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retourna trompé par le prêtre, qui était lié d'ancienne amitié avec le bienheureux Grégoire. Les jeunes, gens après avoir réparé leurs forces par un bon repas, restèrent deux jours dans la maison du prêtre; puis ils partirent et arrivèrent enfin à Langres. L'évêque, ravi de voir ces jeunes gens, pleura dans les bras de son neveu Attale; quant à Léon, il le délivra de la servitude avec toute sa famille et lui donna en propriété une terre sur laquelle il vécut libre le reste de ses jours avec sa femme et ses enfants.

Comment fut sauvé Richard Premier le petit duc de Normandie

Voici

(944)

oici encore un bel exemple de dévouement et de fidélité emprunté à nos anciennes annales. Le narrateur que nous suivons ici est Guillaume de Jumièges, qui composa, au XIe siècle, une Histoire des Normands. La scène se passe dans ces années de confusion où la descendance, tour à tour violente et faible de Charlemagne, achève de s'user dans notre pays, et où grandit en face d'elle cette maison des ducs de France d'où va sortir bientôt la dynastie capétienne. Le duché de Normandie, que Charles le Simple a dû céder en 912 au chef Rollon, traverse une crise grave. Le fils de Rollon, le vaillant duc Guillaume Longue-Épée, qui lui a succédé sans trouble et règne déjà depuis treize ans, vient de mourir, traîtreusement assassiné par un rival, le comte de Flandre. Son fils Richard est tout jeune. Bonne occasion pour Louis d'Outremer de tenter de reprendre ce que Charles le Simple a dû jadis céder. Mais contre ce faible roi les Normands auront un allié, un protecteur tout prêt, le comte de France, Hugues le Grand, auquel l'oncle du petit Richard, Bernard, comte de Senlis, a, sans tarder, recommandé la cause de l'orphelin.

Gr sur

UILLAUME Longue-Épée, duc de Normandie, venait d'être assassiné près de Pecquigny sur la Somme, et son fils Richard, encore enfant, était appelé à lui succéder, quand Louis d'Outre-Mer, qui convoitait l'héritage du jeune prince, parvint à s'emparer de sa personne et, sous prétexte de lui faire donner une éducation digne de son rang, le fit transporter à Laon, chef-lieu de son maigre domaine, et sa résidence ordinaire. Il le soumit à la surveillance la plus rigoureuse, se montra dur et cruel à son égard et manifesta même l'intention de lui faire brûler les jarrets'.

1. Cet affreux supplice paraît avoir été usité plusieurs fois, aux époques mérovingienne et carolingienne, à l'égard des princes qu'on voulait éloigner du trône.

Osmond, intendant du jeune Richard, fut informé de la décision du roi, et, prévoyant le sort réservé à l'enfant, le cœur saisi de consternation, il envoya des députés aux Normands pour leur mander que leur seigneur Richard était retenu sous le joug d'une dure captivité. A peine ces nouvelles furent-elles connues, qu'on ordonna dans tous les pays de Normandie un jeune de trois jours, et l'Église adressa au Seigneur des prières continuelles pour le jeune prince.

Ensuite Osmond, ayant tenu conseil avec le plus puissant des vassaux du duché, Yvon, seigneur de Bellême, engagea l'enfant à faire semblant d'être malade, à se mettre dans son lit, et à paraître tellement accablé par le mal que tout le monde dut désespérer de sa vie.

L'enfant, exécutant ces instructions avec intelligence, demeura constamment étendu dans son lit, comme s'il était réduit à la dernière extrémité. Les gardiens, le voyant dans cet état, négligèrent leur surveillance et s'en allèrent de côté et d'autre pour prendre soin de leurs propres affaires.

Il y avait par hasard dans la cour de la maison un tas d'herbe, dans lequel Osmond enveloppa l'enfant; puis, le mettant sur ses épaules, comme pour aller donner du fourrage à son cheval, tandis que le roi soupait et que les citoyens avaient abandonné les places publiques, il franchit les murailles de la ville. A peine arrivé dans la demeure d'un ami fidèle, il s'élança sur un cheval et, prenant l'enfant avec lui, il s'enfuit au plus tôt et arriva à Coucy. Là, ayant recommandé le prince au châtelain, il continua à chevaucher toute la nuit et arriva à Senlis au point du jour.

Le comte Bernard s'étonna de le voir arriver en si grande hâte et lui demanda avec sollicitude comment allaient les affaires de son neveu Richard. Osmond lui ayant raconté en détail tout ce qu'il avait fait et l'ayant réjoui plus que de coutume par un tel récit, ils montèrent tous deux à cheval et allèrent trouver Hugues le Grand. Lui ayant raconté l'affaire et demandé conseil, ils recurent de lui le serment par lequel il engagea sa foi et promit de secourir l'enfant. Aussitôt ils se rendirent à Coucy avec une grande armée, et, ayant enlevé Richard, ils le conduisirent joyeusement dans la ville.

Les Infortunes d'une Maison Royale Lea Stuarta

Q

Un Frère de Roi : le Duc d'Albany

(1485)

uand David Bruce, fils de ce Robert, qui avait été le héros de l'indépendance de son pays, mourut en 1370 sans postérité, c'est à son neveu Robert II que les Écossais déférèrent la couronne. Ce prince avait pour mère une sœur de David et pour père un haut seigneur, Walter, lord high-steward (grand intendant, grand sénéchal) d'Écosse. Steward, Stuart, ce nom d'une charge devint dès lors le nom d'une famille. Famille illustre et malheureuse: ses infortunes ont, peu s'en faut, duré autant qu'elle, et rempli les quatre siècles de son histoire.

Robert III, le fils du fondateur de la dynastie, meurt de chagrin (1406) après avoir eu à déplorer les fautes et la perte d'un de ses fils, David, et la captivité de l'autre, Jacques. Celui-ci, Jacques Ier, sera obligé de reconquérir son royaume sur un oncle perfide, pour mourir enfin assassiné (1437). Jacques II, son fils, est moins malheureux; mais son règne, qu'une mort accidentelle devait prématurément terminer (1460), n'en fut pas moins troublé par une noblesse toujours turbulente.

Instruit par l'infortune de ses prédécesseurs, il était naturel que Jacques III, fils el successeur de Jacques II, montrât quelque défiance à l'égard des nobles et de sa propre famille. Aussi s'enfermait-il volontiers dans son château de Stirling, où il vivait entouré de gens de très médiocre condition, un maçon, un serrurier, un tailleur, un maître d'armes, un maitre de musique.

Ce sont ces favoris qu'on accuse, et sans doute avec raison, d'avoir entretenu les préventions du roi contre ses frères, le duc d'Albany et le comte de Mar, dont il redoutait la popularité.

Mais écoutons ici le récit de Walter Scott dans son Histoire d'Écosse (I, XIX).

L

Es insinuations des hommes vils et obscurs dont Jacques III faisait sa société intime changèrent bientôt son anxiété et ses soupçons en une haine mortelle et implacable. Ces indignes favoris se mirent donc à remplir l'esprit du roi de terreurs et d'appréhensions sur les dangers qu'il prétendait que lui préparaient ses frères.

Ils lui racontèrent que le comte de Mar avait consulté des sorcières pour savoir quand et comment le roi mourrait, et qu'elles lui avaient répondu que ce serait de la main d'un de ses proches parents.

Ils amenèrent aussi à Jacques un astrologue, qui lui dit qu'il y avait en Écosse un lion qui serait mis à mort par ses lionceaux.

Tous ces récits impressionnèrent l'esprit timide et jaloux du roi, qui se décida à faire arrêter ses frères. Albany fut enfermé dans le château d'Édimbourg; quant au sort de Mar, il fut décidé sur-le-champ: le roi le fit étouffer dans un bain ou, selon d'autres historiens, lui fit tirer jusqu'à la dernière goutte de son sang.

Albany courait grand risque de subir le même traitement; mais quelquesuns de ses amis de France ou d'Écosse avaient dressé leur plan pour le

délivrer.

Un petit sloop entra dans la rade de Leith, chargé de vins de Gascogne, et deux feuillettes furent envoyées en présent au prince captif. La garde du château ayant permis qu'elles fussent portées dans la chambre d'Albany, le duc, en les examinant en secret, trouva dans l'une une grosse boule de cire qui renfermait une lettre cette lettre l'exhortait à s'échapper et lui promettait que le petit bâtiment qui avait apporté le vin serait prêt à le recevoir, s'il pouvait gagner le bord de l'eau. On le conjurait en outre de se hater, parce qu'il devait avoir la tête tranchée le jour suivant. Un gros rouleau de cordes était aussi enfermé dans le même tonneau, pour qu'il pùt descendre du haut des murs du château jusqu'au pied du rocher sur lequel il est bati. Son chambellan, serviteur fidèle, partageait la prison de son maître et promit de l'aider dans son entreprise.

Le point principal était de s'assurer du capitaine des gardes. Dans ce dessein, Albany l'invita à souper avec lui, sous prétexte de goûter le bon vin dont on lui avait fait présent. Le capitaine, après avoir posé des gardes où il croyait qu'il pouvait y avoir du danger, se rendit dans la chambre du duc, accompagné de trois soldats, et partagea la collation qui lui était offerte.

Après le souper, le duc lui proposa de jouer au trictrac bientôt le capitaine, assis à côté d'un grand feu et travaillé par le vin que le chambellan ne cessait de lui verser, commença à s'assoupir, ainsi que les soldats, à qui le vin n'avait pas été épargné davantage.

Alors le duc d'Albany, homme vigoureux, dont le désespoir doublait encore les forces, s'élança de la table, et frappa de son poignard le capitaine, qui tomba raide mort. Il se défit de la même manière de deux des soldats, pendant que le chambellan expédiait le troisième, et ils jetèrent leurs corps dans le feu. Ils vinrent d'ailleurs d'autant plus facilement à bout de ces pauvres diables que l'ivresse et la surprise les avaient presque hébétés.

Ils prirent alors les clefs dans la poche du capitaine, et, montant sur les murs, choisirent un coin reculé, hors de la vue des gardes, pour effectuer leur périlleuse descente.

Le chambellan voulut essayer la corde en descendant le premier, mais elle était trop courte; il tomba et se cassa la cuisse. Il cria alors à son maître d'allonger la corde.

Albany retourna à sa chambre, prit les draps de son lit, les attacha à la corde et se trouva sain et sauf au pied du rocher. Alors il prit son chambellan sur ses épaules, le porta dans un lieu sùr, où il pùt rester caché jusqu'à ce que sa blessure fùt guérie, et se rendit sur le bord de la mer, où, au signal convenu, une barque vint le prendre et le conduisit au sloop, qui fit voile à l'instant pour la France.

Pendant la nuit, les gardes, qui savaient que leur officier était avec trois hommes dans l'appartement du duc, n'eurent aucun soupçon de ce qui se passait. Mais lorsqu'au point du jour ils aperçurent la corde qui pendait le long du mur, ils prirent l'alarme et se précipitèrent dans la chambre du duc; ils y trouvèrent le corps d'un des soldats en travers de la porte et ceux du capitaine et des deux autres étendus dans le feu.

Le roi fut très surpris d'une évasion si extraordinaire, et il ne voulut y ajouter foi qu'après avoir examiné la place de ses propres yeux.

U

Le petit roi Jacquea Cing

(1525)

demi-siècle s'est écoulé depuis les événements qui ont marqué le milieu du règne de Jacques III. La fatalité n'a cessé de s'appesantir sur les Stuarts. Jacques III lui-même meurt sur le champ de bataille (1488) en luttant contre la noblesse écossaise, qui est parvenue à soulever contre lui son fils Jacques IV. Celui-ci, à son tour, meurt en 1513 dans une guerre contre son beau-frère Henri VIII, roi d'Angleterre, laissant une veuve, Marguerite, fille d'Henri VII, qui s'empresse d'épouser le chef même du parti féodal, le comte d'Angus, de la famille des Douglas, et un orphelin d'un an et cinq mois, Jacques V.

Le pauvre enfant se trouvait ainsi, presque dès le berceau, aux mains des pires ennemis de sa famille, de ceux dont l'unique but était de le supplanter sur le trône d'Écosse. Angus, aidé de ses deux frères, George et Archibald, était le véritable maître du royaume, sans qu'il ait jamais pris d'ailleurs officiellement le titre de régent. Ainsi s'écoula l'enfance du petit roi, jusqu'au jour où il réussit à ressaisir à la fois la liberté et le pouvoir : il avait alors douze ans. Nous suivrons de nouveau ici le récit de Walter Scott (Id., I, xxIII).

LUSIEURS tentatives pour délivrer le roi avaient échoué; deux batailles.

P'avaient même élé livrées sans succès par les partisans de Jacques V, et,

au commencement de la seconde, s'apercevant que le roi cherchait l'occasion de fuir, George. Douglas lui avait dit :

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