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Et, rendant l'univers de son heur étonné,
Adjouste chaque jour quelque nouvelle marque
Au nom, qu'il s'est acquis, du plus rare monarque
Que ta bonté propice ait jamais couronné!

Cependant son Dauphin, d'une vistesse pronte,
Des ans de sa jeunesse accomplira le conte,
Et, suivant de l'honneur les aimables appas,
De faits si renommez ourdira son histoire
Que ceux qui dedans l'ombre eternellement noire
Ignorent le soleil ne l'ignoreront pas.

Par sa fatale main, qui vengera nos pertes,
L'Espagne pleurera ses provinces desertes,
Ses chasteaux abbatus et ses champs déconfits;
Et, si de nos discors l'infame vitupere

A pu

la derober aux victoires du pere,

Nous la verrons captive aux triomphes du fils.

Malherbe.

XII

AUX DAMES

POUR LES DEMY-DIEUX MARINS CONDUITS PAR NEPTUNE

1606

O! qu'une sagesse profonde

Aux avantures de ce monde

Preside souverainement,

Et

que l'audace est mal apprise De ceux qui font une entreprise, Sans douter de l'évenement!

Le renom, que chacun admire,
Du Prince qui tient cet empire
Nous avoit fait ambitieux
De meriter sa bien-vueillance,
Et donner à nostre vaillance
Le témoignage de ses yeux.

Nos forces, partout recognues,
Faisoient monter jusques aux nues

Les desseins de nos vanitez;
Et voicy qu'avecque des charmes
Un enfant qui n'avoit point d'armes
Nous a ravy nos libertez.

Belles merveilles de la terre,
Doux sujets de paix et de guerre,
Pouvons-nous avecque raison
Ne benir pas les destinées
Par qui nos ames enchainées
Servent en si belle prison?

L'aise nouveau de cette vie
Nous ayant fait perdre l'envie
De nous en retourner chez nous,
Soit nostre gloire ou nostre honte,
Neptune peut bien faire conte
De nous laisser avecques vous.

Nous sçavons quelle obeïssance
Nous oblige, à nostre naissance,
De porter à sa royauté;

Mais est-il ny crime ny

blâme

Dont vous ne dispensiez une ame
Qui dépend de vostre beauté?

Qu'il s'en aille à ses Neréides,
Dedans ses cavernes humides,

Et vive miserablement,

Confiné parmy ses tempestes; Quant à nous, estant où vous estes,

Nous sommes en nostre élement.

XIII

POUR M. DE BELLEGARDE

1606

Phylis, qui me voit le teint blesme,
Les sens ravis, hors de moy-mesme,
Et les yeux trempez tout le jour,
Cherchant la cause de ma peine,
Se figure, tant elle est vaine,
Qu'elle m'a donné de l'amour.

Je suis marry que la colere
Me porte jusqu'à luy déplaire;
Mais pourquoy ne m'est-il permis
De luy dire qu'elle s'abuse,
Puis qu'à ma honte elle s'accuse
De ce qu'elle n'a point commis?

En quelle eschole nompareille
Auroit-elle appris la merveille

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