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fequent que ces fortes de privileges, que quelques Monafteres s'attribuent, ne font pas legitimes. Celui de Saint Denis que le Pere Doublet à publié, lui fert d'exemple, il donne une copie de ce même Titre tiré d'un ancien Manufcrit qui contredit l'autre & qui eft conforme aux regles de l'Eglife. A cela le Pere Mabillon répond que c'eft une calomnie digne de reprimande, d'accufer fes Confreres d'errer contre l'Eglife & la police des Etats, lorfqu'ils défendent des privileges, quoiqu'on leur ait montré qu'ils font contraires aux canons de l'une & aux loix de l'autre. Il avoue le Titre que produit Monfieur Petit; mais il prétend que celui de Doublet en est un autre: furquoi il donne de mauvaifes raisons. Et pour montrer que celui qu'il défend & pour lequel il a fait un fi gros livre n'eft point contraire à l'Eglife,il ne rapporte ni paffages des Peres ni de Conciles; mais une Formule de Marculphe. Vous croyez peut-être, quoique ce ne foit pas une grande preuve qu'elle parle en termes exprès, cependant c'eft le contraire. Il n'y eft parlé que d'une exemption de juges mediats ou fubalternes, avec une claufe qué ni le Prin

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ce ni le Magiftrat ne pourront détruire cette grace, nec regalis fublimitas nec cujuflibet judicum fava cupiditas refragare tentet. Et une preuve de cela, c'eft que dans un endroit precedent de cette Formule, on y voit les mêmes expreffions que dans le Titre publié par Monfieur Petit: Statuentes ergo ut neque juniores, neque fucceffores vestri, nec ulla publica judiciaria poteftas &c. Enfin pour derniere raifon il rapporte uniquement un femblable privilege donné à Westminster par un Edouard Roy d'Angleterre, contre lequel affurément les raifons du Pere Papebroch & de Monfieur Petit ne perdent rien de leur force, auffi-bien que contre les autres Titres. Et en verité elles font fi peu détruites, que je ne puis comprendre qu'un homme de merite comme D. Mabillon ait voulu expofer fa réputation & celle de fon Ordre, par une fi miferable défenfe *. Ainfi, Monfieur,

après

Les Savans ont porté un jugement plus avantageux de la Diplomatique de Dom Mabillon, & ont mieux fçu lui rendre la juftice qu'il merite, que M. Baudelot de Dairval. Bien loin donc qu'il foit vrai que cet Ouvrage ait fait tort à la reputation de ce Sçavant Religieux, & à celle de fon Ordre, il lui a fait au-contraire plus d'honneur que tout autre. Il a été regardé par tous les Sçavans de l'Euro pe comme un chef-d'œuvre en fon genre, & comme contenant les principes & les regles d'un Art, dont on n'avoit eu jufqu'alors que des idées fort confufes. Ainfi il n'eft pas befoin d'en dire davantage

après avoir fi bien répondu, comme je l'ai montré, je ne m'étonne pas s'il

Es veut

pour prévenir le Lecteur contre l'impreffion defavantageufe que pouroit former dans fon efprit la cenfure fi peu équitable que porte M. Baudelot. Il fuffit feulement, puifque ce Monfieur fe prévaut avec tant d'affectation du témoignage du P. Papebroch Jefuite, de remettre devant les yeux de ceux qui n'auroient rien lû fur ce fujet, la Lettre de ce même P. Papebroch à Dom Mabillon, dont on dit que l'autographe eft confervé chez les Benedictins de S. Germain des Prez à Paris. Elle eft rapportée dans la vie de Dom Jean Mabillon donnée au Public par Dom Thierri Ruinart en 1709. & imprimée chez Muguet & Robustel.

Je vous avoue, dit le P. Papebròch, que je », n'ai plus d'autre fatisfaction d'avoir écrit fur cet,, te matiere, que celle de vous avoir donné occa,, fion de compofer un Ouvrage fi accompli. Il est » vrai que j'ai fenti d'abord quelque peine en li❞ fant vôtre Livre, où je me fuis vû refuté d'une ,, maniere à ne pas répondre: mais enfin l'utilité & » la beauté d'un Ouvrage fi précieux ont bientôt

furmonté ma foibleffe; & penetré de joie d'y voir », la verité dans fon plus beau jour, j'ai invité mon » Compagnon d'étude de venir prendre part à l'ad ,, miration dont je me trouve tout rempli. C'eft » pourquoi ne faites pas difficulté toutes les fois que »vous en aurez l'occafion de dire publiquement que > je fuis entierement de votre avis. Tu porro, quoties res tulerit, audacter teftare quàm totus in tuam fententiam iverim. J'ajouterai auffi ce que le P. du Sollier Jefuite dit dans le Journal de Trevoux du mois de Novembre 1725. pag. 291. que,, fouvent il a oüi-dire au P. Papebroch qu'il avoit l'obligation au P. Mabil ,,lon qu'il appelloit fon ami, d'un avantage qu'il ,, avoit efperé de fes propres foins, qui étoit d'avoir enfin des regles pour difcerner les Chartres ,, veritables d'avec les fauffes.

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Dom Mabillon publia en 1704. le Supplement de fa Diplomatique, dans lequel il établit par de nouvelles preuves tout ce qu'il avoit avancé dans cet Ouvrage ; & ce Supplément a été depuis refondu dans une nouvelle édition de la Diplomatique faite en 1709.

veut encore pardonner à ce dernier Auteur & lui épargner la confufion de le convaincre davantage.

Mais pour en revenir aux Manufcrits d'une meilleure note & d'une utilité plus noble, l'experience apprend tous les jours qu'ils nous confervent tant de richeffes, qu'on ne fçauroit trop louer ceux qui s'étudient à les connoître,à les acquerir, à les publier. On faifoit apparemment un très-grand cas des Manufcrits anciens du tems de: Lucien; puifqu'il fait ordonner dans fes Saturnales d'en faire prefent aux Sçavans. Je les regarde difperfez à prefent & plongez pour ainfi dire dans le fein de l'oubli, comme l'or dans les entrailles de la terre ; s'ils ne font pas eux mêmes ses mines inépuifables & immortelles, d'où la République des Lettres tire toute fa force, fa gloire, La magnificence & fon éternité.

Les Manufcrits ne font pastous d'un même caractere; ils ont leur âge, leur païs, leurs beautez differentes. Le deftin des peuples & des Empires à fouvent fait leur deftin; & l'on reconnoît avec plaifir que leurs défauts ou leurs perfections font autant de traits qu'ils

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confervent encore de la gloire des uns ou de l'abaiffement des autres. Les efprits de chaque Nation n'ont que trop éprouvé la révolution des tems; ils ont eu leur enfance, leur vieilleffe, & les Arts qu'ils ont cultivez, ont fuivi, pour ainsi dire, le même temperament. Les exemples, Monfieur, en font frequens, & je n'en veux pas chercher plus loin: dans le fujet dont je vous parle.

que

L'écriture, dit le Prince de l'éloquence dans fon Oraifon pour P. Sylla, n'a été inventée que par un defir de gloire & de reputation. Mais cet Art admirable, cet Art que je puis appeller de Fimmortalité, ne s'eft pas formé tout d'un coup. Il a eu befoin de plufieurs fiécles pour fuppléer ce qui manquoit à ces figures d'animaux, dont les premiers peuples fe fervoient, comme on le voit dans Tacite & dans les Hifto-riens de la Chine; à ces clous, dont les premiers Romains marquoient leurs années; aux nœuds de quelques-uns & aux autres fymboles dont on fçait que tant de peuples fe font fervis. Et il est vrai de dire que cet Art doit au tant fa perfection à la grandeur des peuples qu'à la politeffe & à la maturi

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* Litteræ pofteritatis caufa repertæ. N. 45

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