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ne l'eft pas. On appelloit ces vers anciennement vers en Taratantara, vraisembla blement, parce que ce mot répeté marquoit la cadence, & faifoit la mesure du vers. Bonaventure des Périers en a faits, & l'on trouve pag. 192. de fes Poëfies imprimées à Lyon in 8o chez de Tournes 1544, une piece intitulée Careme-prenant en Taratantara qui commence ainfi. Carême-prenant, c'eft pour vrai le Diable, Le Diable d'enfer plus infatiable, &c.

M. Régnier à qui dès l'an 1700 j'en donnai avis, me fit réponse qu'il avoit cru de bonne foi être l'inventeur de cette forte de vers, n'aiant point fû qu'on en eût fait de femblables, & n'aiant même jamais oui parler de Bonaventure des Périers. C'eft apparemment fur ce principe qu'il ne s'eft pas cru obligé de donner d'éclairciflement là deffus, lorsque nonobftant l'avis, il a continué à publier, comme une nouvelle invention, fa Lettre à Timandre, dans l'édition complette de fesPoëfies en 1708.

M. de Bl. paffant fur le pont de Quevilly avec un de fes amis, dit : Pourquoi n'a-t-on point misici de gardefous? Son ami lui dit en riant: C'eft qu'on ne favoit pas que vous y duffiez pafler.

Le Pere de M. Molé, furnommé le Barbon, fut premierement Bénéficier & Confeiller Clerc. Pour avoir affifté au jugement d'un criminel, on jetta un' dévolu fur fes bénéfices, qu'il perdit par un jugement; enfuite dequoi il renonça à l'état Eccléfiaftique, & fe maria. C'est de ce mariage qu'eft venu M. Molé le Garde des Seaux.

་ Un laquais tout en fueur, dit à M. le Prince de Guimené: Monfieur, je fuis venu en diligence... M. de Guimené l'interrompit en lui difant: Mon enfant je le fens bien.

Ce mot revient à celui-ci du Chevalier de Tavanes. Il jouoit au Piquet avec une espece de Madame de Bouvillon, & ne pouvoit gagner à moins que de faire capot. La Dame réduite à deux cartes ne favoit laquelle garder. Plus elle héfitoit présentant tantôt l'une, tantôt l'autre, & tenant longtems le bras levé fans pouvoir fe réfoudre, plus cette action portoit l'odeur de l'aiffelle au nez du Chevalier. Enfin comme elle eut lâché la carte qui n'étoit pas celle que le Chevalier fouhaitoit: Ah! Madame,s'écria-t-il, je fentois il y a longtems ce Soup là.

Cette Dame avoit un galant qu'elle

paioit bien. Une fois qu'elle étoit dans une affemblée où elle ne l'attendoit pas, lui aiant donné rendez-vous ailleurs: Eh, lui dit-elle, qui vous a dit que j'étois ici? Madame, lui répondit-il, ne favez vous pas que j'ai bon nez?

Le fragment de Pétrone où eft contenu le foupé de Trimalcion, étoit à Traw en Dalmatie dans la Bibliotheque du Docteur Marino Statilio, d'où aiant été tiré l'an 1663, il parut l'année fuivante imprimé à Padouë & à Paris. Le Pere Mabillon pag. 202. de fon Iter Italicum dit qu'au mois de Mai 1686 le manufcrit de ce fragment étoit à Modéne entre les mains de Lorenzo Statilio fils de Marino. Il eft depuis quelques années à la Bibliotheque Roiale où je l'ai vu tel que Spon le décrit pag. 96 & 97. du tome. 1. de fes voiages. Cette piéce, n'en déplaife aux Wagenfeils & aux Valois, n'eft affurément point fuppofée. Les expreffions barba res qui s'y trouvent y ont été mises exprès pour nous faire connoître la différence qu'il y a entre le langage des pertonnes de qualité, & celui des gens de néant. Un valet dans Plaute & dans Térence s'exprime auffi poliment que fon maître. Petrone, fin & judicieux Ecrie

vain, introduifant des gens de la lie du peuple, les a fait parler naturellement comme ils parloient. Cet échantillon par cette raifon entre autres, eft de conféquence: rien de tel ne fe trouvant dans pas un des Anciens qui ont précedé, ou fuivi Pétrone. Je dis dans pas un des Anciens, parce que nous avons affez de modernes, qui aiant à faire parler des Théologiens ou Philofophes Scholaftiques, & des paiïfans, ont obfervé cette bienséance. Témoins les Auteurs des Epiftola obfcurorum virorum, Thomas Morus dans fon Utopie, l'Anti-Machiavel Latin, Frifchlin dans fon Prifcianus vapulans, & tant d'autres. Nos Comiques François ne fe font pas moins fignalez en ce genre. Cyrano fur tout en fon Pédant joué, dans les rolles de Mathieu Gareau, copiez depuis par Moliére, & par une infinité d'autres. Au refte quand j'ai dit qu'un valet dans Plaute & dans Térence s'exprimoit auffi poliment que fon maître, je n'ai pas prétendu blâ mer ces Auteurs d'en avoir ainfi ufé. La plaifanterie qui confifte dans l'incongruité du langage, n'a de l'agrément que dans les personnages extrémement marquez, & ne doit pas même être mise à tous les jours.

M. Toinard

M. Toinard dit que la raifon' pour laquelle on rend fi peu les livres prétez, c'eft qu'il eft plus aifé de les retenir, que ce qui eft dedans.

La premiere chofe qu'on doit fai re, quand on a emprunté un livre, c'est de le lire, afin de pouvoir le rendre plûtôt. Politien garda quatre ans entiers un Lucrece que Pomponius Lætus lui avoit prêté. Un ami me garda trois ans un Paufanias que je fus obligé de lui redemander par l'Epigramme fuivante. Ter biffena fuum jam Luna redintegrat orbem, Ex quo Paufanias, nunc repetendus, abest. Tarda redire quidem mea, Paule, volumina · poffunt.

At quarto faltem menfe redire decet. Felicem te,meque fimul, fi mittere libros Hac reliquos poffem conditione tibi.

Feu M. le Confeiller Lantin, qu'on devoit nommer Lentin, faifoit bien pis. Je ne pouvois retirer mes livres de fes mains, quoique je lui écrivifle, pour cela, Epigramme fur Epigramme. Ce qui me donna lieu de dire:

Si potuere olim Coelo deducere Lunam Carmina,multum equidem tunc potuiffe liquet Tome I.

M

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