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là vous leur ferez l'histoire mystérieuse do la Paffion du Fils de DIEU, de fa mort qui nous a rendu la vie, & de fa réfurrection qui affure la nôtre; vous laifferez librement couler les larmes de ces enfans, &, fi vous avez un cœur, vous mêlerez vos pleurs à leurs foupirs. Un autre jour vous leur raconterez les vertus des Saints', dont les Tableaux les ont frappés: mais vous aurez foin fur-tout d'élaguer vos hiftoires, & de ne rien hafarder. Après les ftatues & les images, viendront les Tribunaux, où les coupables qui s'accufent reçoivent la grace; la Chaire, où fe diftribue le pain de la parole; la Pifcine falutaire, où nos parrains ont promis à la face du Ciel, que nous marcherions dans la fainteté ; le Banquet facré, où la Divinité fe donne à nous; l'Autel, où fe renouvelle le facrifice de la Croix. Enfin les Tombeaux, où la mort balaye chaque jour les triftes, debris de l'humanité. Pour peu de foi qu'ait un Gouverneur, il ne peut manquer d'échauffer, d'embrâfer, les coeurs de fes éle

ves, en faisant ainfi parler es chofes. Mais il n'oubliera pas qu'il marche entre deux écueils, également dangereux : entre l'impiété audacieuse, & l'ignorante fuperftition. Pour leur rendre ces deux excès odieux & méprifables, il pourra leur en faire l'hiftoire. On s'y eft mal pris d'abord pour battre l'impiété; on fe néglige pour détruire la fuperftition; & telle eft fans doute la double fource des fuccès de ces deux ennemies de la Religion. L'impiété, fille infâme de la corruptipn du cœur, n'étoit prefque rien au commencement. Les impies, timides & tremblants, comme il convient à des coupables, cherchoient les ténébres, & n'ofoient fe montrer. La piété des premiers fideles allarmée, crut n'avoir jamais affez de zele pour défendre la Religion, elle témoigna fes frayeurs; &; employant la maffue contre ces coloffes de fumée, que le fouffle de ridicule auroit diffipés fans doute, elle compofa contr'eux des livres entiers; ceux-ci le voyant redoutés, fe crurent quelque chofe, ils ofe

rent lever le front, & répondre aux écrits des fideles, par des volumes, que leur dicta la corruption du coeur ils formerent rapidement des fectateurs, dont ils favori foient les défordres, & à la fin le libertinage s'eft fait un honneur ridicule de ce qui fait la honte de l'humanité.

La fuperftition, monftre né de l'ignorance, de la crainte, & de l'intérêt, s'eft couverte du manteau de la Religion, pour né pas effrayer les fideles. Préfentée par des perfonnes refpectables par leur piété, mais féduites par les déhors de ce monftre elle fit d'abord des progrès fenfibles ; envain des yeux clairvoyans percerent à travers fon voile impofteur, envain ils voulurent démafquer le monftre, fes protecteurs crierent à l'impiété. Leur cris furent payés; & ils ont continué de le proteger jufqu'à nos jours. Heureufement la lumiere d'une philofophie chrétienne fe répand univerfellement par-tout, & l'on commence à rougir & à fe cacher, dans les pratiques fuperftitieulés.

Notre augufte Religion eft fi fainte, fi fublime, fi parfaite ! Qu'avons-nous befoin de l'étayer de pratiques fuperftitieuses ? C'eft ici fur-tout qu'on peut dire que tout ce qui ne vient pas de DIEU eft contre DIEU. Tout ce qu'on innove eft blâmable. Bornons-nous donc à l'efprit & au fonds de notre fainte Religion; & laiffons l'aveugle fuperftition au Paganisme infenfé, & l'impiété audacieuse au libertinage en démence.

CHAPITRE V.

Nourriture, entretiens, flyle Epiftolaire ; fiyle de Société.

NOURRITURE DES EN FAN S.

LE terme de frugalité (*), ne se trouve aujourd'hui que dans les livres où l'on fait l'éloge de cette ancienne vertu. La réalité n'eft aucune part. Depuis long

(*) Voi. atl., his., ch. 3.

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temps les hommes l'ont bannie de leurs tables, parce que depuis long-temps ils font dégoûtés de ce qui leur feroit le plus utile. Une vie frugale eft la fource de la fanté, de la vigueur de l'efprit & du corps, & le contre-poifon des plus grands vices. Une des premieres vertus de nos éleves, fera donc la fobriété. Mais qu'on ne pense pas que cette vertu regarde feulement la quantité des nourritures: fi cela étoit, on ne trouveroit aucune part plus de gens fobres que parmi ceux qui font les plus éloignés de cette vertu. C'eft autour des tables des riches, où l'intempérence a raffemblé les productions de l'un & de l'autre hémisphère; c'eft autour de ces tables, qui portent en abregé l'un & l'autre monde, qu'on voit des convives raffafiés avant d'ouvrir la bouche. Tous occupés à s'encourager mutuellement, aucun ne fait donner l'exemple. Propreté, deffin parfums, épiceries: tout eft employé pour irriter le goût. Vaines reffources! Il n'y a plus chez eux de goût à reveiller. L'art, à force de s'efcrimer pour eux, a trouvé le

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