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fée appartenir à ladite veuve Coullard & Vanopftal. Et qu'ainfi elles pouvoient être faifies par leurs créanciers & compenfées par leurs redevables, fuivant les Articles XXIII. XXIV. & XXV. de l'Ordonnance de 1673, ci-devant alleguée. De forte que Laillier n'ayant point reçu la valeur defd. lettres de la veuve Coullard & Vanopftal, elles devoient être vendues & reftituées par Gillot. Sur quoi feroit intervenu Sentence le 21 Juillet 1679, par laquelle fans avoir égard à tout ce qu'avoit dit & allegué Gillot, lefdire Jug & Coniuis auroient renvoyé Laillier & les Chicoifneaux abfous de la demande de Gillot, & en conféquence l'auroient condamné à leurrendre les deux avals qu'ils lui avoient baillés. A quoi faire & en cas de refus, con- · traint par corps, & aux dépens de l'instance...

Ledit Gillot auroit interjetté appel de cette Sentence au Parlement de Paris, où la cause ayant été appointée & diftribuée à Monfieur Hervé Confeiller, la Cour par Ar- rêt du premier Février 1681, auroit ordonné entr'autres chofes, que fix Marchands, dont les Parties conviendroient, donneroient leur avis de la maniere en laquelle fe faifoit la négociation des lettres de change depuis l'Ordonnance de 1673, au fujet des ordres & des endossemens qui se mettent fur les lettres de change & fur l'exécution des Articles XXIII. XXIV. & XXV. du Titre V. de ladite Ordonnance, s'il Y avoit un ufage contraire à iceux, & s'il étoit utile au Public, dont il feroit dreffé procès verbal par ledit fieur Confeiller, pour ce fait rapporté, être ordonné ce que de raifon. L'avis defdits fix Négocians auroit été que les Articles XXIII. & XXV. · de ladite Ordonnance, étoient en ufage en ce qui concernoit les fignatures en blanc feulement; mais que les billets ou lettres de change qui étoient remplis d'ordres avec valeur reçue, quoique fans datte, avoient toujours été réputés appartenir à celui du nom duquel l'ordre s'en trouvoit rempli, & que le XXIVe Article étoit de tout tems obfervé & s'obferveroit encore, comme très-utile & néceffaire au * Commerce...

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La Cour nonobftant l'avis defdits fix Négocians, par fon Arrêt diffinitif du 21 Mars 1681, auroit mis l'appellation au néant, ordonné que ce dont avoit été appellé fortiroit effet, & feroient les Articles XXIIL XXIV. & XXV. du Titre V. de l'Ordonnance concernant les lettres & billets de change exécutés, Fait défenses à toutes perfonnes d'y contrevenir. Condamne ledit Gillot à une amende de douze livres, & aux dépens. Et feroit à la diligence du fubftitut de Monfieur le Procureur Général au Châtelet de Paris, ledit Arrêt lû & publié aux Audiences des Préfidiaux : defdits Châtelets, & affiché à la porte du Change de cette Ville de Paris. Ce qui au

roit été exécuté.

Or l'on voit que par cet Arrêt la Cour a jugé de rigueur fuivant le Texte de l'Ordonnance, que les ordres paffés au profit de Gillot, quoique caufés pour valeur reçue de lui, en argent comptant, étoient néanmoins nuls, faute d'avoir éré dattés fuivant l'Ordonnance. La nullité jugée fur le feul & unique défaut de la datte, par lequel défaut de datte ne fe pouvoit connoître fi les ordres étoient avant ou après le tems de la faillite de la veuve Coullard & Vanopftal. La Cour a jugé que l'on avoit affecté de ne pas datter les ordres pour laiffer les chofes dans l'obfcurité & dans l'incertitude, fi les ordres étoient devant ou après la faillite; & que cette affectation de ne point datter lefdits ordres n'avoit eu autres motifs que de cacher que les ordres avoient été mis depuis la faillite, & la fraude qui étoit faite en cela aux créanciers, en mettant par ladite veu

ve Coullard & Vanopftal lefdites lettres de change à couvert fous le nom de Gillot depuis leur faillite. Et ce qui eft encore de plus à remarquer en cet Arrêt, est que la Cour ne s'eft point arrêtée à ce que lesdits fix Négocians avoient dit dans leur avis que les ordres caufés pour valeur reçue argent comptant & fignés, étoient reçûs quoique non dattés. Mais la Cour a paffé par-deffus cet avis, auquel elle a préféré le Texte de l'Ordonnance, qui déclare les ordres nuls faute de datte, & jugé quel'Ordonnance devoit être exécutée contre Gillot, quoiqui favorisé par l'avis defdits fix Négocians, & que Gillot devoit s'imputer d'avoir pris des ordres fans datte. Et la Cour a jugé que le faute de date étoit une fraude affectée pour empêcher qu'on ne connût que les ordres étoient paffés depuis la faillite de la veuve Coullard & Vanopftal, & la Cour l'a jugé poftérieur à la faillite, faute d'avoir mis des dattes aufdits ordres, qui avoient fait voir qu'ils étoient antérieurs; & par cette raifon la Cour a jugé les ordres nuls comme paffés depuis la faillite de ladite veuve Coullard & Vanopstal.

Sur la troifiéme Queftion.

Le fouffigné eftime que pour toutes les raifons ci-deffus alleguées fur la deuxième queftion; que les ordres paffés au dos des deux lettres en question par Jacob Natan, n'étant point dattés, font préfumés avoir été faits depuis la banqueroute, en fraude de fes créanciers. Quoiqu'il en foit l'Arrêt ci-deffus allegué décide entierement la question; & partant il n'y a aucun doute que les lettres de change dont il s'agit, font cenfées appartenir audit Jacob Natan. Ainfi lefdits Beffon & Compagnie font bien fondés à demander la compenfation de la lettre de change que leur a fournie & tirée ledit Juif fur fon Correfpondant de Paris, & qui n'a point été payée & acquittée avec lefdites deux lettres qui ont été fournies audit Juif par ledit Beffon & Compagnie fur eux-mêmes; cela ne pouvant être une difficulté, puifque la quetion a été jugée par un fimple Arrêt, & même cela eft jugé de même par toutes les Jurifdictions Confulaires & Parlemens de France, y ayant eu un Arrêt rendu par le Parlement de Rennes en pareils cas, même avant celui du Parlement de Paris, ci-deffus allegué. Délibéré à Paris le 23 Avril 1688.

PARERE

PARERE LXXII.

Si un Commettant, fa veuve, ou fes héritiers, peuvent objecter la prefcription de cing années portée par l'Article XXI. du Titre V. de l'Ordonnance de l'année 1673, contre un Commiffionnaire pour le remboursement par lui prétendu d'une Lettre de Change tirée fur lui, & par lui acquittée suivant les ordres du Commettant, que le Commiffionnaire a omis de mettre dans le débit ou dépenfe du compte de commiffion qu'il lui a envoyé?

It E fouffigné qui a pris lecture & mûrement examiné un Mémoire qui lui a été communiqué, eft d'avis, que la prescription portée par l'Article XXI. de l'Ordonnance du mois de Mars 1673, n'a point de lieu dans le cas dont il s'agit entre Pierre Commiffionnaire, & la veuve & héritiers de Jacques fon Commettant. En voici la difpofition: Les billets ou lettres de change feront réputés acquittés après cinq ans de ceffation de demande & poursuites, à compter du lendemain de l'échéance, ou du proteft, ou de la derniere pourfuite; néanmoins les débiteurs feront tenus d'affirmer, s'ils en font requis, qu'ils ne font plus redevables, & leurs veuves & héritiers, ou ayans caufe, qu'ils eftiment de bonne foi qu'il n'eft plus rien dû. Or toutes des difpofitions de cet Article ne regardent feulement que les porteurs de lettres de change qui ont des actions à intenter tant contre ceux fur qui elles font tirées, soit qu'ils les ayent acceptées ou non, contre ceux qui ont paffé les ordres à leur profit, que contre ceux qui ont tiré les lettres de change. Par exemple, Jean de la Ville de Paris tire une lettre de change de mille livres fur François de la Ville de la Rochelle, payable à ufance à Guillaume, ou à fon ordre, Guillaume paffe fon ordre au dos de cette lettre de change au profit de Thomas, à l'échéance. Thomas la fait protefter fur François de la Rochelle faute de payement, & enfuite il fait dénoncer le proteft à Guillaume fon donneur d'ordre, & à Jean tireur de la lettre, & fait donner féparément à l'un & à l'autre affignation en recours de garantie pardevant les Juge & Confuls du lieu de leurs domiciles; ce faifant fe voir condamner à lui payer le contenu en la lettre, frais de proteft, change & rechange, où il obtient des Sentences de condamnations à l'encontre d'eux; & en vertu d'icelles Sentences il leur fait des commandemens de payer, & autres procedures: Et après toutes ces diligences, Thomas porteur de cette lettre, demeurera dans le filence pendant cinq ans fans faire aucune pourfuite tant contre François l'accepteur, & Guillaume qui a paffé l'ordre à fon profit, que contre Jean tireur de la lettre. Il eft certain qu'après le tems de cinq ans ladite lettre eft prefcrite, & que Thomas porteur d'icelle, eft non-recevable d'en demander le payement, ni à François l'accepteur, ni à Guillanme l'endoffeur, ni à Jean le tireur; parce qu'aux termes de l'Ordonnance ci-deffus alleguée, ladite lettre eft réputée acquittée par ou par l'autre des fufdits nominés. Et fuppofé que François, fur qui la lettre auTome II.

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354 roit été tirée par Jean, ne l'eût point acceptée, & que Thomas porteur d'icelle, rie l'eût point fait protefter fur lui, & qu'il eût été cinq ans fans lui faire aucunedemande en Justice de la fomme de 1000 livres mentionnée en la lettre, il eft encore certain que ledit Thomas après cinq ans paffés, à compter du lendemain de l'échéance de ladite lettre, y feroit non-recevable en fon action pour les mêmes raifons ci-deffus alleguées.

Il n'en eft pas de même, de la lettre de change de 1000 livres dont il s'agit: car elle n'eft pas dans le cas ci-deffus allegué, parce que ce n'eft pas celui au profit duquel elle eft tirée par François & Martin freres & fils de Jacques le Com-mettant, fur Pierre fon Commiflionnaire, ou celui à qui l'ordre a été paffé, qui demande à Pierre le contenu en la lettre en queftion: mais c'eft Pierre le Commiffionnaire qui l'a acceptée & payée fuivant l'ordre qui lui a été donné par Jacques fon Commettant, par fa lettre miffive qui tenoit un compte ouvert fur fes livres des traites & remifes qui lui étoient faites par Jacques, ou par fes ordres, ledit Pierre, ou celui qui tenoit fes livres, n'a point fait débiteur Jacques dans fon compte de la fomme de 1000 livres contenue en la lettre de change en queftion. Ainfi lorfqu'il a compté avec Jacques de fa geftion active & paflive de fa commif fion, il a auffi obmis à mettre dans le débit (c'est-à-dire, en termes de Justice, dans la dépenfe) des comptes qu'il lui en a donnés qui ont été arrêtés entr'eux en divers tems.

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Or s'agiffant entre les Parties de cette omiffion de dépenfe dans les fufdits comptes, il eft certain qu'elle ne fe peut couvrir que par trente ans, & non pat les cinq ans portés par l'Ordonnance de 1673, quoique ce foit une lettre de change; parce que la queftion n'eft pas dans le cas de l'Ordonnance, comme il a été montré ci-dessus : il en feroit de même fi Jacques le Commettant avoit fait une remife de 1000 livres, ou autre fomme à Pierre fon Commiffionnaire, & ledit Pierre eût omis à mettre cette fomme dans le crédit (c'est-à-dire, en terme de Juftice, dans la recette des comptes qu'ils ont faits enfemble) cette omiflion ne fe pourroit couvrir que par trente ans, quoique la remife ait été faite en la lettre de change. De forte que la veuve & héritiers de Jacques auroient une action pour demander à Pierre le payement de cette fomme de 1000 livres, pourvû que l'action fût intentée dans les trente ans, & Pierre n'auroit raifon quelconque pour s'empêcher de payer cette fomme à la veuve & héritiers de Jacques, d'alleguer la prefcription portée par l'Ordonnance de 1673. Ainfi par la même raifon il ne fert à rien à la veuve & héritiers de Jacques le Commettant, d'alleguer contre Pierre, la prefeription & fin de non-recevoir portée par la fufdite. Ordon

hance.

Il faut obferver une chofe importante pour la décifion du différend des Parties, qui eft que la lettre de change en queftion, ne pourroit produire l'effet de la prefcription & fin de non-recevoir par les cinq ans portés par l'Ordonnance, que contre celui au profit duquel elle a été tirée par lefdits François & Martin pour le compte de Jacques le Commettant, fi elle n'avoit point été acquittée par Pierre le Commiffionnaire: fi celui, dis-je, au profit duquel la lettre eft tirée, revenoit après les cinq ans, à intenter fon action contre la veuve & héritiers dudit Jac ques, pour les raifons ci-deffus alleguées. Or en l'affaire dont il s'agit, la lettre de change en queftion, ne doit point être confiderée à l'égard de Pierre le Commiflionnaire, pour produire l'effet de la prefcription & fin de non-recevoir des

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cinq ans portés par l'Ordonnance. Mais il faut confidérer fimplement la lettre miffive écrite par Jacques le Commettant à Pierre fon Commiffionnaire, par laquelle il luż mande d'accepter & payer la lettre de rooo livres, qui feroit tirée fur.lui par François & Martin pour fon compte, & qu'il luien tiendroit compte fur les affaires qu'ils faifoient enfemble, parce que cette lettre miffive de Jacques eft le titre de Pierre, en vertu duquel il a payé & acquitté ladite lettre pour le compte de Jacques & non pour celui de François & Martin tireurs d'icelle, & en vertu de laquelle let tre miffive ledit Pierre a intenté fon action contre ladite veuve & héritiers de Jacques fon Commettant. Car la lettre de change ne produit autre effet à fon égard que pour juftifier par le récépiffé qui eft au dos d'icelle, qu'il l'a payée au porteur d'icelle. Or il eft conftant que cette lettre miffive de Jacques portant promeffe, doit être confi derée de même qu'un billet ou une promeffe fous lignature privée de Jacques, pour raifon de laquelle il a trente ans pour intenter fon action contre ledit Jacques, ou contre fa veuve & héritiers, cela étant dans le droit commun.

Par toutes les raifons ci-dessus alleguées, le fouffigné estime que les Juge & Confuls de Nantes ont bien jugé par leur Sentence, & que ladite veuve & héritiers de Jacques le Commettant font mal fondés en l'appel par eux interjetté de ladite Sentence au Parlement de Rennes, & qu'ils en feront déboutés & condamnés l'amende & aux dépens.

Délibéré à Paris le 26 Avril 1688.

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PARERE LXXIII.

1. Si un tireur de Lettre de Change, lorsqu'on revient fur lui pour le remboursement du contenu en la lettre, faute d'acceptation & de payement à l'échéance, eft bien fondé à demander la compenfation dudit remboursement à celui au profit duquel il a tiré la lettre, qui ne lui en a donné la valeur qu'en une ou plufieurs autres Lettres de Change de femblable ou moindre valeur, lesquelles n'ont point été pareillement acceptées ni payées à leur échéance?

H. Quelles formalités doit obferver ce tireur pour pouvoir demander valablement em Juftice la compenfation par lui prétendue ?

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MÉMOIRE POUR CONSULTER.

LE FAIT.

E 17 Janvier 1688 le freur Anne de Couftart, réfidant préfentement à Metz, tiré trois lettres de change fur le fieur Monmarqué, Caiffier Général de la Ferme de Langres demeurant à Paris; la premiere de la fomme de 3500 livres, la feconde de 3000 livres, & la troifiéme de 1500 livres, payables à deux jours de vûe à Jacob Natan de Hambourg, Juif, de la Ville de Metz, ou à fon ordre valeur reçue de lui.

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