fruit. Ils réuffiront fans doute; car ils aiment tout ce qui fait plaifir à leurs Maîtres. Il faut louer de pareils domeftiques, & les recompenfer de leur travail. Mon Eleve ne manqua pas d'écrire, &, comme je l'obligeois, il voulut me rendre la pareille: il jetta au hafard des points & des virgules entre les mots, & fit partir cette lettre, qui, mal ponctuée, préfentoit un fens louche & injurieux pour les domestiques & pour le maître. : Mon petit bon-homme dormit fort tranquille là-deffus. Le lendemain nous partons; nous arrivons fort joyeux, & furtout de bon appétit. Mais voici bien une autre fête au lieu des apprêts du dejeûner, nous entendons du tumulte le valet eft tancé d'importance; la Servante perd la tête de colere; l'un & l'autre s'élancent fur mon jeune homme, &, fans lui donner le temps de s'éclaircir fur ce myftere, ils l'accablent de reproches : l'Oncle lui-même qui me tient la main, eft indigné qu'on moque de lui par écrit. L'Enfant croit fe toute la maifoo en démence; il fe ferre contre moi de frayeur. Mais qu'il eft furpris, lorfque, ayant tout çalmé, je lui dé montre que tout ce défordre eft l'effet de fa ponctuation vicieuse! Qu'on fait alors de promeffes d'apprendre à ponctuer, comme il faut ! Nous faifons nos traités : je m'oblige à lui apprendre ce qu'il veut; & lui, s'engage à réciter chaque jour par cœur une demi-page d'un livre, d'un livre, en marquant les points, les virgules, & les accents. Cela s'exécute; & je lui explique tout avec clarté. Si nos Eleves n'orthographioient point, il feroit aifé de les couvrir de honte à chaque faute confidérable. Il eft une perfonne dans le monde, que je ne nomme pas ici, qui n'oubliera jamais combien il lui en a couté d'avoir mal orthographié. Ses parens lui avoient promis depuis longtemps de l'envoyer aux Cent-Suiffes. Le jour fi long-temps attendu arrivoit enfin. Le jeune-homme, en rendant compte à fon pere du trouffeau qu'il préparoit, lui écrit ainfi. MON મે ON CHER PERE, » Avant de partir pour les Cent-Cuiffes & j'ai mis trante peres de Cochons à la leffive, &c. Le reste de la lettre étoit affez analogue à ce beau début. Cependant le pere, furpris d'une telle ignorance, fait différer le départ, & sé dégoûte enfin du parti qu'il alloit faire prendre à son Fils. Ma méthode pour apprendre l'Orthographe eft à-peu-près la même que celle que j'ai indiquée pour la ponctuation. Les Enfans négligent-ils l'écriture? Ne leut accordez rien que fur la demande qu'ils vous en feront par écrit ; &, fi vous n'êtes pas content des progrès, faites-leur réponse que vous n'avez pas fu lire leur billet, &c. DE LA GÉOMÉTRIE, ET DE LA GÉOGRAPHIE. A Près l'Étude des caracteres des lan gues, & de leur fignification, vient naturellement celle des Humanités. Etude agréable & féduifante par les graces avec lefquelles elle fe préfente, & par cette joie pure dont elle enivre tout efprit qui a un peu de goût. Etude intéreffante, qui fait les délices & la gloire de la fociété. Etude fupérieure à la capacité de la plupart des Maîtres de littérature, qui fe font épuifés fur cette matiere, & qui ont failli à tout gâter par la multitude des regles, dont ils ont forgé des fers, auxquels la foule d'efclaves a prétendu que devoit s'affervir le Génie, qui eft nul, quand il ceffe d'être libre. Parmi les Maîtres de littérature on choifira Batteux & Rollin. On effacera dans celui-là quelques critiques hafardées & quelques difcuffions. inutiles; on donnera à celui-ci de la chaleur & de la précifion l'un & l'autre feront mis à la portée des enfans, & le travail d'un fiecle, fera pour eux une moiffon rapidement cueillie. Jufqu'ici nous avons appris la langue françoise dans Vailly, l'Angloife dans Pell, l'Allemande dans Dupont, & la Latine dans des abrégés de Port-Royal, qui ont peu de chofes femblables à l'original. Mais nous ne connoiffons que le fon des termes (a), leur fignification, leur quantité, &c. Déformais nous étudierons la beauté, la force, l'énergie, la fineffe des pensées, & des termes qui doivent être les images fidelles des penfées. Nous choifirons pour objet de notre étude (a) On verra quelle eft l'étendue de la Grammaire, lorfque je donnerai mes principes raisonnés dis Langues. |