préface que Turnébe

fe fût plaint du vol de fes corrections. Il n'a point fait du tout de Préface fur Oppien. On ne voit de lui qu'un avis au Le&teur à la fin de ces Corre&tions, & cet avis eft fi court qu'à trois lignes près M. Ménage l'a prefque cité tout entier. Ce qui peut avoir donné lieu au foupçon qu'on

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