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I. Si un billet fait par un Bourgeois de Paris, qui n'eft point Marchand, au profit d'un Officier de Juftice, peut produire la contrainte par corps?

II. Si l'on peut être réputé Marchand quand on eft intereffe dans une Compagnie de Commerce, qui fe fait fur Mer pour des Voyages de long cours?

III. Si l'Officier au profit duquel eft fait le billet par le Bourgeois, a droit de fe pourvoir pardevant les Juge & Confuls, & s'ils font compétans pour connoître du differend des Parties?

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

Pour la fomme de deux mille livres, que je promets payer au premier Juillet 2683 à Nicolas, pour valeur reçue dudit fieur. Fait à Paris le 20 Décembre 1682, Signé, JACQUES.

L a conteftation pour raifon du billet dont copie eft ci-deffus tranfcrite, en ce I qui concerne la contrainte par corps feulement.

LE FAI T.

Jacques qui a fait le billet dont copie eft ci-deffus tranfcrite, eft un Bourgeois de Paris, qui eft en fociété dans un Commerce qui fe fait sur Mer par des voyages de long cours, lequel a emprunté la fomme de 2000 livres de Nicolas, qui eft un Officier de Cour Souveraine, pour employer en fes affaires particulieres, & non pour le compte de la Compagnie de Commerce.

Nicolas a fait afligner Jacques pardevant les Juge & Confuls de Paris, pour fe voir condamner & par corps, à lui payer ladite fomme de 2000 livres, attendu, dit-il, que c'est un billet de change, où eft intervenu Sentence par défaut, qui condamne ledit Jacques, & par corps, à payer audit Nicolas icelle fomme.

Jacques a obtenu un Arrêt de la Cour fur Requête, qui le reçoit appellant de ladite Sentence defdits Confuls; ordonné que fur l'appel les Parties auront audience au premier jour, & cependant défenfes d'exécuter ladite Sentence fur les peines portées par ledit Arrêt.

Au préjudice de cet Arrêt bien & dûement fignifié, Nicolas fait arrêter à fa Requête ledit Jacques, & le fait conftituer prifonnier ès prifons du grand Châ

telet de Paris.

Jacques a préfenté fa Requête au Parlement, tendante à ce qu'il plût à la Cour le recevoir appellant dudit emprisonnement, & pour voir dire & ordon

ner

ner qu'en venant pour plaider fur les appellations, déclarer ledit emprisonnement nul & injurieux, l'écroue rayé & biffé, le décharger de la garde de l'Huiffier, & faifant droit fur l'appel de ladite Sentence des Juge & Confuls, qu'il fera déchargé de ladite contrainte par corps, attendu que le billet en queftion n'est point un billet de change, ni fait de Marchand à Marchand.

Il s'agit préfentement de plaider fur lefdites appellations.

Nicolas prétend que Jacques eft inal fondé en fefdites appellations, attendu qu'il eft Marchand, que ledit billet eft un billet de change, & qu'il eft intéreffé dans la compagnie du commerce qui fe fait fur la Mer, par des voyages de long cours. L'on demande avis fur le fujet de la préfente conteftation, fçavoir :

Premiérement, fi le billet dont copie eft ci-devant tranfcrite, est un billet de change, & s'il opere de foi la contrainte par corps contre Jacques, qui n'eft point Marchand de profeffion, ni reçu Marchand dans aucun des fix Corps de la Ville de Paris, mais fimplement un Bourgeois de Paris, qui a fait fon billet à Nicolas, qui eft un Officier de Cour Souveraine, pour valeur reçue purement & fimplement, fans dire en quoi confifte cette valeur, fi c'est en argent comptant, ou autres effets ?

Secondement, fi Jacques eft censé être Marchand, pour être intéreffé dans la Compagnie du commerce qui fe fait fur la Mer, par des voyages de long cours, avec d'autres Intéreffés, dont la plûpart font Officiers?

Troifiémement, fi Nicolas a pù introduire Jacques en la Jurifdiction Confulaire de Paris? Si les Juge & Confuls étoient Juges compétens pour connoître le différend des Parties, & s'ils ont pû prononcer la contrainte par corps contre ledit Jacques ?

Le fouffigné qui a pris lecture du billet, dont copie eft ci-deffus transcrite, & du contenu au présent Mémoire, eftime, fçavoir:

Sur la premiere Queftion.

Que ledit billet n'eft point un billet de change, mais fimplement une promeffe. En effet, il n'y a que de deux fortes de billets de change, l'un portant valeur reçue en lettres de change, & l'autre portant promeffe de fournir des lettres de change à celui au profit duquel eft fait le billet : cela eft conforme à l'Article XXVII du Titre V de l'Ordonnance du mois de Mars 1673 qui porte: Qu'aucun billet ne fera réputé billet de change, fi ce n'est pour lettres de change qui auront été fournies, ou qui le doivent être. Ainfi le billet en queftion ne portant point valeur reçue en lettres de change de Nicolas, au profit duquel il eft fait, ni promeffe par Jac ques de lui fournir lettres de change; l'on ne peut pas dire aux termes de l'Ordonnance, ni par l'ufage obfervé parmi les Marchands & Négocians que ledit billet foit un billet de change; mais comme il a déja été dit, une fimple promeffe conçue pour valeur, laquelle ne peut operer aucune contrainte par corps, attendu que cette promeffe n'eft point faite par un Marchand au profit de Nicolas, qui eft Offi cier de Cour Souveraine.

Tome II,

Q99

Sur la feconde Question..

Qu'encore que Jacques foit intéreffé dans la Compagnie du Commerce qui fe fait fur la Mer par des voyages de long cours, il n'eft point réputé être Marchand pour cela, d'autant que ce n'eft pas fon état ordinaire, & qu'il n'eft fimplement qu'un Bourgeois de Paris, ainfi l'on doit regarder son état ordinaire, & non pas cette qualité d'intéreffé audit commerce, qui n'eft qu'accidentelle. De forte que le billet en question ayant été fait par Jacques, qui n'eft point de profeffion mercantille, au profit de Nicolas, qui eft un Officier, ne doit être confideré que comme une fimple promeffe, de même que celles qui fe font entre d'autres perfonnes qui ne font point de profeffion mercantille; néanmoins il en feroit autrement fi Jacques avoit fait & figné le billet collectivement, Jacques & Compagnie du commerce qui fe fait fur la Mer par des voyages de long cours; en ce cas ledit billet feroit cenfé être un billet de Commerce, parce que la valeur mentionnée en icelui auroit été pour fervir dans le commerce de fa Compagnie, & en ce cas il opereroit la contrainte par corps; mais le billet étant fimplement fair & figné pas Jacques, pour emprunt d'argent pour employer à fes affaires particulieres, n'eft point cenfé être fait par un Marchand, & partant il ne peut operer la contrainte par corps ainfi qu'il a été dit ci-deffus.

Sur la troifiéme Question

Que Jacques n'étant point Marchand de profeffion, Nicolas qui eft un Officier n'a pû intenter fon action contre lui en la Jurifdiction Confulaire, parce qu'ils font Juges incompétans, en ce que ledit billet n'eft point fait de Marchand à Marchand, ni pour fait de marchandises. Ainfi ledit Nicolas devoit intenter fon action devant le Prevôt de Paris, Juge ordinaire des Parties. Cela eft conforme à l'Article III du Titre XII de la Jurifdiction des Confuls, de l'Ordonnance de l'année 1673, dont voici la difpofition: Défendons néanmoins de connoître des Billets de: Change entre Particuliers autres que Négocians & Marchands, ou dont ils ne devront · point la valeur: Voulons que les Parties fe pourvoyent pardevant les Juges ordinaires & ainfi que pour de fimples promeffes. De forte qu'aux termes de cette difpofition quand bien le billet en queftion feroit un billet de change (que non pour les raisons ci-deffus alleguées) il n'y a que les Juges ordinaires qui en puiffent connoître, & non les Juge & Confuls. A plus forte raifon le billet en queftion n'étant qu'une fimple promeffe faite entre Particuliers, par un homme non Marchand, pour va-leur reçue fimplement; & fuppofé que Jacques eût comparu en la Jurifdiction Confulaire à l'affignation à lui donnée à la requête de Nicolas, qu'il fe fût défendu. fimplement fur la contrainte par corps, les Juge & Confuls ne l'auroient pas pû condamner par corps au payement de la fomme mentionnée audit billet, encore. qu'il eût reconnu leur Jurifdiction, parce que le billet n'eft point un fait de Mar-chand à Marchand, ni pour fait de marchandife. Ainfi par tout ce que deffus Jacques, aft bien fondé en fon appel de la Sentence des Juge & Confuls.

Délibéré à Paris le 27 Mai 1683..

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1. Si les termes d'une Police d'affurance, qui porte promeffe de garantir de toutes pertes & dommages venus & à venir, fans aucune exception & réserve quelconque, comprennent la baraterie de Patron?

la

II. Si l'Affureur, n'étant point tenu de la baraterie de Patron, eft obligé de prouver perte ou le dommage en question eft arrivée par baraterie de Patron? Ou fi la présomption eft pour l'Affureur?

que

III. Si l'Affuré peut faire abandon de la chofe affurée, & intenter fon action pour le payement de l'affurance, quand on ne fçait ce qu'eft devenu le Navire affuré?

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

U compte d'un autre

LE FAIT.

T

N Marchand de la Ville de Bayonne a fait charger de la marchandife pour le compte d'un autre Marchand de la Ville de Dunkerque, fur un Navire de la Ville de Londres, dont le Maître eft habitant de la même ville, pour faire la route & décharger ladite marchandise au lieu deftiné par la Police.

Le Marchand chargeur de la Ville de Dunkerque, a fait affurer le prix de fa marchandise par un Négociant de la Ville de Lille, & lui a payé la prime.

Il

y a trois mois que le Navire eft parti de fon Port avec trois autres Vaiffeaux pour faire fa route: les trois Vaiffeaux font arrivés au lieu, & le Navire Anglois n'y eft point arrivé, & l'on ne fçait pas s'il eft péri en Mer, ou fi le Maître d'icelui s'en eft allé avec ledit Navire & la marchandife qui étoit dedans; de forte que le Marchand de Dunkerque, qui eft l'affuré, veut faire abandon de ladite marchandise à fon affureur de la Ville de Lille, & en conféquence lui demander qu'il ait à lui payer le prix de l'affurance qu'il a fait defdites marchapdfes.

L'affureur prétend que le Maître du Navire s'en est allé, & qu'il a emmené ledit Navire & la marchandise par lui affurée en Pays étranger, pour en profiter; qu'ainfi y ayant baraterie de Patron, il eft déchargé de fon affurance, attendu qu'il n'eft point tenu de la baraterie de Patron, par la Police d'affurance, n'y en étant parlé en façon quelconque.

L'affuré dit au contraire que, l'affureur s'étant obligé par la Police d'alfurance de garantir les marchandifes par lui affurées, de toutes pertes & dommages venas & à venir, fans aucune exception ni referve quelconque, eft tenu à la baraterie de Patron; de forte que fi le Maître du Navire en queftion a fait baraterie, ledit affureur en eft tenu, & par conféquent qu'il doit lui payer leprix de l'affurance. L'on demande avis fur la préfente conteftation, fçavoir:

Premiérement, fi l'Affureur eft tenu de la baraterie de Patron, quand il y a dans la Police d'affurance, qu'il promet garantir de toutes pertes & dommages venus & à venir, fans aucune exception ni réferve quelconque ? Et fi dans ces termes, fans aucune exception & réferve quelconque, eft comprise la baraterie de Patron?

Secondement, fi fuppofé que l'affureur ne foit pas tenu à la baraterie de Patron, il n'eft pas, tenu de prouver la baraterie de Patron; finon s'il doit payer le prix de

l'affurance?

Troifiémement, fi l'affureur ne prouvant point la baraterie de Patron, ne fçachant point ce qu'eft devenu le Navire, s'il eft péri ou non, l'assuré peut faire préfentement abandon de fa marchandise, & intenter fon action

du prix de fon affurance ?

payement

pour avoir Le fouffigné qui a pris lecture, & mûrement examiné le Mémoire ci-dessus, eftime, fçavoir:

Sur la premiere Queftion.

Que l'affureur n'eft point tenu à la baraterie de Patron, ni obligé d'indemnifer Taffuré du vol qu'a fait le Maître du Navire des marchandifes affurées, parce que l'affureur court feulement le rifque de la Mer, & les cas fortuits, à fçavoir, toutes pertes & dommages qui arrivent fur la Mer par tempêtes, naufrages, échoûmens, abordages, changemens de routes de voyages du Vaiffeau, jet en Mer, feu, prifes, pillage, arrêt de Prince, déclaration de guerre, repréfailles, & généralement toutes fortunes de Mer. Ainfi l'affureur ne court point de rifque de la baraterie de Patron, s'il ne l'eft expreffément dit dans la Police d'affurance. La raifon eft que baraterie de Patron ne peut paffer pour cas fortuit qu'à l'égard du Bourgeois du Navire. De forte que fi le Maître où Patron du Navire fait baraterie, l'affuré a feulement fon action contre le Bourgeois dudit Navire qui lui a affreté fon Vaiffeau, & non contre l'affureur, d'autant que c'eft le Bourgeois qui a mis lui-même le Maître ou Patron pour la conduite du Navire, la bonne foi duquel Bourgeois l'affuré a fuivi, & non celle de l'affureur, qui a fuivi la bonne foi de l'affuré, & celle du Maître ou Patron du Navire dans lequel il a chargé fa marchandise, de la fidélité duquel le Bourgeois eft feul tenu, ne fervant à rien à l'affuré de dire que l'affureur s'eft obligé par la Police d'affurance à la garantie de toutes pertes & dommages venus & à venir, fans aucune exception ou réserve quelconque, qui pourroient arriver à la marchandise qu'il a affurée, parce que ces mots fans exception ou réferve quelconque, ne doivent fe rapporter qu'aux rifques de la Mer, & aux cas fortuits ci-deffus exprimés. En effet, cela eft conforme aux Us & Coutumes de la Mer de toutes les Nations de l'Europe. Il y en a même une difpofition dans l'Ordonnance fur le fait de la Marine du mois d'Août 1681, qui eft l'Article XXVI du Titre VI Des Affurances : Et cette question eft pleinement décidée par l'Article XXVIII, dont voici la difpofition: Ne feront auffi tenus les affureurs de porter les pertes & dommages arrivés aux Vaiffeaux & marchandifes par la faute des Maitres & Mariniers, fi par la Police ils ne font chargés de la baraterie de

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:. Que c'eft à l'affureur a prouver que le Maître du Navire en queftion a fait baraterie; c'est-à-dire, s'il a changé de route pour emmener le Navire & la marchandi

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