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pereur de Maroc, ayant été informé que cette République traitoit la Régence d'Alger avec plus de générofité, s'en plaignit aux Etats Généraux; malgré les ménagemens qu'ils marquèrent à ce Souverain, à la fin de 1774, il leur déclara la guerre, fous prétexte qu'un présent extraordinaire, qu'ils venoient de lui faire & qu'il garda, n'étoit pas affez riche.

La République fit paffer des armemens nombreux dans le détroit, pour la protection de fon commerce & de fa navigation; il en parut peu fur la côte, & ils y parurent fi rarement, que les corfaires du Maroc prirent trois navires Hollandois, dont deux à la fortie de San Laucar, à deux pas de Cadix. Ces avantages furent compenfés par les pertes que fit l'empereur de Maroc ; une frégate Hollandoife, qui ne donna qu'une demi-chaffe à deux armemens de Salé, les fit naufrager, même fans les fuivre, l'un à l'entrée de la rivière de l'Arrache, & l'autre à l'entrée de celle de la Mamore. La Hollande, en renouvellant la paix en 1778, y mit de la générofité, & elle pourra la prolonger par les mêmes moyens.

La Hollande fait, avec la côte de Maroc, un commerce affuré, & l'habitude y a prefque rendu fes importations néceffaires; elle y confomme quantité de toiles de Siléfie appelées platilles,

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beaucoup de toiles communes de la Baltique & autres, peu d'épiceries, de drogues, de thé, des planches, du fer de Bifcaie, & quantité de coutellerie & de merceries d'Allemagne. La Hollande exporte de la côte de Maroc pour le Nord, des huiles par occafion, des cires, des gommes, des dents d'éléphant; mais comme les retours qui conviennent aux Négocians Hollandois font infuffifans pour échanger la maffe de leur commerce d'entrée, ils ont prefque toujours profité de la facilité que leur donnent les Ports François pour faire paffer à Marseille des huiles, des laines, & des cuirs en poil, qui s'y confomment plus facilement que dans le Nord. Si la Hollande n'avoit pas tiré parti de cette tolérance, elle auroit été infenfiblement forcée de renoncer à un commerce qui lui deviendroit défavantageux dès qu'elle ne pourroit pas en réaliser le produit.

La Cour de Danemarck entama fes négociations avec Sidi Mahomet en 1755. Cette Cour, éloignée du Maroc, n'avoit pas de ce Gouvernement une juste idée. Trompée par un Juif, qui fut l'organe & l'interprète de fes négociations, elle avoit cru pouvoir, fans inconvénient, faire conftruire un Fort à Sainte-Croix pour y protéger un comptoir de commerce qu'elle fe propofoit d'y établir. Le Juif, agent de ce

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traité, déguifa les intentions de la Cour de Danemarck & on n'eut connoiffance du Fort qu'elle défiroit conftruire, qu'au débarquement des matériaux. L'Empereur de Maroc offenfé de fe voir affimilé aux Princes du Sénégal, fit arrêter l'Ambaffadeur de Danemarck avec fa fuite, & prétendit les garder comme efclaves. Il fe paffa duftems pour débrouiller ce mal-entendu; la Cour de Danemarck reprit fes négociations en 1757, elle convint d'une rançon, fit de nouveaux préfens & une nouvelle paix.

Le feu Roi de Danemarck, occupé de projets de commerce, donna son confentement, alors, pour l'établiffement d'une Compagnie royale d'Afrique, qui, fous une redevance annuelle de cinquante mille piaftres fortes, obtint de l'Empereur de Maroc le commerce exclufif de fa côte pour le terme de dix ans, par les ports de Salé & de Saffi, où elle forma deux établiffemens. Cette compagnie n'eut que de mauvais fuccès, par les avanies & les embarras que cette exclufion lui fufcita, par les dépenfes qu'occafionnèrent les établiffemens qu'elle forma, & par le peu d'économie de quelques Directeurs étrangers à qui elle avoit confié l'administration de fes intérêts. Son commerce d'autre part, qui n'étoit exclufif que par les ports de Saffi & de Salé, perdit de fon activité, par l'établiffement des ports Tom. III.

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de Mogodor & de l'Arrache, où, par une diminution fur les droits, le Prince avoit attiré les productions de fon empire, qui formoient les retours du commerce d'Europe. Cette compagnie, d'ailleurs, fefoit un commerce entièrement paffif, d'autant plus incertain dans fes fuccès, qu'il étoit mal vu dans fes principes; le Danemark n'a, par lui-même aucune production propre pour la côte de Maroc, & les productions de cette côte n'ont en Danemark aucun débouché, de forte que cette compagnie devenoit tributaire de l'induftrie des nations intermédiaires, & n'avoit, en apparence de bénéfice, que le mouvement de quelques navires nationaux, qui arrivoient fur la côte chargés, & qui, fouvent, retournoient vuides. La compagnie Danoise vit abforber, en peu de tems, fes capitaux par des opérations faites à contre-tems, ou par les générofités que la facilité de fes directeurs, & le befoin de plaire au Roi de Maroc, ne firent que multiplier.

Cette compagnie s'occupa de fa liquidation -après l'avènement de Chriftian Sept à la couronne de Danemark, & elle fut fupprimée en 1767; cette Cour fe libéra alors de la charge annuelle de cinquante mille piaftres, qui étoit le prix d'un commerce exclufif, que la compagnie royale devoit faire, & qu'elle ne faifoit pas ; mais elle

n'obtint la continuation de la paix, que fous une redevance annuelle de vingt-cinq mille piaftres fortes. Le Danemark n'a, d'ailleurs, aucun commerce direct avec cette côte.

La Cour de Suède fit fa paix avec l'Empereur de Maroc en 1763; elle fit alors des préfens diftingués en canons, mâtures, & bois de conftruction, & fe foumit, en outre, à un présent annuel de vingt mille piaftres fortes, qu'elle entendoit payer en effets de fon crû, & que l'Empereur a exigées en argent comptant, jufqu'en 1771. Le Roi Guftave Trois, qui fuccéda alors à la couronne de Suède, fe refufa à toute redevance, se réservant la liberté de faire des préfens à fa volonté, fans en déterminer le tems ni la valeur. Il fut enfin convenu, comme un moyen de cimenter la bonne harmonie, que le Roi de Suède enverroit, tous les deux ans, à l'Empereur de Maroc un Ambaffadeur & un préfent. Les Suédois ne font aucun com→ merce avec la côte de Maroc.

La République de Venife conclut fa paix avec l'Empereur de Maroc en 1765; elle fit, en argent, un préfent diftingué, & fe foumit à une redevance annnelle, d'environ cent mille livres. Cette république ayant marqué à la régence d'Alger plus de magnificence, l'Empereur de Maroc s'offenfa de cette diftinction, & envoya à Venise un Génois

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