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connoît de tous les differends qui naiffent entre les Marchands & Négocians d'icelle Ville pour fait de marchandife, & qui les jugent Confulairement (attendu qu'il n'y a point de Jurifdiction Confulaire dans ladite Ville de Caën) ou pardevant les Juge & Confuls des Villes de leur domicile, ou pardevant ceux des autres Villes où fes débiteurs fe font obligés de payer par leurs billets ou promeffes.

La feconde, fi ledit Mathurin eft bien fondé de faire affigner fes débiteurs aufquels il a vendu & envoyé de ladite Ville de Caen des marchandises en leurs maifons des Villes de leur réfidence, fuivant les ordres qu'il en a reçûs d'eux par leurs lettres miffives, pardevant le Vicomte de ladite Ville de Caën.

Et la troifiéme, fuppofé que Mathurin veuille faire affigner fefdits débiteurs pardevant le Vicomte de ladite Ville de Caen, s'il doit prendre des permiflions & mandemens des Juges ordinaires, ou des Juges-Confuls des Villes où font réfidans fefdits débiteurs, pour les faire affigner pardevant le Vicomte de Caen; & en cas que lefdits Juges ordinaires ou Juges-Confuls fuffent refufans de donner lefdites permiffions & mandemens qui leur feront demandés, ce qu'il fera pour les y obliger.

Et fuppofé que le fieur Savary eftimât que Mathurin fût bien fondé à faire affigner fefdits débiteurs defdites autres Villes des Provinces de ce Royaume pour fait de marchandise pardevant ledit Vicomte de ladite Ville de Caën, qui juge Confulairement, comme il a déja éré dit, il eft prié de dreffer un formule du Mandement & de l'Exploit qui font néceffaires pour cet effet, & de mettre ce formule ensuite de la Confultation qu'il donnera par écrit.

Le fouffigné qui a pris lecture & mûrement examiné les propofitions contenues dans le Mémoire ci-deffus tranfcrit, estime:

Sur la premiere Question.

Que Mathurin a le choix de faire afligner fes débiteurs demeurans. dans les Villes des autres Provinces du Royaume aufquels il a vendu fes marchandises, dans la dite Ville de Caen, pour raifon de quoi ils lui ont fait des promeffes ou billers en ladite Ville de Caen, ou pardevant les Juge & Confuls des autres Villes où sesdits débiteurs fe font obligés de payer par leurs promeffes ou billets, parce que cela est conforme à l'Article XVII. du Titre XII. de l'Ordonnance du mois de Mars 1673, dont voici la difpofition: Dans les matieres attribuées aux Juge & Confuls, le Créancier pourra faire donner affignation à fon choix, ou au lieu du domicile du débiteur, au lieu duquel la promeffe a été faite & la marchandise fournie, ou au lieu que le payement doit être fait. Ainfi il n'y a point de difficulté à cela.

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Mais la queftion eft de fçavoir, fi n'y ayant point de Jurifdiction Confulaire en la Ville de Caen, un Marchand de ladite Ville peut faire affigner fes débiteurs des Villes des autres Provinces du Royaume pardevant le Vicomte de ladite Ville de Caën, dans les matieres attribuées aux Juge & Confuls, & non attribuées aux Juges ordinaires. Ainfi il fembleroit que fuivant la difpofition de l'Article ci-deffus cité, qu'il ne feroit pas loifible à Ma thurin de faire affigner fes débiteurs des autres Villes du Royaume pardevant le Vicomte de Caen, parce que ce n'eft point une Jurifdiction Confulaire, mais une Jurifdiction ordinaire. Néanmoins le fouffigné eftime que le Vicomte de Caën ayant l'attribution de connoître de tous les differends qui naiffent entre les Mar

chands & Négocians de ladite Ville de Caën, pour fait de marchandife, & de les juger Confulairement, Mathurin eft bien fondé de faire affigner fes débiteurs domiciliés dans les autres Villes du Royaume pour fait de marchandise, pardevant ledit Vicomte de Caën. La raison en eft, qu'encore qu'il foit feulement dit dans l'Ordonnance, Dans les matieres attribuées aux Juges & Confuls, &c. néanmoins elle doit être entendue dans les matieres auffi attribuées aux Juges ordinaires des Villes où il n'y a point de Jurifdiction Confulaire établie pour fait de marchandise, pour les juger Confulairement. Ainfi, fuivant ce que porte le fufdit Mémoire, fi le Vicomte de Caen a l'attribution des matieres concernantes le fait de marchandise de Marchand à Marchand, & de les juger Confulairement, il n'y a pas de doute que Mathurin, Marchand de la Ville de Caën, eft bien fondé de faire affigner fes débiteurs Marchands domiciliés dans les autres Villes du Royaume, pardevant le Vicomte d'icelle Ville.

Il faut remarquer qu'il n'y a que dans les Villes capitales des, Provinces du Royaume où il y a des Jurifdictions Confulaires établies fuivant l'Edit de Charles IX. du mois de Décembre 1563; & comme il y a des Villes dans les Provinces où il y a des grandes Manufactures établies, & où il fe fait un grand Commerce, & qui font éloignées des Villes capitales où il y a des Jurifdictions Confulaires, ainfi il faudroit que les Manufacturiers & les Marchands, abandonnallent leurs Manufactures & leur Commerce pour aller plaider en la Jurifdiction Confulaire de ladite Ville capitale : c'eft la raifon pourquoi il eft attribué aux Juges ordinaires des Villes où il y a des Manufactures, de connoître des differends qui naiffent entre les Marchands & Manufacturiers defdites Villes, & de les juger Confulairement pour ne pas détourner lefdits Manufacturiers de leur travail & de leur trafic. Ce n'eft pas feulement dans la Ville de Caën où le Juge ordinaire ( qui eft le Vicomte) ait l'attribution de connoître & de juger Confulairement les differends qui naiffent entre les Marchands pour fait de marchandife; mais il y a encore dans des autres Provinces, plufieurs Villes où il y a des Manufactures, & où il fe fait un Commerce confidérable, où il n'y a point de Jurifdiction Confulaire établie, & où les Juges ordinaires ont pareille attribution que le Vicomte de ladite Ville de Caën. Par exemple, dans la Ville de Laval, qui eft de la Province du Maine, où il y a une Manufacture de toile dont il fe fait un grand Commerce, il n'y a point de Jurifdiction Confulaire; & parce que Laval eft éloigné de la Ville du Mans capitale de la Province où eft établie la Jurifdiction Confulaire, les Marchands & les Manufacturiers de toiles de Laval ne vont point plaider pardevant les Juge & Confuls du Mans, fur les differends qui naiffent entr'eux pour fait de marchandife, mais bien pardevant le Juge ordinaire de Laval, auquel eft attribuée la con noiffance defdits differends, & de les juger Confulairement.

Mais quel préjudice & quel dommage peut-il arriver aux Marchands des Villes des autres Provinces du Royaume, débiteurs de ce Marchand de Caën, de plaider pardevant le Vicomte de ladite Ville.de Caën? Point du tout, parce qu'il jugera les differends qu'ils auront avec ledit Marchand d'icelle Ville de Caen, Confulairement. Ainfi pour toutes ces raifons le fouligné eftime qu'il n'y a aucune difficulté la queftion dont il s'agit.

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Sur la feconde Queftion.

Que Mathurin eft bien fondé de faire affigner pardevant le Vicomte de ladite Ville, les Marchands des autres Villes du Royaume fes débiteurs, pour les marchandifes qu'il leur a fournies en ladite Ville de Caen, fuivant les ordres qu'il en a reçus d'eux par les lettres miflives qu'ils lui ont écrites, parce que cela eft conforme à l'Article XVII. du Titre XII. de l'Ordonnance ci-devant alleguée fur la premiere queftion, qui porte: Ou au lieu où la promeffe a été faite, & la marchandise fournie. Or l'on ne peut pas dire que les marchandifes que ce Marchand de Caën a vendues aux Marchands des autres Villes du Royaume, & qu'il leur a envoyées fuivant les ordres qu'il en a reçus d'eux par leurs lettres miflives à lui écrites, n'ayent été fournies dans ladite Ville de Caën. La raifon en eft, que Mathurin y a livré lefdites marchandises, ou au Meffager de la Ville de Caën, pour les Villes où demeurent fes débiteurs, ou à des Rouliers & autres Voituriers pour voiturer lesdites marchandises dans lefdites Villes, fuivant les ordres qu'il en avoit reçûs d'eux. En forte que dès le moment que Mathurin a livré au Meffager ou Roulier, ou autres Voituriers, fes marchandifes, elles font réputées fournies en ladite Ville de Caën. Et en effet, le Marchand vendeur n'est point garant des risques qui peuvent arrivér par les chemins aux marchandifes, parce qu'elles font fournies & livrées à Caën, aux rifques, périls & fortunes des Marchands qui lui ont mandé de lui vendre & envoyer lefdites marchandifes par ledit Meffager, ou par des Rouliers & autres Voituriers de ladite Ville de Caën, dans les Villes de leur résidence.

Sur la troifiéme Queflion.

Que fi Mathurin veut faire affigner fes débiteurs defdites Villes pardevant le Vicomte de Caen, il ne doit pas prendre Commiffion des Juge & Confuls defdites Villes, mais il faut qu'il en prenne une dudit Vicomte; & s'il veut faire affigner fes débiteurs pardevant les Juge & Confuls des lieux où la promeffe doit être payée & acquittée; en ce cas il doit prendre une Commiffion des Juge & Confuls defdites Villes de la réfidence de fefdits débiteurs.

ว่า

A l'égard de ce que l'on demande, ce qu'il y aura à faire fi les Juge & Confuls des Villes où l'on fera affigner les débiteurs, refufent de donner leur Commiflion, pour cet effet il ne faut pas craindre qu'ils en faffent refus, parce que l'on reconnoît feur Jurifdiction; mais fuppofé qu'ils fuflent refufans de ce faire ( ce que l'on ne croit pas) il faudroit faire une fommation aufdits Juge & Confuls, parlant à leur Greffier, de délivrer leur Commiflion; & au refus, fe pourvoir en déni de Juftice au Parlement où reffortiffent les Sentences defdits Juge & Confuls.

Délibéré à Paris le 30 Mars 1689.

Le fieur Savary estime, , que fi le Marchand de Caën veut faire affigner parde vant le Vicomte de ladite Ville, il n'eft point néceffaire qu'il lui dreife un for mule de Commiffion, parce que le Greffier du Vicomte la dreffera fuivant son yle ordinaire, addreffante au premier Huiflier ou Sergent Royal fur ce requis;

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mais ledit Savary eftime qu'il faut que ledit Greffier mette & ajoûte les qualités du Vicomte, ainfi qu'il enfuit.

Tel

Vicomte de Caën, & Juge des Marchands pour juger Confulairement leurs differends pour le fait de marchandise, & cela afin que les débiteurs, à qui l'on fera donner affignation, n'en prétendent cause d'ignorance.

Et à l'égard de l'Exploit, l'on doit le dreffer de la maniere fuivante.

'An 1689 le

jour de

en vertu de la Commiffion

L'de Monfieur le Vicomte de Caen, Juge des Marchands pour juger Confulairement leurs differends pour fait de marchandife; & à la requête de Marchand de ladite Ville de Caën: J'ai Huiffier Sergent à fouffigné, donné affignation à

de

Marchand en cette Ville

à comparoir pardevant ledit fieur Vicomte de Caën, pour

fe voir condamner, tant par provifion que diffinitivement, & par corps, attendu que c'eft pour fait de marchandise, à payer audit fieur

la fomme de

dattée à Caën le

T

contenue en fa promeffe

pour marchandise à lui vendues & livrées

ou par

en ladite Ville de Caën, (ou bien pour marchandises vendues audit qu'il lui a envoyées par le Meffager en cettedite Ville de un tel, Voiturier, fuivant fon ordre porté par fa lettre miffive par lui écrite audit demandeur, en datte du ) ensemble à payer l'intérêt de ladite fomme fuivant l'Ordonnance, & aux dépens. Et pour juftifier du contenu ci-deffus, j'ai Huiffier fufdir audit baillé & laiffé copie de ladite promeffe (ou lettre miffive) de la fufdite Commiffion, ensemble du prefent Exploit, en prefence de

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témoins, &c.

Si le Marchand débiteur ne comparoît point à l'affignation dans le tems porté par l'Exploit, il faudra lever le Jugement, qui ordonnera qu'il fera réaffigné fur le défaut, pour comparoir dans le tems qu'il portera, pour voir adjuger le profit d'icelui, & le faire fignifier audit débiteur, parce que comme le Vicomte juge Confulairement, il faut que la procedure se faffe aufli Confulairement, comme dans les Jurifdictions Confulaires.

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PARERE CII.

1. Si une Lettre, quoique qualifiée de Lettre de Change dans le texte d'icelle, eft tirée de Place en Place, n'étant point revêtue de la forme effentielle que doit avoir une Lettre de Change, peut être réputée telle, & en avoir l'effet? Et fi au contraire ellene doit pas paffer feulement pour une fimple refcription ou mandement ?

II. Si le tireur d'une Lettre de Change peut en faifir la valeur entre les mains de celui fur lequel il l'a tirée, & qui l'a acceptée, & empêcher qu'il ne la paye au porteur, au profit duquel il a tiré la lettre? En en quel cas un tireur eft recevable à faifir la valeur d'une Lettre de Change entre les mains de l'accepteur?

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Sur le differend mû entre la Dame Dannet & le Sieur Michel Huche, pour raifon de la Lettre de Change dont copie eft ci-deffous tranfcrite.

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Il vous plaira payer par cette foule de Change de 9960 livres, & c'eft pour com pte & a'ordre de fon Alteffe Electorale dei Baviere, faites ben payement, fuivant l'avis, adieu. FRANÇOIS ET JOSEPH GUGLER.

Au bas eft écrit:

Accepté, figné, MICHEL HUCHE, le 26 Mai 1688.

Et au dos eft écrit:

A Monfieur Michel Huche, Banquier à Paris.

LE FAI T.

I A lettre dont copie eft ci-deffus, tranfcrite a été proteftée fur le fieur Huche faute de payement, le 20 Novembre 1688 à la requête de Louis Souchet, porteur d'icelle, prétendant avoir payé la valeur à la Dame Dannet.

Le fieur Dannet, Lieutenant de la grande Fauconnerie du Roi, & Françoife Michelle fa femme ont fait affigner ledit fieur Huche pardevant les Juge & Confuls de cette Ville de Paris, pour fe voir condamner & par corps à leur payer

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