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ine & lui donner quelque confidération. Cinq le fes frégates ou Schabek, qui revenoient de Tunis en Septembre 1773, furent rencontrées à la hauteur du Cap Spartel par le Chevalier Adlon 【1), qui commandoit une petite frégate Toscane; quatre de ces navires, ayant été difperfés & mis en défordre par quelques volées de la frégate Reys Lafchmi Mifteri, de Rabat, qui étoit de l'avant, eut le courage de fe préfenter fous la batterie du chevalier, autant pour dégager fes conferves, que pour leur donner le tems de fe rallier & de fe réunir à lui; mais les Salétins ne furent point du même avis, il firent porter fur l'Arrache, & deux d'entr'eux, pour y arriver plutôt, échouèrent fur la côte : après un léger combat, Reys Laschmi Misteri, fut forcé de fe rendre, & fut conduit à Livourne. Dans cette journée, le Chevalier Acton, avec une petite frégate de Tofcane anéantit une partie des forces. maritimes du Maroc; les armemens des grandes puiffances de l'Europe n'avoient jamais eu une pareille rencontre.

(1) C'eft le même qui paffa à la Cour de Naples, quelque tems après, & à qui le Roi des Deux Siciles confia l'adminiftration, de la marine, & enfuite celle de la

guerre.

Sidi Mahomet (1) n'a guères que fix à huit frégates de deux cens tonneaux de portée, percées pour quatorze & dix huit canons de fix, & une douzaine de galliotes. Ce Souverain a un nombre de matelots claffés; ils reçoivent une modique paie, qui même n'eft point fixe, ce qui fait que fes fujets font peu portés pour la mer, & qu'ils n'y fervent qu'avec répugnance. Le choix des Commandans eft moins déterminé fur l'opinion de leur intelligence, que fur celle qu'inspirent leurs facultés; le Souverain ne confie guères fes armemens qu'à des gens riches, qui puiffent répondre des événemens, au moyen de quoi fes commandans partent toujours tard, arrivent de bonne heure, & évitent tout ce qui pourroit compromettre leur fortune & leur repos.

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Quoique les forces maritimes de l'Empereur de Maroc ne foient pas bien confidérables, la pofition des états de ce Prince, ayant Tanger & Tétuan aux deux embouchures d'un détroit qui rapproche les liaisons de commerce entre les qua

(1) On donne à tous les Princes en arabe, le titre de Muley, qui veut dire Seigneur & Maitre; l'Empereur égnant, par refpeét pour le nom du Prophête, qui eft le fien, s'eft fait appeller Sidi, qui a la même fignification que Muley, mais il eft plus refpectueux

tre parties du globe, donnera toujours quelqu'avantage à fa marine, en ce que fes navires à rames, en station dans un paffage auffi rétréci font à portée de mesurer leurs mouvemens, & d'être fûrs d'une retraite.

&

Revenus de l'Empereur de Maroc.

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L'Empereur de Maroc étant le maître abfolu de tout ce qui eft dans ses états, il semble inutile & fuperflu de vouloir apprécier fes revenus, puifqu'ils dépendent de fa volonté. Pour rendre cependant le joug plus léger & encourager le travail de fes efclaves, en leur confervant des idées de propriété, ce Defpote se borne aux impôts prefcrits par l'Alcoran, fauf les innovations que les tems & les ufages ont introduites, que la foumiffion des peuples a fait refpecter. Les impofitions défignées dans l'Alcoran, & que les Arabes ont exigées des peuples cultivateurs, se réduisent à la dixme fur la production des terres & des troupeaux. Cette impofition, qui eft le tribut le plus ancien, le plus naturel & le moins à charge au cultivateur, fuffifoit dans ces premiers tems, où le Souverain ne foudoyoit pas des troupes, que la défenfe des propriétés, l'intérêt de la religion, l'efprit de fanatifme & l'avi

dité du pillage, réuniffoient fous fes étendarts. Cet impôt fut le même, quand les divers Etats du Maroc s'érigèrent en monarchies, parce que ces Souverains n'avoient ni affez de besoins, ni affez d'autorité pour exiger de plus fortes contributions; les revenus des Rois de Maroc, dans ces tems éloignés, ne devoient pas être bien confidérables; & c'étoit un fardeau léger pour des peuples qui étoient d'autant plus riches, qu'ils avoient peu de befoins. Il eft vraisemblable d'ailleurs, que le commerce intérieur, cet échange de productions refpectives, qui a d'abord raproché les nations, avoit peut-être alors plus d'activité, qu'il n'en a aujourd'hui, & qu'il y avoit des communications plus fuivies entre les peuples qui habitoient l'intérieur de l'Afrique & ceux qui font fur les bords. Les hiftoires, les relations, les con tes que les vieillards du pays fe tranfmettent, qu'ils répètent à leur enfans, & dont ils amufent leur avidité, parlent de la poudre d'or que les Maures recevoient de Tombut & des autres contrées du fud, voifines du Niger; ils échangeoient ces effets contre des productions qui ne coûtoient, que quelque travail, & qui étoient pour eux une fource de richeffes. Les guerres, les révolutions, Farbitraire du Gouvernement, les établiffemens des Européens fur la côte d'Afrique, ou d'autres

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caufes peut-être, ayant donné au commerce un autre cours, les Etats du Maroc n'ont plus les mêmes reffources.

On ne peut pas douter d'abord, que ces tranf ports d'or n'aient fait une partie du commerce intérieur de l'Afrique, avant que la côte eût aucune relation directe de commerce avec l'Europe, quand on confidére les richeffes immenfes que Carthage avoit acquifes, & les efforts qu'elle fut en état de faire, pendant plus de cinquante années de guerres. Après ces grandes révolutions les différentes Tribus de Maures durent entretenir ces communications, mais avec plus de lenteur & moins de fuccès, par la variation qu'il y eut dans les moyens jufqu'à la fin du quinzième fiècle; & il eft affez apparent que ce n'eft guères qu'à cette époque, ainfi que je l'ai déjà obfervé, que les progrés de la navigation donnèrent aux tréfors de l'Afrique de nouveaux débouchés.

On doit être étonné, cependant, de voir ce qui reftoit encore de richeffes entaffées dans les montagnes de l'Empire de Maroc, par celles dont s'empara Muley Archid dans les premiers mouvcmens de fa férocité, &, enfuite, par la quantité de ducats d'or, du tems de Muley Ifmaël, que quelques familles riches avoient confervé, & dont elles ont caché les reftes à l'avidité de fes

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