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Sur la troifiéme Queftion.

Le fouffigné eftime que pour toutes les raisons alleguées fur les deux précédentes questions, Pierre eft bien fondé à fe pourvoir par les voyes de droit contre l'Arrêt d'homologation du Contrat en question, & contre celui rendu par défaut qui le rend commun avec lui, parce qu'il ne s'eft point défendu ; & pour cela il faut qu'il obtienne Requête Civile, fondée fur tous les moyens déduits fur les deux précedentes questions; & il peut demander que fans avoir égard aufdits Arrêts, que la Sentence par lui obtenue contre Jacques en la Jurifdiction Confulaire de Paris, foit exécutée Telon fa forme & teneur, & conformément à icelle lui payer par ledit Jacques ladite fomme de 25624 livres y mentionnée, interêts d'icelle fomme, frais & dépens à lui adjugés par ladite Sentence, n'y ayant aucune difficulté dans fa caufe.

Délibéré à Paris ce premier Décembre 1688.

Tome II.

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PARERE

LXXXVII.

1. Si un Négociant fait banqueroute, quelques-uns de fes créanciers s'affemblent, it' leur préfente un Etat de fes dettes paffives feulement. Sur cet Etat ces créanciers affemblés paffent un Contrat avec lui aux deux tiers de remise de ce qu'il leur doit, & font homologuer le Contrat par Arrêt. Le banqueroutier fait affigner ceux de fes créanciers qui refufent de figner ce Contrat, & obtient un Arrêt par défaut qui le déclare commun avec eux. L'on demande :

Si cet Etat de dettes paffives feulement préfenté par le banqueroutier eft conforme à la difpofition de l'Ordonnance de 1673; & fuppofé qu'il n'y foit pas conforme, fi le Contrat de remife peut fubfifter à l'égard des créanciers qui ne l'ont pas figné? Et enfin s'ils ne font pas bien fondés à fe pourvoir en Requête Civile contre l'Arrét qui l'a déclaré commun avec eux ?

1. Si un tireur de Lettres de Change eft bien fondé à en demander la reftitution à celui au profit duquel il les a tirées pour acquitter une autre Lettre de Change qu'il avoit tirée fur lui, qu'il a laiffé protefter faute de payement, & dont le tireur a rembourse

la valeur ?

III. Si un tireur de Lettres de Change qui les prétend revendiquer comme à lui apparte nantes, peut s'inferire en faux contre les ordres paffés au dos des lettres, par celuï au profit duquel il les a tirées, foutenant que les ordres ont été antidattés ?

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MÉMOIRE POUR CONSULTER..

LE FAIT..

Es f & 12 Mars 1686 Jean Buis, Marchand Banquier de la Ville de Nantes, auroit tité deux lettres de change, l'une de 604 florins fur les fieurs Chrétien & Bouttin de Saint Omer, payable à deux ufances à l'ordre du fieur Morand, Marchand Banquier à Paris, fon Commiffionnaire. en la Ville de Lille; & l'autre de 610 florins fur le fieur Chriftian Crayne, Marchand à Gand, auffi payable en ladite Ville de Gand à deux ufances, à l'ordre dudit Morand; lefquelles deux lettres de change ledit Buis auroit remifes audit Morand pour les négocier à Paris, pour de l'argent en provenant en payer la fomme de 1112 livres dix fols pour une lettre de change qu'il avoit tirée fur lui..

Mora ndpar fa lettre miffive par lui écrite à Buis le 23 dudit mois de Mars, lui mande qu'il avoit envoyé accepter lefdites deux lettres, & qu'il les venoit de recevoir acceptées, mais qu'à caufe du changement des monnoyes à Lille & à Paris, il y avoit de la difficulté de difpofer pour ledit lieu. Ainfi qu'il n'avois

pudifpofer lefdites deux lettres jufqu'alors, & qu'il feroit de fon mieux pour les difpofer le premier jour au mieux pour fon avantage. Et par autre lettre miffive du 30 dudit mois de Mars 1686, Morand mande à Buis qu'il a reçu fa lettre du 26 dudit mois, qui lui a été rendue par Monfieur Beaurogand, qui lui a préfenté fa feconde lettre de 1112 livres 10 fols, auquel il avoit accepté la premiere, & que ledit Beaurogand écriroit à Buis de la lui envoyer, & qu'il la lui payeroit. Et comme lui Morand n'a pû difpofer les fufdites deux lettres de change, qu'il les avoit fait voir audit Beaurogand, lefquelles il avoit réfervées acceptées ; qu'il avoit envoyé accepter les fecondes; que jufqu'alors il n'avoit pû les négocier, attendu qu'il ne fe faifoit point de change pour Lille, à caufe du changement des monnoies audit lieu, & des defenfes qu'on y avoit faites des anciennes monnoies courantes; que pour la lettre de 700 livres qu'il avoit dit au porteur qu'il revînt Lundy, qui étoit après le lendemain, & que Buis ne doit pas trouver mauvais ces contre-tems, parce que c'eft la rareté de l'argent fur la place qui les caufe. Et après que Morand a fini fa lettre miffive, il mande encore audit Buis au bas d'icelle, ces mots: Comme vous faites des affaires avec Bogard, fi vous defirez que je lui remette vos deux lettres, je lui remettrai, en cas que je ne les aye pas difpofées, car je ferai de mon mieux pour les difpofer; ainfi les lui rendant je n'au Tai rien à lui payer. Ainfi aux termes de ces deux lettres miffives Morand n'avoit pas difpofé les deux lettres de change en queftion le 30 Mars 1680, c'est ce qu'il convient remarquer.

Morand ayant laillé protefter la lettre de change de 1112 livres 10 fols que Buis avoit tirée für lui, & ledit Buis l'ayant remboursée à celui au profit duquel il l'avoit tirée, & ledit Morand n'ayant pû difpofer les deux lettres de change en queftion pour les raifons par lui alleguées par fes deux lettres miffives des 23 & -30 dudit mois de Mars, dont l'argent qui en devoit provenir, étoit pour payer celle que Buis avoit tirée fur lui qu'il avoit laiffé protefter, comme dit eft. Buis ayant eu avis que Morand n'étoit pas bien en fes affaires, auroit envoyé fa procuration en datte du 20 Avril 1686 au fieur Jean Bogard, Banquier à Paris, pour retirer de Morand les fufdites letttres de change, lequel Bogard en vertu de ladite procuration, le 24 Avril 1686 auroit fait fommer Morand de lui remettre ès mains lefdites deux lettres de change en queftion, aux offres que lui fait Bogard, lui en donner tel acquit & décharge que de raifon. Lequel Morand ayant été de ce faire refufant, pour s'y voir condamner, & par corps, il lui auroit fait donner affignation pardevant les Juge & Confuls de Paris, en vertu de leur Ordonnance..

Le même jour 24 Avril, Morand auroit fait fignifier à Bogard un Arrêt de la Cour, en datte du 4 dudit mois d'Avril, portant homologation d'un prétendu Contrat d'accord qu'il dit avoir fait avec fes créanciers le premier jour dudit mois, & enfuite ayant comparu à l'affignation à lui donnée, il auroit dit pour défense à la demande de Buis, qu'attendu ledit Arrêt du Parlement pour l'homologation du Contrat par lui fait avec fes créanciers, la caufe des Parties devoit être renvoyée audit Parlement ce qui auroit été empêché par ledit Bogard audit nom, qui avoit perfifté en fa demande. Sur quoi feroit intervenue Sentence contradictoire le 26 dudit mois d'Avril, par laquelle les Juge & Confuls, attendu ledit Arrêt de la Cour, auroient ordonné que les Parties s'y pourvoiroient, ainfi qu'elles aviferoient bon être. Les chofes font demeurées en cet état jufqu'à préfent.

Morand depuis la faillite, par une mauvaise foi fans exemple, auroit paffé fes

ordres au dos defdites deux lettres de change en queftion, qu'il auroit antidattées du 20 Mars 1686, payables à l'ordre du fieur de la Remaudiere, valeur reçue :comptant de lui, & ledit de la Remaudiere auroit paffé les fiens le 30 dudit mois de Mars, payable à l'ordre du fieur Eftienne Broffart, auffi pour valeur reçue comprant de lui.

Etienne Broffard s'eft fait payer de la lettre de change de 604 florins par Chrétien & Boutin de Saint-Omer, fur qui Buis l'avoit tirée, aufquels il a été obligé de rendre & payer ladite fomme : & à l'égard des 610 florins par lui tirés fur Chriftian Craynes de Gand, il y a procès pardevant les Juges de ladite Ville entre ledit Craynes & ledit Broffart porteur.

Buis a levé une Expédition chez Malingre, Notaire au Châtelet de Paris, du Contrat d'accord fait entre Morand & fes prétendus créanciers, le premier Avril 1687, & de l'Etat qu'il a mis ledit jour entre les mains de fefdits prétendus créanciers, pour attacher à la minute d'icelui Contrat.

Ledit Buis a remarqué que ledit Contrat eft paffé entre Eftienne Broffart, Marchand à Paris, demeurant rue des Boucheries Paroiffe Saint Etienne du Mont, créancier de 5372 livres, par Sentence du Châteler de Paris, du 5 Mars 1686, Claude Morand, tant en fon nom que comme fe faifant & portant fort d'Antoine Morand Marchand à Lyon, ledit Claude Morand créancier de 1268 livres, fans dire en vertu de quoi; & ledit Antoine Morand de 2340 livres pour lettre de change par lui acquittée pour ledit Jean Morand & Simon Monfigot, Directeur des droits du Poiffon, créancier de 3800 livres, tant pour lettre de change que pour folde de compte, d'une part, & ledit Jean Morand d'autre, fur ce qui leur a été remontré par ledit Jean Morand, qu'il s'eft trouvé notablement intéreffé en plufieurs faillites, joint le malheur du tems, la diminution notable des marchandifes, & la difficulté de faire le recouvrement des fommes à lui dûes, il fe trouvoit dans l'impoffibilité de pouvoir fatisfaire fes créanciers, à moins de lui faire une remife des deux tiers de leur dû, & de lui accorder terme & délai de trois années pour le payement de l'autre tiers, fans intérêt, d'année en année par tiers : lefquelles propofitions ayant été examinées avec les fufdits créanciers, & après avoir conferé enfemble, ils les ont acceptées & convenu de ce qui fuit : c'est à fçavoir, qu'ayant vû & examiné l'Etat des fommes dûes par ledit Morand à fes créan ciers, tant pour marchandifes, lettres de change, qu'argent prêté, montantes à 36110 livres 8 fols 6 deniers, certifié véritable par ledit Morand, ledit jour premier Avril 1686, ontremis & quitté audit Morand les deux tiers des fommes principal à eux dûes, & le total des intérêts, frais & dépens, qu'aucuns des créanciers feroient en droit de prétendre contre ledit Morand, lequel ne fera plus débiteur envers fefdits créanciers, que de l'autre tiers des fommes principales qui fe trouvent monter pour ledir tiers, à la fomme de 12036 livres 16 fols que ledit Morand promet payer à fefdits créanciers en trois termes & payemens égaux d'année en année, &c. & au moyen de ce que deffus lefdits créanciers ont donné pleine & entiere main-levée de la faifie faite des meubles dudit Morand, enfemble de tou tes les Saifies, Arrêts, & Exécutions qui peuvent avoir été faites fur ledit Morand es mains de qui que ce foit, &c. & à ce faire ledit Claude Morand s'eft rendu caution & répondant dudit Jean Morand fon frere, &c. pour ladite fomme de 12036 livres 16 fols.

Buis a auffi remarqué dans l'Etat de Musand cinq choses. La premiere, que

l'intitulé porte ces mots: Etat des fommes que doit Jean Morand de Paris, donné à fes créanciers le premier Avril 1688. La feconde, que Morand n'a point mis dans ledit Etat fes marchandifes, dettes actives, ni les meubles, étant en fa maifon qui avoient été faifis, ni les autres effets qui lui appartenoient au jour qu'il a fait ledit Etat, & paffé le fufdit Contrat d'accord avec les trois créanciers y dér om més, n'ayant fimplement compofé ledit Etat que de fes dettes paffives, confor me au titre qu'il a mis en tête d'icelui. La troifiéme, que ledit Morand n'y a point mis les pertes qu'il dit par ledit Contrat avoir faites, & qui ont donné lieu à icelui, La quatrième, qu'il a mis dans ledit Etat parmi fes dettes paffives la lettre de change de 1112 livres 10 fols que Buis avoit tirée fur lui qu'il avoit laissé protefter, laquelle étant retournée fur Buis, il l'avoit remboursée à celui au profit duquel il l'avoit tiré. Ainfi Buis n'étant point débiteur dudit Morand de cette fomme, il n'a pû l'employer dans ledit Etat. Et la cinquième, que Morand n'a point additionné les fommes mentionnées dans ledit Etat; & par le calcul qui en a été fait, il fe trouve monter à 46370 livres 16 fols 6 deniers: cependant ledit Contrat porte que les trois créanciers qui l'ont figné, ont vu & examiné l'Etat des fommes dues par Morand à fes créanciers, montantes à 36110 livres 8 fols 6 deniers, qui eft une fauffeté manifefte, parce que fi lefdits trois créanciers avoient vû & examiné ledit Etat, ils auroient trouvé qu'il fe monte à 46370 livres 16 fols 6 deniers, au lieu de 36110 livres 8 fols 6 deniers.

Buis a encore remarqué que par ledit Contrat, Morand ne s'oblige à payer à tous fes créanciers dénommés dans fondit Etat, que la fomme de 12036 livres 16 fols pour le tiers defdites 36110 livres 8 fols 6 deniers, au lieulqu'il devoit s'obliger à leur payer 15456 livres 12 fols 6 deniers pour le tiers defdites 46370 livres 16 fols 6 deniers. Ainfi par toutes les remarques ci-deffus, il n'y a rien de plus frauduleux que ledit Contrat & ledit Etat, quoique ledit Morand l'ait affirmé véri

table.

Le z dudit mois d'Avril 1686, ledit Morand auroit encore fait figner le fufdit Contrat par trois autres fes créanciers, dont les créances fe montent enfemble à 8970 livres, laquelle fomme jointe à 12780 livres, pour laquelle les trois premiers prétendus créanciers avoient figné ledit Contrat, le tout revient enfemble à celle de 21750 livres.

Le lendemain 3 dudit mois d'Avril 1686, ledit Morand auroit préfenté fa Requête à la Cour de Parlement de Paris, par laquelle il auroit demandé l'homologarion dudit Contrat d'accord, & le lendemain 4 dudit mois d'Avril fur cette Requête il auroit obtenu un Arrêt par défaut à l'Audience, qui porte, qu'après que Petit-Jean Avocat pour Morand, a demandé avantage, la Cour a homologué ledit Contrac d'accord avec ceux qui l'on figné; ordonne que les refufans feront appellés, cependant fait défenfes de faire pourfuite ailleurs qu'en la Cour.

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Ledir fieur Buis prétend premiérement, que Morand n'a mis fes ordres fur les deux lettres de change en queftion au profit de la Remaudiere, ni ledit la Remaudiere n'y a mis les fiens au profit d'Etienne Broffart, que depuis la paffation du Contrat d'accord que ledit Morand a fait avec ledit Etienne Broffart, ClaudeMorand, frere dudit Jean Morand, & Simon Monfigot, le premier Avril 1686, quoique les endoffemens de Morand à la Remaudiere, foient datrés du 20 Mars précedent, & ceux de la Remaudiere à Etienne Broffart le 30 dudit mois de Mars. Ce fait elt juftifié par les deux lettres miffives écrites par ledit Morand

L II iij

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