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role de verité. Il s'eft réjoui que je fois venu ici, mais ce n'eft pas pour me voir mourir avec vous, ou être spectateur de vôtre mort. Enfin je me confie en celui qui ne peut mentir: que fi vous méprisez tout ce que je vous ai dit, il vous vifitera par les fleaux, & ne permettra pas que vous foyez condamnez avec ce monde. Il dit cela d'une maniere fi touchante, qu'il tira les larmes de fes auditeurs, & ne put retenir les fiennes.

n. 8.

Le lendemain qui étoit le jour du feftin, il apprit que quelques-uns murmuroient encore, & difoient: De quoi s'avife-t-on maintenant? ceux qui ont fouffert cette coutume, n'étoient-ils pas Chrétiens? S. Auguftin ne fçachant quelle plus grande machine employer pour les ébranler, avoit réfolu de lire le paffage d'Ezechiel, qui dit que la fentinelle eft dé- Ezech. XXXIII. 9. chargée, quand elle a annoncé le péril; enfuite fecoüer fes habits & fe retirer. Mais avant qu'il montât en chaire, les mêmes qui avoient fait ces plaintes le vinrent trouver. Il les reçut doucement, & en peu de mots leur fit entendre raifon. Quand le temps de prêcher fut venu, il laiffa la lecture qu'il avoit préparée, & qui n'étoit plus neceffaire, & pour répondre à cette objection: Pourquoi abolir maintenant cette coûtume? il dit: Aboliffons-la du moins à prefent. Mais pour juftifier ceux qui l'avoient fi long-temps foufferte, il expliqua la neceffité qui l'avoit introdui te. Aprés les perfecutions, les payens qui fe convertif foient en foule avoient peine à renoncer aux feftins qu'ils faifoient à l'honneur de leurs idoles: on eut égard à cette foibleffe,& on leur permit de faire quelque réjouiffance femblable en l'honneur des martyrs, en attendant qu'ils fuffent capables des joïes pu

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n. 94

1006. C.

N. 10.

rement fpirituelles. Nous trouvons en effet que S. Vita Thaum. p. Gregoire Thaumaturge ufa de cette condefcendance,au rapport de S. Gregoire de Nyffe. Mais à present, ajoûte S. Auguftin, il eft temps de vivre en vrais chrétiens, & de rejetter ce qui n'a été accordé à vos peres, que pour les rendre chrétiens. Il leur propofa enfuite l'exemple des églifes d'outre-mer, c'està-dire, d'Italie: dans lefquelles cette coutume n'avoit jamais eu de lieu, ou avoit été abolie par les bons évêques, entre-autres par S. Ambroife: comme S. VI. Confeß. c. 12. Augustin témoigne lui-même ailleurs. On objectoit l'exemple de l'églife de S. Pierre au Vatican, où ces Natal. 9. fub. fin. festins fe faifoient tous les jours ; & S. Paulin fe plaint de ce même abus. S. Auguftin répondit: J'ai oui dire qu'il a été fouvent deffendu; mais le lieu est éloigné du logement de l'évêque; & dans une fi grande ville, il y a une quantité d'homme charnels, principalement d'étrangers, qui y abordent de jour en jour. En ce temps-là, & long-temps aprés, le pape demeuroit au palais de Latran, & le Vatican étoit hors la ville.

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Saint Auguftin voyant tout le peuple d'accord d'abolir cette mauvaife coutume, les pria d'affister à midi aux lectures & au chant des pleaumes, que l'on feroit au lieu des feftins ordinaires : L'affemblée fut encore plus nombreuse que le matin: on lut & on chanta alternativement, jufques à l'heure où le clergé revint avec l'évêque, qui obligea S. Auguftin de parler encore au peuple. Il y avoit répugnance & fouhaitoit que cette journée fi dangereufe fût terminée pour lui: mais il falloit obéir. Il fit un petit difcours, pour rendre graces à Dieu; & fçachant que les héretiques faifoient dans leurs églifes les feftins

,

accoûtumez, il ne manqua pas de relever cette oppofition. Enfuite on celebra l'office des vêpres, comme on faifoit tous les jours; & l'évêque s'étant retiré avec fon clergé, il demeura encore quantité de peuple dans l'églife, à chanter des prieres jufques à la nuit. S. Auguftin écrivit cet heureux fuccés à fon ami S. Alypius évêque de Thagafte.

AN. 195

S. Auguftin évê

Il enfeignoit en public & en particulier; & com- XII. battoit toutes les herefies, principalement les Dona- que d'Hippone. tiftes & les Manichéens: foit en compofant des li- off. vita c. 7. vres, foit en parlant fur le champ. Les heretiques auffibien que les catholiques accouroient avec ardeur pour l'entendre; & plufieurs amenoient des écrivains en notes, pour conferver fes difcours. Tout le monde en parloit: fa réputation s'étendoit de tous côtez, Se jufques aux églifes de deçà la mer, qui s'en réjoüiffoient. Ce fut pendant ce temps de fa prêtrife qu'il 1. Retr. e. 18. 19. commença à expliquer l'écriture fainte. De là vint le livre imparfait fur la Genese, les deux livres fur le fermon de la montagne : l'explication fur quelques propofitions de l'epitre aux Romains: car comme il lifoit cette épître à Carthage, avec ceux de fa compa gnie, ils faifoient écrire ce qu'il répondoit à leurs queftions. Il expliqua auffi l'épître aux Galates, mais tout de fuite; & commença d'expliquer de même l'épître aux Romains. Il fit depuis recueillir fes réponses fur diverfes queftions, traitées depuis fon rctour en Afrique : ce qui produifit le livre des quatrevingt-trois questions. Il écrivit un livre du menfonge, dont il n'étoit pas content: mais il ne put empêcher qu'il ne devînt public. Le livre contre le Manichéen Adimante eft encore du même temps.

L'évêque Valere voyant fa réputation, commença

6.231

C. 24i 6.25.

C. 26,

C. 27.

C. 22.

Poff.c.8.

AN. 395.

le

à craindre qu'on ne le lui enlevât pour le faire évêque: ce qui fût arrivé, s'il n'avoit eu foin de le faire fi bien cacher, qu'il ne put être trouvé par ceux qui cherchoient. Cette experience redoubla la crainte de Valere ; & fe fentant accablé de vieilleffe & d'infirmitez, il écrivit fecretement à l'évêque de Carthage, le conjurant qu'Auguftin fût ordonné évêque pour l'églife d'Hippone, comme fon coadjuteur, plûtôt que comme fon fucceffeur. Il obtint une ré ponse favorable. Enfuite il pria le primat de Numidie, qui étoit Megalius évêque de Calame, de venir vifiter l'églife d'Hippone:& quand il fut arrivé, Valere lui déclara fon intention, & aux autres évêques qui fe trouverent prefens par hazard, à tout le clergé & à tout le peuple d'Hippone. Tout le peuple en fut agréablement furpris, & le peuple demanda que la chose fût executée, témoignant par fes acclamations l'ardeur de fon defir. Il n'y eut que Megalius qui fit Conc. lit. Petil. difficulté de l'ordonner. Ayant conçu de l'indignation contre S. Augustin, fans qu'on en sçache le fujet; il écrivit qu'il avoit donné à une femme un poison pour s'en faire aimer du confentement de fon mari; & cela fous prétexte d'un pain, qu'il avoit envoyé Lib. 1x. Conc. pour Eulogie, fans y entendre fineffe. Megalius preffé par le concile de prouver ce qu'il avoit avancé, & ne le pouvant faire en demanda pardon, & l'obtint; & reconnut fi bien l'innocence de S. Auguftin, qu'il lui impofa les mains.

111. c. 16.

Crefc. c. 64.

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S. Auguftin foûtenoit qu'il ne dévoit point être ordonné du vivant de fon évêque, contre l'ufage de l'églife. Mais tout le monde lui foûtint que c'étoit une chofe ordinaire, & on lui en apporta plu fieurs exemples des églifes d'Afrique, & de celles de

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AN 195

Ef. 31. ad Paul. al.

34.2.4.

25.ex 50.

C.

Bened, ad. ep. 31.

1.4.

deçà la mer. Ainfi il fut contraint de fe rendre, &
ne trouvant plus d'excufe, il n'ofa s'opiniâtrer à refu-
fer. Il fut donc ordonné évêque d'Hippone, conjoin- Prosp.Chr. an.396.
tement avec Valere, fous le confulat d'Olybrius & Aug. Serm. 339. W
de Probin, c'eft-à-dire l'an 395. au mois de Decembre 3.n. v. not.
prés la fête de Noël, étant entré dans sa quarante-
deuxième année depuis le mois de Novembre. Il re- Ep. 213. al. 110.
connut depuis qu'il avoit été ordonné contre les re- conc. Nic. 8.
gles, & que le concile de Nicée avoit deffendu de don- Sup. liv. x1, n. 2. 2:
ner un évêque à une églife, qui en avoit un vivant :
mais ni lui ni Valere ne fçavoient alors cette regle.
Elle fe trouve à la fin du canon huitiéme de Nicée,
énoncée & rapportée en paffant à l'occafion de la réu
nion des Novatiens. Ainfi il fe peut faire que fains
Auguftin & Valere euffent lû plufieurs fois ce canon, S. Augustin, liv, E.
fans pefer affez ces dernieres paroles: comme il est
arrivé à un fçavant évêque de nôtre temps; qui a cru
devoir chercher ailleurs cette difpofition du concile
de Nicée..

Mr. Ged. Vieder

XIII.
Reliques des SSS.

Nazaire & Celfe.

Aug. Ep. 31.

Paul. Ep. 7. al. 46

S. Auguftin écrivant à S. Paulin, lui fit part de fa promotion à l'épifcopat; & S. Paulin manda cette agréable nouvelle à Romanien, l'ancien ami de S. Auguftin; & en même temps écrivit une élégie à fon fils Licentius, pour l'exhorter à s'attacher à un fi grand maître, & à quitter toutes les efperances du fiécle: Peu de temps aprés, S. Paulin reçut de S. Ambroife Natal. 98 des reliques des SS. Martyrs Nazaire & Celfe, qu'il mit dans l'églife de S. Felix. S. Ambroife avoit trouvé Paul. vita n. 33a leurs corps dans un jardin hors de la ville de Milan, Paulin fon fecretaire qui étoit prefent, dit: Nous viimes dans le fepulcre où repofoit le corps du mar tyr, fon fang auffi frais, que s'il avoit été répandu lo même jour, & fa tête coupée. fentiere:avec les che

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