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à la bâtiffe, dont l'augmentation lui paraît inévitable. Ravi de voir fes befoins couverts, heureux par l'espoir de ses moiffons, animé par la reconnaissance du bienfait de fon maître qui se joint à fɔn intérêt personnel; je crois le voir avec sa femme & fes enfans, voler à fon couple ruminant qu'il trouve dans fon étable, l'atteler à fa charrue, commencer par labourer les fept arpens qui ont produit le maïs l'année précédente; y deftiner la femence de son froment, paffer enfuite aux deux arpens d'avoine & de feigle; projetter dans chacun l'échange de chaque femence, échanger également les femailles de maïs & de pommes de terre; la premiere, dans le champ de la pomme de terre; la feconde, dans le champ du froment. C'est ainsi que renouvellant la terre par un an de repos, & lui confiant de nouvelles femences, elle ne fe rebute point par la fucceffion des mêmes fruits; c'est ainsi que, raifonnant cet échange de productions fur la qualité de chacune, le

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laboureur apprend à cultiver par principes,
& à jouir doublement du fruit de fes veilles.
Avant d'apprécier le revenu de chaque
colon, il s'agit d'expliquer les motifs de
fa culture. Le pied du maïs détruifant les
mauvaises herbes, doit être remplacé par
le froment. Rien ne faifant plus de tort à
ce farineux que le rebut des productions
de la terre, le premier femble affurer la
fécondité du fecond. La
pomme
de terre,
à laquelle on fait fuccéder le maïs, affure
une fouille très-profonde qui a été renou-
vellée par le mufelage des porcs, en tour-
nant le champ pour dévorer le reste des
pommes. La racine du maïs aimant à
s'étendre, doit en affurer la fécondité dans
une terre auffi remuée que profonde. La
pomme de terre ayant befoin pour le dé-
veloppement de fes fils, & la nutrition de
tous fes fruits dans le fein de la terre, de
celle qui eft la moins épuisée, doit être
enfemencée dans le champ du froment.
En ce qui touche l'avoine & le feigle, la
reffemblance des femences n'a que le

mérite de l'échange; ce qui eft de principe en culture.

Le colon prenant poffeffion de fa propriété dans laquelle il trouve les chofes indifpenfables pour la culture, les premiers comeftibles & deux bœufs, a l'efpoir d'une riche moiffon. Il faut analyser fa valeur. Sept arpens de froment doivent rendre quatorze ou quinze cents gerbes, à quatorze gerbes la mefure ou le boiffeau du poids de cinquante livres. L'avoine & le feigle, à proportion de l'étendue, donneraient environ quatre cents gerbes. Les quatorze arpens de pommes de terre & de maïs rendraient ensemble aux environs

de

quatorze cents feptiers. Six perfonnes, y compris les enfans du colon, mangeraient douze livres de pain par jour, trois cent foixante livres par mois, quatre mille trois cent vingt livres par an, qui font quatre-vingt fix mefures du poids de cinquante livres, & vingt livres de plus. Er fuppofant que chaque feu fût plus nom

breux, ajoutant à ce calcul les bleds de femence, réduifant les quinze cents gerbes. à douze cents, portant les comeftibles & les femailles à cent cinquante mesures au lieu de quatre-vingt-fix, le colon vendrait cent cinquante mefures, fes befoins prélevés, qui lui ferviraient à l'acquisition de deux bœufs maigres & d'une vache qui trouverait fa nourriture dans fa faifance valoir. Il lui refterait fon avoine & fon feigle. Les pailles de l'avoine alimenteraient fa vache pendant l'hyver; le glû de fon froment, couvrirait fa chaumière; le glû de fon feigle, fervirait à l'usage des liens. Cette évaluation très-faible, ne préfente point le véritable produit. L'avoine & le feigle, confacrés à l'acquisition de quelques moutons & porcs, le colon en état de tirer parti de fa propriété, ferait néceffairement plus riche que je ne le fais paraître. Mais la modicité de l'apprécie, fans diminuer la fortune, invite à la confiance. Mon but eft de convaincre le Public.

L'article de l'engrais des animaux demande bien des détails. Chaque colon récolterait dans l'étendue de quatorze arpens de pommes de terre & de maïs, l'engrais de quinze bœufs, quatre cochons & vingthuit moutons. Propriétaire de quatre bœufs dont les plus faibles ferviraient aux labours, les deux autres pafferaient à l'engrais. Les deniers de leur vente en deux mois de tems, employés à l'acquisition des boeufs maigres, il pourrait en engraiffer trois ou quatre les deux mois fuivans, & ainsi par augmentation à raifon de fes facultés, ou de la diftribution égale de fes fruits pendant l'année. Telle eft la gradation & la jouiffance de la culture, qui paye au centuple tous les foins qu'on lui donne. Le moyen de conferver la pomme de terre toute l'année, fans la rendre plus coûteuse, ne laiffera plus rien à defirer fur cette importante matière.

La pomme de terre en monceau, couverte de paille dans un lieu fec, est à

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