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pris, ou quand il nie de l'avoir, on ne peut l'obliger le rendre; & comme les évêques y étoient fouvent trompez, les juges les accufoient de favorifer la mauvaise foi des coupables. Saint Augustin donne ici d'excellentes regles fur diverfes matieres de restitution : à l'égard des juges, des témoins, des avocats & des miniftres inferieurs de juftice. Macedonius reçut cette Ep. 154 al- sav lettre de faint Auguftin avec grande reconnoiffance; & perfuadé de fes raifons, accorda la grace à quelques criminels qu'il lui avoit recommandez.

LIVRE VINGT-TROISIE ME.

T

ANDIS que l'herefie des Donatiftes tomboit

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Commencement

il s'en élevoit une autre plus dangereuse: celle de Pelage & de des Pelagiens, qui fut condamnée pour la premiere Celeftius, fois, par un concile tenu à Carthage l'an 412. Pelage auteur de cette herefie, étoit né dans la grande Bretagne, de parens peu confiderables, enforte qu'il n'avoit pas été inftruit d'abord dans les bonnes lettres. Il em- Orof. apolog. 6: 26, braffa la profeffion monaftique, & demeura fimple laïque: auffi ne lui donnoit-on autre qualité que de moine. Il demeura trés-long-temps à Rome, y fut connu de beaucoup de gens, acquit une grande réputation de vertu, & fut aimé de faint Paulin, & eftimé de saint Augustin. Il fut auffi renommé pour fa doctri- Aug. de Geft. ne, compofà quelques ouvrages utiles; fçavoir trois livres de la Trinité, & un recueil de paffages de l'écri- Gannad, de ferix. ture pour la morale.

Pendant ce féjour de Rome, Pelage tomba dans Therefie contre la grace, inftruit par un Syrien nommé Rufin. Car cette erreur avoit déja cours en O

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Pelag, c. 22.

C. 42.

t

in lib. fub. not. p. 30. ad Garn.

Mercat.commen. rient: Theodore évêque de Mopfueste l'enseignoit, & on en rapportoit la fource aux principes d'Origene. Rufin le Syrien étant donc venu à Rome fous le pape Anaftafe, c'est-à-dire vers l'an 400. y apporta le premier cette doctrine; & comme il étoit fin ; il n'ofa pas la publier lui-même, de peur de fe rendre odieux; mais il trompa le moine Pelage, & l'inftruifit à fond de ses maximes. Ainfi Pelage commença vers l'an 405. à disputer contre la grace; & dans une conversation, un évêque ayant rapporté ces paroles de S. Augustin dans fes confeffions: Seigneur, donnez-nous ce que vous commandez, & commandez ce que vous voudrez ; Pelage ne put les fouffrir, & s'échauffa prefque Hier. ad Ctesiph. jusques à quereller celui qui les avoit rapportées. Au 6.4.6. jul. 3. refte, il prenoit grand foin de diffimuler fes erreurs: il les faifoit proposer plus clairement par ses disciples, , pour voir comment elles feroient reçues, & les approuver ou les condamner, felon qu'il jugeoit utile pour fes deffeins. Ainsi fa doctrine s'étendit beaucoup en peu de temps.

Aug. de dono per fev. 6. 20. n. 3.

Mercat. comm. ad

imp. c. 1. p. 6. id.

Garn.

44.

Le principal difciple de Pelage fut Celeftius, dont le nom fut auffi donné à la même herefie. Il étoit de noble race, eunuque de naiffance; aprés avoir exerGennad. fcript. e. cé quelque temps la fonction d'avocat, il entra dans un monaftere, d'où il écrivit à fes parens trois lettres qui ne contenoient que des exhortations à la vertu. Enfuite il s'attacha à Pelage, & commença à parler contre le peché originel. Le maître & le difciple avoient tous deux beaucoup d'efprit & de fubtilité, mais Celeftius étoit plus libre & plus hardi. Ils fortirent de Rome un peu avant fa prife, c'est-à-dire vers l'an 409. Ils pafferent, comme l'on croit, en Sicile & de-là en Afrique. Pelage arriva à Hippone

en 410. mais il n'y fit que paffer fans dogmatifer.

A N: 4:2

De-là il vint à Carthage, où S. Auguftin qui avoit de Geft. Pelag. c. déja oüi parler de fes erreurs, le vir une fois ou deux: 22. mais il étoit tout occupé de la conference avec les Donatiftes: car c'étoit en 411. Pelage s'embarqua à Carthage, & paffa en Palestine où il demeura long

temps.

Celestius tâcha de fe faire ordonner prêtre à Carthage; mais comme il enfeignoit ouvertement fon herefie, il fut accufé devant l'évêque Aurelius, vers le commencement de l'an 412. par le diacre Paulin de Milan : le même qui en ce même temps écrivit la vie de S. Ambroise à la priere de S. Auguftin. Aurelius affembla donc un concile de plufieurs évêques, où Paulin prefenta deux libelles, contenant les erreurs dont il accufoit Celeftius réduites à fept articles. Le premier qu'Adam avoit été fait mortel: enforte que foit qu'il pechât ou qu'il ne pechât point, il devoit mourir. II. Que le peché d'Adam n'a nui qu'à lui feul, & non au genre humain. III. Que les enfans qui naiffent font au même état, où Adam étoit avant fon peché.. IV. Que la mort ou le peché d'Adam n'est pas cause de la mort de tout le genre humain : ni la résurrection de J. C. caufe de la réfurrection de tout le genre humain. V. Que la loi envoye au royaume des cieux comme l'évangile. VI. Que même avant la venue de: JC. il y a eu des hommes impeccables, c'est-à-dire fans peché. VII. Que les enfans fans être baptifez,, ont la vie éternelle.

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6.3.

Sur le fécond & troifiéme article, Celeftius dit, Aug. de pec. orig que c'étoit des queftions problématiques, que l'on pouvoit foutenir de part & d'autre ; & qu'il connoif foit plufieurs prêtres, qui nioient le peché originel..

AN. 412.

Etant preffé par Paulin de les nommer, il ne put nom mer que Rufin, qui demeuroit à Rome avec Pammaque. Il ajoûta toutefois, qu'il avoit toujours dit, que les enfans avoient befoin du baptême, & devoient être baptifez. Il donna même un petit memoire, où il avoüoit que les enfans avoient befoin de redemption, & par conféquent de baptême. Toutefois ayant été oui plufieurs fois, il en confeffa affez pour être convaincu d'herefie & d'opiniâtreté dans les erreurs dont il étoit accufé: ainfi il fut condamné & privé de la communion ecclefiaftique, comme il paroiffoit par les actes de ce concile de Carthage. Celeftius appella de cette fentence au faint fiége apoftolique: mais au lieu de pourfuivre fon appel, il s'en alla à EAug. ep.157.m.22. phese. Ses disciples de Carthage étonnez de sa condamnation, n'oferent plus attaquer la foi de l'église, que par de vains difcours & des plaintes femées parmi le peuple.

Resrat, 11.6. 23.

Serm. 170. 174.

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Serm. 176. c. 2.

Saint Augustin n'avoit pas affifté à ce concile de Carthage, & il ne fe preffa pas d'écrire contre les Pelagiens: mais lui & les autres évêques Catholiques travaillerent à les combatte dans leurs fermons & leurs

converfations particulieres. Nous avons plufieurs fermons de S. Augustin où il traite ce sujet, & exhorre fon peuple à demeurer ferme dans l'ancienne doctrine de l'églife. Il foutient particulierement le peché originel, & la neceffité du baptême des enfans. Que chacun de vous, dit-il, parle pour ceux qui ne peuvent parler pour eux-mêmes. On recommande aux évêques le patrimoine des pupilles: ils doiDe Geff. Polag. c. vent avoir bien plus de foin de leur falut, Il commença toutefois à écrire contre eux dés la même année 412. Car le tribun Marcellin, qui étoit à Carthage,

11.n.25.

importuné

importuné des difputes qu'il avoit tous les jours avec AN. 411. eux, confultoit S. Auguftin par lettres, & l'obligea de lui écrire fur ces questions, principalement sur le baptême des enfans.

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III. Premiers écrits de

tre les Pelagiens. Retr. II. c. 33.

Saint Auguftin donc pour fatisfaire aux prieres de Marcellin & au devoir de fa charge, écrivit deux li- s. Auguftin convres qu'il lui adreffa, intitulez du merite des pechez & de leur remiffion, autrement du baptême des enfans. Dans le premier il prouve que l'homme eft devenu fujet à la mort, non par la neceffité de la nature, mais par le merite du peché: que le peché d'Adam a engagé toute fa race, & que l'on baptise les enfans, afin qu'ils reçoivent la remiffion du peché originel. Dans le fecond livre, il montre premierement, que l'homme peut être fans peché en cette vie, par la grace de Dieu & fon libre arbitre: en fecond lieu, que perfonne en cette vie n'est absolument fans peché, puisqu'il n'y a perfonne qui n'ait befoin de dire: Pardonnez-nous nos pechez: troifiémement, que cela arrive, parce perfonne ne le veut autant qu'il faut. Enfin, qu'aucun homme, excepté Jesus-Christ feul, n'eft, n'a été, ni ne fera fans peché. Peu de Lib. III. de pecjours aprés qu'il eut achevé ces deux livres, ayant recouvré les expofitions de Pelage fur faint Paul, il y trouva un nouvel argument que Pelage propofoit comme le fentiment d'un autre contre le peché originel: en difant que fi le peché d'Adam nuit à ceux qui ne pechent point, la juftice de Jefus-Christ sert auffi à ceux qui ne croyent point. Cette objection que S. Auguftin n'avoit point prévûë, lui donna occafion d'ajoûter à ces deux livres une lettre à Marcellin, ou plutôt un troifiéme livre: où il montre comment les enfans font comptez pour fideles & profitent de la Bbb

Tome V.

mor. init

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