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il a donné un azyle; il fait éclater fa générofité: it indique à l'un & à l'autre un endroit dans fa maison où ils pouvoient défier les recherches,

A peine s'y font-ils réfugiés, que les chefs de l'efcadron mettent pied à terre, arrivent au château, & demandent au lord s'il n'a point vû deux hommes qui fuyoient à travers champ, & qu'on difoit être le faux duc d'Yorck, & fon confident Aftley: Courteney réplique avec fierté qu'il eft un des ferviteurs les plus zélés du roi, mais qu'il n'eft ni espion, ni délateur, Ce ton en impose aux officiers qui fe retirent,& tournent ailleurs leurs pas & leurs perquifitions.

Le duc & fon ami, qui de leur retraite avoient tout entendu, fe hâtent d'en fortir, quand ils préfument que la troupe eft éloignée ; ils veulent témoigner leur reconnaissance: duc d'Yorck, dit Courteney, car je ne doute plus que vous ne foyez le fils d'Edouard IV, vous ne me devez aucun remerciment : j'ai agi pour l'honneur. Je fuis déclaré ouvertement contre votre maison, & j'ai dévoué un attachement inviolable à celle de Lancaftre: mais je ne fçais point profiter du malheur de mon ennemi,& le trahir alors qu'il réclame mes fecours; reftez ici jufqu'au moment qu'il n'y ait plus rien à craindre.

Ils attendent pour quitter le château, que le jour foit tombé. Partez, reprend le lord, en s'adressant au duc, nous pourrons nous revoir fur un champ de bataille; c'est-là que je combattrai le concurrent de Henri, & que je tâcherai de lui donner des preuves de courage: aujourd'hui je veux ne lui montrer qu'un cœur fenfible à fa fituation ; je le prie donc de recevoir cette bourse dont il peut avoir besoin dans la circonftance, & qu'il me rendra, quand sa fortune le lui permettra.

Tel étoit l'afcendant de Varbeck, digne à la vérité du rang & du nom qu'il avoit ufurpés : il sçavoit ramener les efprits les plus indifpofés contre les artifices, & fe concilier l'eftime ainfi que l'amitié.

Le duc vouloit, à la faveur des ténèbres, retourner à l'endroit où il avoit laiffé la ducheffe; cette feule idée l'occupoit. Aftley s'égare dans l'obfcurité; fon ami le cherche envain ; à l'inftant qu'il croit l'avoir retrouvé, il eft faifi par des foldats qui l'emmenoient prifonnier ; il a l'adreffe de fe dégager de leurs mains; les portes du monaftère de Bowley étoient ouvertes: il se jette dans cet azyle, & fe hâte de s'y faire enregistrer, dans le deffein de jouir des privilèges

accordés à ce lieu facré. Il eft néceffaire de fçavoir qu'alors en Angleterre, comme dans les autres royaumes qui reconnaiffoient le pape,il y avoit des endroits de refuge, inviolables mêmes pour les fouverains. La plûpart des églises à Rome font encore valoir ce droit qui eft une fource d'abus, & qui n'en eft pas moins respecté.

La première pensée de l'infortuné duc d'Yorck eft de chercher à terminer promptement un fonge qui l'avoit abufé peu d'inftants; le réveil étoit terrible, & ne lui promettoit qu'un enchaînement de difgraces toujours plus accablantes. Qui peut donc le retenir à la

mis, on étoit fûr, en fe retiraut dans ces azyles, d'échapper aux pourfuites des loix ; ils étoient inviolables pour les rois mêmes qui n'auroient ofé les forcer, dans la crainte de s'attirer l'indignation & les anathèmes de la cour de Rome. Le pape, en qualité de fouverain, étoit extrêmement attaché aux privilèges accordés par fes prédéceffeurs à ces lieux de refuge. Cependant Henri VII dans la fuite, & du confentement d'Innocent VIII, vint à bout d'affaiblir ces prérogatives d'où émanoient une foule d'abus d'autant plus dangereux, qu'on avoit fçu intéresser un appui refpectable à leur confervation. C'est ainfi que de tout tems, ce qu'il y a de plus facré parmi les hommes a fervi leur politique & leurs intérêts particuliers. Sçachons donc féparer la caufe des effets, & pleins de vénération pour la tige, ayons le courage d'extirper les rameaux.

vic? l'amour, l'efpérance d'être utile à fa femme, de la fecourir, de la revoir encore ; c'étoit cependant cette épouse chérie qui l'entraînoit dans cet abyme, & qui avoit ruiné toutes ses espérances ; le defir de la retirer de Bodmin l'avoit pour un seul moment fait abandonner fon armée, & il n'avoit pas été plutôt hors du camp, que cette nouvelle s'étoit divulguée & répandue parmi les fiens ; le découragement & la confufion s'étoient mis auffitôt dans ces troupes compofées d'un ramas de vagabonds, d'étrangers, de foldats indifciplinés, de ces gens qui fuyent, comme le dit très-bien le pere d'Orléans, la pauvreté & la justice.

Le malheureux antagoniste de Henri, le croiroiton, devoit effuyer des épreuves encore plus terribles : le prieur de Bowley lui apprend qu'on a décou vert la retraite de la ducheffe, & qu'elle eft au pouvoir de Henri. — Quoi je n'étois pas affez ! brifé fous les jeux cruels de la fortune! ma femme, tout ce que j'aime, dans les mains d'un vainqueur qui brûlera de fe venger! Je perds tout, jusqu'à mon ami que la fatalité m'enlève, & dont j'ignore le deftin ! Ne tremblez point pour vos jours, lui dit le miniftre des autels, le roi lui même n'ose

fuis, c'eft bien peu que d'avoir à craindre pour la vie. C'est pour une épouse ... mon père, fi vous fçaviez...

Le duc d'Yorck épuifé de douleurs, accablé fous la charge de fon infortune, tombe dans une efpèce de léthargie: il en revient pour recevoir d'un religieux, qui le prie de lui garder le fecret, cette lettre qu'il couvre de baifers & de larmes ; » Voilà » donc où vous a conduit cette tendreffe dont la » mienne feule peut approcher ! Ce n'étoit pas affez » d'avoir indifpofé par notre union un peuple qui de» voit vous foutenir, de vous avoir fermé le trône :

je fuis caufe que le fruit de tant de travaux vous eft ravi, que votre armée eft vaincue, que vos espéran» ces font détruites, qu'un ennemi enfin triomphe, & » vous tient en fa puissance. Si votre gloire & votre » honneur souffroient de cette horrible catastrophe,je » vous prefferois moins de vivre: mais un malheur » comme le nôtre, illuftre plus qu'il n'humilie ; vos jours feront en fûreté ; ayez le courage de traîner »ce fardeau, & tant qu'il nous reftera un foupir, ne défefperons point. Croyez que, Croyez que, s'il ne s'agissoit que » de moi, je n'aurois pas héfité fur le parti qui me →reftoit à suivre ; quand on eft parvenu au comble » du désastre où nous fommes, il est aifé de mourir ;

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