Imágenes de páginas
PDF
EPUB

fe pratique prefque toujours, l'ufage étant ordinairement de ne les refendre qu'à mefure que l'on en a befoin pour la conftruction: voici l'avantage confidérable qu'il y auroit à fuivre la pratique que je propofe.

1o, Quand on vient à débiter ces billons ou ces plançons qu'on à laiffé se deffécher dans leur entier, on rejette en rognures ou en copeaux, près de la moitié du bois de ceux qui font deftinés pour la conftruction des Galeres; il y a auffi un déchet affez confidérable fur les plançons deftinés à faire des bordages, fur-tout quand ils font de bon bois : voilà donc du bois, de la main-d'oeuvre, & des frais de tranfport qu'on pourroit épargner en bonne partie, en fuivant la méthode que je propofe ; j'ajoute qu'il en coûtera moins de fciage quand les bois feront verds, que quand ils feront devenus fecs.

2o, En refendant les bois dans les forêts, on pourra décoμvrir les vices intérieurs, que la plus grande application ne peut faire connoître quand ils font dans leur entier. Si ces défauts font confidérables, les Marchands changeront la deftination des pieces qui fe trouveront tarrées; ils éprouveront peu de perte, & on gagnera les frais de transport. Si les dé- · fauts font légers, on empêchera, en les expofant à l'air, qu'ils ne faffent des progrès; car tous les endroits attaqués de pourriture, font déforganifés & chargés d'une humidité qui ne pouvant fe diffiper à caufe de la déforganisation des parties, fermente, fe corrompt & porte l'altération dans les parties voifines: en découvrant la plaie, l'humidité se diffipe, & le progrès du mal eft arrêté.

30, Les bois refendus fe deffechent bien plus promptement ĺes que autres ; ils feront donc plutôt en état d'être employés : c'est déja un grand avantage; mais outre cela, ces bois en feront plus fermes, puifque ceux que l'on fait deffécher lentement, font plus tendres que les autres.

4°, La facilité du tranfport mérite bien qu'on y faffe attention; car les pieces ainsi débitées, étant moins groffes, on les pourra enlever avec de petites voitures : dans les faifons humides, & par des chemins difficiles, s'il fe rencontre de

mauvais pas, on peut plus aifément décharger & recharger les voitures: bien plus, tous les membres des Galeres, fi l'on en excepte les Rodes & les Capions, peuvent être chargés à dos de mulet; ainfi, dans les endroits où les charrois ne pourroient parvenir à raifon de la difficulté du terrein, on pourroit enlever à fommes des bois précieux pour la conftruction des Galeres, & pour quantité d'ouvrages civils, & mettre à profit des arbres qu'on n'abandonne fouvent que parce qu'on les croit dans des lieux inacceffibles.

5°, Enfin ces bois ainfi refendus, pourront être rangés avec beaucoup plus d'ordre & avec moins de peine pour les Journaliers, fous les hangars & dans les chantiers, & ils у оссиperont beaucoup moins de place.

Il est inutile de faire remarquer que ce que je viens de dire, principalement fur les bois destinés à l'Architecture navale, a auffi fon application pour ceux qui doivent être employés aux travaux civils & militaires, de même que pour les bois qui doivent être convertis en merrain, en traverfin, en lattes, en échalas, ou en autres ouvrages de fente.

Je ne m'arrêterai pas non plus à expliquer comment on pourroit faire ufage de mes expériences pour placer les traits de fcie avec adreffe; car connoiffant à peu-près le point où dans tel & tel cas il fe doit former de plus grandes fentes, on pourra quelquefois placer le trait de fcie, de façon qu'il ne fe forme point de grandes fentes dans les parties qui en feroient particuliérement endommagées. Au refte, ces détails ne pourroient être abrégés, & ils deviendroient inutiles à ceux qui voudront réfléchir avec un peu d'attention fur ce qui a été dit; d'ailleurs, nous ne pourrons nous difpenfer d'en parler dans le Livre où il fera queftion du bois de fciage; mais il eft très-important de faire attention aux deux conféquences fui

vantes.

1o, Dans les cas où l'on aura peu à craindre les fentes, & où il fera important de ménager la qualité du bois, il faudra faire équarrir promptement les arbres.

Ainfi, fi l'on eft dans l'obligation de conftruire des Vaiffeaux,

ou de faire de grandes charpentes avec des pieces de bois tendre; comme il n'y a alors que les grandes fentes qui foient préjudiciables, & comme l'on fait que les bois tendres fe fendent peu, il faudra les équarrir promptement. De même, dans les pays froids où l'air eft souvent chargé de brouillards, il ne faudra pas laiffer long-temps les bois dans leur écorce, parce que les bois qui croiffent dans le Nord fe fendent peu, & l'humidité qui regne dans l'air de ces contrées empêche que l'évaporation de la feve ne fe faffe trop brufquement.

2%, Dans les cas où l'on aura plus à craindre les fentes, qu'à ménager la qualité du bois, il faudra conferver l'écorce le plus long-temps qu'il fera poffible, ou faire refendre les bois tout verds. Ainfi, en Provence où les bois fe fendent beaucoup, il ne faudra écorcer les bois que le plus tard poffible, fi les pieces doivent être employées en entier; mais si leur destination exige qu'on les refende, il ne faudra pas attendre qu'ils foient fecs; le plutôt qu'on pourra y mettre la fcie, fera le meilleur; finon on prendra le parti de les conferver en grume jufqu'au temps qu'on les voudra refendre, ou au moins refendre dans les Ports, & le plutôt poffible, tous les plançons, à mesure que les fourniffeurs les livreront.

J'ai dit qu'il falloit refendre le plutôt qu'il feroit poffible, tous les bois qui font destinés à l'être; j'aurois dû en excepter les pieces de tour qui ne peuvent être refendues avant le temps de la conftruction, parce qu'elles font affujetties à des gabaris trop précis; mais j'ai cru cette exception inutile; 1o, parce qu'il eft aifé de choisir pour ces fortes de pieces, les courbants qui font les moins endommagés par les fentes; en fecond lieu, parce que je crois qu'il eft très-avantageux de ne point gabarier les pieces de tour en garniffant les parties courbes des Navires, avec des bordages droits attendris dans des étuves, pour les rendre propres à fe ployer fuivant le contour du Vaif

feau.

Je pense qu'on conviendra aifément qu'il eft poffible de refendre en bordages tous les plançons droits, en prenant attention de donner aux bordages différentes épaiffeurs, fuivant le

fui

befoin qu'on pourroit en avoir: on trouvera peut-être queldifficulté à refendre les plançons courbes, parce que, que vant différentes circonftances, on les refend, foit en fuivant la courbure des plançons, foit fur la face droite; mais j'en parlerai dans le Livre fuivant: on fe procureroit ainsi de quoi fatisfaire à tous les befoins de conftruction.

Il y a encore un moyen de prévenir les fentes, c'eft de refendre les bois fuivant la maille, ou bien par des lignes dirigées à peu-près du centre à la circonférence; mais comme je m'apperçois que ce Chapitre eft déja plus long que je ne m'étois propofé de le faire, je renvoie ce qui regarde cette façon de débiter les bois, à l'endroit où je traiterai du bois de fciage.

Le flottage fournit encore un moyen de prévenir un peu les fentes: j'en parlerai amplement dans la suite.

Après avoir difcuté les deux questions précédentes, qu'on peut regarder comme un préliminaire effentiel fur l'exploitation des gros bois, je vais maintenant parler des bois qui fe vendent en grume.

CHAPITRE III.

De l'exploitation des Bois que l'on vend le plus ordinairement en grume pour le Charronnage, l'Artllerie, &c.

ARTICLE I. Des Bois propres au Charronnage & au fervice de la Marine.

PRESQUE

RESQUE tous les bois de charronnage font de Chêne, ou d'Orme, ou de Frêne : dans quelques Provinces on y emploie le Hêtre.

Dans les hauts-taillis de 50 à 60 ans, on trouve des Chênes

de

de 30 à 40 pouces de circonférence: on les fcie à 18, 20 ou 22 pieds de longueur, & on les vend en grume aux Charrons pour faire des limons de charrette; ils trouvent encore dans ces pieces de quoi faire des pommelles, ou de quoi faire du bois de corde, à moins qu'il ne fe trouve dans les branchages de quoi faire des ages & des manches de charrue; comme nous en avons parlé dans l'exploitation des taillis, nous nous contenterons de faire remarquer qu'on fait ces parties des charrues indifféremment avec de l'Orme, du Frêne & du Chêne.

Si les corps de Chêne dont nous parlons, étoient fort gros au pied, on pourroit lever une ou deux longueurs de rais, & couper le refte pour en faire des limons: nous avons auffi parlé des rais à l'occafion des bois taillis.

On paye au Bûcheron 50 fous du cent d'abattage de ces bois. Les moyeux des roues fe font tous avec de l'Orme; & l'efpece qu'on nomme tortillard, eft infiniment fupérieure aux autres. Les moyeux pour les roues de carroffe, fe livrent en tronçons de 9 pieds & demi de longueur fur 30 pouces de circonférence; & on appelle une pareille piece, toife de moyeux.

Les moyeux pour les groffes voitures, fe livrent auffi en grume, mais par paires; les plus gros ont 51 à 52 pouces de circonférence; la paire doit avoir 4 pieds & quelques pouces de longueur, il y en a de moins gros; les petits doivent être de 36 pouces de circonférence, & les billons, pour la paire, ont 20 à 22 pouces de longueur.

On vend encore des moyeux pour les brouettes & les rouelles des charrues, qui ont 18 pouces de circonférence fur environ 12 pouces de longueur pour chaque moyeu.

Les effieux de Frêne & de Charme fe livrent auffi en grume; les pieces doivent avoir 7 à 8 pouces de circonférence fur 6 ou 7 pieds de longueur; il ne faut pas qu'ils foient ni trop verds ni trop fecs. On prend ordinairement ces pieces dans les bois de débit ou dans le herfage: on appelle bois de dé-. bit de jeunes arbres auxquels on ménage toute la longueur qu'ils peuvent porter, comme 30 ou 40 pieds fur 15 ou 18 pouces de circonférence vers le petit bout. C'eft avec ces bois

« AnteriorContinuar »