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ils deviendront en tel état, qu'il n'y aura plus de remedes qui puiffent les guerir.

Comment est-ce que cette aridité de coeur que vous reffentez, ces diffipations d'efprit, cet égare ment des sens, ce dégouft des chofes qui ont fait voftre plaifir & voftre confolation; & Foubli des exemples que vous dites que vous avez vû parmi nous, & des veritez que vous pretendez y avoir entenduës, ne vous jettent point dans le trouble & dans la confufion? Et comment pouvez-vous vous souffrir, quand vous vous voïez dans une fituation fi differente de celle où vous avez efté, & que pouvezvous attendre pour l'avenir, qu'un regret amer & inutile tout enfemble? Je dis amer, parce qu'il n'y a rien qui le foit davantage, felon la parole d'un Prophete, que de fe voir feparé de la charité de Dieu par fa propre ingratitude. Je dis.

inutile, parce que venant trop tard il eft fans fruit: C'est une penitence aprés coup qui ne peut plus rien contribuer à vostre repos.

Quoique la declaration que vous m'avez faite, mon tres-cher Frere, me rempliffe de crainte, & me donne tres-peu de lieu d'esperer; cela n'empefchera pas que je ne demande à Dieu, qui eft le maistre des cœurs, qu'il ofte du voftre tout ce que l'amour du monde y a pữ mettre; qu'il en arrache le vain defir d'en eftre eftimé & de lui plaire; & qu'il y mette en fa place les difpofitions qui en ont efte bannies, qui eftoient fi conformes à ses volontez, fi dignes de vostre Profeffion, & fans lefquelles toute fainte qu'elle eft, elle ne pourra fervir qu'à vous rendre plus coupable & plus malheureux,

Je ne cefferai de vous plaindre, mon cher Frere, & de m'affliger devant Dieu de vos égaremens,

(je les nomme ainfi felon vostre propre confeffion) jufqu'à ce qu'il fui ait plu de les finir, & de vous remettre dans le chemin que vous avez abandonné, enforte que l'on puiffe vous appliquer les paroles de la verité éternelle, Perierat & inventus eft. Ce font-là les fentimens de la perfonne du monde, qui vous eft la plus unie par les liens d'une charité toute pure, toute vive & toute fincere. Je fuis, &c.

CVIII.

LETTRE

A une Dame'de qualité.

Il la confole fur la perte qu'elle a faite
de fa fille. Il lui fait voir.
que Dieu
eft le maistre abfolu de nos vies:Qu'il
prive les parens de leurs enfans,
quand & comme il le juge à propos.
Qu'elle doit faire de cette privation
un afte de Religion; & de-là il
• prend occafion de lui parler de la

J

mort.

E fuis perfuadé, Madame, qu'on ne fauroit eftre plus touchée que vous l'avez efté de la perte de Madame vostre fille j mais je le fuis auffi, que Dieu qui a appefanti fa main fur vous, vous a foutenuë, & qu'il n'a pas permis que vous vous foïez laiffé aller à rien qui ne foit digne de la profeffion que vous faites d'eftre à lui, & de la fou2 Oo iij

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miffion parfaite que vous devez avoir pour les ordres.

Dieu, Madame, eft le mailtre abfolu de nos vies, il en regle tous les momens ; il les finit fans appeller perfonne dans fes confeils ; & comme c'eft lui qui donne les enfans aux peres & aux meres ; il les en prive auffi quand il le juge à propos & en la maniere qu'il lui plaift, fans qu'ils aïent ni fujet, ni droit de s'en plaindre. Après tout, il ne pouvoit arriver rien de mieux à Madame vostre fille que de ren trer dans les mains de Dieu au fortir des vostres ; & vous devez croire que c'est par mifericorde qu'il l'a retirée avant le temps, afin de prevenir une infinité de dangers & de tentations aufquelles elle fe feroit trouvé exposée dans la fuite fi là courfe avoit été plus longue. Vous avez contribué à fon falut pendant qu'elle a vécu par l'éducation que vous lui avez donnée,il faut prefen

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