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foldats des Cohortes auxiliaires levées & foudoyées par l'Empereur.

On voit même dans Tacite que les Cités des Gaules ont fait quelquefois la guerre l'une contre l'autre dans le temps qu'elles étoient foumises à l'Empire Romain; elles ne pouvoient faire ces guerres qu'avec leurs propres Milices. Lorfque Galba eut été proclamé Empereur, la Cité de Vienne se déclara pour lui, & celle de Lyon fe déclara pour Néron, qui avoit rebâti la Capitale de ce district après qu'elle eut été brûlée. Nos deux Cités fe firent enfuite une guerre fanglante, dont les évenemens furent plus d'une fois funeftes (a) à l'une & à l'autre. Tacite dit même qu'elles la continuerent avec un acharnement qu'on n'a point ordinairement quand on ne la fait que pour les interêts de fon Prince. Cela suppose donc que l'un & l'autre parti pouvoient mettre en campagne des troupes parmi lesquelles il y eût quelque discipline, & qui fuffent un peu aguerries.

Durant la guerre de Civilis contre les Romains, Julius Sabinus, le même qui eft fi celebre par ses avantures, & par le courage de fa femme Eponine, ayant fait foulever la Cité de Langres, il fut à la tête du peuple de cette Contrée attaquer la Cité des Sequanois (b) qui vouloit demeurer fidele à l'Empereur. Il se donna en

(a) Verum inter Viennenfes Lugdu- | fe falutari jubet, magnamque & inconnenfefque difcordiam proximum bellum ditam popularium turbam in Sequanos accenderat. Multæ invicem clades, in- rapit conterminain Civitatem & nobis feftiufque quàm ut tantùm propter Ne- fidam. Nec Sequani detrectavêre certaronem Galbamque pugnarent. men. Fortuna melioribus adfuit. Fufi Tacit. Hift. lib. 2. Lingones.

(b) Interea Julius Sabinus projectis fœderis Romani monumentis Cæfarem

Tome I.

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Tacit. Hift. lib. 4.

E

tre les deux partis une bataille, où ceux de Langres fu rent défaits.

Nous raportons ci-deffous un paffage de Joseph, qui fait foi que fous le regne de Néron les Romains ne tenoient que douze cens hommes de troupes réglées dans l'intérieur des Gaules. Toutes les forces que l'Empire avoit dans cette grande Province, étoient pof tées le long du Rhin: douze cens foldats auroient-ils fuffi pour garder cette vafte étenduë de côtes qui est depuis l'embouchure du Rhin jusqu'aux Pirénées, contre ceux des Barbares de la Germanie qui faifoient le metier de Pirates, fi chaque Cité n'avoit point eu une Milice qu'on pût mettre fur pied, & faire marcher en peu de tems aux lieux menacés d'une defcente?

Je crois qu'il feroit inutile d'aller chercher dans les Hiftoriens poftérieurs à Tacite d'autres preuves de ce que j'ai avancé, d'autant plus qu'il s'agit d'une chofe vraisemblable par elle-même. La raifon d'Etat vouloit que les Romains obligeaffent les Cités des Gaules d'avoir chacune chez elle une Milice qui pût dans les occafions acourir au fecours des troupes réglées qui gardoient. le Rhin & les côtes de l'Ocean. Si l'on veut imputer aux Romains une politique plus fubtile, ils devoient obliger les Cités des Gaules d'avoir chacune fa Milice particuliere, afin que les contestations inévi tables entre des voisins y donnassent lieu à des hoftilités que le Prince feroit toûjours le maître de faire ceffer, mais qui ne laifferoient pas d'entretenir entre ces Cités une aversion capable de les empêcher d'être jamais toutes affez unies pour fe révolter de concert. Quoiqu'il en fût, il est certain que les Cités des Gaules n'étoient guéres en meilleure intelligence fous les Empereurs

Romains qu'elles l'étoient quand leurs dissensions donnerent à Jules-Cefar le moyen de les affujettir l'une après l'autre. Nous les verrons même quelquefois en guerre l'une contre l'autre, fous les Rois Mérovingiens.

Chaque Cité des Gaules avoit un Comte ou Gou verneur particulier qui tenoit fon emploi de l'Empereur, & qui avoit foin d'obliger le Sénat, & les Decurions à faire leur devoir. Cet Officier étoit fubordon. né au Président ou Proconful de celle des dix-fept Provinces où fon diftrict étoit enclavé. C'eft de quoi nous parlerons plus au long, en expofant quels étoient les Officiers que le Prince envoyoit pour gouverner les Gaules. Mais avant que de traiter cette matiere-là, il eft bon de finir tout ce qui regarde les droits dont joüiffoient les Cités.

CHAPITRE IV.

Des Affemblées generales que tenoient les Cités des Gaules. Del'étendue de l'autorité Impériale.

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N voit par l'Hiftoire, que les Cités des Gaules, tandis qu'elles étoient fous la domination des Empereurs, s'affembloient quelquefois par Députés, & qu'elles tenoient des efpeces d'Etats generaux pour y prendre des réfolutions touchant les inte rêts communs. Il ne faut pas confondre cette forte d'Affemblée purement politique avec l'Assemblée Religieufe qui fe tenoit régulierement au temps marqué, aux pieds de l'Autel érigé à Augufte, auprès de

la ville de Lyon, quoiqu'il arrivât quelquefois que par occafion l'on y parlât des affaires publiques. En effet nous voyons dans Dion, que fous le regne d'Augufte lui-même, (a) Drufus Nero profita d'une de ces Affemblées Religieufes, pour ramener les efprits des principaux des Gaulois alors fort aliénés, ce qui prévint une révolte. Outre cette Affemblée annuelle, il s'en te. noit donc une autre purement politique, & qui étoit apparemment la même qu'Augufte convoqua, & qu'il tint à Narbonne lorfqu'il y fit le recenfement des trois Gaules, c'est à dire, de l'Aquitaine, du Pays (b) des Celtes & de celui des Belges. Ce fut alors fuivant l'apparence qu'il réunit ces trois Contrées, dont une portion faifoit l'ancienne Province Romaine dans la Gaule Tranfalpine, en un feul Corps politique, qui n'avoit plus qu'une Affemblée repréfentative, laquelle agiffoit dans l'ocafion au nom de toutes les Gaules, comme fi ces trois Pays n'euffent plus fait qu'une feule & même Province de l'Empire. Suivant Dion (c) Augufte tint l'année de la fondation de Rome cinq cens vingtfept, l'Affemblée dontparlent les fommaires des livres de l'Hiftoire de Tite-Live que nous avons perdus. Ce Prince, dit l'Historien Grec, s'arrêta quelque tems dans les Gaules pour en faire le recenfement, pour y établir une forme de Gouvernement certaine, & pour

(a) Gallorum primoribus fub prætextu ejus fefti quod hodie etiam Lugduni ad aram Divi Augufti celebratur evocatis, motum fubditorum præoccu- | pavit. Dio, lib. 54. pag. 543.

(c) Componendis Gallicis rebus quæ quia fubactis illis ftatim bella civilia fubfecuta fuerant, etiamnum flutuabant, Gallorumque agendo cenfui, vitaque & Republica formanda aliquid tempo

(b) Cum Auguftus Conventum Nar-ris extraxit. bonæ ageret, cenfus à tribus Galliis quas ·Dio, Hift. lib. 53. pag. 5.12.

pater vicerat actus.

Tui Livii Epitome lib. 1.340

y régler differens ufages; ce qui n'avoit point encore été fait, parce que les guerres civiles avoient commencé immediatement après que les Gaules eurent été foumiles; & ces guerres ne faifoient que de finir.

En effet, on voit dans l'Hiftoire de Tacite que fous le regne de Vespasien il se tint une Assemblée des Députés de toutes les Gaules, qui paroît avoir été une Affemblée représentative réglée. Cet Auteur dit que la fidelité des peuples qui avoit été ébranlée dans ce Pays par le bruit des fuccès de Civilis, y ayant été comme rafermie par les avantages que les Romains avoient remportés dans la fuite, & par la nouvelle qu'il leur arrivoit d'Italie de puiffans fecours; la Cité de Reims enjoignit par un Edit aux autres Cités des Gaules d'envoyer à Reims des Députés pour y tenir une Affemblée où il feroit déliberé fur la queftion; s'il étoit à propos dans les conjonctures préfentes de prendre les armes pour s'affranchir du joug des Romains, ou s'il convenoit de refter fous leur obéissance. (a) Auffitôt les Cités des Gaules envoyerent des Députés à Reims. Les Députés * de Langres qui avoient déja pris les armes contre les Romains, s'y rendirent comme les autres, & Tullius Valentinus leur Chef y prononça pour exciter l'Affemblée à la révolte, un difcours très-emporté, & dans lequel il reprochoit à l'Empire Romain tout ce qu'on a toûjours reproché aux grandes Monarchies. Néanmoins l'Assemblée réfolut après avoir entendu ceux qui

(a) Refipifcere, paulatim Galliarum | liarum Civitates in Remos convenere... Civitates, fafque & fædera refpicere tædio futurorum præfentia placuêre, Principibus Remis qui per Gallias edi- fcribuntur ad Treveros Epiftolæ nomixêre ut miffis Legatis in commune con- ne Galliarum, ut abftinerent armis, imfultarent, libertas an pax placeret.... petrabili venia & paratis deprecatoribus Igitur venientis exercitus fama & fuop-fi pœniterent. te ingenio ad mitiora inclinantes Gal- Tacit. Hift. lib. 4.

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