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que pour rapporter les actions qu'ils avoient faites, dans l'efpérance de fe rendre dignes d'elle. » Je fais faire huit exercices (chantoit Harald le Vaillant) »je combats avec courage; nul » cheval ne peut m'ébranler ; je » fais fendre les flots de mes bras » nerveux; je vole en patins fur » la glace; je puis & je fais ramer » avec vigueur; je lance au loin » d'une main fûre un javelot; & » cependant, hélas! une fille de » Ruffie me méprise. »

La nobleffe, la candeur, la fimplicité régnoient dans l'amour, l'hymen & la vie privée de ces Norvégiens; & l'enfant recevoit de fa mère des leçons auffi fortes, auffi rigides que de la bouche du père. Prête à repandre fon fang avec fon époux, la femme demandoit, obtenoit comme la plus grande grace, de suivre fon mari

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dans les combats ou dans les navigations périlleuses qu'ils faifoient fans ceffe. Un des premiers talens que la jeune fille destinée au mariage devoit acquérir, c'étoit la connoiffance des fimples & l'art de guérir les bleffures; c'étoit toujours par une main aimée que le père, l'époux, le fils & le frère étoient fecourus; & lorfqu'une famille nombreufe & dans l'enfance n'exigeoit pas de la jeune époufe de fe livrer à ce foin, rien ne pouvoit l'empêcher de fuivre son mari fur fes vaiffeaux.

Telles furent les mœurs que les defcendans d'Odin portèrent dans la Grande-Bretagne, dans la Gaule, dans la Lombardie, dans l'Exarchat & dans l'Espagne.

Ceux qui connoiffent les anciens Romans, & qui peuvent avoir lu les extraits trop abrégés. que j'ai faits d'une très-petite partie

de ceux qui nous font restés des nations que je viens de citer, reconnoîtront fans peine que le fond de ces Romans & l'efprit de l'ancienne Chevalerie eft dû presque en entier aux coutumes aux mœurs, au caractère des habitans du Nord. En paffant dans les provinces méridionales de l'Europe, ils ont fait ce qu'ont fait depuis les Tartares en Afie. Ces autres Scythes, en conquérant la Chine, fe font confondus avec les habitans indigènes après avoir ou chaffé ou réduit à l'esclavage ceux qui leur ont réfifté, ils ont peu à peu fraternifé avec les autres; &, fi l'on ofe fe fervir de cette expreffion, les mœurs nationales des vainqueurs & des vaincus fe font amalgamées les unes avec les autres, en confervant toujours quelque principe fondamental des mœurs de la na

tion conquérante. L'origine des douze Jurés qui s'affemblent pour juger criminellement leur égal en Angleterre, n'eft-elle pas venue des douze Drottars qui rendoient la juftice dans le nord? nos douze Pairs François qui représentent au facre de nos Rois, n'en font-ils pas une image? Le champion qui paroît au couronnement des rois d'Angleterre, les vidames, le parquet ouvert à deux célèbres avocats, tout ne reffemble-t-il pas à la lice ouverte, aux champions qui combattoient pour de grands differends? Et ce point d'honneur, cet ancien préjugé, ce refte de barbarie qu'un fentiment intérieur nous force à tolérer, & dont un gentilhomme ni un militaire n'ofe approuver ni blâmer les abus, tout ne nous rappelle-t-il pas notre ancienne origine; tout ne nous prouve-t-il pas que notre

imagination eft toujours vivement excitée par tout ce qui fut cher à nos pères, & que les mêmes paffions. qui les agitoient font encore prêtes à germer & à s'exalter dans notre ame? Que de traits de reffemblance ne nous trouverions - nous pas avec les fujets d'Odin? notre amour pour la table, la pêche, la chaffe, la guerre, l'indépendance. Mais ces réflexions me mèneroient trop loin; c'eft aux philofophes moralistes à les approfondir. Je dois m'en tenir à la manière d'aimer & de combattre de ces peuples belliqueux: mon but eft de prouver que c'est à ces derniers que nous devons l'efprit & les premières lois de la Chevalerie; & c'est dans une de leurs plus anciennes hiftoires que j'espère faire remarquer plufieurs traits de reffemblance entre la Chevalerie du

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