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LIVRE CINQUIEME.

De l'exploitation des Bois quarrés.

COMME

OM

M ME les ouvrages de Charpenterie, tant pour les Bâtiments civils, que pour les Vaiffeaux, confomment beaucoup de bois quarrés, on doit, quand on exploite une forêt, mettre part toutes les belles & grandes pieces pour les équarrir. Ce n'eft cependant pas toujours la pratique des Marchands de bois: quand ils apperçoivent qu'ils trouveront un débit plus avantageux du bois de fente, ils font débiter en billons les plus belles pieces, & ils les réduifent, pour ainfi dire, en copeaux pour en faire de la latte, du merrain, & fur-tout de la cerche. Comme toutes ces chofes & autres peuvent fe trouver dans des arbres de moyenne groffeur, & qu'on peut y employer des bois qui commencent à être gras; on facrifie rarement de beaux & grands arbres pour ces fortes d'ouvrages: mais je fuis toujours fâché de voir couper par morceaux les plus belles pieces pour les débiter en cerches; car fi l'on fe rappelle ce que nous avons dit fur l'art du Fendeur, on comprend qu'on ne peut lever de belles & grandes cerches que dans de fort gros arbres, fains, exempts de noeuds, & dont le bois n'est point fort gras. Il feroit à defirer qu'on ne fit de la cerche qu'avec les billes courtes qui peuvent fe prendre entre deux nœuds; fi ces pieces viciées ne fourniffoient pas autant de cerches qu'on en confomme, il n'y auroit pas grand mal, puisqu'il eft poffible de faire de petits seaux affez légers avec du merrain de bois blanc cerclé de fer très mince: la rareté des beaux bois de charpente devroit déterminer les K kk kij

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Marchands de bois à prendre ce parti, excepté dans les cas où la difficulté des chemins les obligeroit de réduire les bois par petites pieces, pour pouvoir être enlevées à dos de bêtes de fomme.

Je fuppofe que les Bûcherons ont abattu les arbres ainsi que nous l'avons expliqué; qu'ils les ont ébranchés; qu'ils ont converti en bois de corde les branches qui ne font propres qu'à cet ufage; qu'ils ont fait des fagots & des bourrées avec les rames; & qu'enfin le menu bois a été converti en charbon. Je fuppofe encore qu'on a délivré aux Fendeurs les bois qui font propres à faire de la fente & de la raclerie; enfin qu'on a vendu aux Charrons & aux Fourniffeurs de l'Artillerie, les pieces qui fe vendent en grume; & aux Charpentiers celles qui font propres à faire des pilots. Après l'enlevement de tous ces bois, il ne doit plus refter dans la vente que les pieces qui doivent être équarries; alors les Marchands doivent connoître à peu-près ce qu'ils pourront avoir de bois quarré, fuivant les regles d'approximation que nous allons rapporter.

§. 1. De la réduction des bois ronds en bois quarrés.

Si la circonférence d'un arbre eft moindre que deux toifes, on défalque la neuvieme partie, & on divise le reftant en quatre, ce qui donne fon équarriffage. Par exemple, fi la circonférence eft de 12 pieds, ou 144 pouces, cette fomme étant divifée par 9, il vient 16 au quotient; lefquels fouftraits de 144, il refte 128, qui divifés par 4, feront connoître que la piece aura 23 pouces d'équarriffage.

Si l'arbre avoit 3 ou 3 toifes & demie de circonférence, il faudroit fouftraire fept parties: s'il avoit 4 ou 4 toises & demie, on ôteroit 7 parties, & du reftant, une vingtieme partie : s'il avoit 6 ou 6 toifes & demie, on ôteroit la cinquieme partie, & du reftant, la vingtieme partie : s'il avoit 7 ou 7 toifes & demie, on ôteroit la quatrieme partie, & du refte, la feizieme. Si l'arbre avoit 9 toifes, on ôteroit la quatrieme partie, & du refte, la fixieme. Les fouftractions étant faites, on divife la

Tomme reftante par quatre, pour avoir la valeur de chaque face.

Par ces approximations, les Marchands pourront faire un inventaire fuffifamment exact des bois quarrés qu'ils pourront tirer des arbres de leurs ventes, afin de se rendre compte à

eux-mêmes.

§. 2. Diftinction des bois droits & des bois courbes.

LES bois droits font les plus précieux pour le fciage & pour les charpentes des bâtiments civils; car je comprends dans ce que j'appelle bois droits, des pieces qui n'ont qu'un peu de courbure, & que les Charpentiers favent employer pour faire des jambes de force, & plufieurs autres pieces qui n'exigent abfolument pas que les bois foient parfaitement droits. Mais les bois fort courbes font très-recherchés pour différents ouvrages, comme pour les roues des moulins, les ceintres des voûtes, pour la construction des bateaux, & fur-tout pour celle des Vaiffeaux; car on peut dire que la Marine emploie toute forte de bois droits ou courbes, pourvu qu'ils foient de bonne qualité & d'un échantillon convenable; les courbes mêmes font fouvent plus précieufes que les pieces droites. Il eft donc à propos d'expliquer comment on doit équarrir toutes fortes de pieces de bois droits ou courbes, & détailler comment les Chabins, (c'eft ainfi qu'onnomme les Ouvriers la plupart Auvergnats, chargés d'équarrir les bois), doivent s'y prendre pour tirer tout le parti poffible des bois qu'ils doivent travailler. Je vais d'abord parler des bois qui font droits & alignés fur toutes leurs faces.

CHAPITRE PREMIER.

Méthode pour équarrir les Bois droits. ON peut dire en général que les pieces de bois droites ne

la

peuvent jamais être trop longues, à moins que la groffeur de Îa tête ne differe trop de celle du pied. Ainfi, avant de rogner ces pieces, il faut les bien examiner & tâcher de leur faire porter le plus de longueur qu'il eft poffible suivant une ligne droite, & fans trop trancher le fil du bois ; fi la piece eft un tant foit peu courbe dans un fens, il vaut prefque toujours mieux fuivre cette courbure que de l'affamer vers la partie convexe.

Pour ménager toute la longueur que l'arbre peut porter, il faut, avant de le couper de longueur, le faire rouler fur le terrein, en examiner avec foin tous tes côtés, & voir celui qui s'aligne le plus droit, afin de juger par le coup d'œil, jufqu'où cette ligne peut s'étendre; quand on a décidé cette longueur, on fait couper l'arbre à la fcie par l'extrémité d'en haut qui eft le plus menu de la piece.

On fait enfuite tourner l'arbre fur chacune de fes faces avec le fecours des leviers, jufqu'à ce qu'on ait trouvé le côté qui s'alignera le mieux dans toute fa longueur; puis on le cale folidement, & on l'appuie fermement pour qu'il ne puisse changer de fituation.

On prend enfuite le diametre du petit bout avec une regle divifée en pouces ; la moitié de la moyenne proportionnelle du tiers & du quart, indiquera de combien de pouces il faut, charger la ligne fur le corps d'arbre que l'on a deffein d'équarrir, d'abord fur deux faces oppofées: donnons un exemple. Je fuppofe un arbre d'environ 30 pieds de longueur, & qui ait au petit bout A B (Pl. XXXIV. fig. 1), où il a été rogné, 24 pouces de diametre, franc d'écorce; il faut prendre le tiers de ce diametre, qui eft 8 pouces ; puis prendre le quart qui eft

6 pouces ; lefquels, ajoutés aux huit précédents, feront 14 pouces, dont la moitié eft 7; c'eft la quantité de bois qu'il faut retrancher de cet arbre, moitié du côté A, & moitié du côté B, pour fon premier équarriffage, ou pour le parage des deux premieres faces: on divifera donc 7 pouces en deux, & ce sera 3 pouces & demi de bois qu'il faudra retrancher, ce qui indique de quelle quantité il faut charger la ligne eh & fg, fur chaque côté de l'arbre; après quoi il ne reftera plus à cette piece, quand elle fera travaillée fur ces deux faces oppofées, que 17 pouces vers la tête, au lieu de 24 qu'elle avoit en grume. A l'égard du pied, on doit avoir attention de lui laisser 2 à 3 pouces de plus qu'au petit bout: ce furcroît de dimenfion fert à redreffer les pieces quand elles fe font déjettées; d'ailleurs, il arrive fouvent que dans un bâtiment, une piece de charpente eft plus chargée à un de fes bouts qu'à l'autre, ou qu'elle doit être foutenue du côté du petit bout par une cloifon; dans ces cas, on place le gros bout vers le côté qui doit fupporter une plus grande charge.

Les deux coups de lignes eh & fg, étant jettés fur toute la longueur de la piece, & tracés bien à plomb fur les bouts doivent être exactement fuivies par l'Ouvrier dans toute leur longueur.

Pour bien dreffer ces deux premieres faces, l'Ouvrier commence par faire de diftance en distance des entailles dd (Planch. XXXIII. fig. 2), qu'il approfondit jufqu'aux lignes cc, & enfuite il enleve le bois f f qui fe trouve compris entre ces entailles, ayant attention de ne point entrer plus profondément dans la piece que les lignes c, c, & de conduire ces faces bien à plomb; c'eft pour cette raison qu'il faut que les pieces foient folidement calées; au refte, c'eft le coup d'oeil qui doit guider l'Ouvrier pour former ces faces bien à plomb.

Le premier parage étant fait fur les deux faces oppofées, on renverse la piece fur le côté qui eft le moins à vive - arrête comme on le voit représenté (Pl. XXXIII. fig. 2). L'Ouvrier examine avec attention le contour que fa piece doit avoir; il la cale de façon que les faces travaillées foient bien de niveau,

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