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LETTRES

CHOISIES

DU TRES

1 R. P. ANCIEN

ABBE DE LA TRAPPE,

ECRITES

A DIFFERENTES PERSONNES.

PREMIERE LETTRE A une Dame affligée.

Il lui parle de la conformité que l'on doit avoir aux volontez de Dieu.

L n'ya que deux jours que j'eus Phonneur de vous écrire, & je n'ai rien à répondre à voftre derniere Lettre, Tome II, А

finon qu'il n'y a qu'une feule chofe en ce monde qui doive nous caufer de la douleur, c'est le peché; & quand noftre vie en eft exempte, quoi qu'il arrive, il faut conferver la paix. Pourvû que Dieu foit content, nous le devons eftre, puif que fa volonté feule doit eftre la regle de la nostre, & quand mefme vous vous feriez mécomptée dans l'affaire dont vous me parlez, il fuffiroit de reconnoiftre vostre faute devant lui, de vous en humilier, & de la reparer en tout ce qui vous feroit poffible, fans vous laiffer furprendre par le trouble, qui fuit prefque toûjours le mauvais fuccés des affaires, qui augmente les maux,& qui ne les diminuë jamais. Quoique vous foïez obligée de faire ce qui peut eftre en voftre pouvoir pour calmer l'efprit des perfonnes aufquelles Dieu vous a foûmife, cependant Si vous n'en venez pas à bout

vous devez porter avec beaucoup de douceur & de patience toutes les humiliations, qui vous viendront de leur part; & à le bien prendre, les mauvais traitemens qui nous viennent du cofté des hommes, font des graces que Dieu nous fait, qui punit en nous,par une conduite de mifericorde, les fautes que nous connoiffons. & celles que nous ne connoiffons pas. Il me paroift que vous eftes fur cela dans une difposition si chrétienne, qu'il n'y a rien autre chose à faire, qu'à prier Dieu qu'il vous la conferve. Non feulement cette rencontre-ci ne vous

est point une raison d'augmenter vos pénitences, au contraire elle vous en eft une de ne rien faire au delà des mesures que vous aviez prises; de crainte que fi vous alliez plus loin, il ne s'y mêlât des motifs & des confiderations humaines,qui en détruiroient tout le merite, & qui empefcheroient que voftre

facrifice n'euft l'agrément, & ne fuft reçû avec la benediction, que vous en aviez efperée : La victime doit eftre toute pure, & il n'y doit rien entrer qui puiffe en alterer l'integrité. Ne prenez aucun parti ni aucune refolution, qui ne foit dans l'ordre de Dieu, & conforme à vos devoirs. Regardez-le, Madame, en tous les états qu'il lui plaira de vous mettre : conduifez-vous uniquement dans fa vûë, & remettez lui toute voftre deftinée entre les mains; il fait ce qui nous eft de plus avantageux, & vous recevrez de fa bonté felon vos befoins tous les fecours & toute la protection qui vous fera neceffaire. Enfin voftre confolation doit cftre de favoir que vous ne pouvez le per. dre, tant que vous le voudrez conferver. Je fuis avec beaucoup de vérité & de respect, &c.

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KIO HIO & H∙JE

II. LETTRE

A un Maréchal de France.

Il lui parle des conduites de Dieu fur lui, & des moiens de le trouver & de le fervir au milieu des embarras & du tumulte, infeparables du commandement d'une Armée.

J

'Admire, Monseigneur, la con duite de Dieu, qui vous engage plus que jamais dans les emplois du monde, lorfqu'il vous infpire plus de defir d'eftre à lui & de vous attacher à son service. Comme vous n'avez fait aucun pas, ni aucune diligence pour vous les procurer, & que c'est un pur effet du choix & de la bonté du Maiftre, il y a tout fujet de croire que Dieu ne vous refusera pas la protection qu'il donne pour l'ordinaire à ceux, qui fuivent les inclinations de fa

pro

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