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font, auffi bien que les difcours dont nous venons de parler, dans le genre brillant & fleuri, parce que l'éloge en fait ordinairentent le fond. L'élégance, la délicatesse & la briéveté doivent diftinguer ces fortes d'ouvrages. On remarquera ces qualités dans les deux pieces fuivantes. Fontenelle, alors Directeur de l'Académie Françoise, fit le compliment fuivant à Louis XV fur fon facre :

SIRE,

Au milieu des acclamations de tout le royau » me, qui répete avec tant de transport celles » que Votre Majefté a entendues à Rheims » l'Académie françoise est trop heureufe & trop » honorée de pouvoir faire entendre fa voix » jufqu'au pied du trône. La naiffance, Sire, vous a donné à la France pour Roi, & la religion veut que nous tenions auffi de fa main » un fi grand bienfait. Ce que l'une a établi » par un droit inviolable, l'autre vient de te con

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firmer par une augufte cérémonie. Nous ofons » dire cependant que nous l'avions prévenue; » votre perfonne étoit déja facrée par le refpect » & par l'amour. C'eft en elle que fe renfer »ment toutes nos efpérances; & ce que nous » découvrons de jour en jour dans Votre Ma » jefté, nous promet que nous allons voir re

vivre en même tems les deux plus grands. » d'entre nos Monarques; Louis à qui vous fuc» cédez, & Charlemagne dont on vous a mis la » couronne fur la tête. »

En 1719, le Czar Pierre ayant fait favoir à l'Académie des Sciences de Paris qu'il defiroit être au nombre de fes honoraires, cette compagnie chargea Fontenelle, alors fon Secrétaire. perpétuel, d'en écrire à ce Prince ; ce qu'il fit

en ces termes :

SIRE,

« L'honneur que Votre Majefté fait à l'Académie royale des fciences de vouloir bien que » fon augufte nom foit mis à la tête de fa lifte, » eft infiniment au-deffus des idées les plus am» bitieufes qu'elle pût concevoir, & de toutes » les actions de graces que je fuis chargé de » vous en rendre. Ce grand nom, qu'il nous. eft prefque permis de compter parmi les nô» tres, marquera éternellement l'époque de la plus heureuse révolution qui puiffe arriver à » un empire, celle de l'établiffement des fciences. » & des arts dans les vaftes pays de la domi. »nation de Votre Majefté. La victoire que vous

remportez, Sire, fur la barbarie qui y régnoit, » sera la plus éclatante & la plus finguliere de » toutes vos victoires. Vous vous êtes fait, ain

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» que d'autres héros, de nouveaux fujets par » les armes; mais de ceux que la naissance vous

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avoit foumis, vous vous en êtes fait, par les >> connoiffances qu'ils tiennent de vous, des » fujets tout nouveaux, plus éclairés, plus heureux, plus dignes de vous obéir : vous les avez conquis aux fciences; & cette efpece de conquête, auffi utile pour eux que glorieuse pour vous, vous étoit réfervée. Si l'exécution de ce grand deffein, conçu par Votre Majefté, s'at» tire les applaudiffemens de toute la terre, » avec quels tranfports de joie l'Académie doitelle y mêler les fiens, & par l'intérêt des » fciences qui l'occupent, & par celui de votre » gloire dont elle peut fe flatter déformais qu'il » rejaillira quelque chofe fur elle !» Je fuis, &c.

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Les mémoires fur les fciences font peu fufceptibles d'ornemens. Il doit y régner beaucoup de clarté & de précifion, & une méthode qui ramene au fujet tout ce qui peut l'éclaircir & qui en écarte avec le même foin tout ce qui eft étranger. Des mémoires fur des matieres d'érudition, de littérature & de critique, comportent plus de fleurs & d'agrémens. La féchereffe même des fujets, une certaine dureté prefque toujours inféparable des recherches laborieuses demande qu'on les adouciffe, qu'on les tempere par une élégance & une aménité qui donnent un nouveau prix à la raison & au savoir, Ces qua

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lités regnent dans la plupart des pieces qui compofent les recueils de l'Académie des fciences & de celle des infcriptions.

C'eft encore à l'élégante fimplicité qu'on doit rapporter le genre d'éloquence qui doit dominer dans les éloges des académiciens. Ces éloges, dit M. de Condorcet, ont l'avantage d'offrir une lecture agréable, facile & inftructive, de permettre les détails fans interdire ni les réflexions niles peintures, ni les difcuffions philofophiques, & de montrer les hommes tels qu'ils font avec leurs fautes & leurs foibleffes. Ils n'exigent pas. le même talent pour l'éloquence que les éloges oratoires; mais ils exigent une connoiffance plus parfaite des objets dont l'homme dont on écrit Phiftoire a tiré fa gloire.

Fontenelle peut être regardé comme le premier Auteur de ce genre, & il a eu pour imitateurs MM. de Mairan, d'Alembert & de Condorcet.

Nous aurions pu encore diftinguer, fous le titre d'éloquence philofophique, celle qui eft appliquée au développement des vérités de la morale & de la philofophie; mais plufieurs rhéteurs l'ont confondue avec l'éloquence académique, & nous avons cru ne devoir pas multiplier davantage ces divifions. arbitraires. Il ne faut pas oublier l'éloquence eft une, quelle que foit la multiplicité des fujets. fur lefquels l'orateur peut exercer fes talens.

que

Fin de la premiere Partie.

DE LA RHÉTORIQUE,

SECONDE PARTI E,

D

Définition de la Rhétorique.

E tous les Auteurs qui ont traité de la Rhétorique, il n'en est presque aucun qui n'en ait donné une définition particuliere. Sans nous arrêter à difcuter ces différentes définitions, nous dirons que la rhétorique eft l'art de bien écrire ou de bien parler pour perfuader. Comme nous ne parlons & n'écrivons que pour faire entrer ceux qui nous écoutent ou nous lifent dans nos idées & dans nos fentimens, rien de fi important que de favoir perfuader : c'eft de quoi il s'agit dans le commerce du monde; auffi eft-ce donner à l'éloquence, qui eft la fin de la rhétorique, des bornes trop étroites, que de la renfermer dans le Barreau, dans les Académies & dans les chaires de nos temples: elle n'eft pas moins néceffaire dans les autres états de la vie. Ainfi l'art de parler s'étend à toutes chofes, & il eft très-utile d'en connoître les regles, qui ne font des obfer

que

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