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à Willaume dudit billet, & les dénonciations qu'il en a faites ou dû faire à Timothée & à Charles, comme auffi les pourfuites qu'il leur a faites ou dû faire dans le tems de l'Ordonnance; comme auffi de faire appeller Pierre en recours de garantie dans le même tems de l'Ordonnance; & pour ne l'avoir pas fait, fi ledit Jacques eft non-recevable en fon action contre Pierre ?

Le fouffigné qui a pris lecture du billet, des ordres qui font au dos d'icelui, & de l'écrit, dont copies font tranfcrites dans le Mémoire ci-deffus, & exactement examiné les raifons des Parties y mentionnées, eft d'avis, fçavoir:

Sur la premiere Question..

que

Que le porteur d'un billet eft tenu indifpenfablement de faire fes diligences contre le débiteur dudit billet dans dix jours, à compter après celui de l'échéance d'icelui, s'il eft conçu pour valeur reçue en deniers ou en lettres de change qui auront été fournies, ou qui le devront être, & dans trois mois, s'il eft conçû pour marchandifes ou autres effets, conformément à l'Article XXXI. du Titre V. de l'Ordonnance du Commerce, du mois de Mars 1673, les diligences portées. par l'Article ne font autre chofe qu'un fimple Exploit de fommation fait le porteur au débiteur du billet de lui en payer le contenu, & non un proteft, parce qu'un proteft ne fe fait qu'en matiere de lettres & billets de change par un Exploit ou par un Acte fait par un Notaire, par lequel l'on fomme l'accepteur d'une lettre de change de payer au porteur le contenu en icelle, & au refus l'on protefte qu'il prendra de l'argent à change & rechange aux dépens de qui il appartiendra, c'eft-à-dire, de l'accepteur, du tireur, & de ceux qui ont paffé leurs ordres fur ladite lettre de change, & en outre de toutes pertes, dommages, & intérêts. Il en eft de même d'un billet conçu pour lettre de change, que celui qui l'a fait s'eft obligé de fournir à celui qui en a payé la valeur en deniers, marchandifes, ou autres effets; car on le fomme de fournir la lettre de change dont il s'eft obligé par fon billet, & au refus l'on protefte d'en prendre aux dépens tant de celui qui a fait le billet, que contre les donneurs d'ordres, parce qu'ils y font tenus mais en matiere de fimples billets à ordres conçus pour valeur reçue en deniers, marchandises, ou autres effets, il ne faut, comme il vient d'être dit, qu'une fimple fommation au débiteur du billet de payer le contenu en icelui & au refus on lui déclare que le porteur à la requête duquel eft faite la fommation, fe pourvoira tant contre ledit débiteur que contre les donneurs d'ordres, ainfi qu'il avifera bon être..

On peut appliquer ce qui vient d'être dit à la queftion dont il s'agit: mais pour pouvoir faire cette application il faut fçavoir fi Willaume a reçu les 2309 livres 7 fols mentionnées en fon billet de Timothée, en deniers ou en marchandifes, parce que le billet porte feulement valeur dudit fieur (c'eft-à-dire Timothée) fans. expreffion de valeur. Ainfi l'on ne peut pas dire fi cette valeur eft en deniers ou en marchandifes: cependant c'eft d'où dépend la décifion de la question; car fi la valeur du billet est en deniers, il n'y a aucun doute que Jacques a dû faire fes difigences contre Willaume, c'eft-à-dire, lui faire une fommation de payer le contenu en icelui dans les dix jours; & fi la valeur eft en marchandifes, dans trois mois, Le tout à compter du lendemain de l'échéance dudit billet, conformément à l'Or

donnance ci-deffus alleguée, finon & à faute de ce faire il eft non-recevable en fon action en recours de garantie contre Timothée, & contre Charles, donneur d'ordre, fuivant l'Article XV. du Titre V. de l'Ordonnance. Charles foutient que le billet en queftion eft conçu pour argent prêté, & Jacques, que c'eft un billet de Ville & en marchandifes. Ce font là des dires qui ne prouvent rien. Ainfi Willaume n'ayant point exprimé par fon billet la valeur qu'il a reçûe de Timothée, il faut donc en venir à la preuve litterale ou teftimoniale, qui font les regles de droit fur lefquelles on rend la Justice. La preuve litterale fe peut faire par les livres journaux de Willaume & de Timothée, & l'on connoîtra par iceux, fi la valeur dudit billet a été donnée & reçûe en deniers ou en marchandises; & la preuve par témoins fe peut faire par une Enquête. Le tout de l'Ordonnance de la Cour, où le Procès eft pendant.

Sur la feconde Question.

Que Jacques eft tenu & a dû faire dénoncer la fommation qu'il a faite à Willaume, à Charles, & le pourfuivre en garantie dans la quinzaine, s'il eft domici lié dans la diftance de dix lieues de la Ville de Bordeaux; & au-delà, àraifon d'un jour pour cinq lieues, à compter du lendemain de ladite fommation, jusqu'au jour de l'action en garantie inclufivement, finon il eft non-recevable en fon action en recours de garantie contre Charles qui a paffé l'ordre fur le billet à fon profit. C'est une Jurifprudence Confulaire qui ne reçoit point de difficulté, parce qu'elle eft conforme aux Articles XIII. XIV. XV. & XXXII. dudit Titre V. de l'Ordonnance du Commerce de 1673.

Sur la troifiéme Question.

Que l'écrit qu'a fait Pierre, ne peut être réputé un ordre, d'autant qu'il n'en a pas la forme ni l'effet: car un ordre qui fe met au dos d'un billet ou d'une lettre de change, eft conçu en ces termes : Pour moi vous payerez le contenu de l'autre part, à tel, valeur reçûe de lui en deniers, marchandifes, où autres effets. Voilà la forme d'un ordre, & l'effet de cet ordre eft une ceffion & tranfport que fait le donneur d'ordre, au profit de celui qui lui a donné la valeur du contenu au billet ou lettre de change. En forte qu'il fe dévêt de la propriété qu'il a audit billet ou lettre de change, en faveur de celui au profit duquel il paffe fon ordre, lequel au moyen de la valeur qu'il en donne, en devient le maître & le propriétaire incommutable. L'écrit de Pierre eft conçu en ces termes : Je déclare à Monfieur Charles, que quoique je n'aye pas foufcrit le billet de 2309 livres 7 fols fait le dernier Février par Willaume à Timothée, qu'il a paffé à l'ordre du fieur Charles, le payer. Or l'on ne peut pas dire que cet écrit, de la maniere qu'il eft conçu, foit un ordre que Pierre ait paffé au profit de Charles; car pour que fût ainfi, il eût fallu que Timothée eût paffé fon ordre fur le billet en question au profit de Pierre, portant valeur reçûe de lui en deniers, marchandifes, ou autres effets, pour l'en rendre propriétaire, & qu'enfuite Pierre eût paffé le fien au profit de Charles. L'on peut bien préfumer par ces mors, quoique je n'aye pas jouf crit le billet, que Willaume avoit requis Pierre de mettre fon aval au bas de fon

I i iiij

cela

billet, pour lui faire plaifir, afin de le faire plus facilement négocier, & que Pierre ne l'a voulu en cette maniere, par la raifon, peut-être, qu'il ne vouloit pas que fon nom parût dans le Public, & qu'au lieu de mettre fon aval au bas dudit billet, il a mieux aimé le donner à Charles par un écrit féparé. Et fuppofé même que l'écrit de Pierre eût été fait au bas dudit billet, il ne pourroit être confideré que comme un aval, c'est-à-dire, de cautionnement, & non pour un ordre, parce qu'il n'en a pas la forme ni l'effet pour les raifons ci-deffus déduites. Or l'écrit en question étant un aval, Pierre eft obligé folidairement avec Willaume, au payement dudit billet envers Charles, au profit duquel il l'a paffé conformément à l'Article XXXIII. du Titre V. de l'Ordonnance ci-deffus alleguée; ainfi il n'y a ombre de difficulté à cela.

Il faut obferver que celui qui met fon aval au bas d'une lettre de change ou d'un billet payable à ordre, eft non-feulement obligé au payement du contenu en iceux envers celui au profit duquel la lettre eft tirée, ou que le billet a été fait, mais encore envers tous ceux au profit defquels les ordres feront dans la fuite paffés; parce que pour l'ordinaire celui qui fait fon aval au bas d'une lettre de chan.ge ou d'un billet, met fimplement ce mot aval, ou pour aval, ou pour fervir d'aval, (c'est-à-dire, qu'il fera valoir la lettre ou le billet, en cas qu'il ne foit point payé à l'échéance par celui qui l'a fait) & au-deffous de l'un de ces mots il met fa fignature. Or encore qu'il n'y ait que ce fimple mot d'aval, celui qui le donne, ne laiffe pas d'être obligé folidairement avec celui qui a fait la lettre ou le billet au payement du contenu en iceux, quoiqu'il n'y en foit point fait mention. Par l'aval qu'a donné ledit Pierre, il déclare à Charles, qu'encore qu'il n'ait pas foufcrit le billet dudit Willaume, qu'il le payera, fans dire fi ce fera à Charles feulement, & à celui qui fera porteur de fon ordre; c'est la raifon pour laquelle ledit Pierre dit pour défenfe, contre la demande à lui faite par Jacques, qu'il ne s'eft point obligé envers lui, mais envers Charles feulement. Or le fouffigné eftime que Pierre ayant déclaré à Charles, qu'il payera ledir biller, qu'il s'eft obligé par-là de le payer non-feulement à Charles, mais encore à celui au profit duquel il pafferoit fon ordre; ainfi Jacques, qui eft porteur de l'ordre de Charles, eft bien fondé en for action contre Pierre (fuppofé que Charles für fon débiteur par l'évenement du procès) quand même Pierre ne feroit obligé qu'envers Charles, & non envers Jacques porteur de fon ordre : ainfi ledit Jacques n'exerce-t-il pas de droit les actions actives & paffives de Charles fon debiteur 2

Le fuffigné eftime auffi que Jacques étoit tenu de faire dénoncer audit Pierre, les pourfuites qu'il a faites, tant contre Willaume, Timothée, que contre Charles; car encore que dans les affaires qui ne font point de commerce, quand deux perfonnes font obligées folidairement un feul pour le tout, fans divifion ni difcuffion envers un autre, qu'il foit loifible à cette perfonne de s'attacher feulement à l'un des Coobligés, & de le pourfuivre en Juftice, fans qu'il foir tenu de faire dénoncer fes diligences à l'autre Coobligé ; néanmoins en matiere de commerce de lettres & billets de change l'on en doit ufer autrement, parce que les Marchands & Négocians font fouvent des affaires de commerce enfemble; ainfi ib fe peut faire qu'un Négociant qui aura paffé fon aval fur un billet d'un autre. Négociant, pour lui faire plaifir, que depuis la paffation d'icelui

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PARERE LXXXIV.

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il viendra par une négociation fon débiteur, & de même des paffeurs d'ordres. De forte que fi le porteur du billet n'eft pas payé à l'échéance, & qu'il faffe des diligences contre celui qui a fait le billet, s'il les fait dénoncer au donneur d'aval dans le temps porté par l'Ordonnance, il donnera à celui au profit duquel eft fait le billet, ou à celui qui fera porteur de fon ordre, la fomme qu'il lui doit, & l'employera au payement du contenu au billet pour lequel il a fait fon aval. Ainfi l'on voit l'importance qu'il y a que le porteur d'un billet faffe dénoncer au donneur d'aval les diligences & pourfuites qu'il a faites tant contre celui qui a fait le billet, que contre les donneurs d'ordres. De forte que quoiqu'il n'y ait aucune difpofition dans l'Ordonnance qui ait ftatué fur cette queftion, néanmoins les Juges la doivent décider en ce rencontre par la droite raifon.

Mais fans s'arrêter à ce qui vient d'être dit, fi Jacques n'a pas fait fes diligences contre Willaume, dans le tems porté par l'Ordonnance, & fuppofé même qu'il les ait faites dans le tems, & qu'il ne les ait point fait dénoncer à Charles, ni qu'il n'ait point intenté fon action en recours de garantie contre lui dans le tems porté par l'Ordonnance, il eft non-recevable en fon action contre Charles, & par conféquent contre Pierre, donneur d'aval, qui s'eft rendu caution envers Charles, parce que Jacques n'ayant point d'action contre Charles, il n'en peut avoir contre Pierre. Ainfi Charles étant renvoyé abfous de la demande de Jacques, par même raison Pierre doit être auffi renvoyé abfous de la demande qui lui a été faite par Jacques.

Délibéré à Paris le 15 Novembre 1688.

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I. Si dans une faillite les marchandifes qui fe trouvent avoir cap & queue, la marque, le numero & l'aunage du Marchand qui les a vendues à celui qui a failli, peuvent être revendiquées dans tous les cas généralement quelconques par le vendeur ?

II. Si les marchandifes qui ont cap & queue, le numero & l'aunage feulement, la marque du Marchand en ayant été ótée par la fraude du banqueroutier, font revendiquables par le vendeur?

III. Si celles qui fe trouvent coupées par la moitié, & dont l'un des deux coupons porte la marque du Marchand & l'aunage, peuvent être revendiquées par le vendeur?

U

MÉMOIRE POUR CONSULTER.

LE FAIT.

d'effets

N Marchand a fait faillite, il doit plus de 160000 livres, & a peu pour payer. Lors de l'Inventaire il s'eft trouvé plufieurs Marchands qui ont reclamé & revendiqué les marchandifes qu'ils ont vendues au failli, ce qui a fait naître diverfes conteftations entre les créanciers & les revendiquans, qui proviennent de ce que le falli a coupé les marques des marchandifes, & n'a épargné que celles qu'il n'a pû trouver.

Les créanciers foutiennent que celles où il n'y a point de marques ne peuvent être revendiquées, d'autant qu'on ne les peut reconnoître que par la marque du Marchand, le numero, la qualité, & qu'elles n'ayent cap & queue, & que lorfqu'il y manque une de ces qualités ou marques, que la marchandise n'eft plus reconnoiffable, & par conféquent non revendiquable.

Ceux qui revendiquent foutiennent au contraire qu'il fuffit pour rendre reconnoiffable la marchandise, que le numero & l'aunage fe trouvent en conformité de la facture, & partant qu'elle peut être revendiquée.

Il y a eu Inftance en la Jurifdiction Confulaire, où l'on a jugé que les marchandifes qui avoient cap & queue, & marque du Marchand qui les a revendiquées, lui feront rendues. Et à l'égard des marchandifes où il ne fe trouve point de marque, foit pour être coupées, ou autrement, quoique conformes en numeros & aunages à la facture dont la revendication eft prétendue, il a été ordonné qu'elles demeureront à la maffe des autres marchandifes & effets, pour être vendues au profit de tous les créanciers.

Il

y a encore un autre Jugement pour raifon de certaines pieces de marchandifes qui fe font trouvées coupées par moitié, au bout desquels coupons la marque

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