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cette occafion de fucceder à l'Empire. En même AN DU M. tems le Sénat envoya prier Agrippa de venir pren4044. de J. C.44. de l'E. dre féance dans fa Compagnie. Il se peigna, se fe re vulg. 41. parfuma, & vint au Sénat comme un homme qui fortoit de table; & feignant de ne rien fçavoir de ce qui fe paffoit, il demanda au Sénat ce qu'étoit devenu Claude.

On lui raconta ce qui s'étoit paffé, & ce qu'il fçavoit mieux que perfonne, & on le pria de dire fon avis fur ce qui fe pouvoit faire dans l'état préfent des affaires. Il témoigna d'abord qu'il étoit disposé à sacrifier même fa vie pour la gloire & les intérêts du Sénat; mais qu'il étoit d'avis, s'ils fongeoient à reprendre la fouveraine autorité, de voir auparavant s'ils avoient des armes, de l'argent, & des gens de guerre, pour foûtenir une telle entreprise. Le Sénat répondit que rien de tout cela ne lui manquoit, & que dans le befoin, ils pourroient même armer un grand nombre d'esclaves. Agrippa repartit que c'étoit la une foible ressource, que d'oppofer des efclaves nouvellement armez aux anciennes troupes, qui foûtenoient Claude; mais qu'il étoit d'avis qu'on envoyât à Claude, pour le prier de fe déporter de fa prétention, & qu'il fe chargeoit d'accompagner les Députez du Sénat. La propofition fut agréée. Veranius & Braccus allerent avec Agrippa au camp, où étoit Claude. Mais Agrippa ayant trouvé moyen de parler en particulier à Claude, lui découvrit le trouble où étoit le Sénat, & lui confeilla de parler en Prince, qui étoit déja monté sur le trône. Les Députez du Sénat parlerent enfuite, comme nous

l'avons vû, & Claude leur fit la réponse que nous avons rapportée.

AN DU M. C.44. de l'E 4044. de J. vulg. 41.

Agrippa & les Députez ayant fait leur rapport, le Sénat répondit, (a) que jamais il ne fe foûmet- re troit volontairement à la fervitude, & qu'il ne craignoit point qu'on pût l'y forcer. C'étoit-la une déclaration de guerre. Auffi Claude ayant fçû leur résolution, leur envoya Agrippa, pour leur dire que s'ils perfiftoient dans ces fentimens, il feroit contraint de leur faire la guerre, quoique pour lui ilen eût tout l'éloignement imaginable; mais qu'il les prioit qu'au moins on convînt de quelque endroit bors de la ville, afin que les Temples des Dieux ne fuffent pas foüillez par le fang des citoyens armez contre les citoyens. Enfin le peuple ayant abfolument demandé un Prince, & la plûpart des Sénateurs s'étant abfentez, on fut obligé de reconnoître Claude pour Empereur.

Honneurs, dont

Ce Prince pour reconnoître les fervices impor- CHAP. X. rans, qu'Agrippa lui avoit rendus dans cette occa- Claude combla fion, (b) ajoûta à ce qu'il poffédoit déja, la Judée, Agrippa. qui comprenoit auffi l'Idumée méridionale, & la Samarie; en forte qu'il se vit en poffeffion de tout ce qu'Hérode le Grand fon ayeul avoit poffédé. Il lui donna outre cela l'Abilene, & le mont Liban; c'est-à-dire, les terres que Lysanias y avoit possédées. Claude voulut que cette donation fût gravée sur le cuivre, & mise dans le Capitole. Il fit auffi avec ce Prince un traité d'alliance, confirmé par

(a) Jofeph. Antiq. 1. 19. c. 3. & de Bello, l. 2. c.18. Vide & Sue

(b) Anzig. 1. 19. c. 4. & de Bello, I. 2. c. 18.

des fermens, au milieu de la grande place de Rome. AN DU M. Il accorda de plus, à la priere d'Agrippa, le Royau4044. de J. C.44. de l'Eme de Calcide à Hérode fon frere, qui étoit auffi re vulg. 41. fon gendre. Enfin il donna (a) les honneurs du

Confulat à Agrippa, ceux de la Préture à Hérode;

& à tous deux le pouvoir d'entrer dans le Sénat. & de lui faire leur remerciment en Grec; car d'ordinaire on ne parloit à l'Empereur qu'en Latin.

Les Juifs d'Alexandrie, qui avoient été opprimez fous Caïus, reprirent courage fous Claude. Ils prirent même les armes, & exciterent des féditions dans la ville. Les Alexandrins furent maltraitez, & l'Empereur qui étoit tout à Agrippa & à Hérode, ou ignora, ou diffimula ces broüilleries, Caïus avoit fait mettre en prison Alexandre Lysimaque frere de Philon, & Alabarque ou Chef, & Gouverneur des Juifs d'Alexandrie: mais Claude, qui l'aimoit depuis long-tems, le mit en liberté, L'Empereur donna même un Edit en faveur des Juifs d'Alexandrie, (b) par lequel il jugeoit le différend qu'ils avoient avec les Alexandrins, au fujet du droit de bourgeoifie. Il envoya à Alexandrie, & dans la Syrie cet Edit, par lequel il déclaroit que les Juifs ayant toujours joui des mêmes privileges, que les autres bourgeois d'Alexandrie, & ayant eu de tout tems le droit de fe choisir un Ethnarque ou Gouverneur, & de vivre felon leurs Loix, & dans l'exercice de leur Religion, fans qu'on pût les y troubler; il les confirmoit dans cette joüiffance, & défendoit de les y inquiéter.

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C.44.

Il donna dans la même année un autre Edit en faveur de tous les Juifs répandus dans toute l'éten- AN DU M. 4044. de J. duë de l'Empire, par lequel il déclare qu'en confide l'E dération d'Agrippa & d'Hérode fes amis, il permet re vulg. 41. à tous les Juifs qui font dans l'Empire Romain, de vivre felon leurs Loix; de même qu'il l'a permis. à ceux d'Alexandrie. Mais il leur recommande de se contenter de cette liberté, fans parler avec mépris des Religions étrangeres. Il ordonne que toutes les villes d'Italie, & les Princes même prendront copie de ce Refcrit, & qu'il demeurera affiché dans les places publiques pendant un mois, afin que nul n'en ignore. Nonobitant cette grande inclination que l'Empereur' témoignoit alors pour les Juifs, Dion (a) remarque que ce Prince en leur permettant de vivre felon leurs Loix, leur défendit de tenir aucune affemblée; & qu'il ne les laiffa à Rome, que parce qu'ils étoient en trop grand nombre, pour en être chaffez, comme ils l'avoient été fous Tibére. Toutefois dans la fuite, il les chaffa de cette ville, comme nous le verrons ci-après. Peu de tems après, Agrippa partit de Rome, Agrippa revient & revint en diligence dans fon nouveau Royaume, (b) pour en regler les affaires. Claude lui donna des Lettres de recommandation pour tous les Gouverneurs & les Intendans des Provinces par où il devoit paffet. Auffi-tôt qu'il fut arrivé a Jerufalem, il offrit à Dieu des facrifices d'ac tions de graces, & s'acquitta des vœux qu'il avoit

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A

(a) Dio, lib. 60. p. 669. {. (b) Foseph. Antiq. l. 19. c. 5.3

en Judée.

L

fas. Il fit rafer les cheveux à plufieurs perfonnes qui firent les vœux de Nazaréens, & il contribua even tout, ou en partie aux frais de leur confécration; car c'étoit la coûtume parmi les Juifs, (a) que pour avoir part au mérite du Nazaréat d'un autre, l'on contribuât aux frais de fa confecration. Et ayant exactement accompli tout ce que la Loi ordonne, il fit présent au Temple de la chaîne d'or que l'Empereur Caïus lui avoit donnée, * en la place de celle de fer qu'il avoit portée auparavant. Il la fufpendit au dedans des galeries du Temple, au-deffus du tronc où l'on jettoit Fargeht qui étoit confacré à Dieu, pour être un monument éternel de l'inftabilité des chofes humaines, & du fouverain pouvoir de Dieu fur la fortune des Rois, qu'il éleve, & qu'il abaisse quand il lui plaît.

Ce Prince ôta la fouveraine Sacrificature à Théophile fils d'Ananus, (b) & la donna à Simon Cantharas, fils de Boëthus, beau-pere du Grand Hérode, à caufe de Mariamne fa fille, que ce Prince avoit épousée. Agrippa voulut le dépouiller peu de tems après de cette dignité, pour la donner à Jonathas, fils d'Anne ou Ananus, qui l'avoit déja eue après Caïphe fon beau-frere: mais Jonathas s'excufa de la recevoir, difant qu'il ne fe croyoit pas digne de poffeder cette dignité une feconde fois; qu'il fe contentoit de l'honneur qu'il avoit eu de la poffeder une fois : mais qu'il avoit un frere,

(a) Voyez Alt. XX. 23. & no- (b) Antiq. 1. 19. c. §. & 6. tre Commentaire fur çer endroit.

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