s'écrioit qu'on ne lui parlât plus de la comretfe, quit l'oublieroit, qu'il l'avoit oubliée: Cni, Truffel, c'est une ingrate, indigne de la folle ardeur dont le alors que mais, jamais... & c'eft moi qui profère ce mot ... it n'importe, je fuis roi; je veux l'être ; je veux vaincre ma paffion. Edouard doit être un modèle pour fes égaux; ce n'eft qu'à force de furmonter les obftacles & d'affujettir la nature, que l'on peut s'élever au rang de grand homme ; j'y parviendrai. (Le lord Varuccy s'offre aux regards du monarque) Varuccy, il ne faut point contraindre votre fille ; qu'elle refte à Salisbury ; je ne retiendrai point longtems le comte, & il volera auprès de fon épouse. (Le lord s'étoit retiré) Eh bien, Truffel, Edouard eft-il digne de porter la couronne ? tu le vois je fçais m'immoler :mais que le premier de mes fujets que l'amour aura; égaré, redoute un maître inflexible; je voudrois punir de ma victoire l'univers entier. Edouard verfe des larmes: Et le roi d'Angleterre, Edouard pleure ! & pour une femme ! elle est maitresse de mon ame ! je fais trembler l'Écoffe, & je n'ofe déplaire à la comteffe de Salisbury! ah! Truffel, que l'amour change un cœur ! je ne me connais plus! je fuis... le plus faible des hommes ! Truffel s'efforce de préfenter au monarque tout ce qu'il doit à fa grandeur. Truffel, écartons le maître l'amour ne fe plaît que dans l'égalité; c'est peut-être mon rang qui empêche la comteffe de me payer d'un retour que j'ai mérité. Je porterai mes fentiments à un degré qui dumoins m'obtiendra fon eftime. Je l'ai réfolu : elle ne paraîtra point à ma cour. Je me bornerai à l'aimer, à l'idolâtrer dans le fond de mon cœur ; elle feroit bien injufte, bien barbare,fi elle ne me plaignoit pas !..Truffel, crois-tu que madame de Salisbury me haïffe? fa lettre eft d'une femme fenfible, à qui fon devoir & la vertu font chers ; fi elle n'étoit pas enchaînée par un hymen, qui m'eft odieux, peut-être euffé je pu concevoir quelque espérance; elle feroit venue à ma cour; elle n'auroit pas évité ma vûe.. je m'égare dans mille projets qui fe détruisent fucceffivement. Truffel ... je ne ferai jamais un tyran ; la comteffe de Salisbury jouira de toute fa liberté, & mon amour ne caufera qu'à moi feul des peines qui me flatteront encore, puifque la comteffe en fera l'objet. C'est ainsi qu'Edouard fçavoit concilier le monarque & l'amant. S'il eût fuivi les confeils empoisonnés du vil Truffel, ce prince n'eût été qu'un roi ordinaire: mais le grand homme avoit la force de fe confulter foi-même, & il lui étoit impoffible de l'Angleterre. Un héros peut éprouver des faibleffes: mais il eft rare qu'il y fuccombe. Maly, différente du confident d'Edouard, excitoit dans le cœur de fon amie, l'amour de l'honneur & de la vertu ; elle armoit jufqu'à l'orgueil contre un fentiment qu'elle aidoit la comtesse à repouffer. Eh! que de triomphes fur nos paffions la vanité nous fait remporter ! qu'il eft peu de ces victoires impofantes qui foient l'ouvrage du pur amour de nos devoirs ! la vertu fans mélange reffemble affez au sentiment défintereffé: on en parle beaucoup, & on en cherche encore des exemples. La comteffe de Salisbury tomba malade. Il y avoit des moments où elle regrettoit de n'avoir point fuivi à Londres mylord Varuccy; enfuite elle demandoit pardon à Maly de ces mouvements qui bleffoient fa gloire; elle fe condamnoit au jugement même de fa propre raison. Un exprès arrive de Londres, qui apporte à la comtesse une lettre de fon père. Le maintien de cet homme annonçoit une nouvelle défagréable: la fille du lord Varuccy eft incertaine fur le coup qui la menace ; elle se détermine enfin à lire ce que mylord lui écrit. » Ma fille, (lui difoit-il dans cette lettre) » voici le moment où il faut vous armer de ce cou» rage que vous avez puifé dans mon fang. La véri> table grandeur eft en nous; celle que nous tenons >> de la fortune, s'évanouit comme les autres illu» fions qui compofent le menfonge de la vie. Vous attendiez avec impatience votre époux ; il vous alloit faire partager les nouveaux bienfaits que » lui préparoit fon maître. Le Souverain suprême, qui commande à tous les rois de la terre, n'a pas » voulu que le comte de Salisbury jouît plus long→tems des bontés de notre monarque. En un mot, » ma fille, je vous le répéte : vous avez de la religion, de la fermeté ; vous devez être résignée aux → plus cruels évenements : une maladie précipitée vient de nous enlever le comte... Madame de Salisbury n'achève point la lettre: elle la donne à Maly qui étoit avec elle, en s'écriant: vois jufqu'à quel point le fort me pourfuit: la mort vient de m'enlever mon époux! Maly continue de lire : elle eft inftruite de tous les' détails relatifs à cette perte qui auroit été encore plus foudroyante pour une femme ambitieuse:mais la comtesse ne regrettoit point le degré d'élévation où l'au |