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TRAITÉ

DE L'EXPLOITATION

DES BOIS.

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LIVRE QUATRIEME.

De l'Exploitation des Futaies. EN fuppofant une forêt abattue, il s'agit d'en exploiter les

arbres & d'en tirer tout le parti poffible; mais avant de donner le détail de tous les objets d'ufage auxquels ils employés, je crois devoir discuter deux questions importantes. peuvent être La premiere confifte à savoir si, après que les arbres ont été abattus, il eft à propos de les laiffer quelque temps avec leurs branches & dans leur écorce; ou s'il convient mieux de les équarrir fur le champ. Cette premiere queftion nous conduit à en discuter une feconde non moins importante: favoir, quelle eft la caufe des fentes & des éclats qui fe trouvent dans le bois, & qui endommagent fi confidérablement ceux de la meilleure qualité. Après avoir traité à fond ces questions, nous II. PARTIE. Hhh iiij

parlerons de l'exploitation des hauts taillis, ou des demifutaies; & nous terminerons ce Livre par les bois qui fe vendent en grume, c'est-à-dire, en rondins fimplement écorcés.

CHAPITRE PREMIER,

Où l'on examine fi, lorfque les Arbres ont été abattus, il convient de retrancher leurs branches, de les écorcer, de les équarrir fur le champ, même de les débiter en quartelage ou en planches; ou s'il y a un avantage réel, ou un dommage évident, à les laiffer quelque temps avec leurs branches foit dans leur écorce, foit du moins dans leur aubier, & fans être équarris.

DANS

ANS le Chapitre qui traitoit de la faifon convenable d'abattre les arbres, il a été queftion d'une propofition qui fembloit devoir être adoptée fans aucune difcuffion, non-feulement parce qu'elle eft généralement reçue par ceux qui font le plus au fait de l'exploitation des forêts ( par les maîtres de l'art), mais encore parce qu'elle paroiffoit être fondée fur des raisonnements Phyfiques très-féduifants : j'avoue que je ne me fuis livré à l'examen de cette queftion, que parce que je m'étois fait une loi de n'embraffer aucun fentiment qui ne fût appuyé fur des preuves expérimentales que je me propofois d'établir avec toute l'exactitude dont je peux être capable. Mes recherches ont combattu fi folidement en différents points les pratiques reçues & mes propres préjugés, que j'ai été obligé de réformer mes anciennes idées, & de conclure plufieurs fois contre le fentiment le plus généralement établi.

Il n'en eft pas de même de la queftion que je me propose d'examiner dans ce Chapitre, fur laquelle les fentiments font fort partagés. Chacun croit cependant avoir en fa faveur des raifons Phyfiques & des expériences; mais comme il s'agit de parvenir à une folution, il eft néceffaire, avant tout, de pefer les raifons des uns & des autres, pour difcerner celles qui font d'accord avec la bonne Physique, & en même-temps (ce qui eft bien plus important) examiner la valeur des expériences que l'on objecte, foit en les répétant pour en conftater l'exactitude, foit en les comparant avec d'autres, qui, ayant été exécutées dans la feule vue d'éclaircir un fait particulier, fe trouvent ordinairement plus exactes & plus concluantes que ne le peuvent être des obfervations vagues que peut fournir une pratique journaliere, dans laquelle il eft rare que l'on faffe attention à des circonftances qui peuvent varier les effets, & rendre les obfervations défectueufes. Pour entrer en matiere, je vas commencer par expofer d'une maniere générale les différents sentiments qui partagent les Auteurs, & les perfonnes expérimentées que j'ai confultées fur le point dont il s'agit ici.

1o, Tout le monde convient qu'on ne peut trop tôt retrancher les branches à un arbre qui vient d'être abattu.

2o, Mais il y en a qui voudroient qu'on l'équarrît aussi sur le champ.

3o, Quelques-uns prétendent qu'il eft plus avantageux de le laiffer pendant huit ou dix jours dans fon écorce.

4°, D'autres eftiment qu'il y a de l'avantage à ne l'équarrir qu'au bout d'un mois, de fix femaines & même de deux mois. 5°, D'autres foutiennent qu'on devroit le laiffer beaucoup plus long-temps dans fon écorce.

6°, Enfin d'autres décident qu'il faut écorcer les arbres immédiatement après qu'ils ont été abattus, mais ne les équarrir que quelque temps avant qu'on veuille les employer.

Voilà les différentes opinions qui partagent ceux qui font dans l'ufage de faire exploiter les bois : les vues générales qui ont donné naiffance à tant de fentiments divers fe réduifent,

foit à conferver au bois fa bonne qualité, abstraction faite de toute autre chofe, foit à prévenir que les arbres ne deviennent inutiles à caufe des fentes & des éclats qui ne manquent gueres d'arriver quand ils fe deffechent; & ceux - là ne font gueres attention à la qualité intrinfeque du bois. Nous avons. cru qu'il étoit important, de prêter également attention à ces deux objets; cependant pour obferver un ordre dans cette matiere, nous diviferons notre travail en deux parties, pour confidérer féparément ce qui regarde la qualité du bois & ce qui appartient aux fentes. Mais il faut reprendre chaque fentiment en particulier, rapporter les raifons que leurs auteurs alleguent, & les expériences qu'ils propofent pour s'autorifer dans leur avis; il faut que le détail de nos obfervations & de nos expériences fuive de près celles des autres, pour fe trouver en état d'en tirer des conféquences qui puiffent conduire à l'éclairciffement de notre question : c'eft ce que nous allons effayer de faire. Nous terminerons enfin ce Chapitre par donner des regles de pratiques fondées fur ce que nous aurons établi auparavant.

ARTICLE I. Quel peut être l'effet que l'écorcement & l'équarriffage des arbres abattus peuvent produire fur leur bois, relativement à leur qualité.

CEUX qui foutiennent qu'il faut ébrancher & équarrir fur le champ les arbres qu'on abat, pofent pour principe:

1o, Que le bois des arbres qui meurent fur pied eft de mauvaise qualité, & que ces arbres font prefque toujours remplis de défauts : généralement parlant il en faut convenir.

2o, Qu'un arbre qu'on abat & auquel on conferve les branches & l'écorce, ne meurt que peu à peu : il faut encore accorder cette propofition qui a été fuffifamment prouvée dans le Livre précédent, ainfi que dans la Phyfique des Arbres.

De ces principes, ils concluent qu'il faut (auffi-tôt qu'un arbre a été abattu) lui retrancher fes branches & fon écorce, afin, difent-ils, de le tuer, & pour empêcher que fon bois

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