vous fuplions, pour l'utilité de tous ceux qui font à LI. contre Rufin. Saint Jerôme ayant reçu cette lettre avec la verfion S. Jerôme écrit & la préface de Rufin, écrivit une lettre à Pammaque & à Ocean, où il fe juftifie des loüanges qu'il avoit données à Origene. Il dit qu'il a loüé fon esprit & fon érudition, mais fans aprouver fa doctrine; & qu'il s'en eft fervi comme S. Cyprien de Tertullien, comme on fe fert des livres d'Apollinaire contre Porphyre, & de l'histoire ecclefiaftique d'Eusebe. Il avoue qu'il a étudié fous Apollinaire & fous Didyme, & qu'il a eu même un Juif pour maître. J'ai lû Origene, ajoûte-t-il, je fçai tout ce qu'il a écrit: croyez-moi, j'en parle par experience, fes dogmes font empoifonnez, & font violence à l'écriture. Il loüe les mœurs d'Origene & fes travaux immenfes ; il convient qu'il eft excufable en fes erreurs; feulement il ne veut pas qu'on le vante comme un apôtre, & qu'on prétende qu'il ne s'eft trompé en rien. Quant à l'apologie d'Origene attri- «. 4. buée au martyr S. Pamphile: il foutient qu'elle n'eft Ep. 66. pas de lui, mais d'Eufebe. Il écrivit auffi à Rufin; car ils s'étoient féparez en paix, quand Rufin quitta la Paleftine. S. Jerôme fe plaint doucement de cette préface, où Rufin le loüant en aparence, l'accufoit en j effet d'Origenifme; & ille prie de ne plus en ufer ainfi, de peur que d'autres ne fuffent pas fi patiens. ་ Q ij C. 3. En même temps S. Jerôme traduifit les livres des principes d'Origene, comme Pammaque & Ocean l'en avoient prié ; & il reconnut lui-même la neceffité d'en faire une nouvelle traduction, quand il eut conferé avec le grec la verfion qu'ils lui avoient envoyée. Car il remarque que Rufin avoit corrigé les erreurs d'Origene contre la Trinité, qui n'eussent pas été fouffertes à Rome; mais qu'il avoit laiffé les autres dogmes, de la chûte des anges & des ames, de la réfurrection, de la multitude des mondes, du rétabliffement de toutes choses. Rufin avoit laiffé toutes ces erreurs, comme il les avoit trouvées dans l'original: ou les avoit fortifiées par les memoires de Didyme. S. Jerôme fe crut donc obligé de faire une verfion plus fincere de cet ouvrage, où toutes les erreurs d'Origene paruffent également: Pammaque l'ayant reçue, eut horreur de ces erreurs, & tint le livre enfermé, de peur qu'elles nese répandiffent dans le public. Mais un frere pouffé d'un zele indifcret, les demanda pour les lire, promettant de les rendre auffi-tôt : & Pammaque les luiprêta sans se défier de rien. L'autre prit auffi-tôt des écrivains en notes, & fit copier tout l'ouvrage fi promptement, qu'il le rendit plutôt qu'il n'avoit promis. Il communiqua cette copie à d'autres: mais elle étoit pleine de fautes & manquoit de fens en plufieurs endroits; tant par l'obfcurité de la matiere, que par la précipitation des copistes. C'est pourquoi dix ans aprés, & vers l'an 409. un nommé Avitus pria faint Jerôme de lui envoyer cette verfion dans fa pureté. Saint Jerôme le fit ; & pour lui donner en même temps le contrepoifon il lui écrivit une lettre il marque les erreurs contenues dans, chacun dess quatre livres des principes. Nous avons perdu la ver- LII. Le pape Anaftafe l'avoit appellé plufieurs fois à Rome pour fe juftifier. Il n'y alla point & fe contenta Rome. de lui écrire une lettre: où il dit pour excufe, qu'ayant To. ult. Hierd été trente ans fans voir fes parens, il eût été dur de les quitter fi-tôt, & qu'il étoit trop fatigué de fes grands voyages. Il prétend que fa foy eft affez sup. liv. XVII. 7. Pamm. Marc. in fi. Gap. Hier, to. ult, & des églifes d'Aquilée & de Jerufalem. Cette apologie ne contenta pas le pape Anaftafe: il ne laiffa pas de condamner Rufin; & ayant apris que Theophile d'Alexandric avoit condamné les écrits d'Origene, & en défendoit la lecture: il les conHier. ep. 78. ad damna auffi à Rome. Ce qu'il fit principalement à la pourfuite de fainte Marcelle, & comme l'on croit l'an 401. L'année suivante il écrivit à Jean évêque de Jerufalem, qui l'avoit confulté au fujet de Rufin ; & lui To. 2.cone. p. 1194 en parla ainsi : C'est à lui à voir comment il fe justifiera devant Dieu, qui eft juge de fa conscience. Pour Origene qu'il a traduit en nôtre langue, je ne fçavois point auparavant qui il étoit, ni ce qu'il avoit dit. Il témoigne enfuite defaprouver tout à fait cette traduction, comme n'étant propre qu'à infecter l'églife Romaine d'une mauvaise doctrine. Il fe confie en la providence divine, que fa conduite sera aprouvée par tout le monde; & dit qu'il en a écrit plus amplement à son confrere Venerius. C'étoit l'évêque de Milan, qui avoit fuccedé à Simplicien. Il ajoûte qu'il y a un refcrit des empereurs, qui défend à tous les fideles la lecture des livres d'Origene. Il exhorte Jean à ne point s'arrêter aux difcours du peuple, & ne prendre de mauvais foupçons contre perfonne : ce qui femble regarder S. Jerôme; & conclut, parlant de Rufin: Scachez que je le tiens féparé de nous, enforte que je defire d'ignorer ce qu'il fait & où il eft :: enfin qu'il voye où il pourra être abfous. Ainfi finit la lettre du pape Anastase, qui eft le feul écrit que nous ayons de lui. Il y traite Jean de Jerufalem avec. beaucoup d'honneur, & dit que la gloire de son épifcopat fe répand par tout le monde: ce qui montre que les reproches d'Origenifme avancez contre lui a 6. cons. p. 658, B. par S. Epiphane & par S. Jerôme, n'avoient pas fait Hier. 2. apolóz e. grande impreffion à Rome, ou qu'elle étoit effacée. Epift. Justin. 10. 5. Origene fut auffi condamné en Italie par Venerius de Milan, & même par Chromace d'Aquilée : enfin tout -l'Occident le condamna.. C LIVRE VINGT-UNIE ME.. Theophile con- Profp. Chr. ELUI qui entreprit le premier & avec le plus de chaleur la condamnation d'Origene, fut Theophile évêque d'Alexandrie. Il fut long-temps à s'y réfoudre, quoique preffé par S. Epiphane & par S. Jerôme, qui lui écrivit que plufieurs faints n'approuvoient pas la patience dont il ufoit envers les he- Hier. ep. 68. retiques, qu'il efperoit en vain corriger par la douceur. Enfin il fut déterminé par cette occafion. Entre Ep. ad Epiph. Sup. liv. xix. m2 les moines d'Egypte, il y en avoit plufieurs de fimples Socr. VI. c. 7& groffiers: qui s'attachant à l'écorce des expreffions sozom. v111.c.114 de l'écriture fainte, s'imaginoient que Dieu avoit une figure humaine, ce qui les fit nommer en grec Antropomorphytes. Les mieux inftruits voulant les desabufer, il s'excitoit des difputes; & comme Origene, dé- 45. Grié d'ailleurs, étoit le plus éloigné de cette groffiere: explication de l'écriture : les Antropomorphytes traitoient d'Origeniftes ceux qui les vouloient defabufer, & ceux-ci les traitoient: eux-mêmes de blafphema teurs & d'idolâtres, L'évêque Theophile foutenoit la faine doctrine, & enfeignoit publiquement que Dieu eft incorporel.. Il s'en expliqua même dans une lettre pascale, où il réfuta fort au long l'erreur contraire. Cette lettre caff, coll. x. 6. 22 étant portée à l'ordinaire dans les monafteres, irrita |