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dans leurs intérêts, ils semblent leur en faire le sacrifice, mais ce n'est qu'un dépôt qu'ils espèrent retirer plus aisément des mains des rois que des mains du peuple ou du clergé. Le pape Eugène III adresse à Louis le Thomas Jeune un diplôme, par lequel il lui accordoit la disWalsingam in Hypodig. position des prélatures de son royaume; Louis VII

Neustria.

vita S.Ludo

vici.

p. 1. tit. 13.

Lettres

P. 31.

siéclc.

ces lettres

que

Broymarus, jette le diplôme au feu : « j'aime mieux, dit-il, brûler d'être brûlé à cause d'elles (1). » Saint Vanesper, Louis ne fit point de jeu de mot, mais il traita de même cap. 6. n. 8. un pareil diplôme. Le même Saint Louis fit en 1228, et d'Antoine renouvela en 1268 la Pragmatique-Sanction, par laArnaud, t. 5. quelle il réprime les exactions déja insupportables de Treizième la cour de Rome (2), et confirme plus que jamais le droit d'élection. Les papes prirent d'autres routes pour parvenir à leur but. L'impétueux Boniface VIII, qui ne sut jamais douter d'aucun des droits du Saint-Siège, ne daigna pas même employer les voies détournées; il n'existoit à ses yeux qu'un seul pouvoir, celui de J. C., pouvoir déposé à jamais entre les mains de son seul représentant sur la terre, le pape; Boniface disposa des évêchés de France, comme il disposoit des sceptres et des

(1) Malo illas híc comburere, quàm si propter illas in Inferno comburerer.

(2) Art. 5. Exactiones et onera gravissima pecuniarum per curiam Romanam ecclesiæ regni nostri imposita, quibus regnum nostrum miserabiliter depaupertatum extitit.....levari aut colligi nullatenus volumus.

Rome nous suce et nous transgloust,
Rome traict et destruit tout,

Dont soudent tous li mauvais vices.

Dit un poète de ce temps-là (Hugues de Bercy.)

couronnes. Bientôt on ne parla plus que de l'autorité indéfinie de Rome, et de ses droits sur tous les bénéfices. La foiblesse des rois, la superstition des peuples, la puissance des papes, leur séjour dans Avignon, surtout ce lui qu'y firent les antipapes pendant le schisme d'occident, renversèrent entièrement la dicipline des élections, les églises se remplirent de pasteurs mercenaires, le clergé de France fut dans une dépendance absolue de pontifes auxquels la France donnoit un asyle; chaque jour vit naître de nouveaux abus, taxes ordinaires et extraordinaires, droits de provisions, annates, décimes, dévolutions, préventions, vacances in curid, droits de dépouille, expectatives aux mandats apostoliques, réserves (1), en un mot, de toute espèce, et qui se

(1) L'annate, revenu d'une année que les papes retiennent sur les bénéfices qu'ils confèrent.

Dévolution, droit établi en 1179 par le pape Alexandre III, dans le troisième concile de Latran : c'est une loi portée contre les collateurs négligens; loi qui fait passer à un autre leur droit de conférer. L'objet de cette loi est d'empêcher la trop longue vacance des bénéfices, et jusque-là il n'y a rien que de juste. Mais les papes abusèrent de ce droit en l'attirant tout entier à eux seuls et en l'exerçant toujours sous le moindre prétexte. Il en étoit de même de la Prévention, c'est-à-dire, du droit de prévenir les collateurs ordinaires et les patrons ecclésiastiques. L'exercice de ce droit étoit poussé jusqu'aux derniers excès de l'abus.

Mandat apostolique ou grace expectative, collation anticipée par laquelle le pape assuroit à un ecclésiastique un bénéfice non vacant, de là les vœux pour la mort du titulaire, et quelquefois les efforts pour la hâter. Ces grâces d'ailleurs furent quelquefois vendues.

Vacance IN CURIA, droit de nommer aux bénéfices des ecclésiastiques qui mouroient à Rome, et il faut remarquer que la multitude de droits exercés d'ailleurs par les papes, sur les bénéfices de toute la chrétienté, attiroit à Rome une foule d'ecclésiastiques de tout

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Quatorzie

me et quin

zième siècle.

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vendoient (1). Les princes favorisèrent ce brigandage pour avoir part aux décimes (2), les cardinaux l'augmentèrent dans l'espérance d'envahir les meilleurs bénéfices, les prélats le souffrirent, parce qu'ils lui devoient leur intrusion, et qu'ils espéroient monter à de plus grands sièges; le clergé inférieur ne pouvait que gémir, l'université de Paris osa élever sa voix (3), elle brava l'excom

pays. Bientôt ce qu'on appeloit curia, c'est-à-dire, la cour du pape, fut étendu à deux journées de Rome (ou d'Avignon) et le droit de la vacance in curia fut appliqué à toute espèce de vacance.

Ces divers abus peuvent être compris sous le nom général de réserves, les unes spéciales, par lesquelles le pape se réservoit la disposition d'un bénéfice particulier, lorsqu'il seroit vacant; les autres générales, comme quand le pape Jean XXII se réserva tout à la fois toutes les cathédrales. Parmi ces réserves générales, quelque-unes sont exprimées dans le droit. C'est à Boniface VIII et Clément V, qu'on attribue les premières réserves générales.

(1) Il n'y avoit laboureur qui ne baillát argent pour avoir une gráce expectative, dit Jean Juvenal des Ursins, histoire de Charles VI,

année 1414.

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(2) Une ordonnance de Charles VI, du 25 décembre 1417, qui renouveloit les dispositions de la pragmatique de S. Louis eût suffi pour réprimer ces désordres, si sous l'arnachie tumultueuse de ces temps-là un réglement sage eût pu être exécuté.

Si clade et peste sub illâ

Sævitiam damnare et honestum afferre liceret

Consilium.

Cette ordonnance étoit due aux soins du parlement, qui fit des efforts généreux pour la maintenir; mais le cruel duc de Bourgogne surprit Paris, et les massacres publics prirent la place des lois. « Ce néanmoins, dit Pasquier, 1. 5, c. 26, tous ces misérables objets ne purent jamais fléchir cetle compagnie, que toujours elle ne portát sur ses épaules ( ainsi qu'un Atlas, la voute du Ciel) les privilèges de notre église Gallicane.

(3) Un des articles des libertés de l'église Gallicane, cite en faveur

munication, elle fatigua l'autorité, ses cris se firent entendre à toute la chrétienté; enfin, sur ses instances et sur celles de l'empereur Sigismond, le pape Jean XXIII convoqua le concile de Constance (1) qui le déposa.

Les prélats François y firent, le 2 mai 1418, avec Martin V, une espèce de concordat par lequel ce pape, abandonnant une partie de ses prétentions sur les béné fices de France, en conservoit encore une si grande, que le Roi ne put approuver, ni le parlement enregistrer ce traité.

Charles VII, forcé par les succès des Anglois d'acheter des amis au prix des plus grands sacrifices, donna le 10 février 1424, à Chinon, un édit favorable aux réserves, mais il n'étoit pas assez puissant alors pour être obéi, même contre ses intérêts; l'édit ne fut point enregistré.

Au reste, le concile de Constance éteignit heureusement le long schisme causé par l'ambition des prétendans à la papauté (2); mais des divisions non moins funestes naquirent des précautions même qu'on avoit prises pour les prévenir. La convocation fréquente des conciles, ordonnée par celui de Constance, mettoit un

de l'université le roman de la rose qu'il appelle le roman François, et où l'on trouve les vers suivans:

Si n'étoit la bonne garde
De l'université qui garde

La clef de la chrétienté,

Tout eût été bien tourmenté.

Cet éloge est bien antérieur au temps dont nous parlons, mais ce corps l'a mérité dans plus d'un temps.

(1) Ouvert le 16 novembre 1414, terminé le 22 avril 1418. (2) Il avoit duré quarante ans.

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frein trop dur aux entreprises des papes, et resserroit leur autorité dans des bornes qu'ils ne pouvoient souffrir; Martin V éluda le concile de Pavie, après l'avoir transféré à Sienne. Son successeur Eugène IV fut moins heureux à Bâle; il y trouva tous les esprits armés contre lui de ce zèle vigoureux qu'inspirent l'amour de l'ordre et l'attachement aux saines maximes. L'Eglise pleuroit trop amèrement ses lois violées; elle avoit été trop déchirée par les intrigues des papes, elle voyoit le luxe et la simonie infecter trop scandaleusement la cour de Rome; on voulut enfin arrêter tant d'abus. On établit d'abord la supériorité de l'église universelle sur les papes, et cette proposition fut le signal de la rupture entre Eugène et le concile. Le pontife négocia, menaça, essaya de séduire, de transférer, de dissoudre le concile; les pères furent inébranlables. Leur fermeté irrita Eugène, il éclata, il rompit les liens de l'unité, il convoqua un concile nouveau à Ferrare; on n'eut point d'égard à cette convocation illusoire, les prélats assemblés à Bâle, usant contre Eugène même de cette autorité supérieure qu'il leur disputoit, le citèrent au concile; et, sur son refus accompagné d'excommunications frivoles, ils le déposèrent et mirent à sa place Amédée VIII, duc de Savoye, qui prit le nom de Félix V. Un an avant cet acte hai di, Charles VII, ayant vainement essayé de réconcilier le pape avec le concile, et d'arrêter les progrès de ce nouveau schisme, avoit voulu du moins l'écarter de ses états; le clergé de France, assemblé à Bourges, avoit été chargé de remédier aux maux de l'Eglise. Cette assemblée solemnelle, où assistèrent avec le dauphin Louis (1), les princes du sang, (1) Alors âgé de 16 ans.

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