Oter la vie à l'Amour, est trop fort: & les mots de culpa & de ladere font foibles pour exprimer l'action d'une personne qui a fait mourir un Dieu : & un Dieu n'est point sujet à la mort. D'ailleurs, Una manus, est équivoque; pouvant s'entendre de la main droite, & altera, de la main gauche. Mr. de Benférade ayant fait ce beau Sonnet sur l'incendie de la Ville de Londres, Ainsi brûla jadis cette fameuse Troye L'horreur ne s'en pouvoit plus long-tems foutenir: Ce que toute la Mer n'auroit pas bien lavé. Il fut traduit en Latin par les plus célebres Poëtes du Royaume (1); par le Pere Vavasseur de la Compagnie de Jesus ; & par les Peres Cossart, Commire & de la Ruë de la même Compagnie. Le Pere Vavasseur en fit deux Traductions. Voici la premiere: Arsit Troja: tamen sua Numina crimine nullo Quam longum est, Londinum arsit: facra templa domusque: Tale nihil monstri toto Sol vidit in orbe: 1. Parmi les Traductions desquels il ne faloit pas oublier celle de Mr. de Santeuil de Saint Victor. Dii, lenti punire, probant se denique justos: Voici la feconde: : Troja superba ruit flammis, non illa rebellem Secula non addent postera, credo, fidem. Et tria per totidem fata venire gradus. Voici la Traduction du Pere Coffart de la Compagnie de Jefus: Inclyta fic arsit quondam Ilios: at neque Reges Voici celle du Pere de la Ruë, de la même Compagnie. Sic olim in tenues ruit Ilios illa favillas, LL Sic quondam in cineres iit Ilios, at neque Reges De mon côté, je fis aussi cette Epigramme sur le même sujet; CAROLUS: & fcelus est, savo Britanne, tuum. In cineres abeunt Londini tecta fuperbi. 2. Principis horrendam, gens fcelerata bais. Je laisse au Lecteur à juger si j'ai fait une mauvaise action en travaillant, à l'imitation de ces grands hommes que je viens de nommer, fur une matiére toute taillée. CXXXI. Vers que j'ai faits à l'envi des anciens Poëtes Latins. M Ais je n'ai pas seulement fait des Vers à l'envi des plus célebres Poëtes modernes, j'en ai fait à l'envi des plus célebres Poëtes de l'Antiquité: & Grecs & Latins. Voici ceux que j'ai faits à l'envi des anciens Poëtes Latins. ۱۶ १ 4 10.5 1 Le premier des Epigrammataires Latins, c'est sans contestation Catulle. Les Epigrammes de Martial ne font recommendables que par la fin. Celles de Catulle font belles depuis les pieds jusqu'à la tête : à cause de cette élégance non affectée; qui l'a fait appeller par Daniel Heinfius, elegantie non affectate, affectator Catullus. Et parmi ses Epigrammes, celle-ci tient un des premiers rangs, au jugement des Critiques: יזי Surripui tibi, dum ludis, mellite Juventi, Verum id non impune tuli, namque ampliùs boram. Nam fimul id factum est, multis diluta labella Praterea infesto misero me tradere amori : Ut mi ex ambrosio mutato jam foret illud Quam quoniam pænam mifero proponis amori, Ita venustum, hoa Epigramma eft, ut ipsa fi velit Venus venuftius eo efficere quidquam non queat, dit Murer en parlant de cette Epigramme. Voici comme j'ai traité le même lujet : Je ne voudrois pas donner ces deux vers pour les seize de Catulle. Outre que la fin de son Epigramme est plate, (1) fa narration est ennuieuse par fa longueur, & par ses particularitez peu considérables. Ce distique d'ailleurs, Ne quicquam nostro contractum ex ore maneret, Tanquam commincte spurca Jalivagula, donne non seulement une vilaine, mais une abominable image. C'est ainsi que Voffius a reftitué ce distique par les manufcrits. Il y avoit dans les éditions antérieures à celles de Voffius: Tanquam commincte spurca faliva lupe: qui ne fait pas une fi vilaine image, mais qui ne laisse pas d'en faire une très vilaine. Je ne parle point du métacifme, ma, me, me, mi, en ces mots Jumma me memini: le Castelvetro fur ce vers du premier Sonnet de Pétrarque, Di me mede smo meco mi vergogne, prétendant qu'il fait beauté. ! ! Après Catulle, le meilleur des Epigrammataires Latins, C'est fans doute Martial. Refutandus Giraldus, qui libro de Poëtica, pauciffima Martialis Epigrammata bona effe affirmat: item, Mureti judicium de Martiale examinandum: Marulli, contemnendum, qui Epigramma cultum, tefte Rallo, nullo dum fcriptum effe dixit, Naugerii vituperandum, qui Martialis Epigrammata flammis damnare aufus eft. C'est ce que Mr. Guyet, qui a été un des premiers Critiques de fon tems, a écrit à la tête de l'exemplaire de fon Martial. Tout le monde fait que Naugérius brûloit tous les ans un exemplaire de Martial; qu'il facrifioit aux 1 1. On ne fauroit plus mépriser cette Epi- qui, au Jugement des Critiques, tient un des gramme, que fait M. Menage Il ne fos premiers rangs parmi celles de Carulle, eft contente pas de dire qu'il ne voudroit pas défectueule à ce point, quelle estime fera-t-on donner ses deux vers pour les seize qui la du refte? Les défenseurs des Modernes tirecompofent, il ajoûte qu'elle est platre, en- ront fans doute avantage de ce chapitre & du nuicule, & dégoûtante. Si cette Epigramme, fuivante 1 |