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diment leurs fpéculations & leurs conjectures, & raisonné, fans aucun difcernement, fur une matiere qui demande une longue expérience de la guerre, & une étude profonde; tant il eft difficile de trouver des fçavans assez reservez & affez en garde pour s'empêcher de décider. On ne doit décider que lorfqu'on eft bien affuré de fonterrain,&qu'on l'a bien &exactement reconnu, fans cette précaution on court rifque d'en être chaffé.

Lipfe nous donne l'ordre de ba taille des Romains du tems de Polybe; il s'eft trompé, & fon ordre eft faux à tous égards. Machiavel, qui a fuivi Tite - Live dans l'explication de l'ordonnance Romaine, n'a pas compris fon Auteur; car il prétend, comme une foule d'autres, que les Romains ne combattoient pas par cohortes ou par compagnies rangées en quinconce, mais par files, qui

entroient les unes dans les autres comme dans un étui ; c'est-à-dire,

que les haftaires étant repouffez, entroient dans les files des Prin- Mach.difc. ces, & celles-ci dans celles des Tite Live. polit. fur

Triaires, lorfque les uns & les autres avoient du pire. Il eft vrai que ce paffage de Tite Live eft un peu embaraffé, ce qui n'eft que trop ordinaire aux hiftoriens qui n'ont aucune expérience des armes. On voit bien que Machiavel étoit un grand politique, & un fort mauvais Auteur en matiere de guerre. Il s'eft mêlé d'écrire de cette fcience affez mal pour fe faire mocquer des intelligens, & de traduire prefque tout Vegece, fans dire un feul mot de fon Auteur, comme je penfe l'avoir déja dit. Parlons maintenant de l'ordonnance Romaine du tems de Céfar, ou un peu avant le dernier foupir de la République.

Une armée Romaine étoit com

L'art. de
Mach.

la guerre

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pofée de légions. La légion étoit un corps de cinq mille hommes pefamment armez qu'on divifoit en dix cohortes, ou bataillons de soo. hommes chacun, quelquefois de plus, felon les occurences. Je ne parle pas ici d'un certain nombre de Cavalerie qui en faifoit partie. Chaque légion. formoit trois ordres, c'eft-à-dire, qu'une armée Romaine combattoit fur trois lignes paralleles. Les Soldats étoient armez de différentes fortes d'armes. Les plus fortes étoient une (a)Pilum. maniere de pertuifane (a) à peu près semblable aux efpontons de

nos Officiers. On en armoit la troifiéme ligne, que l'on faifoit fouvent paffer où l'on jugeoit à propos, comme cela fe voit dans Polybe même, & fur tout contre un effort de Cavalerie.

La distance d'une cohorte à l'au tre étoit égale à fon front. Les coda acies.. hortes de la feconde ligne (6)

(b) Secun

étoient placées vis-à-vis les efpaces de la premiere, (a) & celles (a) Prima de la troifiéme, (b) vis-à-vis ceux de la feconde.

La Cavalerie étoit rangée par efcadrons. Les intervales des uns aux autres égaux à leur front comme nous le pratiquons aujourd'hui, fi ce n'eft qu'ils ne combattoient pas fur deux lignes de Cavalerie, parce qu'ils avoient fort peu de cette forte d'arme dont ils ne faifoient pas grand cas tout ce qu'ils avoient de fort & de redoutable confiftoit dans leur Infanterie, dont ils connoiffoient la force qui naiffoit de l'excellence de leur difcipline militaire. On ne fçauroit révoquer en doute les ef cadrons ; cependant il fe trouve un grand nombre de Sçavans, qui doutent que les Romains combattiffent par turmes, ou efcadrons difiinguez les uns des autres par des efpaces entre eux.

acies.
(b) Tertia
acies.

Dans une converfation que j'eus l'honneur d'avoir avec S. A. R. Monfeigneur le Duc d'Orleans, il ne me parut pas qu'il fût bien perfuadé de cette maniere de combattre à la Cavalerie. Il faut être alerte, & bien poffeder les matiéres avec un Prince auffi plein d'efprit, auffi éclairé, & auffi fçavant qu'il l'eft. Il eft vrai que Tite-Live ne nous dit pas formellement que les Romains combatiffent par turmes, féparez les uns des autres; mais il me femble que c'eft affez nous le faire entendre que de diftinguer les turmes dans les combats de Cavalerie, & l'entrelaffement de l'Infanterie legére parmi les turmes i car cette Infanterie n'auroit pû combattre entre les files de Cavaliers, & s'écouler entre-elles, ce qui feroit abfurde. Nos traducteurs fe fervent du terme équivalent d'efcadrons, lorfqu'ils parlent des turmes. Il y

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