Imágenes de páginas
PDF
EPUB

cians, que pour négocier plus facilement les billets, fans qu'il foit befoin de ceffion & tranfport, parce qu'un ordre paffé au dos d'une lettre ou billet de change, portant valeur reçue en deniers comptans, marchandifes ou autres effets, a le même effet qu'une ceffion & tranfport; & même cet ufage de mettre fur les billets & lettres de change payables à ordre, ne fe pratiquoit point avant l'année 1620 n'y ayant point d'Auteurs qui ayent traité des matieres de lettres & billets de change avant ladite année 1620, qui en ayent parlé. Ainfi il est constant que le billet en queftion eft un billet de change, puifqu'il en a la forme comme il a été dit. ci-deffus.

par

Sur la feconde Queftion.

Qu'avant l'Ordonnance de 1673, les lettres & billets de change ne fe prefcrivoient que par trente ans, de même que les autres billets & promeffes qui fe faifoient dans le Commerce. Mais comme en matiere de lettres & billets de change tout eft fommaire, tant dans la conception d'iceux, des tems dans lefquels ils font payables, que des tems dans lefquels les diligences doivent être faites pour en tirer payement, & que d'ailleurs le tems de trente ans pour en acquerir la prescription caufoit beaucoup d'inconvéniens dans le Commerce qui troubloient les familles, comme l'on peut voir dans le Parfait Négociant; il a fallu que Sa Majesté y ait remedié par fon Ordonnance de 1673, en abrogeant la prescription de trente années, & la réduifant à cinq années feulement, comme il eft porté l'Article XXI. du Titre V. de ladite Ordonnance. Ainfi le billet en question étant un billet de change fait le 9 Août 1664 eft prefcrit, & par conféquent Antoine eft mal fondé en fon action de demander le 7 Septembre 1687, le payement de la fomme de 600 livres pour le reftant des 1100 livres mentionnées audit billet,& il en doit être débouté & condamné anx dépens. Mais il faut obferver que la prefcription de cinq ans dudit billet ne court que depuis l'enregistrement de ladite Ordonnance au Parlement de Paris, qui eft du 23 Mars 1673. De forte que fi Antoine avoit intenté fon action contre Jean dans les cinq -ans, à compter du lendemain dudit enregistrement, il n'y a pas de doute qu'il eût été bien fondé en fon action, parce qu'avant l'Ordonnance jufqu'au jour de l'enregistrement d'icelle la prefcription des lettres & billets de change n'étoit point acquife qu'après trente ans, comme il a été dit ci-deffus. Mais depuis ledit jour de l'enregistrement, quoique lefdites lettres & billets foient faits & conçûs avant l'enregiftrement de ladite Ordonnance, néanmoins la prescription de cinq ans court depuis ledit enregistrement de l'Ordonnance; cela ne reçoit aucune difficulté, & cette question a été jugée plufieurs fois en la Jurifdiction Confulaire & au Parlement de Paris. Ainfi l'allégation faite par Antoine qu'il n'y a que pour les billets qui font faits depuis l'Ordonnance, dont la prescription eft de cinq ans, & non pour ceux qui font faits avant l'Ordonnance, cette allégation, dis-je, ne fert à rien, parce que l'intention de l'Ordonnance est aixant pour les billets faits avant, que pour ceux faits depuis icelle, afin de faire ceffer tous les differends & conteftations qui pourroient arriver tant pour le paffé que pour l'avenir, pour raifon des billets & lettres de change dont l'on n'intentepas F'action dans les tems portés par ledit Article XXI. du Tiere V, de ladite

roit

Ordonnance. En effet, quelle apparence y a-t-il, le billet de 1100 livres en question étant du 9 Août 1664 payable à volonté, & à bon compte duquel Antoine a reçu 500 livres le 15 defdits mois & an, qu'il ait attendu jufqu'au 7 Septembre 1687 qui font 24 ans, fans demander le payement des 600 livres reftans à Pierre fils & héritier ? Pourquoi a-t-il attendu trois ans après la mort de Jean à faire cette demande ? Et pourquoi non de fon vivant? Cela paroît de mauvaise foi. Ainfi l'on voit que l'Ordonnance a fagement pourvû à ces inconvéniens. Il en feroit pourtant autrement, fi au lieu de faire un compte verbal entre lesdits Antoine & Jean, ils en euffent fait un par écrit en débit & crédit, & que ledit Antoine eût obmis à paffer dans le débit de Jean ladite fomme de 600 livres; car en ce cas il n'y auroit point de prefcription ni de cinq ans, ni même de trente ans, parce qu'une omiffion de recette ou de dépense ne fe couvre point, non plus que l'erreur de calcul double & faux emploi dans un compte.

Sur la troifiéme Queftion

Que Pierre eft bien fondé à demander à Antoine la représentation du double du compte verbal qui eft entre fes mains, figné de Jean, pour voir & connoître s'il eft de la même ou d'une autre datte que celle que rapporte Jean, parce qu'il

fe

peut faire que l'on s'eft trompé dans la datte de celui que rapporte Jean, qu'il prétend être du 24 Mars 1665, auquel jour il l'a écrit fur fon livre, & non du 24 Mai 1664. Et en effet, il n'y a nulle apparence que Jean ait écrit fur fon livre ledit compte verbal le 24 Mars 1665 s'il eft du 24 Mai 1664. Quoiqu'il en foit, ledit Antoine doit repréfenter le double qu'il a entre fes mains figné de Jean.

Sur la quatrième Queflion.

Que Pierre eft encore bien fondé à demander à Antoine la représentation de fes livres, pour voir de quel jour, de quel mois & de quelle année il a écrit fur iceux la fomme de 175 livres qu'il a payée à Jean, & qu'il a écrit fur iceux le compte verbal qu'il a fait avec Jean. Car il faut que les livres d'Antoine & de Jean fe rapportent les uns aux autres, s'ils font bien réguliérement tenus, parce que les livres d'un Marchand ou Banquier font comme une histoire journaliere de tout fon commerce & de toutes les affaires. Et fi Antoine refufe de repréfenrer fes livres, & le double du compte verbal fait entre lui & Jean, c'est une marque de fa mauvaise foi, parce qu'ils fervent à fa conviction. De forte que ne repréfentant pas fes livres ni le double dudit compte verbal, il n'y a pas de doute que le livre de Jean doit être cru, & l'on y doit ajoûter foi contre Antoine, parce que Pierre paroît de bonne foi de s'en rapporter au livre d'Antoine, & au double dudit compte verbal figné de Jean, qui eft entre fes mains. C'eft pourquoi il ne doit pas refufer de les repréfentet en Juftice.

Le fouffigné eftime que fi Pierre demande à Antoine la représentation dudit compte double & de fes livres, ce ne doit être que par exuberance de droit Eeee iij

[ocr errors]

& fans fe départir de la prefcription par lui alleguée du billet en question, & qu'il fera encore mieux de s'arrêter à ce feul moyen, parce qu'il eft indubitable, & que les Juge & Confuls de Nantes ne peuvent juger autrement, fuivant l'Article VI. du Titre I. de l'obfervation des Ordonnances de l'Ordonnance du mois d'Avril 1667, dont voicila difpofition: Voulons que toutes nos Ordonnances, Edits, Déclarations, Lettres Patentes, foient obfervés tant au Jugement des procès, qu'autrement, fans y contrevenir, ni que fous prétexte d'équité, bien public, ou accélération de la Justice, ou de ce que nos Cours auroient à Nous repréfenter, Elles ni les autres Juges s'en puiffent difpenfer, ou en moderer les difpofitions, en quelque cas ou pour quelque autre cause que ce foit. Et l'Article VIII. porte: Déclarons tous Arrêts & Jugemens qui feront donnés contre la difpofition de nos Ordonnances, Edits & Déclarations, nuls & de nul effet & valeur, & les Juges qui les auront rendus, refponfables des dommages & intérêts des Parties, ainfi qu'il fera par Nous avifé. Ainfi fuivant ces difpofitions les Juge & Confuls de Nantes doivent juger la queftion, conformément à l'Article XXI. du Titre V. de l'Ordonnance de 1673, & s'ils jugeoient autrement, leur Sentence feroit nulle & de nul effet, & ils pourroient être pris à partie, & condamnés aux dommages & intérêts de Pierre.

Délibéré à Paris le 5 Août 1688.

[blocks in formation]

I. Si une Société collective entre deux Négocians fe peut prouver autrement que par un Acte, foit fous feing privé, ou pardevant Notaires? Et fi une acceptation mife fous deux noms au bas d'une Lettre de Change,eft une preuve fuffifante pour prétendre qu'il y ait aucune Société collective entre celui qui a figné l'acceptation, & celui dont l'ac cepteur a mis le nom collectivement avec le fien?

II. Si une Left qui n'eft point tirée de place en place, & où le nom de celui au profit du quel elle est tirée n'eft point exprimé, doit être réputée une Lettre de Change?

III. Si l'acceptation faite d'une Lettre de Change fous deux noms, peus obliger folidairement au payement de ladite lettre celui des deux qui n'a point figné l'acceptation, comme étant affocié de celui qui l'a figné ?

[ocr errors]

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

Ly a conteftation entre Jacques & Paul, pour raifon des trois lettres de change ci-deffous tranfcrites.

A Anvers 24 Janvier 1686. Pour 170 livres.

A trois ufances, payez par cette premiere Lettre de Change à l'ordre de moi fouffigné, dans Anvers cent foixante-dix livres de gros, & paffez-les à compte, fuivant l'avis de

A Meffieurs Pierre & Paul,

Marchands à Nantes.

JACQUES.

Accepté au domicile de François,
PIERRE & PAUL.

A Anvers, 20 Janvier 1686. Pour 200 livres.

[ocr errors]

A deux ufances & demi, payez par cette ma premiere de change dans Anvers l'ordre de moi fouffigné, la fomme de deux cens livres de gros, & paffez-les à compte, felon l'avis de

A Meffieurs Pierre & Paul;

Marchands à Nantes.

JACQUES.

Accepté au domicile d'Alexandre,
PIERRE & PAUL.

A Anvers, le 6 Avril 1686. Pour 500 écus.

A deux ufances & demi, payez par cette premiere Lettre de change, dans Paris, à l'ordre de moi fouffigné, la fomme de cinq cens écus, que pafferez à compte de

A Meffieurs Pierre & Paul,
Marchands à Nantes.

JACQUES.

Accepté au domicile de Jooris,
PIERRE & PAUL.

LE FAIT.

Pierre Marchand de la Ville de Gand en Flandres, qui a accepté les trois lettres de change ci-deffus tranfcrites à Anvers, fous les noms de Pierre &Paul, a fait faillite le 25 Mai 1686.

Au mois de Juillet 1688 Jacques le tireur a fait affigner pardevant les Juge & Confuls de Nantes, Paul, pour fe voir condamner à lui payer le contenu aux fufdites trois lettres de Change, attendu qu'il étoit l'affocié de Pierre. De forte que Pierre ayant accepté lefdites trois lettres de change fous les noms de Pierre & Paul, il a obligé folidairement avec lui Paul.

Paul dit pour défenfes qu'il n'y a jamais eu de fociété entre Pierre & lui; ainsi qu'il ne fert à rien qu'il ait figné fon nom & celui de Paul, & que ces fignatures ainfi faites par Pierre, ne l'obligent point au payement du contenu efdites trois lettres, & d'autant moins que les protefts ont été faits à Pierre, & non à lui Paul, qui n'a jamais eu connoiffance de cette négociation.

A quoi Jacques réplique, qu'il eft conftant qu'il y avoit eu une fociété collective entre Pierre & Paul: Que ce fait eft prouvé, 1°. par plufieurs lettres de change que Paul a tirées fur Pierre, payables à diverses perfonnes, qu'il a fignées Paul & Pierre, qui eft le nom focial d'une fociété collective. 2°. Que le 7 Mars 1684, Paul tira de la ville de Gand une lettre de change fur lui Jacques, en ces termes : A deux ufances, payez par cette premiere lettre de change, à l'ordre de nous fouffignés, deux mille florins, valeur en vous-même, que pafferez à votre compte, fuivant l'avis de Pierre & Paul, laquelle lettre ledit Paul a paffée au crédit de Jacques; ainfi ledit Paul a reconnu par-là la fociété qui étoit entre lui & Pierre de Gand.

A quoi Paul répond: 1°. Qu'il eft vrai qu'il a tiré quelques lettres de change fur Pierre payables à des Particuliers, qu'il a fignées Paul & Pierre ; mais que c'eft Pierre, lorfqu'il quitta la ville de Nantes, pour aller demeurer à Gand, qui permit à lui Paul de figner fon nom avec le fien, pour lui donner crédit: mais que Pierre ayant laiffé protefter lefdites lettres de change, que lui dit Paul les avoit rembourfées à ceux qui en étoient porteurs. De forte que cela ne prouve point qu'il y ait eu une fociété collective entre lui & Pierre.

2°. Que Jacques & lui Paul faifoient négoce enfemble, lequel Jacques étant venu à Nantes, lui Paul tira fur lui une lettre de change de 2000 livres, fur 4800 livres qu'il lui devoit, laquelle il auroit acceptée; mais à l'échéance ledit Jacques lailla protefter ladite lettre fur lui, De forte que n'ayant point

d'argent

« AnteriorContinuar »