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Sous mes faux cheveux blonds déja toute chenue, A jetté fur ma tête, avec fes doigts pefans, Onze luftres complets, furchargés de trois ans, Ceffez de préfumer dans vos folles penfées, 30 Mes Vers, de voir en foule à vos rimes glacées Courir, l'argent en main, les Lecteurs empreffés. Nos beaux jours font finis, nos honneurs font paffés, Dans peu vous allez voir vos froides rêveries Exciter du Public les juftes moqueries;

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Et leur Auteur, jadis à Regnier préféré,

A Pinchêne, à Liniere, à Perrin comparé.
Vous aurez beau crier: O Vieilleffe ennemie!
N'a-t-il donc tant vécu que pour cette infamie?
Vous n'entendrez par-tout qu'injurieux brocards
Et fur vous & fur lui fondre de toutes parts..

VERS 28. Onze luftres complets furchargés de trois ans.) Cinquantehuit ans.

IMIT. Vers 32. Nos beaux jours font finis, nos honneurs font paffés.] Ce vers reffemble un peu à celui-ci de l'Epitre cinquieme.

Ainfi que mes beaux jours, mes

chagrins font paffés.

Et à cet autre de RACINE, dans
Mithridate, Acte III. Sc. V.

CHANG. Vers 36. A Pinchêne, à Liniere, à Perrin comparé.) Dans la premiere compofition il y avoit : A Sanlecque, à Regnard, à Bellocq comparé. Ces trois Poëtes ont compofé des Satires, & ils avoient écrit, contre la Satire X. de notre Auteur; mais il ne voulut pas faire imprimer leurs noms; & il mit ces trois autres Poëtes qui n'étoient plus vivans. REGNARD s'étoit reconcilié avec lui, & BELLOCQ lui avoit fait faire des excufes.

IMIT. Vers 37.

O Vieil

Mes ans fe font accrús: mes hon leffe ennemie ! &c.) Vers du Cid,

neurs font détruits.

CHANG. Vers 34. Exciter du Public les juftes moqueries.) L'Auteur avoit mis dans toutes les éditions: Du public exciter, &c. mais je lui propofai ce Changement, & il l'a approuvé.

Acte I. Sc. IV.

VERS41. Que veut-il, dira-t-on ? &c.] Ce font les propres termes des Cenfeurs de notre Poëte.

VERS 44. Malheureux, laiffe en paix &c.) C'eft la traduction de ces deux vers d'Horace L. I. Ep. I. v. 8.

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Que veut-il, dira-t-on ? Quelle fougue indifcrette Ramene fur les rangs encor ce vain Athlete? Quels pitoyables Vers! Quel ftyle languiffant! Malheureux, laiffe en paix ton cheval vieillissant, 45 De peur que tout à coup efflanqué, fans haleine, Il ne laiffe, en tombant, fon Maître fur l'arene. Ainfi s'expliqueront nos Cenfeurs fourcilleux: Et bientôt vous verrez mille Auteurs pointilleux Pièce à pièce épluchant vos fons & vos paroles, 50 Interdire chez vous l'entrée aux Hyperboles ; Traiter tout noble mot de terme hazardeux, Et dans tous vos Difcours, comme monftres hideux, Huer la Métaphore, & la Métonymie ;

(Grands mots que Pradon croit des termes de Chymie:) 35 Vous foûtenir qu'un Lit ne peut être effronté;

Solve fenefcentem mature fanus

equum, ne

Peccet ad extremum ridendus, &
ilia ducat.

Pradon avoit fait l'application de
ces deux vers à Mr. Despreaux, &
les avoit mis à la fin d'une Criti-
que intitulée: Réponse à la Satire X.
du Sieur D
Mais notre
Auteur montre ici à Pradon, com-
ment il faut traduire Horace.

Y iij

& quelques autres, s'étoient acharnés fur cette expreffion, qui eft tirée du vers 345. de la Satire X.

Se font des mois entiers fur un lit effronté

Traiter d'une vifible & parfaite
fanté.

Rien n'eft plus commun que cette
Figure dans la Poëfie. Horace,
Ode XXXVII. du Livre I. v. 6.

Dum Capitolio

Regina dementes ruinas - - parabat,

VERS 54. Grands mots que Pradon croit des termes de Chymie.] Allufion à un fameux trait d'ignorance. de Pradon, qui ne favoit pas faire la différence de la Chronologie & La Reine Cléopatre préparoit de folles de la Géographie. Ce trait eft rap- ruines au Capitole; pour dire: La porté ci-devant fur le dernier vers folle Reine préparoit &c. Mr. le de l'Epitre VII. Prince de Conti ne blâmoit pas l'Épithête d'effronté, mais il trouvoit, qu'elle préfentoit un autre

VERS 55.
Qu'un lit ne
peut être effronté.] Perrault, Pradon,

Que nommer la Luxure eft une impureté.

En vain contre ce flot d'averfion publique
Vous tiendrez quelque temps ferme fur la Boutique;
Vous irez à la fin, honteufement exclus,

60 Trouver au Magazin Pyrame & Regulus,

65

Ou couvrir chez Thierry, d'une feuille encor neuve, Les Méditations de Buzée & d'Hayneuve:

Puis, en triftes lambeaux femés dans les Marchés, Souffrir tous les affronts au Jonas reprochés.

Mais quoi, de ces difcours bravant la vaine attaque, Déja comme les Vers de Cinna, d'Andromaque, Vous croyez à grands pas chez la Postérité Courir, marqués au coin de l'Immortalité. `

Hé bien, contentez donc l'orgueil qui vous enivre. 70 Montrez-vous, j'y consens : mais,du moins,dans mon Livre Commencez par vous joindre à mes premiers Écrits. C'est là qu'à la faveur de vos Freres chéris, Peut-être enfin foufferts, comme Enfans de ma plume,

fens, & qu'elle difoit plus que l'Auteur n'avoit voulu dire. Mr. Despreaux convenoit, que c'étoit la feule bonne critique qui lui eût été faite fur cet endroit.

VERS 56. Que nommer la Luxure eft une impureté. Mr. Perrault fit la Critique de la Satire X. dans la Préface qu'il mit à fon Apologie des Femmes. Cet Écrivain blâmoit Mr. Despreaux d'avoir parlé des Héros à voix luxurieufe, & de la Morale lubrique des Opéra ; & condamnoit ces expreffions, comme contraires à la pudeur. Mais notre Auteur fut pleinement juftifié de cette accufation par Mr. Arnauld, dans une

Lettre que ce célèbre Docteur écri vit à Mr. Perrault lui-même, & qui eft inférée ci-après au Tom. IV.

VERS 60. Pyrame & Regu Lus.] Pièces de Théâtre de Pradon. VERS 62. Les Méditations de Bu gée & d'Hayneuve.) Notre Auteur étant un jour dans la Boutique de Thierry fon Libraire, s'apperçut qu'on avoit employé les Tragédies de Pradon à envelopper les Médita tions du P. JULIEN HAYNEUVE, Jéfuite. Le P. BUZEE, autre Jéfuite, a fait auffi des Méditations autrefois eftimées.

VERS 64. Tous les affronts au Jonas reprochés.] Jonas, Foëme

Vous pourrez vous fauver, épars dans le Volume. 75 Que fi mêmes un jour le Lecteur gracieux,

Amorcé par mon nom, fur vous tourne les yeux; Pour m'en récompenfer, mes Vers, avec usure, De votre Auteur alors faites-lui la peinture: Et, fur-tout, prenez foin d'effacer bien les traits, so Dont tant de Peintres faux ont flétri mes portraits. Déposez hardiment: qu'au fond cet Homme horrible, Ce Cenfeur qu'ils ont peint fi noir & fi terrible, Fut un Esprit doux, fimple, ami de l'Équité, Qui cherchant dans fes Vers la feule Vérité, 85 Fit, fans être malin, fes plus grandes malices, Et qu'enfin fa candeur feule a fait tous fes vices. Dites, que harcelé par les plus vils Rimeurs

Jamais, bleffant leurs Vers, il n'effleura leurs moeurs: Libre dans fes difcours, mais pourtant toûjours fage; 90 Affez foible de corps, affez doux de vifage, Ni petit, ni trop grand, très-peu voluptueux, Y iv

héroïque, non vendu. Voyez le vers 91. de la Satire IX.

VERS 66. De Cinna, d'Andromaque.] Cinna, Tragédie de Corneille: Andromaque, Tragédie de Racine.

VERS 74. Vous pourrez vous fauver, épars dans le Volume.) L'Auteur fe repentoit d'avoir publié la Satire X. en un volume féparé; les Critiques la voyant ainfi feule, l'avoient attaquée avec plus de hardieffe, & cela lui fit prendre la réfolution de ne plus donner aucun Ouvrage qu'il ne l'inférât en même temps dans le Volume de fes Oeuvres.

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Ami de la Vertu plutôt que vertueux.

Que fi quelqu'un, mes Vers, alors vous importune, Pour favoir mes parens, ma vie & ma fortune, 95 Contez-lui, qu'allié d'affez hauts Magiftrats, Fils d'un Pere Greffier, né d'Ayeux Avocats; Dès le berceau perdant une fort jeune Mere, Réduit, feize ans après, à pleurer mon vieux Pere, J'allai d'un pas hardi, par moi-même guidé, 100 Et de mon feul Génie en marchant fecondé, Studieux amateur & de Perfe & d'Horace, Affez près de Regnier m'affeoir fur le Parnaffe. Que par un coup du Sort au grand jour amené, Et des bords du Permeffe à la Cour entraîné,

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fut

Jean Boileau fut un des quatre
nommés pour exercer fa charge
près du Parlement; & HENRI
BOILEAU fon Petit-fils,
reçû en 1408. Avocat du Roi en la
même Cour.
leurs Défcendans ont été de célè-
Quelques-uns de
bres Avocats.

VERS 97. Dès le Berceau perdant une fort jeune Mere.) Il n'avoit NIELLE, fa Mere, mourut âgée qu'onze mois quand ANNE DEde 23. ans, en 1637.

VERS 98. Réduit, feize ans après, à pleurer mon vieux Pere.] Il mourut en 1657. âgé de 73. ans.

VERS 102. Affez près de Regnier m'asseoir fur le Parnaffe.) Cela eft bien modefte. Il a parlé plus hardiment, quand il n'a fait que rapporter les fentimens du Public: Et leur Auteur jadis à Regnier préfére, vers 35.

VERS 108.. Crayonnât fes exploits.) Il fut nommé pour écrire

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