XXXIII STANCES SPIRITUELLES 1619 Loüez Dieu par toute la terre, Dont il menace les humains, Mais pour ce que sa gloire en merveilles abonde Et que tant de beautez qui reluisent au monde Sont des ouvrages de ses mains. Sa providence liberale Est une source generale Toujours preste à nous arrouser. L'Aurore et l'Occident s'abreuvent en sa course; On y puise en Afrique, on y puise sous l'Ourse; Et rien ne la peut épuiser. N'est-ce pas luy qui fait aux ondes D'un nombre infiny de poissons; Qui peuple de troupeaux les bois et les montagnes, Donne aux prez la verdure, et couvre les campagnes De vandanges et de moissons? Il est bien dur à sa justice De voir l'impudente malice Dont nous l'offensons chaque jour; Nos affections passageres, Se font vieilles en un moment; Quelque nouveau desir comme un vent les emporte; La sienne, tousjours ferme et tousjours d'une sorte, Se conserve éternellement. XXXIV POUR MONSEIGNEUR LE COMTE DE SOISSONS 1622 Ne deliberons plus, allons droit à la mort; Je n'ay que trop gemy: Si, parmy tant d'ennuis, j'aime encore ma vie, O beaux yeux, beaux objets de gloire et de grandeur, Puis-je souffrir assez Pour expier le crime et reparer la honte Quelqu'un dira pour moy que je fais mon devoir, XXX SUR LE MARIAGE DU ROY ET DE LA REYNE [LOUIS XIII ET ANNE D'AUTRICHE] 1615 Mopse, entre les devins l'Apollon de cet âge, Qu'un soleil qui naistroit sur les rives du Tage Cette prediction sembloit une avanture N'estant pas convenable aux regles de nature Anne, qui de Madry fut l'unique miracle, Au sein de notre Mars satisfait à l'oracle, Et dégage envers nous la promesse des cieux. Bien est-elle un soleil, et ses yeux adorables, Déja veus de tout l'orison, Font croire que nos maux seront maux incurables, Quoy que l'esprit y cherche, il n'y voit que des chaisnes Certes c'est à l'Espagne à produire des reines, Heureux couple d'amants, nostre grande Marie Elle a forcé les vents et domté leur furie : Goustez-les, beaux esprits, et donnez cognoissance, Qu'à des cœurs bien touchez tarder la jouissance, Les fleurs de vostre amour, dignes de leur racine, Mais il faut passer outre, et des fruits de Lucine Reservez le repos à ces vieilles années, Tout le plaisir des jours est en leurs matinées; |