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durant plus de trente ans, conduisit avec tant d'habileté les plus importantes affaires de l'Église.

Il est vrai qu'en me bornant presque au littéraire, je me prive de tout ce qui pouvoit le plus orner mon ouvrage. Mais j'ai devant moi l'exemple d'un grand maître, Cicéron. Dans un livre où son dessein est de faire connoître les orateurs illustres qui l'ont précédé, il ne s'arrête qu'à leur qualité d'orateur. Plusieurs avoient commandé des armées, avoient été consuls. De petites digressions sur leurs emplois militaires et sur leurs vertus civiles devoient bien tenter un homme qui ne haïssoit pas les occasions de paroître éloquent. Il a pourtant le courage de se captiver; et, d'une matière si abondante, si variée, il n'en prend que ce qui va directement à son but.

Je remonte à quelques-uns des Académiciens dont a parlé M. Pellisson, mais seulement à ceux sur qui j'ai pu recouvrer des mémoires exacts. Quant aux autres, je me suis contenté de mettre en forme de notes, comme on l'a vu dans le tome précédent, le peu que j'avois à dire sur leur sujet1.

Un point essentiel, c'est de rapporter jusqu'aux moindres ouvrages d'un Académicien et d'en citer toujours la première édition, parce que, sur cette date, les critiques voient si c'est un fruit ou de la jeunesse ou de l'âge mûr 2.

1 La 1re édition, publiée isolément, porte: « Quant aux autres, comme actuellement il se fait une nouvelle édition de son Histoire, j'y ai mis en forme de notes le peu que j'avois à dire sur leur sujet. »

2 Dans le texte ancien de l'abbé d'Olivet, la liste des ouvrages

Ils voient si c'est un ouvrage posthume; et qui dès lors mérite plus d'indulgence, car l'auteur peut n'y avoir pas mis la dernière main. Et quand il y a plusieurs ouvrages d'un même auteur, on peut quelquefois, en observant le temps où ils ont été faits, parvenir à connoître les changements arrivés dans ses études, dans son goût, dans ses opinions, et même dans sa fortune.

de chaque académicien suit immédiatement la notice qui lui est consacrée. Nous avons réuni en un corps ces listes particulières pour en faire un catalogue général que l'on trouvera à la fin de ce volume.

I

JEAN-LOUIS GUEZ DE BALZAC

Conseiller du Roi en ses Conseils', l'un des premiers Académiciens, né en 1597, mort le 18 février 16542.

Il naquit3 en 1594 à Angoulême, où son père, gen

1 Pour éviter tout anachronisme, il est à observer que les titres dont le nom d'un Académicien est suivi, répondent la plupart, non pas au temps de sa réception, mais aux derniers temps de sa vie. (0.)

2 Cette date de la mort de Balzac est fausse. Ce n'est pas le 18 février comme l'ont dit Bayle, l'abbé d'Olivet et d'autres, mais le 8 février, qu'eut lieu la mort de Balzac. On le voit par le passage suivant d'une transaction passée entre le frère de Balzac, Fr. Guez de Roùssines, et sa sœur Anne Guez, dame de Campaignolles, pour régler la succession de Balzac qui venait de mourir «Ledit seigneur de Balzac étant décédé en cette ville, en la maison de ladicte dame de Campagno (sic), le huitiesme de febvrier de la présente année, » etc.- La Muse historique de Loret ne fait mention de cette mort que dans la lettre du 21 février 1654.

Bayle, dans son Dictionnaire, art. BALZAC, rem. A., prétend que Balzac étoit né en 1595, ou même plus tard. Mais j'ai trouvé 1594 dans un Mémoire de la propre main de Chapelain.

[Et Balzac lui-même, dans une de ses lettres non imprimées à Chapelain, du 12 juin 1645, autorise cette date :

« Je suis très-content, dit-il, de l'épître à M. de Coligny. Mais ■ au lieu d'amasser des rimes en luë, il seroit temps pour M. de

tilhomme de Languedoc, avoit épousé une demoiselle 1 qui lui apporta en mariage la terre de Balzac, située

« Voiture, aussi bien que pour moi, de songer à nous convertir « sérieusement.

Jam subrepet iners ætas, nec amare decebit,

Dicere nec cano blanditias capite.

« Le feu cardinal de La Valette lui a dit mille fois ces deux « vers du poëte qui est son favori. Ce poëte (Tibulle) mourut à « l'âge de vingt-cinq ans; et M. de Voiture et moi en avons plus « de cinquante, dont peut-être nous n'avons pas vécu un quart « d'heure selon les règles de M. de Saint-Cyran. >>

Puis donc que Balzac passoit cinquante ans en 1645, il étoit né tout au moins en 1594]. (o.)— Toute la partie de cette note renfermée entre crochets, a été supprimée depuis la 1re édition. Comme tous les biographes jusqu'ici, l'abbé d'Olivet a pris pour exact l'âge que se donnait Balzac d'une manière plus ou moins vague. Mais tous les calculs de Bayle, de l'abbé d'Olivet et d'autres, tombent devant la pièce suivante, publiée en 1845 par M. E. Castaigne. C'est l'acte même du baptême de Balzac que nous devons aux patientes recherches de cet érudit. Nous le transcrivons textuellement :

« Le jour et feste de la très-saincte et individue Trinité, premier jour de juing, an 1597, en l'église parrochialle de Saint-Paul d'Angoulesme, a esté baptizé Jehan Gay (on lit en marge GUEZ), fils de noble homme Guillaume Gay et de damoyselle Marie Nesmond, sa femme; et a esté son parin monseigneur Jehan-Loys de La Valette, chevallier du Saint-Esprit, duc d'Espernon, pair de France, lieutenant pour le Roy des païs d'Angoumoys et Saint-Onge, païs d'Onis, et du hault et bas païs de Lymouzin, et sa marine damoyselle..., mère dud. seigneur d'Espernon, et a tenu, au lieu de lad. damoyselle..., madame de Rouilhat, sa fille. »

(Recherches sur la maison où naquit Jean-Louis Guez de Balzac, etc., par J.-F. Eusèbe Castaigne. — Angoulême, Defraisse, 1846. In-8°, tirage à part à 100 exemplaires des Annales de la Société archéologique de la Charente.)

'Bien «< demoiselle » et noble en effet, puisqu'elle étoit de la famille de Nesmond.

dans le voisinage de cette ville, sur les bords de la Charente.

A l'âge de dix-sept ans' il alla en Hollande, je ne sais à quelle occasion2; mais il nous apprend lui-même que, peu de temps après, il accompagna dans plusieurs voyages le duc d'Épernon, à qui son père étoit attaché, et qu'ensuite s'étant donné au cardinal de La Valette, il alla, en qualité de son agent, passer dix-huit mois à . Rome pendant les années 1621 et 1622.

A son retour d'Italie3, n'étant encore àgé que de vingt-huit ans, il se confina dans sa terre de Balzac, d'où il ne sortit presque plus le reste de ses jours que pour se montrer cinq ou six fois à Paris. Il s'y laissoit attirer par quelques lueurs de fortune sous le ministère du cardinal de Richelieu, qui, avant que d'être mi

1 A l'âge de vingt ans.

? En 1617, c'est là qu'il connut Théophile, et si l'on er croit une lettre injurieuse de celui-ci, il en auroit rapporté, par suite de ses débauches, les maladies dont il se plaint si souvent dans ses lettres. Voyez OEuvres de Théophile (Bib. elzév. t. 11, p. 285). C'est là qu'il composa son Discours politique sur l'état des Provinces-Unies.

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3 Le séjour de Balzac en Italie eut la plus heureuse fluence, dit-il lui-même, sur son style. C'est là qu'il prit cette extrême délicatesse qui distingua ses œuvres et s'habitua au soin, souvent exagéré, qu'il donne à ses moindres écrits. Voyez, dans ses œuvres, les Passages défendus, 3° défense; voyez aussi le 18e discours.

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L'erreur est donc manifeste des écrivains qui font de Balzac un des visiteurs assidus de l'hôtel de Rambouillet. · Nous avons eu l'occasion ailleurs de prouver qu'il assista rarement aux célèbres réunions de la marquise. Moniteur du 27 juillet 1857.

5 Voyez les OEuvres de Balzac, édition in-folio, tome 11., p. 402,

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