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Enfuire Jacques fait affigner audit Parlement de Bretagne, Pierre, & d'autres: prétendus créanciers, dont les créances fe montent à 22168.livres, pour voir déclarer ledit Contrat commun avec eux. Ledit Pierre & lefdits prétendus créanciers. n'ayant point comparu à cette affignation, ledit Jacques auroit obtenu un Arrêt par défaut, qui ordonne que le Contrat d'accord, qui a été homologué avec les autres créanciers, feroit commun avec eux, & exécuté felon fa forme & teneur. De forte que cet Arrêt ayant été fignifié à Pierre, il n'a pû mettre la Sentence par lui obtenue contre Jacques à exécution, ce qui l'auroit obligé de lever chez le Notaire le saufconduit que ceux qui ont figné le Contrat de Jacques lui ont donné, le Contrat d'accord, & l'état des effets actifs & paffifs dudit Jacques, attaché à la minute dudit

Contrat..

Par la lecture que Pierre a faite de ces trois pieces, il a remarqué, 1°. Que Jacques s'eft abfenté le 20 Décembre 1687, que le lendemain 21 defdits mois & an il auroit demandé à quelques-uns de fes prétendus créanciers un fauf-conduit pour la fûreté de fa perfonne, afin de leur faire connoître l'état de fes affaires, & conferer avec eux; lefquels prétendus créanciers lui auroient donné fauf-conduit pour la liberté de fa perfonne pour deux mois, & que pendant ledit tems, il feroit un Etat au vrai de tous fes effets & crédits, en quelques Royaumes & Pays qu'ils fuffent, lequel Etat il dépoferoit ès mains de la Lande Notaire, pardevant lequel eft passé l'Acte de fauf-conduit, dans huitaine, pour par fes créanciers en prendre communication, & auroient en outre lefdits prétendus créanciers confenti la levée du fcellé appofé en la maison dudit Jacques ledit jour 20 Décembre, & auffi main-levée de fes effets, pour en faire un Etat au vrai en présence des fieurs Barnabé & Michel,, le lendemain huit heures du matin..

2°. Qu'il ne paroît point qu'il ait été fait aucun Inventaire des meubles & autres effets qui étoient fous le fcellé appofé en la maifon dudit Jacques, ni de fes titres & papiers, ni de fes livres qui étoient fous ledit fcellé, ni que ledit Jacques ait employé dans l'Etat qu'il a dreffé de fes effets, les meubles & uftenciles étant en fa maifon, ni que l'Etat ait été fait en présence des fieurs Barnabé & Michel, confor mément à l'Acte de fauf-conduit..

3°. Que les dettes paffives fe montent à 708 20 livres.

4°. Que Jacques n'a point employé dans ledit Etat les 25644. livres qu'il devoit à Pierre, y ayant feulement mis la fimple referve fuivante en ces termes: Sans compter les lettres de change tirées par moi, ou endoffées, qui pourroient retourner de Hollande, de Hambourg, ou de Paris, dont je n'ai eu jufqu'à ce jour aucune connoiffance, fi elles. font acceptées, payées, ou proteftées.

5°. Que ledit Etat n'eft point certifié véritable par Jacques.

7°. Qu'il ne paroît point par ledit Etat, ni par le Contrat d'accord, que Jacques ait représenté ni remis fes livres ès mains de fes créanciers, ou dépofé au Greffe des Confuls, fuivant l'Ordonnance, fes livres journaux, de caiffe, & grand livre de raifon, fur lefquels ledit Etat a dû être dreffé, ni que les pertes que Jacques prétend avoir faites, & qui font mentionnées dans ledit Etat, ayent été juftifiées par aucunes parties.

7°. Que de vingt-fept créanciers qui font dénommés dans ledit Etat, il n'y en a que treize dont les créances fe montent à 48652 livres, qui ayent figné ledit Contrat d'accord, & les quatorze reftans dont les créances fe montent à

22168 livres, ne l'ont point figné. Or pour que ledit Contrat pût être homologué en Justice, il falloit fuivant l'Ordonnance qu'il y eût les trois quarts des créanciers, eu égard aux fommes, qui euffent figné ledit Contrat qui fe montent à 53115. livres: cependant les fommes dûes aux créanciers qui ont figné le Contrat ne fe monlivres que les trois quarts des tent qu'à 48652 livres; partant il s'en faut 4663 créanciers ayent figné ledit Contrat. Et fi ledit Jacques avoit employé dans fondit Etat les 25644 livres qu'il doit à Pierre, il fe feroit trouvé monter à 96464 livres, au lieu de 70820 livres. De forte que les fommes pour lefquelles lefdits treize créanciers ont figné ledit contrat ne fe montent qu'à 48652. livres, & le total des dettes dûes par Jacques fe montant à 96464 livres, il fe trouve qu'il n'y a la moitié des créanciers (à 420 livres près) eu égard aux fommes, qui ayent figné ledit Contrat, au lieu qu'il falloit qu'il y eût les trois quarts des créanciers qui fe montent à 62348 livres qui euffent figné ledit Contrat, pour donner lieu à l'homologation d'icelui fuivant l'Ordonnance..

que

On demande avis à Monfieur Savari fur trois chofes..

La premiere, Jacques n'ayant point représenté fes livres aux créanciers qui ont figné fon Contrat d'accord, ni dépofé iceux au Greffe de la Jurifdiction Confulaire fuivant l'Ordonnance, ledit Etat n'ayant point été fait en la présence des deux créanciers dénommés par l'Acte de fauf-conduit, ni par eux été vérifié fur les livres dudit Jacques; ledit Jacques n'ayant point employé dans fondit Etat Pierre pour la fomme de 25644 livres qu'il lui doit, n'y ayant point juftifié par aucunes pieces les pertes qu'il prétend avoir faites, mentionnées dans ledit Etat, ni certifié icelui véritable; fi ledit Etat eft nul, & fi le Contrat d'accord qu'il a fait avec les treize prétendus fes créanciers en conféquence, peut fubfifter ou

non?

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La feconde, fi n'ylayant pas eu les trois quarts des créanciers,eu égard aux fommes, qui ayent figné ledit Contrat d'accord, il a pû être homologué au Parlement de Bretagne par fon Arrêt? Et fi par un autre Arrêt rendu par défaut contre Pierre, ledit Contrat a pû être tenu commun avec lui ?

Et la troifiéme, fi Pierre n'eft pas bien fondé à fe pourvoir par les voies de droit contre les deux fufdits Arrêts, & demander que fans avoir égard à iceux, la Sentence contradictoire par lui obtenue contre Jacques en la Jurifdiction Confulaire de Paris, foit exécutée felon fa forme & teneur, & conformément à icelle payer par ledit Jacques à Pierre la fomme 25644 livres mentionnée, intérêt d'icelle fomme, frais & dépens?

Le fouffigné qui a pris lecture, & mûrement examiné le Mémoire ci-deffus,

eftime::

Sur la premiere Question:

Qu'un Marchand, Négociant ou Banquier qui s'eft abfenté & a fait faillite dont le fcellé a été appofé dans fa maifon, & que partie de fes créanciers qui font dans les lieux de fa réfidence lui ont donné fauf-conduit pour la liberté de fa perfonne, il faut après fon retour proceder à la levée du fcellé en préfence des créanciers oppofans ou dûement appellés; & du Procureur du Roi pour les créansiers abfens; qu'inventaire foit fait tant des marchandifes, meubles meublans

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qu'autres effets du failli, comme auffi de tous les livres, titres & papiers, & enfeignemens qui fe trouvent fous ledit fcellé, & après l'Inventaire fait il faut mettre le tout en bonne & fûre garde, afin que le failli ne puiffe rien détourner au préjudice de fes créanciers, tant préfens qu'abfens. Qu'enfuire le failli doit dreffer tant fur fes livres qu'autres titres & papiers un Etat de tous fes effets, tant mobiliers qu'immobiliers, que de fes dettes paffives, même de toutes les pertes qu'il a fouffertes qu'il doit juftifier par des pieces bonnes & valables; lequel Etat il doit certifier véritable, & enfuite le donner à fes créanciers fuivant & conformément à l'Article II. du Titre XI. de l'Ordonnance du mois de Mars 1673. Que fi les livres du failli ne font point trouvés fous les fcellés appofés en fa maifon fuivant & conformément à l'Article III. il eft tenu de les représenter pour être mis au Greffe de la Jurifdiction Consulaire, s'il y en a dans le lieu de Ta réfidence, ou à l'Hôtel commun dudit lieu, ou ès mains de fes créanciers à leur choix; & fi le failli ne représente pas fes livres en la maniere ci-deffus exprimée, il peut être réputé banqueroutier frauduleux, fuivant l'Article XI. Qu'il faut que les créanciers avant d'entendre & recevoir aucune proposition &accommodement du failli, examine l'Etat qu'il leur a mis entre les mains, tant fur fes livres que fur l'Inventaire qui en a été fait, pour voir s'il s'y trouve conforme, & s'il n'y a rien d'obmis tant activement que paffivement, & cela tant

pour leur propre interêt que de celui des créanciers abfens. Que pendant que les créanciers du failli qui fe trouvent fur le lieu de fa réfidence examinent fes affaires, ledit failli eft tenu par lettres miffives d'avertir tous fes créanciers abfens de la faillite, afin qu'ils puiffent venir en perfonne, ou envoyer procuration pour affifter aux affemblées qui fe feront pour prendre tous enfemble les réfolutions justes & raifonnables pour fortir d'affaire avec le failli leur débiteur commun. Enfin que fi toutes les chofes n'ont pas été faites en la forme & maniere ci-deffus exprimée, tant par le failli que par lefdits créanciers préfens, elles font reputées avoir été faites en fraude des créanciers abfens; & partant elles demeurent nulles & fans effet, fans qu'elles leur puiffent nuire ni préjudicier, ni tout ce qui a été fait depuis en conféquence,

En appliquant tout ce qui a été dit ci-deffus à la queftion dont il s'agit, l'on verra que tout ce qui a été fait tant fur les créanciers que fur ledit Jacques, est nul, & qu'il ne peut porter aucun préjudice à Pierre ni aux autres créanciers abfens qui n'ont point figné le Contrat d'accord dudit Jacques. En effet, il paroît dans les pieces mentionnées dans le fufdit Mémoire, que Jacques s'eft abfenté le 20 Décembre 1687, que le fcellé avoit été appofé en fa maison le même jour, & que le lendemain 21 dudit mois par Acte pallé pardevant Notaire, fes créanciers préfens, au lieu de fa demeure, lui ont donné fauf-conduit pour deux mois pour la liberté de fa perfonne, confenti la levée du fcellé, & lui ont donné main-levée de fes effets pour en faire un Etat au vrai, en présence des fieurs Barnabé & Michel, le lendemain huit heures du matin, Mais il ne paroît point par le Contrat d'accord fair entre ledit Jacques & fefdits créanciers le 14 Janvier 1688, ni par aucuns autres Actes qu'il ait été fait aucun Inventaire des meubles & autres effets, qui étoient fous le fcellé appofé en la maifon dudit Jacques, ni de fes titres & papiers, ni de fes livres. Tout cela fait voir que les créanciers qui ont figné l'Acto de fauf-conduit ont voulu favorifer Jacques au préjudice des créanciers abfens

En effet, ils ont bien pû confentir la levée dudit fcellé, mais ils n'ont pû ni du lui donner main-levée de fes effets étant fous ledit fcellé, fans au préalable en faire un Inventaire en présence des créanciers ou dûement appellés, & du Procureur du Roi pour les créanciers abfens, qui font chofes qui étoient effentielles fuivant les regles de la Juftice qui fe pratiquent en ces fortes de rencontres. Ainfi les créanciers qui ont figné ledit fauf-conduit ont donné lieu à Jacques de détourner fes meilleurs effets, & d'en dreffer un Etat tel que bon lui a femblé. D'ailleurs il ne paroît point que l'Etat ait été dreffé par Jacques en la préfence des fieurs Barnabé & Michel conformément à l'Acte de fauf-conduit, ni qu'il l'ait certifié véritable fuivant l'Ordonnance. De forte que la conduite des créanciers qui ont figné le faufconduit étant vicieuse, auffi-bien que la procedure, ledit Etat eft nul & de nul effet.

Outre toutes ces nullités, il paroît que Jacques a dreffé ledit Etat en fraude de fes créanciers, & particuliérement de ceux qui étoient abfens, parce que, comme porte le fufdit Mémoire, ledit Jacques n'a point employé dans ledit Etat les meubles meublans & uftanciles qui étoient dans fa maifon, ni les 25644 livres qu'il devoit à Pierre. Non-feulement ces deux obmiffions faites dans ledit Etat font frauduleufes, comme il vient d'être dit, mais celle de 25644 livres a été faite à deffein de faciliter l'homologation du Contrat qui devoit être fait dans la fuite entre Jacques & fes créanciers qui ont figné ledit fauf-conduit, & c'est ce qui fait d'autant plus la nullité dudit État, & partant il ne peut nuire ni préjudicier à Pierre ni aux autres créanciers abfens qui n'ont point figné ledit Contrac d'accord.

On dira peut-être que la dette de 25644 livres de Pierre étoit incertaine lorf que Jacques a dreffé fon Etat, ainfi que c'eft la raifon pour laquelle il a mis un article au bas conçu en ces termes : Sans compter les Lettres de Change tirées par mož ou endoffées, qui pourroient retourner à proteft de Hollande, de Hambourg, ou de Paris, dont je n'ai jufqu'à ce jour aucune connoiffance fi elles font acceptées, payées ou proteftées. A quoi l'on répond que cet article au bas de l'Etat de Jacques eft une pure cavillation, & qu'il eft frauduleux, parce que ledit Jacques a dû donner connoif-fance à fes créanciers par ledit Etat de toutes les négociations qu'il avoit faites quis pouvoient produire des derres actives & paffives. C'eft pourquoi il devoit faire men-tion dans ledit Etat des lettres de change qu'il avoit tirées, ou par lui endoffées & déclarer les noms de ceux fur qui & au profit de qui il avoit tiré & endoffé lefdites lettres, cela étant de fa connoiffance, parce qu'il a tenu ou dû tenir des livres. des traites & remifes qu'il faifoit. Ainfi c'eft une malice & une fraude qu'il a com-mife de ne l'avoir pas fait. Et en effet cet article dans ledit Etat eft de mauvaise foi parce qu'il fait des équivoques qui ne peuvent produire que de mauvais effets, & c'eft auffi ce qui le rend nul..

L'Etat de Jacques étant nul & frauduleux, pour toutes les raifons ci-deffus alleguées, il n'y a pas de doute que le Contrat d'accord qu'il a fait avec fefdits treize créanciers en conféquence, eft auffi nul; & partant il ne peut produire aucun effes: contre Pierre, ni contre les autres créanciers abfens qui n'ont point figné ledit Conetrat d'accord..

Sur la feconde Queftion.

à

Le fouffigné eftime que pour donner lieu à un Contrat d'accord qui fe fait entre le failli & fes créanciers, il faut qu'il y ait les trois quarts d'iceux, eu égard aux fommes qui leur font dûes, qui y confentent; finon il ne peut être valablement fait, & parrant il ne peut nuire ni préjudicier aux créanciers qui n'ont point confenti á faire ledit Contrat: cela eft conforme à l'Article VI. du Titre XI. de l'Ordonnance dej 1673, & que pour donner lieu à l'homologation du Contrat d'accord en Juftice fait entre le failli & fes créanciers, il faut qu'il y ait les trois quarts, eu égard aux fommes qui leur font dûes, qui l'ayent figné, conformément à l'Article VII. dudit Titre XI. finon il ne peut être homologue en Juftice; & s'il y étoit homologué, la Sentence ou l'Arrêt d'homologation ne peut être rendu commun avec les autres créanciers qui ne l'ont point figné. C'est une Jurifprudence qui ne reçoit point de difficulté.

Il paroît dans le fufdit Mémoire qu'il y a vingt-fept créanciers qui font employés dans l'Etat, dont le total de leur dû monte à 70820 livres; que defdits vingt-fept créanciers il y en a treize dont le total de leur dû fe monte à 48652 livres qui ont figné le Contrat d'accord de Jacques, & que les quatorze autres créanciers, dont le total de leur dû fe monte à 22168 livres, n'ont point figné ledit Contrat. Or les trois quarts de la fomme totale de 708 20 livres dûs aufdits vingt-fept créanciers, qui reviennent à 53115 livres, & le total des créances des treize créanciers qui ont figné ledit Contrat ne fe montant qu'à 48652 livres, partant il s'en faut 4663 livres des trois quarts des créanciers, eu égard aux fommes qui leur font dûes, qui ayent figné ledit Contrat, & partant ledit Contrat ne pouvoit être homologué qu'à l'égard des treize créanciers qui l'ont figné, dont le total de leur dû fe monte à 48652 livres, & non à l'égard des quatorze, dont le total de leur dû fe monte à 22168 livres, qui ne l'ont point figné. Ainfi l'Arrêt qui a homologué ledit Contrat, ne peut être déclaré commun avec lefdits créanciers.

Or, par ce qui vient d'être dit, fi le Contrat d'accord de Jacques ne peut être rendu commun avec les quatorze créanciers employés dans fon Etat, à plus forte raifon ledit Arrêt ne peut être rendu commun avec Pierre, premiérement, parce que ledit Pierre n'eft point employé dans ledit Etat pour ladite fomme de 25644 livres à lui due par ledit Jacques. Secondement, fuppofé que Jacques eût employé cette fomme dans fondit Etat, le total de toutes les dettes paffives fe feroient trouvé monter à 96464 livres, dont les trois quarts reviennent à 72348 livres. De forte que n'y ayant eu que treize créanciers, dont le total de leur dû ne fe monte qu'à 48652 livres, qui ayent figné ledit Contrat, iln'y a que la moitié à 420 livres près des créanciers, eu égard aux fommes qui leur font dûes, qui ayent figné ledit Contrat; & partant l'on ne peut rendre l'Arrêt d'homologation du Parlement de Bretagne commun avec ledit Pierre; & d'autant moins que les créanciers qui ont figné ledit Contrat, & qui ont confenti l'homologation, ont favorifé ledit Jacques au préjudice de Pierre & des autres créanciers qui n'ont point figné icelui Contrat & que ledit Etat eft frauduleux & nul, pour les raifons alleguées fur la premiere queftion.

Sur

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