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PARERE LXIII.

S'il y a fujet de confifcation lorsqu'un Particulier à qui une Compagnie ( qui a un Privilege de faire certain Commerce maritime à l'exclufion de tous autres, à peine de confifcation) a promis de donner quatre permiffions pour quatre Navires de deux cens cinquante à trois cens tonneaux pour faire une fois ce Commerce, ayant envoyé quatre Navires, dont quelques uns étoient de moindre portée que ce qui eft exprimé dans ces permiffions, trois ans après a envoyé deux autres Navires fans permiffion de cette Compagnie, ou fi les Vaiffeaux ne faisant pas la charge de douze cens tonneaux des permiffions promifes, ces deux Navires peuvent paffer pour l'ac compliffement?

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

LE FAIT.

E 15 Septembre 1679, les Directeurs de l'ancienne Compagnie du Sénégal

&

Le côte d'Afrique, donnerent au fieur Jean du Caffe une délibération portant promeffe de fui délivrer entr'autres chofes quatre permiffions pour quatre Navires de 250 à 300 tonneaux, pour négocier à Gambié, Cacho, & Côte de Guinée, tant Négres que marchandises; lefquels Négres il porteroit aux Isles Françoifes de l'Amérique, pour y être vendus pour fon compte, fans payer aucun droit à la Compagnie; & ce pour demeurer quitte envers ledit fieur du Caffe de la moitié qui lui revenoit, fuivant l'écrit de la Compagnie, du 8 Mars 1678, de la prife & Commerce d'Arquien & du Navire Hollandois nommé le

Triton.

Le 22 Juillet 1681, il y a eu nouvelle Compagnie du Sénégal, & Côte d'Afrique, entre les fieurs Dapoigni, Mefnager, du Čaffe, & autres, en conféquence du Traité qu'ils avoient fait avec l'ancienne Compagnie, pour raifon des Habitations du Sénégal & autres lieux fitués dans la Côte d'Afrique. Ensemble de leur Privilege d'y négocier à l'exclufion de tous autres, tant François qu'Etrangers, à peine de confifcation, & fe font obligés aux charges, claufes & conditions portées par ce Traité.

Le même jour cette nouvelle Compagnie par délibération expreffe a approuvé & promis exécuter le traité ci-deffus de l'ancienne Compagnie, du 15 Septem

bre 1679.

En exécution de cette délibération le fieur du Caffe a envoyé quatre Vaiffeaux, l'Emerillon, le Joly, la Perle, & l'Arc-en ciel, qui ont fait le voyage d'Afriquefur la fin de l'année 1681, pour le compte dudit fieur du Caffe, à l'effet du contenu en la fufdite délibération du 15 Septembre 1679.

Le 16 Juin 1683, ledit Lieur du Caffe ne defirant plus être Intéreffé dans certe

Compagnie, a cédé tous les droits qui lui pouvoient appartetenir dans cette Compagnie, par Contrat paffé pardevant Baudry & fon Compagnon, Notaires au Châtelet, moyennant le prix y porté, avec cette claufe, que c'eft fans préjudice des comptes qui font à regler entre lefdits fieurs Intereffés & ledit fieur du Caffe, pour autres affaires que ce qui concerne ladite Société.

Le 13 Septembre 1683, ledit fieur du Caffe voulant envoyer le Navire la Jolie, du port de 120 tonneaux à la Côte d'Afrique, il a demandé une autre permiffion aufdits Directeurs, qui lui a été accordé fous le nom du fieur du Jardin.

Comme ledit fieur du Caffe prétendoit que l'envoi des quatre Vaiffeaux l'Emerillon, le Joly, la Perle, & l'Arc-en-ciel, qui ont fait le Voyage à la fin de l'année 1681, ne rempliffoit pas la promeffe portée par la fufdite délibération du 15 Septembre 1679, & que la Compagnie prétendoit au contraire que le Voyage de ces quatre Vaiffeaux confommoit entiérement ce qui avoit été promis par cette délibé ration, il fut fait deux chofes:

-La premiere fut un écrit double, par lequel il fut convenu que la permiffion. accordée le même jour pour le Vaiffeau la Jolie, ne pourroit nuire ni préjudicier aux prétentions réciproques des Parties.

La feconde fut fait un billet de 3000 livres payables au porteur, que ledit du Caffe donna pour le prix de cette permiffion, au cas qu'en reglant ces prétentions réciproques il fût jugé que les quatre premiers Vaiffeaux euffent rempli la promesse de la délibération du quinze Septembre 1679, pour être rendu audit fieur du Caffe, au cas qu'au contraire il fût jugé que ladite nouvelle permiffion devoit être pour l'accompliffement de ladite promeffe, portée par délibération du quinze Septembre 1679.

Au mois d'Octobre 1684, ledit fieur du Caffe a fait équiper à Hambourg un Vaiffeau nommé l'Efcureuil, monté par le Capitaine Gagnon, pour le compte d'un Marchand de Hambourg, & a pris une Commiffion & Paffe-port des Magiftrats de Hambourg, & l'a fait partir dudit lieu fous la banniere de Hambourg pour aller au Cap Blanc à ladite Côte d'Afrique, pour y attendre le Navire le faint Joseph, Capitaine Polqui, équippé & partí de Nantes au mois de Novembre fuivant, quoique le Paffe-port de France pour le faint Jofeph, fût pour aller aux Ifles de l'Amérique, & non à la Côte d'Afrique, ce qui eft important d'observer; lefquels deux Navires étoient pour faire le Commerce des Négres, & autres marchandifes qui appartient feul à ladite Compagnie, à l'exclufion de tous autres, à peine de confifcation des Navires & marchandises.

Lefdits deux Navires étant entrés dans la Riviere de Gambié, pour y faire lefdites traites & Commerce, ont été pris & faifis par le Capitaine du Vignau, commandant le Navire la Sereine, de ladite Compagnie du Senegal, le 14 Janvier 1685, & par lui amenées à Gorée, où les Procès verbaux de prife defdits Vaifseaux, & l'inventaire de tout ce qui s'y eft trouvé ont été faits.

Ledit Navire la Sereine, eft venu à Breft, y a amené lefdits deux Vaisseaux, où les Officiers dudit lieu ont fait de nouvelles procedures qu'ils ont envoyées à Monfeigneur le Marquis de Seignelay, au Rapport duquel cette affaire a été renvoyée, & par le Roi pardevant Meffieurs Puffort, Dagueffeau, & Bochet,

leur avis.

pour donner La Compagnie prétend que lefdits deux Vaiffeaux l'Efcureuil & le faint JoJeph font de bonne prife, & qu'ils doivent lui être acquis & confifqués, atten

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du qu'il n'appartient qu'à ladite Compagnie de faire le Commerce d'Afrique, à l'exclufion de tous autres, à peine de confifcation.

Ledit fieur du Caffe prétend au contraire que lesdits deux Vaiffeaux ne peuvent être déclarés de bonne prife, parce que par ladite Délibération du 15 Septembre 1679, lui ayant été promis de lui donner des permiffions pour quatre Vaiffeaux du port de 250 à 300 tonneaux, qui font en tout 1000 à 1200 tonneaux, il a pû envoyer des Vaiffeaux pour négocier à la Côte d'Afrique, autant qu'il lui plairoit, jufqu'à ce qu'il eût rempli ladite quantité de 1200 tonneaux, & que par conféquent les permiffions qui lui ont été accordées ne rempliffant pas les 1200 tonneaux, il a pû envoyer les deux Vaiffeaux en queftion pour y fuppléer. La Compagnie prétend que ledit fieur du Casse est mal fondé en fa prétention. Premiérement, parce que la promeffe de quatre permiffions a été déterminée à quatre Vaiffeaux feulement, & la déclaration de 250 à 300 tonneaux n'a été que pour fixer la capacité des Vaiffeaux, & pour empêcher que ledit fieur du Caffe n'en pût envoyer de plus grande capacité, & cette délibération n'a pas été pour regler

la quantité du commerce à faire.

Secondement, parce que ledit fieur du Caffe ayant cedé tous fes droits qu'il avoit dans la Compagnie aufdits Directeurs, fans aucune réferve, que pour compter pour autres affaires que ce qui concerne ladite Compagnie, s'eft reconnu n'avoir plus aucune prétention pour les permiffions promises.

Troifiémement, parce qu'ayant voulu envoyer le Vaiffeau la Jolie pour fupplé ment de cette promeffe des permiffions, & ladite Compagnie n'ayant pas voulu lui en accorder la permiffion pour le fupplément, il a donne fon billet pour le prix de cette cinquième permiffion, & les prétentions refpectives ont été réfervées. Ainfi tout ce qu'il pouvoit prétendre étoit la reftitution de fon billet, & les défenfes de la Compagnie au contraire.

Quatrièmement, parce qu'il a voulu ufer des voyes cachées, frauduleuses, & prohibées par les Ordonnances, en ce qu'il a employé un Vaiffeau équippé en Pays étranger, avec Commiffion, Paffe-port, & Pavillon étranger, & un Vaiffeau François fous un Paffe-port pour aller aux Ifles de l'Amérique ; en quoi il a commis une fauffeté, & a reconnu qu'il ne pouvoit pas faire le Commerce d'Afrique à découvert, & tous ces faits font incontestablement prouvés par les pieces du procès. L'on demande avis fur la conteftation ci-deffus..

Les fouflignés qui ont pris lecture du Mémoire ci-deffus, & les copies des pieces y mentionnées, eftiment que la Compagnie du Sénégal eft bien fondée en fa demande en confifcation, parce qu'il paroît vifiblement par les termes de la délibération du 15 Septembre 1679, que la promeffe de donner des permiffions audit fieur du Caffe pour faire le négoce d'Afrique, n'a été que pour quatre Vaiffeaux feulement, & non pour plus grand nombre; car elle porte en termes formels quatre Permiffions pour quatre Vaiffeaux de 250 à 300 tonneaux. Que files Parties euffent entendu regler cette permiffion par la quantité des tonneaux, l'on n'auroit pas déterminé le nombre des Vaiffeaux à quatre; l'on auroit dit un ou plufieurs Vaiffeaux jufqu'au port de 1200 tonneaux en tout ce qui n'ayant pas été exprimé ainfi, il faut s'attacher aux termes de la premiere convention, & ne pas affembler ce que les Parties n'ont pas affemblé ; que fi ledit fieur du Caffe a envoyé fous fes permiffions quelques Vaiffeaux de moindre port, c'eft à lui à fe l'imputer, de même que: les Négocians qui font venir des balles de marchandifes de moindre poids, ou de

:

moindre qualité que ce qui eft porté par les Tarifs, font pourtant obligés de payer les droits fixés pour la balle, fans que l'on leur diminue à proportion de ce qui manque, ni que l'on leur impute ce qui excede fur d'autres balles, quand le Tarif porte que celles qui excederont, payeront pour balle & demie.

Et comme l'Acte de ceffion des droits que ledit fieur du Caffe avoit dans la Com pagnie du Sénégal, eft poftérieur à l'envoi des quatre Vaiffeaux, & qu'il eft général pour tous les droits qu'il avoit dans ladite Compagnie, dont fans doute le droit d'ufer du privilege de cette Compagnie en pouvoit être un, fi la délibération du 15 Septembre 1679 n'avoit pas été remplie, il auroit été abfolument néceffaire pour le conferver audit fieur du Caffe d'en faire une réserve expreffe, fans quoi il eft certain qu'il auroit été cedé, par la raifon que qui cede tout ne retient rien. Et l'on ne peut pas prétendre que ce prétendu droit des permiffions foit réfervé par la caufe, fans préjudice des comptes qui font à regler; car étant dit pour autres affaires que ce qui concerne ladite Société, cette réferve ne comprend point la prétention des permiflions, puifqu'elle regarde la Compagnie, ce qui produiroit une fin de non

recevoir.

Et en 1683, quatre années après ladite délibération du 15 Septembre 1679, ledit heur du Caffe ayant une prétention pour faire revivre ladite promeffe des permiffions, & ladite Compagnie en étant formellement difconvenu, il falloit avanttoutes chofes que ledit fieur du Caffe fît regler ce differend, & qu'il demandât la reftitution de fon billet, & jufqu'à ce que cela eût été fait, il ne pouvoit pas prétendre ufer de cette ancienne promeffe de permiffions, & encore moins fans venir prendre une permiffion de ladite Compagnie, de même qu'il avoit fait pour le Vaiffeau la Jolie.

Et d'ailleurs du Caffe ayant fait le Commerce par des voyes cachées, en fe fervant du Pavillon de Hambourg, & furprenant le congé de l'Amirauté fous une fauffe destination, contre la difpofition de l'Article III. du Titre X. de l'Ordonnance du mois d'Août 1681 pour la Marine, il a bien jugé qu'il ne pouvoit pas obtenir une permiffion gratuite, & en vertu de ladite délibération du 15 Seprembre 1679, c'eft pourquoi ayant voulu faire ce commerce en fraude de cette Compagnie & fous le nom des Etrangers, à qui il eft prohibé, il ne peut éviter la 、 confifcation que les Lettres Patentes du Roi ont ordonnée au profit de ladite Com pagnie en cas de contravention ; & fi cela n'étoit ainfi, fon privilege ne lui ferviroit de rien.

Délibéré à Paris le 27 Mars 1686.

SAVARY ET DUPUIS DE LA SERRAT

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PARERE LXIV.

Si une Lettre de Change qui a été remife par un Banquier à un Négociant fur Livourne, eft pour lui en tenir compte? Ou fi c'eft à compte de bleds, qui devoient être délivrés à ce Négociant à Palerme, fuivant le mandement de Change du Banquier qui avoit été protefté faute de délivraifon defdits bleds? Ou bien encore, fi cette Lettre a été remife à ce Négociant pour de la Vaiffelle d'argent qu'il prétendoit avoir vendue ou Laiffée ès mains du Banquier lors de fon départ de Meffine?

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AVERTISSEMENT.

Ly avoit procès au Parlement en la quatrième Chambre des Enquêtes, entre de Larra, appellant d'une Sentence des Juge & Confuls de Paris, d'une part; & Giarella, Intimé, d'autre, duquel Monfieur Bignon étoit Rapporteur. Mondit fieur Bignon voyant que cette affaire étoit finguliere & difficile à décider pour plufieurs circonftances qui s'y rencontroient, qui regardoient le commerce des lettres de change, qui n'étoit gueres connu que par les Négocians & Banquiers, me fit l'honneur de me demander mon avis fur cette affaire; & pour cela il ne fe contenta pas feulement de me dire le fait & les raifons des Parties, avec beaucoup de netteté, mais encore de me confier le procès pour voir les pieces qu'il avoit alleguées dans fon dire. De forte qu'après avoir vû & examiné lefdites pieces, je dreffai mon avis que je me donnai l'honneur de porter à mondit fieur Bignon. Et comme cette affaire eft affez finguliere, j'ai jugé à propos de la mettre en ce lieu au rang

Pareres.

Le differend des Parties fe réduit à trois chofes.

de mes

Premiérement, fi la lettre de change de 950 piaftres onze fols de huit Reaux en question, qui a été remise à de Larra fur Livourne, est pour en tenir compte à Giarella.

Secondement, ou fi cette lettre a été remife à de Larra, à compte de 456 falmes de bleds, qui lui devoient être livrés à Palerme par Cemeca, fuivant le mandement de Change de Giarella, qui avoit été proteftée fur ledit Cemeca, faute de livraison de ladite quantité de bleds?

Troifiémement, ou bien fi ladite lettre de change a été remife à de Larra pour la valeur de la Vaiffelle d'argent qu'il prétend avoir vendue ou laiffée ès mains de Giarella, lors de fon départ de Meffine.

A l'égard de la premiere chofe, la lettre de change porte fimplement pour la va leur en moi-même. Ces termes marquent qu'il y avoit eu quelque commerce entre Giarella & de Larra; car valeur en moi-même veut dire que Giarella avoit de l'argent, marchandifes ou autres effets entre les mains, dont il étoit débiteur envers de Larra, car autrement il n'auroit pas mis ces mots pour la valeur en moi-même mais feulement ceux-ci, ladite quantité de piaftres fera bien payée; & en ce cas il n'y a pas de difficulté qu'elle n'auroit été remife à de Larra que pour en

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