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pas plus de droit que lui, ne peuvent pas faifir lefdits effets, quoique fa femme Toit en communauté de biens avec lui.

En effet, il faut confiderer Claude touchant la part qu'il a dans les effets mobiliaires qui font ès mains de Louise fa femme, comme Marchande publique, à caufe de la communauté de biens qu'il a avec elle, de même qu'elle doit être confiderée touchant la part qu'elle a dans les meubles & conquêts immeubles faits par Claude fon mari, à caufe de la communauté de biens qu'elle a avec lui; car il eft certain qu'elle ne peut demander à fon mari la part defdits meubles & conquêts immeubles par lui faits, parce qu'il en eft le feigneur & le maître pendant & conftant leur mariage, & qu'il en peut difpofer à fon plaifir, fuivant l'Article 225 du Titre X. de la Coutume de Paris ci-devant alleguée; & elle ne peut la demander fuivant l'Arcle 229 dudit Titre X. de ladite Coutume de Paris, qu'après le décès de fon mari que la communauté eft finie & réfolue, & que les biens de la communauté fe divifent par moitié entr'elle & les héritiers de fon mari. Ainfi pour les mêmes raifons Louife étant maîtreffe des marchandises, dettes actives, & autres effets dépendans du fait du Commerce, dont elle fe mêle publiquement, Claude fon mari ne peut pas non plus demander la division desdits effets qu'après le décès de fa femme. De forte que fes créanciers pour les dettes qu'il a contractées avec eux pour raifon de fon commerce & autres affaires particulieres qui exercent fes actions, ne peuvent pas pendant le vivant de Louise faire faifir les effets dépendans de la marchandise publique dont elle fe mêle, dans lefquels Claude fon mari a la moitié à caufe de la communauté de biens qu'il a avec elle, ni en demander la divifion pour fe pour le payer ce qui leur eft dû fur la moitié defdits effets appartenans audit Claude, qu'après le décès de ladite Louise fa femme, parce qu'ils n'ont pas plus de droit que Claude leur débiteur, comme il a déja été dit.

Déliberé à Paris le 15 Septembre 1682.

de

PARERE X X X V.

De quelle maniere il faut entendre ces mots: pour valeur en moi-même; valeur de moi-même; & valeur rencontrée en moi-même, affez fréquens dans les Lettres de Change?

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

A Rennes, le 9 Juillet 1681.
pour 330 livres.

Λ

Monfieur, à vue payez, s'il vous plaît, par cette premiere lettre à l'ordre de Mademoifelle de la Sellerie la fomme de 330 livres, pour valeur en moi-même, & passez compte de

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A Monfieur Gerard,

Marchand à Rennes.

Et au dos eft écrit:

Votre très-humble ferviteur
REAUVAL BARBE

Pour moi payez à Monfieur Duval Crouin mon fils, ou ordre, à Rennes le neuf Juillet mil fix cens quatre-vingt-un.

Payez à Monfieur Guefdon.

DUVAL CROUIN.

LE FAIT.

LA SELLERIE.

Le fieur Reauval Barbé, tireur de la lettre ci-deffus tranfcrite, n'en a reçu aucun argent ni billet pour la valeur d'icelle de la Demoiselle de le Sellerie, à laquelle il l'a fournie fur le fieur Gérard; néanmoins aujourd'hui que Reauval Barbé lui demande les 330 livres contenues en icelle, elle dit qu'elle l'a payée ; & la raifon qu'elle en donne, eft que ces mots pour valeur en moi-même, fuppofent que le tireur en a reçu la valeur. On répond au contraire que valeur en moimême veut dire que c'eft comme fi on difoit, valeur reçûe de moi-même ; d'autant plus que ladite la Sellerie eft Marchande publique, & femme d'un Marchand de Saint-Malo.

On demande avis fur la préfente conteftation, & fi en la forme qu'eft conçue cette lettre de change, la Sellerie ne doit pas être condamnée à la payer audit Reauval Barbé? Quelle raifon elle peut avoir pour s'en défendre, & celle qu'on doit alleguer au contraire pour s'en faire rendre raison en Justice?

Le fouffigné qui a pris lecture de la lettre de change, des ordres qui font au dos, & du Mémoire ci-deffus tranfcrit, eftime que ces mots, pour valeur en moimême, ne veulent pas dire que le fieur Reauval Barbé ait reçu de la Sellerie la valeur de la lettre en queftion, qui font les 330 livres mentionnées en icelle; car

encore que ces mots, pour valeur en moi-même, ne foient gueres ufités par les Cambiftes, mais feulement les fuivans, valeur rencontrée en moi-même, ou bien valeur de moi-même. Néanmoins tous ces mots mis dans une lettre de change par le tireur, font fynonymes, & fignifient la même chofe, c'eft-à-dire, que le tireur eft créancier de celui fur lequel il tire la lettre ; & quand le tireur dit, pour valeur en moi-même, ou bien rencontrée en moi-même, ou bien encore pour valeur en moimême, tout cela veut dire que quand celui fur lequel la lettre eft tirée aura payé le contenu en icelle au dénommé, auquel il l'a fournie, ou à celui en faveur duquel les ordres feront paffés, cette valeur demeurera au tireur en lui-même pour demeurer quitte de pareille fomme, ou pour lui en tenir compte fur plus grande fomme qu'il lui doit.

Il faut remarquer deux chofes, La premiere, qu'un Banquier ou un Négociant qui tire une lettre de change fur fon débiteur, ne fe fert pour l'ordinaire de l'une

ces trois valeurs, que quand il la fait payable à fon Correfpondant ou Commiffionnaire, pour en procurer le payement, pour lui rendre compte de la fomme contenue en la lettre, ou bien pour en difpofer pour lui fuivant fon ordre à quelqu'autre perfonne. La raison eft, que fi le tireur mettoit dans fa lettre, valeur reçûe en deniers comptans, marchandises, ou autres effets, fon Correfpondant ou Commiffionnaire, pourroit en mefufer, en difant que la lettre lui appartiendroit, paroiffant par icelle qu'il en auroit donné la valeur. Ainfi il n'y auroit point de fureté dans le commerce des lettres de change.

La feconde, que quelquefois un Banquier ou un Négociant donnera à un ami auquel il voudra faire plaifir, une lettre de change fur fon Correfpondant ou Commissionnaire, conçûe de la maniere qu'eft celle dont eft question, au lieu d'une lettre de crédit, parce qu'elle eft plus efficace ; & quand cet ami a reçi de ce Correfpondant ou Commiffionnaire la fomme contenue en la lettre, il devient alors débiteur du tireur; en forte qu'il doit lui rendre & reftituer pareille fomme, parce que lorfqu'il lui a fourni la lettre, il ne lui en a point donné la valeur. En effet, cette valeur qui eft mife par le tireur dans la lettre pour valeur en moi-même, ou de moi-même, ou rencontrée en moi-même, ne regarde point celui à qui la lettre eft payable, mais bien le tireur, & celui fur qui elle est tirée, comme il a été dit ci-dessus, & à proprement parler, c'eft une valeur entendue entr'eux.

Ainfi par tout ce qui vient d'être dit ci-devant, l'on voit que le fieur Reauval Barbé n'a fait qu'un office d'ami à la Demoiselle de la Sellerie, lorfqu'il lui a fourni la lettre en question fur le fieur Gerard de Rennes ; & que de la maniere qu'elle eft conçue pour valeur en moi-même, ne veut pas dire qu'elle lui en ait donné aucune valeur, & cette valeur ne le regarde en aucune façon, mais bien une valeur qui eft entendue par ledit fieur Barbé avec Gerard fon Correfpondant. En effet, fuppofé que ladite lettre fût revenue à proteft, ladite Demoiselle de la Sellerie n'eût eu aucun droit ni aucune action de garantie contre ledit fieur Reauval Barbé de la fomme de 330 livres contenue en cette lettre, parce qu'elle feroit demeurée nulle, comme non faite & avenue; & pour que la Demoiselle de la Sellerie eût pû revenir en recours de garantie contre le fieur Barbé, il eût fallu que la lettre eût porté valeur reque d'elle en argent, marchandifes, ou autres effets, fuivant l'Ordonnance du mois de Mars 1673, Titre V. Article I.

De forte qu'il n'y a aucune difficulté que ladite de la Sellerie doit rendre & reftituer audit feur Barbé les 330 livres mentionnées en la lettre de change en

queftion, puifqu'elle l'a reçûe, ou ceux à qui les ordres ont été paffés du fieur Gerard, fur qui elle étoit tirée, elle ne peut avoir aucuns moyens valables pour s'en défendre.

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Il faudra que ledit Barbé lui faffe donner affignation pardevant les Juge & Confuls de Rennes, pour se voir condamner & par corps à lui payer ladite fomme de 3 30 livres & aux interêts; & fi ladite Demoiselle fe défend par les raifons qui font dites dans le Mémoire ci-deffus tranfcrit, ledit fieur Barbé lui opposera toutes les raifons, ci-deffus rapportées, & il n'y point de Juge qui ne la condamne à payer.

Délibéré à Paris le 22 Décembre 1681.

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Si celui qui prend en payement une Lettre de Change, avec une fignature en blanc, feize jours après que les dix jours pour le proteft font paffes, eft obligé de la faire procefter dans les dix jours après qu'elle lui a été remife; & fi faute de le faire il peut en courir les rifques?

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Ly a contestation entre Georges & Henry, pour raifon d'une lettre de change que Georges a donnée en payement au Commis de Henry, pour la recevoir de François l'accepteur, fur fa fignature en blanc, fervant d'endoffement, dont le tems des dix jours pour faire le proteft étoit paffé.

LE FAIT.

Georges devoit à Henry 12000 livres pour le contenu en une lettre de change tirée fur lui, & qu'il avoit acceptée, à l'échéance de la lettre, qui eft le 24 Decembre 1682, Henry envoye fon Commis chez Georges pour en recevoir le payement. Georges donne au Commis d'Henry 10000 livres en argent comptant, & pour parachever le payement defdites 12000 livres, il lui donne à recevoir de François une lettre de 2000 livres à lui payable au 28 Novembre précédent, la¬ dite lettre acceptée par ledit François, dont le terme étoit échû dès ledit jour 28 Novembre, fans que ledit Georges l'eût fait protefter fur ledit François dans les dix jours après celui de l'échéance, fuivant l'ufage, qui finiffoient le 8 dudit mois de Décembre. De forte qu'il y avoit 16 jours que le tems des dix jours étoit paffé, lorfque Georges a donné ladite lettre en payement au Commis d'Henry, au dos de laquelle lettre Georges avoit mis fa fignature en blanc pour fervir d'endoffement, & la remplir d'une quittance, lorfqu'on en recevroit le payement. Le Commis de Henry après les Fêtes de Noel va plufieurs fois chez François pour recevoir lefdits 2000 livres fans le rencontrer, jufqu'au 5 Janvier de la présente année 1682, que François s'eft abfenté & a fait banqueroute.

Le même jours Janvier le Commis de Henry va chez Georges, & lui dit qu'il

été plufieurs fois chez François pour recevoir les 2000 livres contenues en la lettre qu'il lui avoit donnée à recevoir de lui, fans l'avoir pû rencontrer, & qu'il avoit appris le matin qu'il s'étoit retiré & fait faillite, & qu'ainfi il eût à reprendre La lettre de change, & lui payer ladite fomme de 2000 livres.

Georges fe défend de reprendre ladite lettre, & de payer à Henry les 2000 livres. La raifon de fon refus eft qu'il a négocié ladite lettre de 2000 livres à Henry, & que pour cela fa fignature en blanc, qui eft au dos de ladite lettre, étoit pour remplir par le Commis de Henry, un ordre à fon profit le 24 Décembre dernier, jour auquel il lui a donné ladite lettre par négociation; qu'ainfi il étoit tenu de faire protester dans les dix jours portés par l'Ordonnance de 1673, à compter du jour 24 Décembre qu'il lui a négocié ladite lettre, ce qui n'ayant point été fait par Henry, puifqu'il y avoit douze jours qu'il l'avoit entre fes mains fans l'avoir fait protefter, qu'il étoit non-recevable à venir lui demander à reprendre ladite lettre de change; & qu'ainfi elle devoit demeurer pour fon compte à fes rifques, perils & fortunes, conformément à la fufdite Ordon

nance.

Henry foutient au contraire, qu'il n'eft pas vrai que Georges ait négocié ladite lettre de change à fon Commis, mais qu'il la lui a feulement donné à recevoir de François fur fa fignature en blanc, qui eft au dos de ladite lettre, pour la remplir d'un reçû ou quittance, lorfque fon Commis en recevroit le payement de François. En effet, que fi Georges avoit négocié la dite lettre au Commis de Henry, ainfi qu'il dit, il auroit paffé fon ordre au profit dudit Henry, ce qui ne fe trouve point, puifque fa fignature fe trouve encore préfentement en blanc, & par conféquent qu'elle ne peut paffer que pour endoffement & non d'ordre, fuivant l'Ordonnance de 1673. D'ailleurs, fi ledit Georges avoit négocié ladite lettre à fon Commis pour lui, il lui auroit payé le change; ce qu'il n'a point fait, & ne le pouvoit faire, puifque dès le même jour 24 Décembre qu'il a donné ladite lettre a fon Commis pour parachever le payement des 12000 livres qu'il avoit à recevoir de lui, il pouvoit recevoir le payement de François, puifque ladite lettre de change étoit échûe il y avoit 26 jours; qu'ainfi par toutes ces raifons Georges eft de mauvaise foi, & a mauvaise grace de ne vouloir pas reprendre ladite lettre, & lui rendre les 2000 livres contenues en icelle, puifque fondit Commis ne l'a prise de lui en payement que pour lui faire plaifir.

L'on demande avis fur cette conteftation.

Le fouffigné qui a pris lecture du Mémoire ci-dessus, & examiné les dires & conteftations des Parties, eft d'avis que dès le moment qu'une lettre de change eft échûe, & que les dix jours acquis à celui au profit duquel elle eft tirée pour la faire protefter font paffés, elle n'eft plus négociable dans le Public, & ne peut être reçûe que fur fon endoffement, c'est-à-dire, fur fa quittance qu'on mettra au-deffus de fa fignature en blanc, qui eft au dos de la lettre, du reçû du contenu en la lettre lorfque l'accepteur l'acquittera & payera. De forte que quand celui au profit duquel eft tirée une lettre de change, l'a donnée en payement à une perfonne pour la recevoir fur fa fignature en blanc, cette perfonne n'est point tenue ni obligée à faire aucun proteft fur l'accepteur, parce que le tems fatal des dix jours acquis pour faire protefter la lettre étant paffé, il n'y a plus de tems limité dans lequel celui à qui on l'a donné en payement la puiffe faire protefter, & l'Acte de proteft feroit même inutile, parce que l'effet d'un protest

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