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fible dans les bois qui, comme ceux de la précédente expérience, font d'un petit équarriffage; l'effet du defféchement inégal des couches extérieures & des intérieures, diminuant auffi dans les bois qu'on équarrit, fur-tout quand ces bois ne font pas fort gros, les bois équarris fe doivent donc moins fendre que les rondins écorcés.

Mais pourquoi les rondins qui étoient en grume fe font-ils moins éclatés que les bois mêmes équarris ? l'inégalité de denfité devoit s'y trouver comme dans les rondins écorcés? Cela eft vrai: mais comme on a vu par les expériences rapportées dans le premier article, que ces bois se deffechent lentement, & même que l'écorce eft une matiere fpongieufe qui fe charge de l'humidité de l'air, l'évaporation de la feve fe fera donc plus uniformément dans toutes les couches; le rapprochement des fibres ligneufes ne fe fera pas par des fecouffes qui les faffent éclater, mais par une force lente & ménagée qui obligera les fibres à s'écarter les unes des autres; ainfi, au lieu de grandes fentes, il fe formera un nombre de petites gerces qui ne feront aucun tort aux pieces, & c'eft-là tout ce qu'on peut defirer; car dans un rondin de bonne qualité, il faut néceffairement que les couches extérieures prêtent de quelque façon que ce puiffe être.

J'ai fait encore plufieurs expériences qui démontrent l'évidence de ce que je viens d'avancer; je dois les rapporter ici tout de fuite.

§. 12. Troisieme Expérience.

J'AI dit dans le premier article de ce Chapitre, que j'avois fait abattre deux gros Chênes, dont l'un avoit été marqué A, & l'autre B (Pl. XVII. fig. 1); que j'avois fait fcier leurs troncs par billes de trois pieds de longueur; que chaque arbre m'en avoit fourni quatre qui avoient été numérotées 1, 2, 3, 4 ; que la bille numéro 1, de l'arbre A, étoit reftée en grume; que celle numéro 2, du même arbre avoit été équarrie; que la bille, numéro 3, étoit reftée en grume, & celle, numéro 4, équarrie. A l'égard de l'arbre B, la bille, numéro 1, fut écor

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cée ; celle numéro 2, équarrie; la bille, numéro 3 fut écorcée, & celle, numéro 4, équarrie. J'ai dit que tous ces bois avoient été mis fous un même hangar ; & j'ai établi dans quelle proportion s'étoit faite l'évaporation de leur humidité. J'ai auffi donné mes remarques fur la différente qualité de leur bois; mais je n'ai rien dit des obfervations que j'avois faites fur les fentes de ces différentes billes : voici le lieu d'en ren

dre compte.

Un plus grand détail me paroît cependant inutile, il suffira de favoir que les rondins qui avoient été écorcés, étoient tellement fendus jufqu'au cœur, qu'on auroit pu, avec les moindres efforts, en détacher des quartiers.

Quoique les billes équarries fuffent moins fendues que les premieres, cependant elles l'étoient beaucoup plus que celles qui étoient reftées dans leur écorce, & celles - ci l'étoient si peu, & seulement par les bouts, qu'en les équarriffant, toutes fentes qui étoient fort petites, ont difparu entiérement; mais en y regardant de près, on y appercevoit un grand nombre de gerces, à la vérité fort petites, & qui ne pouvoient pas empêcher que ces billes ne puffent être employées à toute forte d'ufage.

§. 13. Remarque.

CETTE expérience confirme les conféquences que j'ai tirées de mes deux premieres ; je n'ajouterai donc ici qu'une fimple remarque; c'eft qu'en obfervant attentivement le defféchement des rondins écorcés de ma troisieme expérience, j'ai plus particuliérement reconnu que, quand on fait deffécher trop promptement le bois, il s'ouvre dans les premiers mois de grandes fentes qui fe referment enfuite en partie, & que les petites gerces difparoiffent entiérement.

Je fouhaitois fort qu'on pût exécuter de pareilles expériences en Provence, parce que je jugeois que la différence entre les bois écorcés & ceux qui ne le feroient pas, y feroit plus confidérable que dans nos Provinces, non-feulement parce que les arbres qui y croiffent, étant de meilleure qualité

que les nôtres, y gercent infiniment plus, mais encore parce que l'air y étant plus chaud & plus fec, fait fendre le bois d'une maniere extraordinaire.

M. de Héricourt, Intendant des Galeres, fe prêta volontiers à mes vues; en conféquence, tout fut difpofé pour l'expérience pendant un féjour que je faifois à Marseille; & après mon départ, M. Garavaque, Ingénieur de la Marine, ayant bien voulu fe charger de fuivre celles que j'avois commencées, il s'en acquitta de la maniere la plus fatisfaifante pour moi : je rapporter ces expériences en détail.

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LE 18 Mai 1736, on abattit dans le terroir de Marseille quatre gros Chênes; on les fit voiturer fur le champ dans l'Arfenal; on les coupa par billes, & on en tira toutes les pieces qui pouvoient être propres pour la conftruction des Galeres; on en équarrit une partie; on en écorça une autre, & on laiffa le refte en grume : toutes ces pieces furent dépofées sous un même hangar.

Voici les obfervations qui ont été faites fur ces pieces de bois, vers le mois de Juin 1738, lorsqu'on les a examinées pour la derniere fois.

Les billons qu'on avoit conservés avec leur écorce, ne paroiffoient point, ou prefque point fendus fur leur longueur; mais on voyoit des fentes affez confidérables fur les bouts ou fur l'aire de la coupe. Ces gerces avoient commencé à fe former dans la partie moyenne qui eft entre le cœur & la fuperficie; & elles avoient fait des progrès vers l'une & vers l'autre, fans pour l'ordinaire y être parvenues tout-à-fait ; quelques fentes cependant s'étendoient dans quelques pieces jufqu'au cœur, & même le traversoient (PI. XVII. fig. 2), mais prefque jamais elles n'atteignoient l'écorce; enforte que. fi l'on eût dépouillé ces billons de leur écorce, on n'auroit apperçu aucune fente confidérable à la fuperficie, puifque de toutes celles qui paroiffoient fur la coupe, aucune n'atteignoit la circonférence.

Pour s'affurer fi ces fentes qu'on voyoit par les bouts pénétroient bien avant dans les billons, & s'il ne s'en formoit pas d'autres dans l'intérieur, on fit couper à l'un des bouts de quelques billons, une tranche de deux pouces d'épaiffeur, & 'on trouva que les fentes diminuoient confidérablement dans l'intérieur; on en enleva enfuite une feconde tranche de la même épaiffeur, pour pouvoir pénétrer davantage dans l'intérieur du billon, & les fentes difparurent prefque entiérement, fans qu'on en découvrît de nouvelles. On fit aussi refendre à la fcie quelques-uns de ces billons, & on n'y découvrit aucune fente; mais quoiqu'il y eût deux ans & demi que les arbres avoient été abattus, ce bois étoit encore chargé de feve.

Ces obfervations ont été répétées plufieurs fois fur d'autres arbres, fans qu'on ait pu remarquer aucune différence confidérable.

Les billons du même temps, & qui avoient été équarris, étoient dans un état bien différent, quoiqu'ils euffent refté fous le même hangar où l'on avoit mis ceux en grume. Ils étoient traversés de beaucoup de fentes, larges vers la fuperficie, & qui fe perdoient au centre où peu d'entr'elles y touchoient, quoique leur direction fût toujours vers cet endroit : voyez Pl. XVII. figure 4, & encore pour les arbres écorcés, la figure 3.

Enfin ces billons équarris étoient bien plus fecs, que ceux qui avoient été confervés en grume, quoique les uns & les autres euffent été abattus dans le même temps, & confervés dans le même lieu.

§. 15. Conféquences de la précédente Expérience.

CETTE expérience, quoiqu'exécutée dans une Province éloignée, & suivie par une autre perfonne que moi, s'accorde à merveille avec les précédentes.

L'écorce forme non-feulement un obftacle à l'évaporation de la feve; mais outre cela elle est une forte d'éponge qui se charge de l'humidité de l'air, comme nous l'avons démontré dans le précédent article: je pense que c'en eft affez pour

empêcher que les bois ne fe fendent, & pour que la plûpart des fentes des bouts ne puiffent atteindre la fuperficie des billons qui font recouverts d'écorce.

Comme la feve a une libre iffue par les bouts, il doit s'y former des fentes, mais qui ne pénétreront point avant dans le bois.

Le contraire de tout cela doit arriver dans les arbres équarris: c'est encore ce qu'on voit dans l'expofé de cette expé

rience.

Ce feroit cependant chercher à fe faire illufion que de fe perfuader, qu'en ralentiffant l'évaporation de la feve, il y auroit beaucoup à gagner du côté des fentes, fi réellement on ne faifoit que les retarder; car s'il eft vrai que le bois ne fe fend qu'à proportion de l'humidité qu'il perd, on accordera volontiers qu'au bout d'un certain temps, celui qui eft en grume fe trouvera moins fendu que le bois écorcé ou équarri, puifqu'il eft fuffisamment prouvé que l'écorce fait un obftacle à l'évaporation de la feve. Mais auffi on conviendra qu'il faut à la fin que cette feve s'échappe ; & fi après un an d'abattage, lorfqu'on viendra à équarrir du bois qui fera refté pendant ce temps dans fon écorce, il vient à fe fendre comme fi on l'avoit équarri tout verd, il eft clair qu'on n'auroit rien gagné à le laiffer en grume pendant ce même temps. C'est donc ici le lieu d'examiner fi la lenteur du defféchement qui réuffit fi bien aux Potiers de terre, peut avoir fon application à l'égard du bois.

§. 16. Continuation des précédentes Expériences.

C'eft dans cette vue que j'ai écrit à M. Garavaque pour le prier de faire équarrir, neuf mois après leur abattage, quelques uns des billons qu'il avoit confervés en grume; ce qu'il voulut bien exécuter. De mon côté, j'ai fait équarrir, un an après qu'ils avoient été abattus, les bois en grume de ma feconde expérience & encore ceux de la troisieme: tous font reftés plus d'un an en cet état. Il s'eft formé fur ceux de M. Garavaque & fur les miens, beaucoup de gerces & quelques

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