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C. 2.

les neceffitez de la vie. ils efperoient même en convertir d'autres par leur exemple & leurs instructions. Enfin ils fe figuroient que dans le voifinage des terres de leurs ancêtres, ils trouveroient de belles forêts & des folitudes agreables & fertiles. Ils communiquerent ces pensées à l'abbé Abraham, qui en prit sujet de les entretenir de la mortification, & leur dit : Ces pensées fi foibles marquent, que vous n'avez pas encore renoncé au monde ni mortifié vos defirs. Nous aurions pû chercher auffi les mêmes foulagemens. Nos parens nous nourriroient volontiers: & quand ils nous manqueroient, les riches de ce monde nous fourniroient avec joye tous nos befoins. Nous pouvions mettre nos cellules fur le bord du Nil, & nous épargner la peine d'aller querir de l'eau à quatre milles. Nous aurions auffi trouvé dans ce païs des deferts agreables, avec des arbres fruitiers & des jardins. Mais nous avons préferé à tout ces deferts triftes & fecs, & ces fables falez & ftériles. Ceux qui tendent à la perfection, doivent chercher des lieux où rien ne les invite à fortir de leur cellule, pour travailler au grand air, qui diffipe & fait évaporer l'efprit en diverfes 11. 12. 13. penfées. Il infifte fur la neceffité du travail des mains, pour ne point vivre aux dépens d'autrui, & ne pendre de perfonne.

C. 3.4.

VII.

Coll. XVII. c. I.

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Caffien à Scetis. Aprés que Germain & Caffien eurent demeuré fept ans en Egypte, ils retournerent à leur monaftere de Bethleem, où ils furent tres-bien reçûs; & avec la permiffion de leurs anciens, ils revinrent pour vifiter le fameux defert de Scetis; & yvirent entre-autres, fept illuftres folitaires, Moïfe, Paphnuce, Daniel, SeCell. 1. c. 1. rapion, Theodore, Serene & Ifaac. L'abbé Moïse

Coll. 11. c. 2. avoit été dans fa jeuneffe auprés de S. Antoine; &

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comme ils lui demandoient quelque instruction, il coll. 1. c. 1. fe fit beaucoup prier,ne voulant parler de la perfection chrétienne, qu'à ceux qui la defiroient ardemment & non pas à ceux à qui elle étoit indifferente: pour ne pas tomber lui-même dans la vanité ou l'indifcretion. Enfin se laiffant toucher à leurs prieres & à leurs larmes, il leur parla du but de la vie monaftique, qui est d'acquerir la pureté de cœur, pour arriver à la vie éternelle. Le lendemain il les entretint de la discretion, Coll. 111.c.1. ou plûtôt du discernement des efprits & de la prudence qui regle toutes les autres vertus: dont il confirma la neceffité par plufieurs exemples.

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Ils eurent auffi une conference avec l'abbé Paphnuce furnommé Bubale ou Bufle, à cause de son grand amour pour la folitude: qui lui faisoit fuïr la compagnie même des autres anacoretes. Il étoit prêtre du defert de Scctis, & alors àgé de plus de quatrevingt-dix ans. Toutefois il n'avoit jamais voulu quitter la cellule qu'il avoit commencé d'habiter en fa jeunesse, quoi-qu'éloignée de l'eglise de cinq milles, qui font prés de deux lieues. Il ne laiffoit pas d'y aller tous les famedis & les dimanches; & n'en revenoit pas à vuide, mais les épaules chargées d'un grand vafe, qui contenoit fa provifion d'eau pour toute la femaine; & dans ce grand âge, il ne voulut jamais fouffrir que les jeunes gens le foulageaffent de ce tra

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vail. Il entretint les deux amis des trois fortes de renonciations neceffaires à un folitaire: aux richeffes & aux biens exterieurs, à ses passions, à ses pensées, pour oublier toutes les chofes temporelles. Daniel Coll. xv. 6. 14 étoit principalement recommandable par fon humilité. Paphnuce le fit ordonner diacre, le préferant à plufieurs autres plus âgez, & même enfuite il le fit

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Gal. v. 17.

Coll. 7.

Goll. VI. c. I.

élever au facerdoce: mais Daniel ne voulut jamais en faire de fonction en fa prefence, & continua de lui fervir de diacre, tout prêtre qu'il étoit. Paphnuce le deftinoit pour fon fucceffeur; mais il fut fruftré de fon efperance, & Daniel mourut devant lui. El entretint les deux amis de la caufe des fechereffes fpirituelles & du combat de la chair & de l'efprit. Serapion qui excelloit principalement dans la discretion, leur parla des huit vices principaux, c'est-à-dire des fources de tous les pechez: la gourmandise, l'incontinence, l'avarice, la colere, la triftcffe, l'ennui, la vanité & l'orgueil.

Il y avoit un monaftere en Palestine prés de Thecué vers la mer morte & les deferts d'Arabie, où de trés faints moines habitoient depuis trés-long-temps... Ils furent tuez dans une incurfion fubite des Sarafins Les évêques du païs avec tout le peuple Arabe, enleverent leurs corps, & les enterrerent avec les reliques des martyrs. Il s'affembla une multitude infinie de peuples des deux villes voifines, qui difputoient leurs reliques jufqu'au combat & aux épées, les uns fe fondant fur le voifinage de leur demeure, les autres fur le lieu de leur origine : l'église les honore Martyr, Rom. comme martyrs le vingt-huitiéme de May. Caffien & quelques autres fcandalifez de cet évenement, comme indigne de la bonté de Dieu, allerent confulter Theodore, qui demeuroit aux Celles, entre Nitrie & Scetis: & il les entretint à cette occafion fur la nature. du mal & l'utilité des fouffrances. Serene recomman dable par fa pureté angelique, leur parla de la mobilité de l'ame., & du pouvoir des démons fur elle. Il raporte comme un fait certain, que les premiers for litaires qui habiterent ces deferts, étoient bien pluss

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Qoll. VII.

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tourmentez des démons, & attaquez même visiblement: enforte que dans les communautez on étoit obligé de veiller tour à tour pour faire garde mais alors leur pouvoir étoit fenfiblement diminué. Cet coll. vIIr. entretien engagea l'abbé Serene à leur en faire un autre, de la nature des démons, de leur chûte, de leur fubordination & de leurs emplois. L'abbé Isaac les entretint de l'oraison.

Coll. IX. X..

VIII
Vie des moines

d'Egypte.

1. Inftit... S

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C. 2.

C. G.

Le long fejour que fit Caffien chez les moines d'Egypte, lui donna moyen de s'inftruire parfaitement de leur maniere de vivre; & c'eft par lui que nous en pouvons le plus fçavoir. Il décrit auffi leur habit. Ils sup. liv. xv. n. så portoient une tunique de lin, qui ne venoit guere au Reg. S. Pach. c. 24 deffous des genoux, & dont les manches ne paffoient pas les coudes, afin de laiffer plus de liberté pour le travail. C'est la même qu'ils nommoient collobe ou lebitone. Ils n'approuvoient pas l'ufage des cilices, comme extraordinaire; & en general ils blâmoient toute affectation. La tunique étoit large, & pour l'arrêter, ils portoient non-feulement une ceinture, mais encore une écharpe ou cordon de laine, qui defcendant du cou, de part & d'autre, paffoit sous les aisselles, & ferroit les deux côtez, afin de donner aux bras toute liberté. Ils portoient des cuculles ou capuces, mais trés petits, & qui ne descendoient que jusques au haut des épaules; & ils ne les quittoient ni jour ni nuit. Ils marchoient nuds pieds pour l'ordinaire: mais ils se chauffoient quelquefois, pour le garantir du froid des matinées d'hyver, ou de la chaleur du i prof. in Regs, midi ; & alors ils portoient cette chauffure vulgaire, que l'on nommoit en latin caliga. Par deffus la tunique, ils portoient un manteau, nommé Maforte, qui couvroit le cou & les épaules, & n'étoit que de

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Hier.

S. Pach

c. T.

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lin comme la tunique: & par deffus une melote ou peau de chevre. Ils marchoient avec un bâton à la

main.

Leur nourriture ordinaire n'étoit que du pain & de l'eau. Car aprés de longues experiences & de mûres déliberations, ils avoient préferé cette nourriture à celle des legumes, des herbes ou des fruits, que d'autres mangeoient fans pain. Le leur étoit du biscuit, & la quantité étoit d'une livre Romaine par jour : c'est-à-dire douze onces, en deux petis pains de fix onces chacun, nommé paximacia, dont ils manColl. XI. 6. 23. geoient l'un à none, & l'autre le foir. Les jours qui n'étoient pas jeûnes comme les dimanches, & pendant Coll. 11.6.26. le temps pafcal, ils avançoient le premier repas jufques à midi, & ils l'avançoient auffi quelquefois en faveur des hôtes; mais foit qu'ils mangeaffent une ou plufieurs fois, ils n'excedoient jamais la mesure qu'ils s'étoient prescrite. Elle paroiffoit grande d'abord, & les nouveaux moines avoient peine à manger leurs douze onces de pain: mais à la longue quand falloit vivre de pain feul, fans y rien ajoûter, quelque jour que ce fût, cette nourriture si seche paroifColl. VIII. 6. 1. foit legere. Toutefois ils ajoûtoient en certains jours quelques douceurs : & Caffien dit que l'abbé Serene les traitant un dimanche, leur donna une sausse avec un peu d'huile & du fel frit, trois olives, cinq pois chiches, deux prunes, chacun une figue. Ils ne prefcrivoient pas à tous la même abftinence, ils avoient v.Inftit. c. 5.9. égard à l'âge, au fexe, à la force de chacun. Ils n'aprouvoient pas les jeûnes de deux ou trois jours ou plus, fans manger: ils aimoient mieux que l'on prît chaque jour de la nourriture.

C. 20.

C. 27.

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Ils s'affembloient pour prier le foir & la nuit ; &

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