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cours, raffermir & étendre leur Empire. Sur cette invitation, Jofeph paffa en Andaloufie, & ayant joint fes forces à celles des Mahométans Efpagnols, il s'empara de Séville & de fes environs; & ayant conçu de nouveaux projets, il retourna en Afrique pour en préparer l'exécution.

Ce Souverain fit publier en Afrique la gazie, ou guerre de religion, &, ayant raffemblé beaucoup de troupes, encouragées par le fanatifme & par l'efpoir du butin, il alla s'embarquer à Ceuta, & fe rendit à Malaga. Cette campagne, & celles. qui fuccédèrent, furent très-glorieuses pour le Roi de Maroc; puifqu'en 1102, maître de toute l'Andaloufie, de Grenade, & de Murcie, il retourna en Afrique couvert de lauriers. Ce Prince repaffa en Espagne les années fuivantes pour continuer fes conquêtes; il pouffa jusqu'à Cordoue, gagna quelques batailles, particulièrement celle du 29 Mai 1107 contre l'armée de Don Alphonfe fix; Don Sanche, fon fils, qui la commandoit, y perdit la vie, avec fix autres Seigneurs diftingués; & c'cft cette bataille que les Elpagnols ont appelée la bataille des fept Comtes. Jofeph, étant retourné à Maroc après cette victoire, mourut de maladie en 1110, & fon fls Aly lui fuccéda.

Aly, fils de Jofeph, troifième Roi de Maroc,

de la ligne des Morabethoun, fit conftruire la grande Mosquée de Maroc; il continua à fecourir les Mahometans d'Espagne, & à y faire refpecter fa fouveraineté par les armées qu'il y conduifit en perfonne, depuis 1112 jufqu'en 1115. Quelques Auteurs difent qu'il fut tué à la bataille de Moriella, où fon armée fut attaquée par celle du Roi Alphonfe, & que fon fils Teffifin Ben Ali étant refté en Espagne avec quelques troupes, les restes de l'armée furent ramenés en Afrique.

Brahem, fils d'Ali, qui fut le dernier Roi de Maroc de la même Dynaftie, fut proclamé après la mort de fon père; il confirma dans leurs poffeffions les Princes qui gouvernoient dans les provinces orientales de fa dépendance, & fut déclaré Commandant des fidèles. L'Afrique, fous le règne de ce Prince, fut déchirée par des divifions, qui furent funeftes à la Dynastie des Morabites ; elles ne permirent pas à Brahem d'aller par lui-même au fecours de l'Espagne, ni d'y maintenir la souveraineté, que les Arabe-Maures avoient offerte à fes ancêtres, & qu'ils avoient méritée par leur valeur. Les Gouverneurs des principales places de l'Andaloufie profitèrent de cet instant de foibleffe pour ériger en petites fouverainetés les villes & les provinces dont ils avoient le Gouvernement, fans que le Roi de Maroc, qui étoit

occupé des troubles dont fes Etats étoient agités, pût s'oppofer à ces ufurpations. Brahem, d'ailleurs, étoit un Prince indolent, & adonné à fes plaifirs; il facrifia tout pour fournir aux moyens de les fatisfaire, & fes fujets, vexés & furchargés d'impôts, refusèrent enfin de le reconnoître pour maître.

La foibleffe du gouvernement & le mécontentement des peuples favorisèrent la révolution que fufcita dans le même-tems, du côté du mont Atlas, un novateur, qui, fous le titre impofant de Mohadi, Directeur des fidèles, s'étendit dans la Mauritanie, & attira à fon parti les peuples, toujours faciles à féduire par des projets de réforme. Ce prédicateur, appelé Mahomet Abdallah, fe difant defcendant d'Aly, rencontra, près de Mélille, dit d'Herbelot, un Docteur appelé Abdulmomen, qui fe difoit lui-même être le Mohadi, ou prophète, attendu dans la fin des fiècles; ces deux hommes s'étant approchés de Maroc y préchèrent publiquement, attirèrent bien du monde dans leur parti, & Abdallah fut reconnu Roi. Brahem qui, dans le fein des plaifirs, n'avoit fait aucun cas de cette révolution, fortit enfin de Maroc avec fon monde, pour combattre ce réformateur, dont l'armée, groffie par l'enthousiasme & le mécontentement, défit celle de Brahem, &

l'obligea de prendre la fuite. Ce Prince, pourfuivi de retraite en retraite, arriva jufqu'à Oran, où les Maures n'osèrent lui donner afyle, pour ne pas s'expofer au reffentiment d'Abdulmomen, qui étoit à fa poursuite. Brahem, fe voyant fans afyle, & ne pouvant furvivre à fon défespoir, fe précipita, difent quelques Hiftoriens, du haut d'un rocher; d'autres difent qu'il périt dans un château, où Abdulmomen fit jetter des artifices, & la mort de ce Prince termina la Dynastie des Morabéthoun.

Abdulmomen, Général d'Abdallah, ayant foumis à fon maître, dans cette expédition, toutes les provinces de la Mauritanie, & portant avec lui les hommages de leur foumiffion, reprit la route de Maroc, où il trouva Mahomet Abdallah mort dans fon camp. Les chefs, s'étant affemblés, reconnurent pour Souverain & Commandant des fidèles, Abdulmomen, qui fe difoit auffi de la race de Mahomet & d'Aly.

Dynafie des Moahédins.

Abdulmomen (1) fut le premier Roi de la lignée

D'Herbelot l'appèle Mohamet Adulmomen ben Tomrut, & felon Marmol, on l'appeloit Abulmomen ben-Abdallah bea Aly.

des Moahédins, que les Espagnols ont appelés Almohades; il fut élu Roi de Maroc en 1148. Après fon élection il fit abattre la ville de Maroc, que les habitans refusèrent de lui remettre, & qu'ils confervoient à Ifac, fils de Brahem, ce qui irrita fi fort ce Prince, qu'il jura de faire paffer cette ville par un crible. L'ayant enfin emportée d'affaut, il étrangla, de fes propres mains, le jeune Ifac, fils de Brahem, qui y avoit été reconnu Roi & qui étoit le feul rejetton de la maifon de Teffifin, fondateur de Maroc, ainsi que de l'Empire. Abdulmomen, pour accomplir fon ferment, fit réduire en pouffière, & paffer par le crible, une partie de cette Capitale ; & pour ne laiffer aucun veftige de la grandeur de fes Rois & faire oublier leur mémoire, il fit détruire leurs palais & leurs mofquées. Ce Prince, enfuite, fit tout rebâtir à neuf, & donna des ordres pour faire mourir tous les Morabéthoun qu'on trouveroit dans fon Empire, pour n'avoir rien à craindre de leur reffentiment. L'animofité qu'il y eut entre ces deux fectes, ne fervit qu'à entretenir en Afrique une fuite de révolutions; elle affoiblit en même-tems les deux partis, & donna aux provinces Orientales la facilité de fecouer le joug des Rois de Maroc & d'élire des chefs indépendans.

Abdulmomen, cependant, refta maître de toute

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