Imágenes de páginas
PDF
EPUB

fuivie fi vivement, qu'elle fut renverfée fur toute fon Infanterie, dont les intervales entre les corps, fupofant même qu'il y en eût, ne fe trouvant pas affez larges pour recevoir ce torrent de fuiards, elle fut rompuë & entraî. née par fes propres gens, qui y portérent le trouble & la terreur.

C'est ainfi qu'on doit entendre cette bataille. L'Auteur l'a tellement embaraffée & défigurée, qu'il n'y a qu'un homme du métier qui puiffe la bien éclaircir. Cet ordre de bataille de Narfez peut aider à débrouiller celui de Caffilin, qui eft célébre dans l'Hiftoire de France, & qu'Agathias décrit bien plus ténébreusement que Procope celui de Narfez.

Ce qui m'a porté à l'examen de cet ordre de bataille, c'est la grandeur de l'évenement qui a excité ma curiofité, parce que la defcription d'Agathias n'offre aucun

deffein,

1

deffein, fi l'on en excepte la tête de porc. Le Pere Daniel a donné un Plan de cette ordonnance dans fon Hiftoire de France, & dans celle de la Milice Françoife, je ne doute point qu'il ne l'ait bien examiné, mais je ne crois pas que, Bucelin, qui étoit un habile Chef de guerre, eût fait deux courbes de les aîles. L'ordre de Narfez est encore plus difficile à débrouiller. Il ne s'agit pas de celui-ci, dont je ne fais pas grand estime ; mais de l'autre qui me paroît très-remarquable. Cette maniere de fe ranger mife dans fon véritable jour m'a femblé digne de l'admiration des gens du métier, je ne la donne pas ici, quoiqu'elle ait quelque raport à mon fujet, je n'ai crû devoir entrer dans un détail qui m'eût mené trop loins & mon deffein a été de me renfermer dans les bornes les plus étroites fur une matiere qui fournit des

pas

R

કંટ

elpaces infiniment plus grands que ceux que nous avons courus.

On peut voir par le Plan de la bataille de Creffy, & par cenom bre prodigieux de combats & de batailles dont FHftoire de France eft remplie, qu'il ne feroit pas im poffible de l'orner & de l'enrichir des Plans gravez de ces batailles & de ces combats, & de les donner dans toutes les régles de l'art. Rien n'atache & n'intereffe davantage que l'hiftoire de nos ancêtres. Je vois par la lecture que j'ai faite de celle du Pere Daniel, qui eft tout ce qui s'eft fait de meilleur dans ce genre, que la plupart des actions qu'il raporte ne font pas fr difficiles à débrouiller que bien. des gens le prétendent. L'Hiftoire de la Milice Françoife fourniroir de grandes lumieres, en conful fant pour un plus grand éclairciftement, les fources où cet Hifto rien a puifé la defcription des faits qu'il raporte.

[ocr errors]

Dès qu'un homme du métier, apliqué & d'une longue expérience, eft au fait de l'ancienne Milice, il lui eft aifé de débrouiller & de voir la clarté où les autres ne voyent que ténébres. En examinant les actions de guerre on fe régle felon les différens fiécles, & felon les différens changemens quí font arrivez dans la maniere de fe ranger & de combatre depuis ces tems reculez jufques au tems où nous vivons. Je le répéte encore, cette entreprife ne feroit pas fi difficile que bien des gens fe l'imaginent. J'en ai eu fouvent la penfée; mais celle de travailler aux Commentaires de Cefar,après mon Polybe, m'aparû plus belle, plus aifée, plus utile & plus agréable, outre que j'ai une grande partie des matériaux. Il faut pourtant convenir que ces deux entreprises (fans les croire au-dessus de mes forces) font au - deffus de mes

moyens, & fans le fecours d'une main Royale l'execution m'en paroît impoffible. Pour le coup je reconnois, contre le fentiment des Philofophes que la foif des richesfes eft bien moins un vice dans un certain ordre d'hommes, qu'un défir de faire éclater leurs vertus & les qualitez qui peuvent les rendre recommandables à la posterité. La mauvaise fortune les tient dans l'impuiffance de rien executer de ce qu'ils font capables de faire, leurs talens demeurent enfevelis & comme morts. Il ne leur fert de rien de rouller de gran des penfées, & de propofer de grands deffeins dont le fuccès feroit infaillible, fi on leur fourniffoit les moyens & les fecoars néceffaires pour réu ffir. Je netrouve rien de plus trifte que cela.

FIN.

« AnteriorContinuar »