Imágenes de páginas
PDF
EPUB

Le bruit fe répand que le roi d'Angleterre va épouser une des filles du comte de Haynaut : la comteffe de Salisbury ne fçauroit cacher le trouble où la jette cette nouvelle ; c'eft alors que fa mélancolie augmente ; fon cœur a besoin de s'épancher ; elle voudroit que ce fut dans celui de Maly: au moment où fon fecret eft prêt à lui échapper, la voix lui manque,& elle ne peut que verfer des larmes. Vous rejettez toujours, lui dit Maly, l'excès de votre chagrin fur la captivité de votre époux. Eh! ma chère comteffe, son fort eft-il auffi malheureux que vous le prétendez? fon féjour à la cour de France adoucit bien le défagrément d'être prifonnier. Il trouve peut-être dans fon efclavage des douceurs qui le dédommagent de fa liberté. Qui vous affurera que quelque aimable Française ne lui a point fait oublier la charmante comteffe de Salisbury, ou du moins ne l'a point rendu infidèle. Qu'il me trahisse s'écrie Alix, qu'il ceffe de m'aimer ... ce n'eft point... Elle

,

Du comte de Haynaut. En effet Edouard épousa dans la fuite Philippe, une des filles du comte; Ifabelle, mère du prince Anglais, avoit déjà arrêté ce mariage du vivant

» mon ame; je vous contemple, je vous parle, je → vous répéte que je vous offre avec transport l'hom» mage d'une tendreffe qui n'éclatera jamais ; je ne vi> vrai que pour vous aimer, pour vous adorer en se»cret;je me dirai à moi-même que mon cœur vous est > confacré ; & cet aveu ne fuffira-t-il pas à mon bonheur? tout le monde ignorera l'objet de mon attachement; je me contenterai de connaître, de fentir > l'amour; n'eft-ce rien que le plaifir d'aimer ? Mais qu'eft-ce que j'écris ! voilà bien un tableau fidèle du bouleversement total de ma raison ! fçais-je ce » que je veux, ce que je fouhaite ? ce papier ne fert qu'à me couvrir de honte; c'eft une glace fidèle où je me contemple avec humiliation.

[ocr errors]

Alix s'étoit arrêtée à cet endroit, & enfuite elle reprenoit le cours de cet examen d'elle-même. Maly n'eut pas besoin d'en lire davantage pour être éclairée sur la fituation de la comteffe de Salisbury; loin de fe reprocher fon indifcrétion, elle crut devoir s'applaudir; elle espéra d'amener la comteffe au point de lui réveler fon fecret, & alors elle fe flattoit que fes confeils falutaires rendroient à fon amie un repos qu'elle ne pouvoit acquérir par fes propres réfle

Le bruit fe répand que le roi d'Angleterre va époufer une des filles du comte de Haynaut : la comtesse de Salisbury ne fçauroit cacher le trouble où la jette cette nouvelle ; c'eft alors que fa mélancolie augmente ; son cœur a befoin de s'épancher ; elle voudroit que ce fut dans celui de Maly : au moment où fon fecret eft prêt à lui échapper, la voix lui manque,& elle ne peut que verfer des larmes. Vous rejettez toujours, lui dit Maly, l'excès de votre chagrin fur la captivité de votre époux. Eh! ma chère comteffe, fon fort eft-il auffi malheureux que vous le prétendez? fon féjour à la cour de France adoucit bien le défagrément d'être prifonnier. Il trouve peut-être dans fon efclavage des douceurs qui le dédommagent de fa liberté. Qui vous affurera que quelque aimable Française ne lui a point fait oublier la charmante comtesse de Salisbury, ou du moins ne l'a point rendu infidèle. Qu'il me trahiffe, s'écrie Alix, qu'il ceffe de m'aimer ... ce n'eft point... Elle

Du comte de Haynaut. En effet Edouard époufa dans la fuite Philippe, une des filles du comte; Ifabelle, mère du prince Anglais, avoit déjà arrêté ce mariage du vivant

mon ame; je vous contemple, je vous parle, je » vous répéte que je vous offre avec transport l'hom»mage d'une tendreffe qui n'éclatera jamais ; je ne vi> vrai que pour vous aimer, pour vous adorer en se»cret;je me dirai à moi-même que mon cœur vous eft > confacré ; & cet aveu ne suffira-t-il pas à mon bonheur? tout le monde ignorera l'objet de mon attachement; je me contenterai de connaître, de fentir > l'amour; n'eft-ce rien que le plaifir d'aimer ? Mais qu'eft-ce que j'écris ! voilà bien un tableau fidèle du bouleversement total de ma raison ! fçais-je ce » que je veux, ce que je fouhaite ? ce papier ne fert qu'à me couvrir de honte; c'est une glace fidèle où je me contemple avec humiliation.

[ocr errors]

D

Alix s'étoit arrêtée à cet endroit, & enfuite elle reprenoit le cours de cet examen d'elle-même. Maly n'eut pas besoin d'en lire davantage pour être éclairée sur la fituation de la comteffe de Salisbury ; loin de fe reprocher fon indifcrétion, elle crut devoir s'applaudir ; elle espéra d'amener la comteffe au point de lui réveler fon fecret, & alors elle fe flattoit que fes confeils falutaires rendroient à fon amie un repos qu'elle ne pouvoit acquérir par fes propres réfle

Le bruit fe répand que le roi d'Angleterre va époufer une des filles du comte de Haynaut : la comteffe de Salisbury ne fçauroit cacher le trouble où la jette cette nouvelle ; c'eft alors que fa mélancolie augmente; fon cœur a befoin de s'épancher; elle voudroit que ce fut dans celui de Maly: au moment où fon fecret eft prêt à lui échapper, la voix lui manque,& elle ne peut que verfer des larmes. Vous rejettez toujours, lui dit Maly, l'excès de votre chagrin fur la captivité de votre époux. Eh! ma chère comteffe, fon fort eft-il auffi malheureux que vous le prétendez? fon féjour à la cour de France adoucit bien le défagrément d'être prifonnier. Il trouve peut-être dans fon esclavage des douceurs qui le dédommagent de fa liberté. Qui vous affurera que quelque aimable Française ne lui a point fait oublier la charmante comtesse de Salisbury, ou du moins ne l'a point rendu infidèle. Qu'il me trahiffe, s'écrie Alix, qu'il ceffe de m'aimer... ce n'eft point... Elle

Du comte de Haynaut. En effet Edouard épousa dans la fuite Philippe, une des filles du comte; Ifabelle, mère du prince Anglais, avoit déjà arrêté ce mariage du vivant

« AnteriorContinuar »