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gion. Sans des précautions femblables, fans cette perfuafion intime, ces actes de piété pratiqués en présence des fcandales publics, ces actes de Religion faits fans connoiffance, fans motifs, par conféquent fans mérite, & toujours avec ennui, leur infpirent un dégoût mortel. Meres abufées dans votre Religion, vous portez vos enfans à votre oratoire, avant même qu'ils puiffent marcher. Mais que voulez-vous qu'ils y faffent?.... Qu'ils prient..... Qu'ils prient!.... Ignorez-vous donc que la priere eft le cri du cœur, & qu'on ne prie qu'autant qu'on fent fes befoins, & qu'on connoît la puiffance de celui qu'on invoque? Commencez donc par pénétrer ces enfans de la connoiffance de leurs befoins; qu'ils foient convaincus que DIEU veut & peut les foulager, & alors vous pourrez leur dire: Mes enfans, DIEU ne vous a faits que pour vous rendre heureux : mais il veut que vous le reconnoiffiez pour votre Maître & que vous vous adreffiez à lui dans vos befoins. Le feul defir d'être

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guéri de fa main fuffit; mais, pour foutenir & fortifier ce defir, il faut recourir à la priere qui l'échauffe, & écarte les penfées étrangeres.

Gardez-vous, après cela, de leur prefcrire une formule de priere qui foit conftamment la même. Ils s'y accoutumeroient; & bientôt elle ne feroit plus l'expression du defir. Leur bouche prononceroit une priere, & leur cœur en feroit une autre. Difons mieux: leur coeur refteroit dans le filence, tandis que leur langue articuleroit des mots, auxquels l'habitude auroit ôté toute leur force. Qui n'en a pas fait une trifte expérience? Et, s'il eft permis d'employer cette comparaison, n'eft-il pas conftant, que la plus belle piéce de littérature, la fcéne de théâtre la, plus animée, la plus touchante, nous laiffent enfin tomber dans la langueur, fi elles font trop fouvent répétées? Que fera donc (abftraction faite de la grace) une de nos formules ordinaires de priere? D'ailleurs, les befoins n'étant pas toujours les mêmes, la priere ne doit

elle pas changer comme eux? Je fais cependant qu'il eft des oraifons, auxquelles

il ne faut jamais rien changer

telle eft celle que la Sageffe Eternelle a daigné nous apporter du Ciel; tels ces fublimes & touchans Cantiques de l'Ecriture,tels ces poëmes magnifiques du berger felon le cœur de DIEU. Mais en général nos formules ordinaires de priere doivent être changées de temps en temps. Et fur-tout il faut éviter d'en preferire de longues aux enfans: DIEU lui-même a reprouvé cette coutume.

A quel âge faut-il conduire les enfans à l'Eglife? Quand ils ont une idée de la majefté du Dieu qui l'habite? Vous ne fuivrez donc pas l'habitude irréligieufe & fcandaleuse où l'on eft de les y porter au maillot, ou de les y conduire auffi-tôt qu'ils peuvent se tenir fur leurs pieds. Què veut-on qu'à cet âge ils aillent faire dans nos faints Temples? Attend-t-on qu'ils y adoreront ce qu'ils ne connoiffent pas? ou leur ferat-on balbutier des mots qui ne disent rien pour eux? Quelle folie! Eft-ce pour leur

apprendre de bonne heure le chemin de FEglife? Ils l'apprendront, il eft vrai; mais comme ils y entrent aujourd'hui fans aucun motif, ou avec l'ennui que leur caufe la petite gêne, à laquelle il faut bien les contraindre, pour ne pas troubler la cé lébration des mystères, ils y entreront toute leur vie fans motifs; devenus un peu grands ils éviteront ce lieu gênant pour eux, ou ils choifiront leur temps pour y aller poliffonner, & se venger ainfi de la contrainte où les y a tenus la préfence de leurs furveillans, qu'ils redoutoient plus que celle de la Divinité. Les y conduisez-vous enfin pour fatisfaire leur curiofité? Quel fcandale Le Seigneur extermina autrefois cinquante mille Bethfamites pour avoir ofé jetter des regards curieux fur l'Arche, qui n'étoit que la figure de nos facrés Tabernacles. De quel oil croyez-vous qu'il voie ceux qui rempliffent aujourd'hui nos faints Temples d'une foule d'enfans uniquement occupés à faire rouler leur gâteau, refonner les grelots de leur hochet, ou à pour

fuivre des chiens, qui n'y prient pas moins qu'eux ? Vous conduifez vos enfans à l'Eglife, pour fatisfaire leur curiofité!..... Et moi je vous prédis qu'ils n'y feront plus conduits que par le même motif : & fi leurs yeux lafcifs n'y rencontrent pas l'idole qu'ils y chercheront, ils n'y adoreront rien, Vous n'avez que trop d'exemples de pareils adorateurs. Croyez-moi, avant de mener vos enfans à l'Eglife, faites-leur connoître la majefté de ce lieu, où tout eft faint, où tout nous invite à la fainteté, dont les pierres-mêmes font fanctifiées, & donnezleur alors l'exemple vous-mêmes du profond respect & de la confiance avec lefquels on doit entrer dans ce lieu augufte, où Dieu habite dans toute fa gloire & dans toute fa bonté.

Vos enfans vous demanderont fans doute ce que repréfentent les Images, les Tableaux, les Statues, & tout ce qui décore nos Eglifes. Alors, s'il n'y a pas d'adorateurs (& ces momens ne font pas rares) vous les conduirez devant un Crucifix; &

a pas

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