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fe chargée dans icelui dans d'autres Pays, pour les vendre à fon profit, ou fait quelqu'autre friponnerie au préjudice du Marchand chargeur, parce qu'une allégation ne fuffit pas, il faut en rapporter la preuve.

Sur la troifiéme Question.

Que fi l'affureur ne rapporte point de prevue que le Maître ou Patron du Navire en question ait fait baraterie, comme on ne fçait s'il eft péri en Mer, ou s'il a été pris par les Pirates, ou de quelques Armateurs de Princes qui ayent guerre contre l'Angleterre, d'où eft ledit Navire, & appartenant à un Anglois ; en ce cas par un Acte l'affuré peut faire abandon à l'affureur des marchandifes qu'il a affurées, mais il ne peut le faire qu'après l'an expiré, à compter du jour du départ du Vaiffeau pour les voyages ordinaires de proche en proche, & après deux ans, s'il eft fretté pour faire un voyage de long cours, & demander après ledit an, ou deux ans & jour, le payement du prix de l'affurance. Cela eft conforme à l'Article LVIII du Titre VI de l'Ordonnance de 1681 alleguée fur la premiere question. Cela ne reçoit aucune difficulté en France.

Mais comme l'affureur eft de la Ville de Lille, il faut fçavoir si les habitans de ladite Ville exécutent la fufdite Ordonnance; parce qu'il fe peut faire que par le Traité de la réduction de cette Place au Roi de France, les affaires s'y jugent fuivant les Us & Coutumes du Pays & les Ordonnances du Roi d'Efpagne, auquel ils étoient fujets avant la réduction d'icelle ; car en ce cas l'affuré pourroit faire fon délai & abandonnement dès à préfent, en déclarant à l'affureur par l'Acte, qu'il entend être payé de la fomme par lui affurée fur la marchandise qui étoit dans le Navire en queftion, à la fin de l'an & jour, à compter du jour du délai à lui fait, parce que c'est un ufage qui eft fuivi en Flandre & en Angleterre, d'où eft le Vaiffeau, & par toute l'Europe, & qui l'étoit même en France avant l'Ordonnance de la Mer de l'année 168r.

Mais à dire le vrai, ce nouvel ufage qu'a introduit ladite Ordonnance pour la France, eft plus conforme à la droite raifon que l'ancien ufage qui fe pratique encore dans les autres Pays étrangers, comme il vient d'être dit, parce que dès le moment que l'abandonnement eft fait, la marchandise appartient à l'affureur. De forte que fi aux termes de l'ancien ufage l'affuré en fait le délai & abandon avant le jour & an, & que le vaiffeau revienne avant ledit an & jour, les marchandifes appartiennent en pleine propriété à l'affureur, au moyen du prix de l'affurance qu'il en a payée à l'affuré, au lieu que fi l'affuré ne fait fon délai & abandon qu'après l'an & jour expiré, à compter du jour du départ du Vaiffeau, fuivant la fufdite Ordonnance de 1681, il a l'avantage que fi le Navire duquel on n'a point de nouvelles, revient avant l'an & jour expiré, ainfi par fa patience il ne perdra point la marchandise pour un modique prix d'affurance qu'il recevra de l'affureur.

Délibéré à Paris le 5 Juin 1686..

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I. Si deux perfonnes qui ne font point affociées ayant accepté conjointement une lettre de Change, font obligées folidairement à ba payer?

II. Si le tuteur des enfans d'un des accepteurs peut prétendre qu'une femme au profit de laquelle cette lettre étoit faite, Joit non-recevable en fon action contre fes mineurs, à caufe qu'elle a promis par écrit de ne faire aucune pourfuite contre l'autre accepteur vivant, ni contre les enfans du décedé, moyennant qu'il lui paye de mois en mois certaine fomme jufqu'à la fin du payement, & que cet accepteur vivant eft entré en payement?

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Le fieur de la Tour, de la Ville de Rouen, a tiré une lettre de change le 15 Novembre 1681 fur les fieurs Sinfon & Lucas, de la fomme de 2000 livres, payable folidairement à la veuve le Févre, Marchande Plombiere à Paris, ou à fon ordre, au 18 Mai 1682, valeur reçue de ladite veuve.

La lettre eft acceptée par lefdits Sinfon & Lucas, le 18 Décembre 1682 ladite veuve le Févre a fait un billet, par lequel elle promet audit fieur Lucas & aux héritiers dudit Sinfon de ne leur faire aucune pourfuite de la fufdite lettre de change que ledit Lucas & ledit Sinfon ont acceptée, moyennant que ledit Lucas donnera à ladite veuve le Févre de mois en mois 200 livres, jusqu'à la fin du payement, commençant le premier Janvier 1683.

En exécution duquel billet ledit Lucas a payé à ladite veuve le Févre 1200 livres en plufieurs & diverfes fois, conformément audit écrit.

Énfuite de ces payemens ledit Lucas ayant fait faillite, & fes biens étant en direction, ladite veuve le Févre ne pouvant par ce moyen faire payer les 800 livres reftans de ladite lettre de change, auroit fait affigner aux Juge & Confuls de cette Ville de Paris les héritiers dudit Sinfon, faute d'avoir par ledit Lucas fatisfait audit billet, pour fe voir condamner à lui payer ladite fomme de 800 livres, intérêts, frais & dépens; à laquelle affignation le tuteur des enfans dudit Sinfon feroit comparu, qui autoit dit pour défenfes que ladite veuve le Févre étoit non-recevable en fa demande, pour deux raifons. Premiérement, parce que ladite veuve le Févre avoit donné du temps audit Lucas, fans la participation ni le confentement defdits héritiers. Secondement, parce que par ce moyen elle a reconnu ledit Lucas pour fon feul & unique débiteur, & ainfi elle n'eft plus dans le

tems de demander à l'encontre defdits héritiers le reftant de ladite lettre de change, & partant fans action. Sur quoi feroit intervenu Sentence des Juge & Confuls, qui renvoye lefdits enfans & héritiers dudit Sinfon quittes & abfous dela demande de ladite veuve le Févre.

De laquelle Sentence ladite veuve le Févre a interjetté appel en la Cour de Parlement de Paris, fur lequel il s'agit de prononcer.

Le fouffigné qui a pris lecture du Mémoire ci-deffus, enfemble de la copie de la lettre de change & billet y mentionné, eftime que ladite veuve le Févre eft bien fondée en fon appel.

Premiérement, parce que ledit défunt Sinfon & ledit Lucas font obligés folidai rement au payement de ladite lettre de change, & qu'ils s'en font rendus débiteurs. dès le moment de leur acceptation.

Secondement, parce que ladite le Févre n'a point par fon écrit dérogé à l'obligation folidaire, tant dudit Lucas, que des héritiers Sinfon, qui exerçoit les actions dudit défunt. Bien loin de cela lefdits héritiers Sinfon ayant accepté le billet de ladite veuve le Févre en la forme & maniere qu'il eft conçû, ils fe font reconnus redevables avec ledit Lucas folidairement envers ladite veuve le Févre de la fomme de 2000 livres y mentionnée.

En effet, par ledit billet ladite veuve promet audit Lucas & aux héritiers Sinfon de ne leur faire aucune pourfuite de la lettre de change de 2000 livres que lefdits Lucas & Sinfon ont acceptée, moyennant que ledit Lucas lui donnera de mois en mois 200 livres, jusqu'à la fin du payement. Ainfi le billet étant fait au nom des deux débiteurs par ladite le Févre, elle ne s'eft point départie des pourfuites qu'elle pouvoit faire contre lefdits héritiers Sinfon, en cas que ledit Lucas ne fatisfit pas au payement du contenu en ladite lettre dans les tems portés par trois billeis. De forte que ledit Lucas n'ayant pas fatisfait à la claufe dudit billet, ladite le Févre peut retourner fur les héritiers Sinfon, pour avoir le payement du furplus.

Les héritiers Sinfon ne peuvent pas dire que ladite veuve le Févre a donné du tems audit Lucas, d'autant que le tems pour ne point faire des pourfuites eft donné. auffi-bien aufdits héritiers Sinfon, qu'audit Lucas, comme il paroît par ledit billet. Et ainfi la claufe n'ayant pas eu fon entier effet de la part de Lucas, ladite veuve le Févre peut pourfuivre lefdits héritiers Sinfon, comme il a déja été dit, & fon action dure cinq ans. Cela eft conforme à l'Article XXI du titre V de l'Ordon-nance du mois de Mars 1673, ainfi il n'y a aucune difficulté en cette cause.

Délibéré à Paris le 15 Décembre 1685..

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PARERE LXII.

I. Quel jour l'on a dû faire protefter une Lettre de Change?

II. Si un endoffeur, qui a reçu la Lettre de Change par lui endoffee, renvoyée faute de payement fans proteft, & qui enfuite en a renvoyé une autre au porteur, eft recevable à demander au porteur qu'il lui fourniffe un proteft de la premiere, ou qu'il lui rende la feconde ?

III. Si n'y ayant qu'une fimple fignature en blanc au dos d'une Lettre de Change, lorfqu'elle a été négociée, l'on a pú poftérieurement mettre un ordre au-deffus de cette fi gnature?

IV. Si une femme en puissance de mari, qui a tiré une Lettre de Change, en eft garante en fon nom? Et fi faute de payement de cette Lettre le porteur peut intenter action contre elle?

L'dres

E fouffigné qui a pris lecture du Mémoire, de la lettre de change, & des orqui font au dos des lettres miffives, & des autres piéces attachées audit Mémoire, ensemble de la lettre du fieur Collard, écrite fur ce fujet, estime. Premiérement, que la lettre de change en queftion a dû être proteftée le 201 Juillet 1685 à la requête de Jeannot, au profit duquel ledit fieur Collard a passé fon ordre, qui font dix jours après qu'elle étoit échûe, qui étoit le premier Juillet le lendemain de l'écheance, & duquel jour l'on doit compter les dix jours de faveur qu'avoit Jeannot pour la faire protefter. Cela eft conforme à l'Article IV du Titre' de l'Ordonnance du mois de Mars 1673 & à l'ufage qui s'est toujours pratiqué dans le commerce des lettres de change.

Et fuppofé même que la lettre eût été proteftée le 10 Juillet, il falloit que Jeannot fe pourvût en recours de garantie contre ledit fieur Collard, dans le tems porté par l'Article XIII dudit Titre V. De forte que la lettre n'ayant été protestée que le 18 Juillet, c'eft un tems fatal pour Jeannot, qui n'étoit plus recevable en fon action en garantie de ladite lettre contre ledit fieur Collard. Cela eft auffi conforme à l'Article XV du Titre V.

Secondement, › que la lettre en queftion ayant été renvoyée audit fieur Collard, & au lieu d'icelle en ayant volontairement renvoyé une autre de pareille fomme pour rembourfer Jeannot, fans lui avoir demandé le proteft, qui devoit avoir été fait, comme dit eft, le 10 Juillet 1685, pour retourner fur Franciere, qui avoit paffé fon ordre au profit dudit fieur Collard, c'eft une affaire confommée à son égard, parce que volenti non fit injuria. Ainfi ledit Collard doit s'imputer à luimême fa négligence; de forte qu'il n'a plus d'action contre ledit Jeannot.

Troifiémement, quant à ce que ledit fieur Collard dit par fa lettre miffive qu'il peut revenir contre Jeannot, attendu qu'il n'avoit mis que fa fimple figna

ture

ture au dos de la lettre; ainfi qu'elle ne fervoit que d'endoffement & non d'ordre, & qu'il n'a écrit ledit ordre au profit de Jeannot au-deffus de ladite fignature en blanc que le 15 Juin. Et qu'ainfi c'est un moyen pour intenter fon action contre Jeannot. Le fouffigné eftime que ce moyen n'eft d'aucune confidération, parce qu'il fuffit que ledit fieur Collart, après avoir mis fa fignature en blanc, l'ait rempli depuis de fon ordre ; & quand même il fe trouveroit rempli d'une autre main de la fienne, l'ordre feroit bon & valable. C'est une Jurifprudence Confulaire qui ne reçoit aucune difficulté.

que

Quatrièmement, que ledit fieur Collart eft non-recevable en fon action en recours de garantie contre Franciere, qui a paffé l'ordre à fon profit pour les mêmes raifons ci-deffus alleguées.

Cinquiémement, que la femme de Caron, qui a tiré la lettre fur fon mari, n'est point garante de l'évenement d'icelle. La raifon eft qu'une femme en puiffance de mari ne peut s'obliger fans le confentement & autorisation de fondit mari. Ainsi afin ladite femme fût garante, que il faudroit qu'elle eût tiré ladite lettre en vertu d'une procuration de fon mari, qu'il l'eût autorifée de faire valoir les lettres de change qu'elle tiroit fur lui en cas qu'elles retournaffent fur elle à proteft faute de payement; & c'est ce qui ne fe trouve dans la question dont il s'agit. De forte que la lettre qu'elle a tirée eft la même chofe que fi fon mari avoit tire fur lui-même, ou qu'un Commiffaire, qui en cette qualité eût tiré fur fon Commettant, parce qu'il ne fait en cela que les affaires de fondit Commettant, & non les fiennes. Ainfi ni la femme ni le Ceffionnaire ne s'obligent à aucune chose.

Sixièmement, après tout ce qui a été dit ci-deffus, il femble inutile de fçavoir en quelle Jurifdiction Confulaire, ou de Metz, ou de Paris, ou d'Amiens, l'on fera affigner Jeannot en recours de garantie, parce que ledit fieur Collart n'y feroit pas bien fondé pour les raifons ci-deffus alleguées. Néanmoins fi l'on vouloit interter cette action, le fouffigné eftime que ce doit être pardevant les Juge & Confuls de Metz, parce que cette Jurifdiction eft la plus proche du domicile de Jeannot, & de celui du fieur Collart, étant l'usage établi parmi les Cambistes, & même par les Arrêts de la Cour de Parlement de Paris, qui l'ont ainfi reglé en femblables ren

contres.

Délibéré à Paris le 26 Février 1686.

Tome II

ངན

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