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fentes, mais qui n'étoient ni fi ouvertes ni fi profondes que celles des billons qui avoient été écorcés ou équarris fur le champ: cette multitude de petites fentes n'a point empêché qu'on n'ait pu faire ufage de ces pieces.

§. 17. Conféquences de ces Expériences:

CES expériences prouvent que les pieces de bois, ainfi que les ouvrages des Potiers de terre, fe fendent moins, quand on peut ralentir leur defféchement, que quand on veut le précipiter; mais avec cette différence, qu'en y apportant beaucoup de précautions, on peut empêcher les ouvrages de terre de fe fendre en aucune façon; au lieu que les bois fe gercent, quelque précaution qu'on y apporte, & c'est à l'inégale denfité du bois que j'attribue cette différence.

Cependant, puifqu'il eft démontré qu'on peut, en fufpendant l'évaporation de la feve, diminuer beaucoup les fentes, & faire qu'au lieu d'une grande fente, il s'en forme plufieurs petites & moins préjudiciables, c'eft déja un moyen de préferver les bois du dommage qu'elles leur caufent: ce moyen eft praticable en certains cas. Nous allons propofer d'autres expédients; mais avant de finir cette matiere, il eft à propos de faire quelques obfervations relatives au bois qu'on conferve

en grume. §. 18. Premiere Remarque.

Nous avons dit dans le premier article de ce Chapitre, que les bois dont on fufpendoit le defféchement, foit en les tenant dans des lieux frais, foit en les laiffant recouverts de leur écorce, étoient plus tendres que ceux qu'on exposoit à un prompt defféchement; on fait d'ailleurs que les bois tendres fe gercent moins que les bois forts: il pourroit donc arriver que cet affoibliffement des fibres ligneufes contribuât à diminuer le progrès des fentes; mais je ne vois pas comment on pourroit, par des expériences, parvenir à faire une diftinction précife de ce que produit dans ce cas l'affoibliffement des fibres

ligneufes, ou le fimple rapprochement tonique dont nous avons parlé.

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§. 19. Seconde Remarque.

POUR efpérer quelques avantages de l'écorce, il ne fuffit de conferver les bois en grume l'espace de deux ou trois mois. En preuve de ce que j'avance, je rappellerai ce qu'on a vu dans mes expériences précédentes, qu'un rondin couvert de fon écorce, qui devoit perdre, pour être réputé fec, un tiers de fon poids, n'en a perdu, pendant les mois de Février, Mars & Avril, qu'un quinzieme."

Cependant le foleil commence à avoir bien de la force en Mars & en Avril. Il n'eft pas douteux que ces rondins auroient beaucoup moins diminué de poids, fi on les eût abattus en Décembre, & pefés à la fin de Février. Mais je prends le cas le plus favorable à l'évaporation de la feve; & l'on voit qu'au commencement de Mai le rondin dont il est question ci-deffus, n'ayant diminué que d'un quinzieme, étoit peu différent, quant au poids, de ce qu'il étoit dans le temps précis de la coupe: ainfi, fi je l'avois fait équarrir au commencement de Mai, temps où le foleil a beaucoup de force, & dans lequel la feve s'évapore très - promptement, il eft clair qu'il fe feroit confidérablement fendu, & prefque autant que fi on l'avoit abattu dans cette même faifon, & équarri fur le champ.

J'ai encore pefé ce même rondin à la fin de Décembre, c'està-dire, dix mois après avoir été abattu, il n'étoit encore gueres plus diminué de poids que d'un feizieme, au lieu d'un tiers qu'il devoit perdre, & qu'il a effectivement perdu par la fuite.

Cette expérience prouve qu'il faut au moins conferver les bois jusqu'à la fin de l'Eté dans leur écorce, fi l'on veut empêcher par ce moyen qu'ils ne fe fendent par grands éclats; alors on pourra hardiment les équarrir, parce que les chaleurs étant paffées, il n'y aura point à craindre que le refte de la feve ne fe diffipe trop brufquement; feulement une partie s'évaporera lentement pendant la faifon de l'Hiver, & les bois en feront plus en état de fupporter les chaleurs du Printemps & de l'Eté de l'année fuivante.

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Je vais plus loin, & je dis qu'il vaudroit mieux les équarrir auffi-tôt qu'ils ont été abattus, pendant l'Hiver, que de remettre ce travail au Printemps fuivant, parce que, comme la feve s'échappe plus promptement d'un morceau de bois équarri, que de celui qui refte en grume, il s'en diffipera davantage pendant l'Hiver, faifon où l'on doit moins redouter une trop prompte évaporation, parce que, nonobftant l'équarriffage, elle s'opérera toujours lentement.

Cette évaporation lente n'eft pas à négliger: elle a monté dans un gros morceau de bois quarré que j'avois pris du même arbre qui m'a fourni le rondin dont je viens de parler, à près d'un quart dans les mois de Février, Mars & Avril; & il fe trouvoit fort fec à la fin de Décembre, ayant alors perdu plus d'un tiers de fon poids; par conféquent une bonne partie de la feve s'eft échappée doucement dans l'efpace de trois mois; au lieu qu'elle fe feroit échappée brufquement, fi l'on eût remis à équarrir cette piece de bois au Printemps fuivant.

§. 20. Troifieme Remarque.

J'AI prouvé dans le détail de mes expériences, que les bois qui reftent en grume font moins fujets à fe fendre & à s'éclater, que ceux qu'on équarrit prefque auffi-tôt qu'ils ont été abattus; & j'ai pensé qu'on étoit redevable de cet avantage au ralentiffement de l'évaporation de la feve occafionné par les écorces. Malgré les preuves expérimentales que j'ai rapportées pour appuyer mon fentiment, quelques perfonnes exercées dans l'exploitation des forêts, en convenant avec moi du fait, en donnent une autre raifon. Ils regardent l'écorce des arbres comme une gaîne capable de réfistance, & qui s'oppose à l'effort que font les fibres pour fe féparer.

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Mais pour faire fentir la résistance des écorces ne peut produire un grand effet, je demande qu'on examine l'écorce du Chêne; il eft vrai qu'on découvrira, fur-tout fur les jeunes branches, un épiderme dont les fibres ont plutôt une direction circulaire que verticale par rapport à la longueur du tronc;

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mais cet épiderme eft fi mince & fi fragile qu'on le peut hardíment compter pour rien; le furplus de l'écorce eft une efpece de laffis, ou un affemblage de fibres ligneufes qui ont une direction longitudinale, mais qui font mal unies latéralement les unes avec les autres, & qui forment un réseau dont les mailles font remplies par des véficules, ou un parenchifme, ou des vaiffeaux extrêmement capillaires, auffi incapables les uns que les autres d'une grande résistance; c'eft en conféquence de cette organisation que l'écorce peut réfifter avec force quand on tire fes fibres fuivant leur longueur, & qu'elle cede aisément quand on ne tend qu'à les féparer en tirant l'écorce dans fa largeur.

Que l'on compare à préfent cette foible résistance (que tout le monde peut éprouver) à la force confidérable des fibres ligneufes qui tendent à fe défunir, force capable de rompre les affemblages de menuiferie les mieux conditionnés, & de produire beaucoup d'autres effets dont je parlerai par la fuite. Je crois donc que la force des écorces, la force des écorces, dans le cas dont il s'agit, n'égale pas à beaucoup près celle d'une couche ligneuse. On m'objectera que la grande réfiftance de l'écorce se voit fenfiblement dans un arbre qui végete, & que fi l'on fend avec la pointe d'une ferpette l'écorce d'un arbre vigoureux fuivant la direction de fon tronc, on voit en peu de temps la plaie s'ouvrir & l'arbre groffir; ce qui prouve que l'écorce oppofoit une grande réfiftance à l'effort des fibres ligneufes qui tendoient à s'étendre fuivant la groffeur du tronc.

Ce raifonnement paroîtra concluant à qui n'aura pas examiné la chofe de plus près : mais fi l'on y veut prêter attention, on s'appercevra bientôt que l'écartement de l'écorce ne vient pas de ce que le bois fe trouvoit gêné par l'écorce, mais de ce que l'écorce l'étoit elle-même par le bois fur lequel elle étoit étendue; ainsi, pour entendre précisément ce qui en eft, il faut fe représenter un morceau de parchemin mouillé, trèsmince & très-aifé à déchirer, qui feroit tendu fur un morceau de bois; ce parchemin ne feroit pas capable d'empêcher le bois de fe fendre, puifque je le fuppofe mince, aifé à fe rompre

& expanfible; mais fi l'on fait une incifion à ce parchemin, il eft clair que les levres coupées fe retireront en vertu de la tension & de l'élafticité du parchemin. Il en eft de même de l'écorce que l'on fend fur un arbre; comme elle eft fur le bois dans un état de tension, elle fe retire, ce qui doit déja faciliter l'augmentation de groffeur de l'arbre; outre cela, il s'échappe, des fibres coupées ou rompues, un fuc qui s'endurcit, & qui fait une augmentation de volume dans le lieu de la cicatrice, capable quelquefois de produire de bons effets, comme de redreffer de jeunes arbres un peu courbés, ou de leur donner de la groffeur dans les endroits où, par quelque accident, ils n'avoient pas pris affez de corps. Mais comme tout ceci n'eft pas de mon fujet, il me fuffit d'avoir prouvé que la résistance des écorces n'eft pas capable de produire un grand effet dans le cas dont il s'agit ici; & je reviens à mon objet.

On a vu que, quand la fuperficie des rondins fe deffeche trop promptement en comparaifon du centre, les bois fe fendent confidérablement, & qu'on peut prévenir cet accident en retardant l'évaporation de la feve.

Je crois auffi avoir démontré qu'il fe formoit néceffairement des gerces fur un rondin qui fe deffeche, par la raison que les couches du centre ne fe contractent pas proportionnellement à celles de la circonférence: on peut bien, en fufpendant l'évaporation de la feve, empêcher qu'il ne fe forme de grands éclats; mais quelque chofe que l'on faffe, il eft néceffaire qu'il fe forme beaucoup de petites fentes fur la fuperficie d'un rondin qui fe deffeche. J'ai jugé que la même chofe n'arriveroit fi l'on débridoit, pour ainfi dire, les cercles ligneux, pour leur faciliter la liberté de fe contracter; ce qui m'a confirmé dans cette opinion, c'est que j'ai remarqué que quand il fe formoit une grande fente à la circonférence d'un cylindre, il ne s'en trouvoit prefque pas dans le refte du corps de la piece: cette réflexion m'a engagé à faire l'expérience fuivante.

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S. 21. Cinquieme Expérience.

DANS les premiers jours de Janvier, je fis débiter trois

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