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AN. 418.

une autre erreur: que le fecours de la grace n'eft pas
pour faire le bien abfolument, mais plus facilement; Aug. c. 29.
& il le difoit encore dans fon premier livre pour le
libre arbitre.

Par tous ces paffages faint Augustin montre, que
Pelage n'avoit jamais condamné clairement l'erreur
qui lui étoit attribuée fur la grace: puifque tout ce
qu'il en avoit dit, foit dans le concile de Palestine;
foit dans fes écrits au pape Innocent, foit en presence
de Pinien: tout cela fe pouvoit entendre, felon fes
principes, du pouvoir naturel de faire le bien : de la
loy, de l'exemple, & des autres manieres de nous
éclairer, ou de la remiffion des pechez: fans reconnoî
tre la neceffité de fecours furnaturel, de la part de
la volonté. Et parce que Pelage avoit donné de grandes
loüanges à Ambroife, dont il tiroit quelques paroles à
fon avantage: Saint Auguftin en raporte plufieurs paf. 43. 44i
fages formels pour la neceffité de la grace..

LIV.
Livre du peché

Dans le fecond livre à Albine, Pinien & Melanie, faint Augustin traite du peché originel.. Il montre originchque Celeftius s'étoit plus ouvertement declaré contre ce dogme, dans le concile de Carthage de l'an 412. que Pelage dans le concile de Palestine: mais que Pelage s'en étoit affez expliqué dans le premier livre de fon ouvrage pour le libre arbitre, où il difoit: Le bien ou le mal qui nous rend loüables ou blâma- 4 Auga. de prebles, ne naît pas avec nous: c'eft nous qui le faifons: .nous naiffons capables de l'un & de l'autre fans vice comme fans vertu : & avant l'action de la volonté propre, il n'y a dans l'homme que ce que Dieu a Gréé. Ce feul paffage faifoit voir la mauvaise foy avec laquelle il avoit anathematifé ceux qui tenoient le peché d'Adam n'avoit nuit.qu'à lui feul, & que

Qqq iij

que

orig. c. 13.

c. 13.

C. 26,

6.33.

les enfans naiffent au même état où il étoit avant fon peché.

Saint Augustin montre enfuite que cette queftion n'eft pas de celles où la foy n'eft point interreffée, comme Pelage & Celeftius prétendoient. Mais qu'elle regarde le fondement du Chriftianifme, puisqu'il s'agit de fçavoir fi Jefus-Chrift eft veritablement le mediateur de tous les hommes: en forte que perfonne n'ait jamais pû être fauvé fans la foy en fes merites, & la grace qu'il nous a meritée. Car Pelage diftinguoit trois états dans la fuite des fiecles; & difoit que les juftes avoient vêcu d'abord fous la nature, puis fous la loy, & enfin fous la grace. Comme fi les premiers s'étoient fauvez par la nature feule, les feconds par le feul fecours de la loy; & que la grace n'eût été neceffaire que depuis l'avenement de JefusChrift.

Enfin S. Auguftin réfute cette objection des Pelagiens contre le peché originel: Qu'il s'enfuivroit que le mariage feroit mauvais; & que l'homme qui en eft le fruit ne feroit pas l'ouvrage de Dieu. Il montre que le mariage eft bon en foy; & que ce qu'il enferme de honteux, quoique legitime, n'eft que l'effet de la concupifcence, qui eft furvenue depuis le peché du premier homme. Mais il traita depuis 6.7. in fin. plus à fond cette matiere, Avec ces deux livres faint Auguftin envoya à Pinien tous les actes de la condamnation de Pelage & de Celeftius en Afrique & à

LV: S. Auguftin à Cefarée de Maurita

nie.

11. Retract. II.

Rome.

Quelque temps aprés, S. Auguftin fut obligé d'aller

Epift. 190. init. en Mauritanie, pour quelques affaires ecclefiaftipape Zofime l'avoit chargé avec quel ques dont le ques autres évêques. Comme ils étoient à Cefarée,

C. S.I.

A N. 418
Poffid. c. 14.

Baud.
De Geft. cum Emers

Sup. liv.XII. n. 285

LV.

capitale de la province, aujourd'huy Tencz dans le royaume d'Alger: ils apprirent qu'Emerit évêque Donatifte de la ville, y venoit d'arriver. C'étoit un des principaux du parti, qui avoit le plus parlé dans la conference, où il étoit un de leurs commiffaires. Les évêques Catholiques allerent auffi-tôt le chercher; & l'ayant rencontré, ils fe faluerent reciproquement. Saint Auguftin lui dit: Il n'eft pas honnête que vous demeuriez dans la ruë; venez à l'églife. Emerit y confentit fans peine: ce qui fit croire aux évêques. Catholiques qu'il ne refuferoit pas leur communion:: mais ils furent trompez dans leur efperance. Saint Au- Serm. ad Cafar. 10. gustin commença à parler au peuple; & fit un fer- 9. p. 617. mon que nous avons fur la charité, la paix & l'unité de l'églife: où il réïtere les offres faites par les Catholiques dans la conference, de recevoir les évê- sup. xx11. n. 296 ques Donatiftes en qualité d'évêques; & il le promet de la part de Deuterius évêque Catholique de Cefarée.

to. 9.

Deux jours aprés les évêques Catholiques prefferent encore Emerit d'entrer dans leur communion; & afin que la preuve en demeurât, on fit dreffer des actes de cette conference, qui commencent ainfi :: Sous le douzième confulat d'Honorius, & le huitiéme Gefta cum: Emer:de Theodofe, le douziéme des calendes d'Octobre: Pofid, vita c. 14c'eft-à-dire le vingtiéme de Septembre 418. à Cefarée dans la grande églife. Deuterius évêque Metropoli-tain de Cefarée, avec Alypius de Thagafte, Auguftin d'Hippone, Poffidius de Calame, Ruftique de Cartenne, Pallade de Sigabite & les autres évêques étant venus dans une falle en prefence des prêtres, des dia-cres, de tout le clergé, & d'un trés-grand peuple,

presence aufli d'Emerit évêque du parti de Donat::

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40.

AN. 418. Auguftin évêque de l'églife Catholique a dit: Mes chers freres, vous qui avez toujours été Catholiques, & vous qui êtes revenus de l'erreur des Donatiftes, ou qui doutez encore de la verité: écoutez-nous, nous qui cherchons vôtre falut, par une charité pure. Il raconte enfuite ce qui s'étoit paffé deux jours aupara vant, & ajoûte:

Puifque Emerit eft present, il faut que fa prefence foit utile à l'églife, ou par fa converfion, comme nous fouhaitons. ou du moins pour le falut des autres. Je fçay ce qu'on vous a dit, je parle à vous qui avez été Sup. liv. xx11. n. du party: on vous a dit que dans la conference nous avons acheté la fentence du commiffaire, qu'il étoit de nôtre communion, & qu'il n'avoit pas permis aux vôtres de dire tout ce qu'ils vouloient. Puis adreffant la parole à Emerit, il dit: Vous avez affifté à la conference; fi vous y avez perdu vôtre caufe, pourquoy êtes-vous venu icy? Si vous ne croyez pas l'avoir perduë, dites-nous par où vous croyez la devoir gagner. Si vous croyez n'avoir été vaincu que par la puiffance, il n'y en a point icy: fi vous fentez que vous avez été vaincu par la verité, pourquoy rejettez-vous encore l'unité? Emerit répondit: Les actes montrent fi j'ay perdu ou gagné, fi j'ay été vaincu par la verité ou oprimé par la puiffance. S. Auguftin dit: Pourquoy donc êtes-vous venu? Emerit répondit: Pour dire ce que vous me demandez. S. Augustin dit: Je demande pourquoy vous êtes venu: fi vous n'étiez pas venu, je ne le demanderois pas. Emerit dit au notaire qui écrivoit en notes, & qui l'avertissoit de répondre: Faites; & ne parla plus.

Saint Auguftin aprés l'avoir encore invité à parler, & avoir attendu long-temps fans pouvoir en tirer

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40.

29.

une parole: s'adreffa au peuple, & fit remarquer fon AN. 418, filence. Il recommanda à l'évêque Deuterius de faire lire tous les ans dans l'églife les actes de la conference tout au long pendant le carême, comme on faifoit à Carthage, a Thagafte, à Constantine, à Hippone, sup. liv. xx11. n. & dans toutes les églifes les mieux reglées. Enfuite S. sup. liv, xxxx. n. Alypius lut la lettre que les évêques Catholiques avoient adreffée au Tribun Marcellin, avant la conference: & S. Auguftin infifta principalement fur l'offre qu'ils avoient faite, de ceder leurs chaires aux évêques Donatiftes, en faveur de l'union. Puis il expliqua ce qui s'étoit paffé entre les Donatiftes, à l'occafion du fchifme de Maximien, interpellant Emerit de le démentir, s'il avançoit quelque chofe contre la verité. Car Emerit étoit un des chefs des Primianistes, & c'étoit lui qui avoit dicté la fentence du concile de sup. xxx. n. 44 Bagaïe contre Maximien. Mais quoique pût dire S. Augustin, Emerit demeura toujours opiniâtre dans fon filence, lui qui s'étoit montré fi grand parleur à la conference de Carthage. Ses parens & fes concitoyens, car il étoit natif de Cefarée, le preffoient auffi de répondre ; & lui promettoient s'il pouvoit ré- poffid. c. 144 futer ce qu'avançoient les Catholiques, de retourner à la communion: même au hazard de perdre leurs biens & leur état temporel; mais il demeura toujours

muet.

24.

Saint Augustin étant à Cefarée de Mauritanie, abolit une mauvaise coutume établie de temps imme morial. C'étoit un combat, qui fe faifoit tous les ans iv. Doût. Chr. en un certain temps, pendant plufieurs jours de fuite, nommé en latin Caterva: c'eft-à-dire la Troupe. Tous les citoyens & les plus proches parens, jufques aux peres & aux enfans, fe partageoient en deux, & fe batTome V.

Rrr

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