les meilleurs morceaux des bons auteurs Chaque phrafe, chaque penfée, chaque expreffion, feront pefées : fur nos obfervations réciproques, nos Eleves feront des regles, & un petit traité de littérature : & s'il en eft qui foient deftinés à faire un ufage particulier des lettres, ceux-là marqueront exactement les pensées fines, brillantes, fublimes, naives, gracieufes, riches, fortes, les traits hardis & frappants: en un mot tout ce qui fait le prix de la belle littérature, que quelques critiques ont affez bien faifi, que d'autres ont fuppofé exifter là où le goût, qui leur manquoit, ne trouvoit rien de beau; & que les Ecoliers faififfent rarement parceque ce n'eft pas eux, mais leurs Maîtres, qui penfent, & qui prétendent leur faire trouver des beautés, dans des endroits qui choquent ou ennuyent leur efprit, d'une trempe différente de la leur. Un Instituteur ne doit avoir d'attention qu'à préferver, ou à rappeller adroitement fes Eleves des écarts où ils pourroient donner; tout au plus il pourra leur infpi

,

rer les réflexions, mais non les faire

eux.

pour

les

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Les Auteurs qu'on peut choifir Humanités, font, Phedre, la Fontaine, pour Fontenelle, Horace, Pope, Haller, Rouffeau, Boileau, Racine, Tite-Live, César, Sallufte, Plutarque, Ciceron, Boffuet, Flechier, Maffillon, les Difcours couronnés à l'Académie Françoife, Virgile, la Henriade, Télémaque, &c.

Mais les endroits de ces Auteurs doivent être choifis avec goût, digerés à loifit, & préfentés avec fageffe. On n'aura jamais affez d'attention pour écarter des des. yeux enfans ce qu'il y a de blâmable dans les Ecrivains.

Il s'en faut bien que dans la Fontaine, ainfi que dans Phédre, toutes les Fables foient également propres à l'inftruction des enfans! Le rolles du Lion infpirent prefque toujours l'orgueil, l'injuftice, la tyrannie; ceux du Renard enfeignent la perfidie; ceux du Loup, la rapine, la cruauté, &c. Choififfez donc les Fables que vous voulez

&

faire lire à la jeuneffe. Celle du Chien, qui, ayant trouvé un tréfor, devient avare, meurt en le gardant; celle du Rofeau, qui voit périr le chêne par le motif même de fon orgueil; celles des deux Mulets, du Cerf qui fe mire, du Gland & du Payfan, de l'Avare, qui a perdu fon tréfor; & un très-grand nombre d'autres qu'un prudent Inftituteur faura choifir, feront l'objet de l'Etude des enfans, jufqu'à ce. que, fortifiés contre les fcandales, ils puiffent les lire toutes avec fruit. Je fouhaiterois que la Fable du Loup qui devore l'Agneau, fut jointe à celle de l'Os arrêté au gôfier de cette bête vorace; que ce fut le même animal puni de fa criminelle glontonnerie; que la Cigogne, au lieu de le foulager, s'en excufat par la crainte du fort de l'agneau, & lui fit un beau Sermon pour l'exhorter à patience. Enfin je voudrois que le criminel trouvât toujours un châtiment dans le crime-même.

La premiere chofe que nous examinerons dans les Fables, fera le caractere

des Acteurs, qui doit fe foutenir, & convenir à leur nature. Que feroit-ce fi l'Agneau étoit représenté turbulent & emporté; le Lion, foible & timide; le Tigre, plein de douceur? ou fi chacun de ces animaux ayant commencé par montrer fon véritable caractere finiffoit par actions d'un caractére oppofé? La nature feroit renversée, & les enfans feroient choqués de ces contradictions.

des

Après avoir examiné le caractere des Acteurs, on réfléchit fur la vérité morale, qui résulte de leur action. On observe comme toutes les parties de la Fable concourent à établir cette vérité. On paffe enfuite aux qualités du récit enfin on pefe tous les agrémens de la Fable; & fur ces obfervations on fait des regles d'Apologue.

Dans Fontenelle vous ferez un choix des dialogues que vous devez préfenter à vos Eleves: vous les étudierez ensemble avec paffion; & vous vous enivrerez du plaifir qu'on trouve toujours à lire de bellesTM

chofes exprimées d'une maniere fine, dé licate, ingénieufe. Fontenelle eft plein d'efprit; mais de cet efprit qui plait tant à l'efprit, qu'il éclaire & rémue délicieufement. C'eft de cette fleur de génie qu'eft plein Fontenelle; il en montre, il en répand par-tout, & avec tant d'abondance, que plufieurs Ecrivains ont voulu lui en faire un crime: l'indigence l'a blamé d'être trop riche.

Les Hiftoires font un recueil de faits, qui plaifent aux enfans & captivent leur imagination volage. Dans Sallufle on faifira les portraits & les réflexions judicieufes; dans Tite-live les narrations & les harangues; dans Cefar on admirera la noble. fimplicité, caractere particulier à ceux qui font véritablement grands, & que ne compenfera jamais tout l'art des Ecrivains médiocres. Plutarque eft admirable par fon attention à fuivre d'un oeil philofophe les grands hommes dans leur vie privée, & par les comparaifons judicieufes qu'il fait d'homme à homme. Chaque mois on fera.